Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Réunion du mardi 31 juillet 2018 à 11h35

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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Répartition par groupes du travail de cette réunion de commission

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La réunion

Source

La réunion débute à 11 heures 35.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, Présidente.

La Commission examine, en lecture définitive, la proposition de loi relative à la mise en oeuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération (Mme Emilie Chalas, rapporteure).

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Mes chers collègues, l'Assemblée nationale est invitée par le Gouvernement à se prononcer, en lecture définitive, sur la proposition de loi relative à la mise en oeuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes.

À ce stade de la discussion, conformément à l'article 45 de la Constitution, il n'est possible de modifier le texte adopté en nouvelle lecture qu'en reprenant, le cas échéant, un ou plusieurs des amendements adoptés par le Sénat.

Onze amendements ont ainsi été repris, que je vous propose d'examiner.

Article 1er (art. 64 de la loi n° 2015-991 portant nouvelle organisation territoriale de la République) : Droit d'opposition au transfert de la compétence « eau » et « assainissement »

La Commission repousse l'amendement n° 2 de M. Fabrice Brun.

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Article additionnel après l'article 1er (art. L. 1412-1 du code général des collectivités territoriales) : Possibilité de créer une régie unique multiservices à l'échelon intercommunal

La Commission accepte les amendements identiques n° 11 du Gouvernement et n° 8 de M. Raphaël Schellenberger.

Article 1er quater (art. L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales) : Assouplissement des dispositions encadrant le financement des compétences eau et assainissement par le budget général

La Commission repousse l'amendement n° 3 de M. Fabrice Brun.

Article 1er quinquies (art. L. 5211-5, L. 5211-17, L. 5211-18, L. 5721-6-1 du code général des collectivités territoriales) : Possibilité de rétrocéder des produits perçus au titre des redevances d'occupation du domaine public des biens et équipements mis à disposition des établissements publics de coopération intercommunale

La Commission repousse l'amendement n° 4 de M. Fabrice Brun.

Article 1er sexies (art. L. 5211-5, L. 5211-17, L. 5211-18 du code général des collectivités territoriales) : Transfert facultatif des soldes de budgets annexes relatifs aux compétences « eau » et assainissement » des communes aux établissements publics de coopération intercommunale lors du transfert de ces compétences

La Commission repousse l'amendement n° 5 de M. Fabrice Brun.

Article 2 (art. 64 et 66 de la loi n° 2015-991 portant nouvelle organisation territoriale de la République, L. 5214-16, L. 5215-20, L. 5216-5 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales) : Exercice de la compétence « gestion des eaux pluviales urbaines » et mesures de coordination

La Commission repousse les amendements n° 6 et n° 10 de M. Fabrice Brun.

Article 3 (art. L. 5214-21, L. 5216-7 du code général des collectivités territoriales) : Assouplissement des règles de représentation-substitution des communes au sein des syndicats exerçant les compétences « eau » et « assainissement »

La Commission repousse l'amendement n° 7 de M. Fabrice Brun.

Intitulé de la proposition de loi

La Commission repousse les amendements identiques n° 1 de M. Fabrice Brun et n° 9 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

La Commission auditionne M. Jean-Raphaël Alventosa, dont la nomination est envisagée par le Président de la République à la fonction de médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques, puis procède au vote sur cette proposition de nomination dans les conditions prévues à l'article 29-1 du Règlement.

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Nous allons procéder à l'audition de M. Jean-Raphaël Alventosa, dont la nomination est envisagée par le Président de la République à la fonction de médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques.

Cette fonction a été créée par l'article 28 de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique : le médiateur du crédit est chargé de concourir au financement légal et transparent de la vie politique ; dans cette perspective, il doit faciliter le dialogue entre, d'une part, les candidats à un mandat électif et les partis et groupements politiques et, d'autre part, les établissements de crédit et les sociétés de financement.

Conformément à l'article 13 de la Constitution, cette nomination ne pourra avoir lieu si l'addition des votes négatifs des commissions des lois de l'Assemblée nationale et du Sénat représente plus de trois cinquièmes de l'ensemble des suffrages exprimés.

C'est la première fois depuis le début de la législature que notre commission est appelée à se prononcer sur une nomination proposée par le Président de la République. Nous le ferons en suivant les règles définies par mes prédécesseurs en la matière. Ainsi que le permet l'article 29-1 du règlement de l'Assemblée nationale, nous avons nommé un rapporteur, en l'occurrence une rapporteure, appartenant à un groupe de l'opposition. Le groupe Nouvelle Gauche a désigné Mme Cécile Untermaier.

Afin que M. Alventosa puisse préciser ses intentions, la rapporteure lui a adressé un questionnaire auquel il a répondu par écrit. Ses réponses ont été adressées aux commissaires hier et, pour que le public soit informé du parcours, des intentions et des observations éventuelles du candidat, le document a également été mis en ligne sur le site internet de l'Assemblée.

Conformément à l'article 1er de la loi du 23 juillet 2010, qui précise la procédure de nomination, cette audition est ouverte à la presse.

J'ajoute que M. Alventosa a été entendu la semaine dernière par la commission des lois du Sénat. Son vote sera dépouillé, comme le nôtre, aujourd'hui même, à 14 heures 15.

Je vais commencer par donner la parole à M. Alventosa, pour un propos liminaire, puis à la rapporteure. Nous en viendrons ensuite aux questions des autres commissaires.

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Jean-Raphaël Alventosa

Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, de me recevoir malgré le calendrier très chargé qui est le vôtre et, par ailleurs, une actualité dont chacun sait à quel point elle est lourde.

Le questionnaire auquel j'ai essayé de répondre était très complet et il m'a semblé que les questions posées étaient les bonnes. Je ne vais pas commenter mes réponses, car cela prendrait un peu temps et vous avez un écrit qui est certainement mieux que ce que je pourrais vous dire oralement. Vous savez mieux que moi, qui rencontre les services depuis quelques jours, cette affaire étant tout à fait récente, pourquoi la loi a prévu un médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques. Cela fait suite aux difficultés que rencontrent les candidats et les partis afin d'avoir accès au financement bancaire. Je dirai seulement quelques mots pour ouvrir le débat, avant d'écouter vos observations et de tenter de répondre à vos questions.

La loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique avait décidé deux choses : son article 30 a prévu qu'une ordonnance permettrait de prendre les mesures nécessaires – je crois qu'il était question d'une structure dédiée – en cas de défaillance avérée du marché, à compter du 1er novembre 2018, c'est-à-dire presque demain ; l'article 28 de la loi a prévu, par ailleurs, la création d'un médiateur du crédit. La première question à traiter était de déterminer si l'ordonnance s'imposait. Mme la ministre de la Justice vous a donné, le lundi 16 juillet, des informations dont il résulte que seul l'article 28 de la loi est maintenant opératoire.

Les difficultés tiennent, selon ce que je comprends et les documents auxquels j'ai pu avoir accès depuis la semaine dernière, à une méconnaissance mutuelle des deux grandes catégories d'acteurs en question : d'une part, le manque d'information des banques, en tout cas certaines d'elles, qui ne connaissent pas bien la problématique des candidats et des partis, notamment les règles de délai qui sont liées aux échéances électorales ; d'autre part, et cela ne paraît pas étonnant, le manque d'information des candidats et des partis sur les outils mobilisables, le réseau bancaire et son fonctionnement.

Il semble que l'articulation entre les délais d'octroi des prêts et les échéances électorales puisse poser des difficultés : les banques attendraient en général l'ouverture de la campagne officielle pour rendre leurs décisions, ce qui est trop tard ; en outre, d'après ce que j'ai pu lire, les candidats semblent engager des démarches auprès des banques de manière non systématique, souvent trop tardivement et sans faire jouer la concurrence. Dans ce cas, comme je l'ai indiqué en réponse à la question écrite qui m'a été posée, un médiateur pourrait répondre aux problèmes résiduels : j'ai cru comprendre, mais vous le savez mieux que moi, qu'il n'y a pas de problème dans la grande majorité des cas. Le médiateur devra d'abord établir un diagnostic technique afin de savoir quelle est l'ampleur du problème sous ses deux aspects : l'ouverture des comptes et, ce qui n'est pas tout à fait la même chose, l'obtention des prêts.

Le médiateur pourrait conduire trois actions que j'ai indiquées par écrit.

Il pourrait, tout d'abord, mettre en relation les acteurs qui, dans certains cas, ne se connaissent pas, et il pourrait tenter de régler les problèmes résultant d'une interrelation défaillante entre les candidats et les acteurs bancaires locaux. Comme je l'ai souligné dans mes réponses écrites, un décret fixe des délais et un mode de saisine : le médiateur doit répondre, dans un délai de deux jours, si je ne me trompe pas, et essayer de trouver une solution. La médiation sera libre, bien sûr : comme pour toute médiation, la solution est totalement facultative.

La seconde action paraît également évidente : comme il y a un problème d'interrelation ou de méconnaissance mutuelle, le médiateur devra bien connaître le marché du crédit aux candidats. Il semble que des banques ne soient pas intéressées, mais que d'autres le soient, en revanche, tout simplement parce que c'est un marché – mais, là aussi, je pense que votre expérience est mille fois supérieure à la mienne.

Enfin, il faudra anticiper les difficultés. Je vois bien de quoi il peut s'agir : elles ne seront pas, me semble-t-il, de nature technique, contrairement ce que l'on voit dans le système de la médiation du crédit aux entreprises, où tout est très compliqué car il y a beaucoup de secteurs, de crédits et d'acteurs différents. En l'espèce, le sujet est relativement simple. La vraie difficulté est le pic, l'avalanche ou le tsunami, comme certains médias disent, qui pourrait se produire s'il faut traiter beaucoup de demandes en quelques jours. L'idée serait que le médiateur essaie de travailler le plus possible en amont, afin qu'il n'y ait plus que quelques personnes ayant des difficultés à ouvrir un compte ou à obtenir un prêt le jour « J », c'est-à-dire quelques jours avant les élections. Moins il y en aura, plus la médiation pourra fonctionner et moins elle aura besoin de moyens – c'est évidemment une préoccupation que l'on peut avoir sur ce sujet certes ponctuel, mais sensible.

Je ne l'ai pas indiqué dans mes réponses écrites, car la question ne m'a pas été posée, mais je vois quatre conditions du succès.

Il faudra, tout d'abord, travailler avec les banques, installer un système de confiance – la loi parle de « dialogue », ce qui me paraît évidemment nécessaire – et travailler avec les services de la Banque de France, qui est déjà un acteur très important du dispositif, puisqu'elle applique une procédure de droit au compte, laquelle fonctionne plutôt bien, mais pas toujours.

Il faudra également cerner les contraintes de la vie politique, c'est-à-dire des partis politiques et des candidats : la médiation devra bien les connaître. Là aussi, il faudra instaurer la confiance pour tenter d'anticiper les difficultés. Le médiateur devra être à l'écoute de tous les partis, sans exclusive, afin de pouvoir faire en sorte que tous aient un égal accès aux financements. C'est l'aspect le plus symbolique et le plus politique du dispositif. Le sujet est très important : il s'agit de faire en sorte que les grandes idées ne soient pas empêchées de s'exprimer parce que l'argent constituerait une barrière à l'expression la plus entière possible de la vie démocratique. Il faudra évidemment collaborer avec les services préfectoraux, qui connaissent bien les difficultés.

Une troisième condition du succès sera d'être indépendant. Le dispositif étant nouveau et les questions relativement sensibles, il pourrait y avoir d'importantes attentes, mais aussi quelques interrogations. Le médiateur devra évidemment se positionner hors de toute influence partisane, technique et professionnelle, ce que je devrais parvenir à faire si vous me donnez l'autorisation d'exercer cette fonction…

Enfin, comme on ne sait pas trop comment le dispositif va se mettre en place, puisque l'on ne connaît pas encore totalement le diagnostic technique, il faudra établir un rapport au plus tôt. La loi et le décret sont d'ailleurs bien faits : ils demandent la remise d'un rapport. Je le ferai plus vite que prévu, car j'aurai le souci de savoir, dans les mois qui viennent, comment le dispositif peut fonctionner – j'y aurai un intérêt presque personnel, et en tout cas technique. Je n'attendrai certainement pas les élections européennes pour voir si ça marche, pour regarder quelles sont les évolutions réglementaires, voire législatives, qui seraient nécessaires pour améliorer le dispositif, et pour faire en sorte de revenir vers vous.

Pour conclure sur une note que je veux considérer comme prometteuse, il n'est peut-être pas inutile de souligner que le dispositif de médiation existant dans le secteur économique fonctionne bien : tous les acteurs sont satisfaits, et ils viennent de signer des accords de place par lesquels les banques et les autres parties prenantes créent des procédures devant fonctionner le plus automatiquement possible, afin de coûter aussi peu cher que possible, tout en marchant correctement. Il faudra peut-être essayer de faire de même dans le secteur qui nous occupe aujourd'hui.

Je ne dis rien sur mon profil, car j'ai déjà livré beaucoup d'anecdotes dans mes réponses écrites, et je vous prie de m'excuser d'avoir versé dans ce penchant. J'ai un certain goût pour le service de l'État, la mission me paraît passionnante et, si vous voulez me la confier, j'espère être à la hauteur. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions et entendre vos observations.

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Je voudrais vous remercier, monsieur Alventosa, pour votre propos liminaire. La loi a prévu un médiateur du crédit et nous considérons tous qu'elle a bien fait – un passé récent nous incite à le penser. J'ai particulièrement apprécié que vous nous disiez qu'il faudra travailler avec les banques et les partis, établir une relation de confiance avec ces acteurs, connaître les contraintes de la vie politique, agir dans un esprit d'indépendance et, bien sûr, anticiper. Je crois que les banques ont un besoin d'information, bien sûr, mais c'est vrai également pour les partis et les candidats : le médiateur du crédit sera là pour pallier un manque.

Je voudrais aussi vous remercier vivement pour les réponses très précises, circonstanciées, et intéressantes que vous nous avez transmises hier et dont mes collègues ont pu prendre connaissance. À titre personnel, même si je pense que ce sentiment est partagé par beaucoup, je tiens à saluer l'ensemble de votre parcours professionnel, qui vous fait honneur, et qui témoigne d'un engagement fort et constant en faveur du service public et de l'intérêt général.

Je souhaiterais m'arrêter très brièvement sur deux points des réponses écrites que vous nous avez adressées.

S'agissant des modalités de mise en oeuvre des prérogatives de conciliation qui sont attachées aux fonctions de médiateur du crédit, vous avez évoqué une « action de veille et de suivi » en soulignant qu'elle « devrait se traduire par une connaissance précise des acteurs bancaires et des outils mobilisables par les candidats et les partis » et qu'une « documentation devrait pouvoir être élaborée à cette occasion », laquelle documentation serait « utilisable de manière quasi‐automatique ». Pouvez-vous préciser à quoi vous pensez ?

En réponse à la sixième question, vous avez mentionné la procédure d'aide à l'ouverture d'un compte qui est mise en oeuvre par la Banque de France. J'aimerais savoir comment vous envisagez l'articulation entre les prérogatives du médiateur du crédit en la matière et la procédure de droit au compte qui est actionnée par la Banque de France.

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Jean-Raphaël Alventosa

Je vais essayer de répondre, étant entendu qu'il s'agissait non pas de cogitations de ma part, mais d'interrogations que j'ai sur une mission qui n'est pas encore bien connue.

Je suis un fanatique de l'automatisme : il peut y avoir des milliers de candidats et, si tous rencontrent des problèmes, je ne vois pas comment la médiation, qui va démarrer modestement, pourrait arriver à les traiter. Mon idée est d'arriver à faire en sorte que les acteurs bancaires n'invoquent pas, comme j'ai pu le lire dans la presse spécialisée, des arguments qui ne seraient pas les bons pour refuser des ouvertures de comptes ou des prêts. En tant que financier, qui connaît un peu le secteur et le jargon, je trouve certaines choses un peu étonnantes : je tiens à m'exprimer avec prudence, mais les risques de crédit, d'image et de conformité juridique me paraissent relativement surdimensionnés. Du point de vue technique qui est le mien, j'essaierai de voir ce qu'il en est exactement du risque, c'est-à-dire s'il est réel ou s'il s'agit plus simplement d'habiller le refus d'une prestation de service qui doit être faite – la Cour de cassation a considéré, me semble-t-il, que les banques ne sont pas obligées d'ouvrir des comptes, mais elles ont aussi des règles à respecter.

Le terme de « veille » paraît un peu faible, mais elle peut être active : l'idée est d'essayer de savoir quelles sont les banques concernées, en particulier celles qui seraient moins enclines à travailler sur ce marché – cela peut d'ailleurs se comprendre : cela dépend des régions, des candidats et des partis. La situation est extrêmement variée. Avec les collaborateurs que j'aurai, les préfectures et la Banque de France, qui connaît bien le sujet, l'idée serait ensuite d'établir des fiches pour expliquer la marche à suivre, comme j'ai eu l'occasion de le faire toute ma vie dans de nombreux secteurs. Cela peut sembler extrêmement administratif, et j'en suis désolé, mais je suis un fonctionnaire de l'État chargé de faire fonctionner des dispositifs… Ceux qui font bien les choses aujourd'hui n'ont pas besoin de telles fiches, mais elles permettront de diffuser l'information et de vérifier que tout fonctionne.

Comme je me suis permis de le dire à quelques personnes, déjà, le réseau devrait être mis sous tension : tout est assez bien connu, la loi est bien faite, et en général nos services fonctionnent correctement, me semble-t-il, mais il peut y avoir des défaillances. Mon travail sera de faire en sorte qu'elles soient aussi peu nombreuses que possible et que l'on puisse régler d'une manière quasiment automatique les difficultés, en diffusant l'information et en mettant en relation les uns et les autres. Cela ne me paraît pas impossible à faire, même si tout reste à démontrer. Il s'agit surtout de problèmes de relation avec une population extrêmement variée tant du côté des candidats et des partis politiques – vous connaissez les chiffres mieux que moi –, que du côté des banques – ce marché est très ouvert et très complexe, et il est marqué par des politiques commerciales et des politiques d'image qui dépendent de très nombreux critères.

Vous m'avez posé une très bonne question sur les relations avec la Banque de France. Je n'ai pas encore vu son Gouverneur : je crois que cela dépend de l'autorisation que vous donnerez ou non en ce qui me concerne – il attend de savoir si le Parlement est d'accord avant de dire, à son tour, s'il veut bien de ma personne pour être le médiateur en question. On pourrait penser – et une loi est récemment intervenue sur ce point – que la procédure d'ouverture de compte doit permettre de régler les problèmes : il ne devrait donc pas y en avoir… J'ai commencé à regarder, rapidement, la réglementation de la Banque de France en la matière : on rencontre quelques cas, significatifs, la procédure fonctionne bien, semble-t-il, mais elle pourrait encore être améliorée en ce qui concerne les garanties. J'ai cru comprendre qu'elle est souvent longue et un peu tardive. Par ailleurs, elle ne couvre évidemment pas le problème du crédit, qui est sans doute le plus compliqué. La question de l'ouverture des comptes doit pouvoir se régler, mais je n'exclus pas qu'il y ait quelques cas compliqués et politiquement sensibles, en nombre réduit, en ce qui concerne l'obtention des prêts. La presse a fait état, ces dernières années, d'un certain nombre de préoccupations qui me dépasseront un peu – le médiateur n'est pas chargé de revoir le financement de la vie politique – mais qui pourraient constituer une sorte de noyau dur à traiter.

Il me semble qu'il serait intéressant d'agir en amont de la Banque de France : si la médiation a travaillé correctement, cela devrait tarir l'alimentation du service qui s'occupe de l'ouverture des comptes. Mais je m'avance un peu, car tout cela reste à vérifier techniquement, de manière précise. Il faut regarder la réalité des problèmes et leur nombre. Ce ne sont, de ma part, que des réflexions et, par anticipation, une recherche de solutions : elles devraient être mises au point plus clairement dès la rentrée.

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Je ne vais pas revenir sur l'abandon de la « banque de la démocratie », sauf pour évoquer brièvement cette question qui nous « chatouille » un peu et nous laisse sur notre faim.

Pour avoir pratiqué depuis quasiment dix ans la médiation du crédit aux entreprises, au niveau des établissements bancaires – j'ai même eu à traiter un des premiers dossiers de la médiation du crédit au plan national –, je suis d'accord avec vous en ce qui concerne les accords de place. Mais encore faudra-t-il que vous puissiez traiter le problème des personnes politiques exposées (PPE) : tant que les établissements bancaires se réfugieront derrière les obligations de la directive européenne pour refuser l'ouverture d'un compte, une relation bancaire classique et, surtout, un crédit, il y aura des difficultés.

S'agissant de l'ouverture des comptes, la procédure de la Banque de France fonctionne très bien pour les particuliers, les professionnels et les associations. Il n'y a pas de difficulté non plus pour les comptes de campagne : il y a des clefs de répartition, et la Banque de France fonctionne très bien dans ce domaine. Il suffit de faire un copier-coller. Le vrai problème concerne le crédit, qui est généralement de court terme, du moins à l'origine car il devient à moyen terme quand l'État met du temps à procéder aux remboursements. La question est de savoir comment faire lorsqu'il y a, dans une circonscription rurale, par exemple, deux établissements bancaires qui se partagent quasiment tout le marché, qui sont régionaux – il y a peut-être une tête de pont nationale, mais ce sont des établissements locaux de plein exercice – et qui ont décidé qu'ils ne veulent absolument pas financer des candidats car cela reviendrait à afficher une certaine couleur. Dans ces circonscriptions, comment faire lorsqu'il y a 12 candidats – c'est la moyenne – ou 15 – on l'a vu lors des dernières élections – qui ont besoin de financements de court terme ? Traiter 15 ouvertures de comptes, c'est faisable, mais il est beaucoup plus compliqué de faire 15 ouvertures de crédit – les garanties ne sont pas tout à fait les mêmes selon les personnes et certains établissements bancaires locaux refusent. Cela implique nécessairement de conclure des accords nationaux : il faudra des structures de financement qui ne soient pas locales. Comment allez-vous gérer cette problématique ?

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Jean-Raphaël Alventosa

Ce sont des sujets très intéressants et très difficiles, sur lesquels je n'ai que des interrogations à ce stade. J'ai été assez choqué de lire que certaines banques osent invoquer la réglementation relative aux PPE – mais je ne devrais peut-être pas m'exprimer d'une manière aussi directe. J'ai consulté la réglementation, en particulier la directive visant à lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, et je trouve que la situation est étonnante. Certaines autorités, que vous connaissez aussi bien que moi, devraient faire davantage de pédagogie. C'est en effet la question, au moins dans un premier temps : il faudrait ensuite voir quels acteurs persistent. J'ai regardé la liste des PPE : les candidats aux élections n'y figurent pas, et ils ne sont pas, par principe, susceptibles de fomenter des actes de terrorisme. Il s'agit, à tout le moins, d'une mauvaise interprétation – il y a peut-être d'autres éléments que je ne peux qu'imaginer. Il faudra traiter ce problème. Il me semble par ailleurs, même si je peux me tromper car tout cela est très récent pour moi, que ce n'est pas parce qu'on est une PPE que l'on ne doit pas avoir « une relation d'affaires ». Tous ces arguments me paraissent donc très fragiles.

Je n'ai pas trop d'inquiétude sur le plan national : notre pays fonctionne bien à l'échelon centralisé – c'est notre culture et notre organisation –, mais il peut y avoir un blocage et une impasse au niveau des territoires. Vous avez évoqué ce qui devrait être la solution : je n'en vois pas d'autres pour le moment. Si l'on se trouve vraiment dans une impasse au plan local, avec seulement deux ou trois banques, beaucoup de candidats coincés et des délais impossibles, on n'y arrivera pas. Il faudra commencer par réaliser le diagnostic que j'ai évoqué, afin de comprendre où, quand, comment et pourquoi. Je crois qu'il n'y a pas encore beaucoup d'éléments disponibles, car c'est un secteur nouveau. Comme vous l'avez dit, il faudra remonter d'un cran, au niveau régional et, certainement, national. Il me semble que ce n'est pas intellectuellement compliqué, mais il faudra que ça fonctionne. Je ne suis pas du tout sûr aujourd'hui – mais je ne suis pas là pour dire que la médiation ne va pas réussir à fonctionner – que cela se fera sans difficulté. À l'heure actuelle, c'est la solution que je vois. Il faudra jouer la carte des accords de place au niveau national, avec des déclinaisons au niveau local, là où ça bloque. Il faudrait arriver à réaliser une cartographie, mais je m'avance peut-être un peu trop, car cela suppose beaucoup de moyens et d'analyses statistiques.

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Tout d'abord, félicitations pour votre engagement et merci pour les réponses que vous nous avez apportées en préalable à cette audition.

Quand nous nous sommes portés candidats à la députation, nous avons été confrontés, pour la première fois, à une présentation à des élections dans des délais extrêmement courts. Même si chacun peut déposer une candidature, la question de l'accessibilité se posait pour nous dans des conditions particulières, vu que nous n'appartenions pas à un parti politique, mais à un mouvement. Quand nous formulions une demande de crédit, nous recevions donc plutôt une réponse individuelle et personnelle.

Dans ce délai très court, la réponse pouvait donc être différente selon qui sollicitait un prêt, selon quelles relations il entretenait précédemment avec son banquier, selon quel compte en banque il avait… En outre, si on n'atteint pas 5 % des suffrages, on est susceptible de devoir rembourser sur ses propres deniers.

Je m'interroge également sur le temps mis par l'État pour nous rembourser. Il a en effet fallu attendre un an pour être déliés de nos engagements financiers. Vous avez évoqué des fiches de procédure : il me semble effectivement intéressant de pouvoir disposer d'une information lisible et compréhensible par des néophytes. Cela doit faciliter l'accès à un crédit, de façon que chacun puisse s'engager.

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Jean-Raphaël Alventosa

La situation a aussi beaucoup évolué ces toutes dernières années. Nous nous trouvons désormais en face de candidatures, de partis, de groupements et de mouvements que nous ne connaissions pas auparavant. De là est née l'idée de la banque de la démocratie, de même que l'invention du médiateur.

On peut imaginer que les difficultés n'étaient pas du tout les mêmes lorsque les partis étaient plus traditionnels et plus installés. Il me semble qu'il s'agit de faire en sorte que des idées nouvelles puissent accéder aux campagnes et au débat politique sans se heurter à la barrière de l'argent – même s'il y en a beaucoup d'autres.

Sur le plan technique, les solutions qui fonctionnaient, mais qui n'étaient pas souvent mobilisées par les partis « traditionnels », existent bel et bien. C'est pourquoi il faut développer l'information et la documentation. Ensuite, je redoute qu'il y ait quelques cas où de vrais blocages se font jour. Mais, comme vous le savez, la réglementation, qui évolue depuis les années 1990, est bien faite : les lois adoptées vont dans le bon sens.

Dans cet environnement mouvant, il faut sans doute rappeler aux acteurs que des règles existent et que des innovations permettent aussi de débloquer des situations.

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L'actuelle majorité avait adopté le principe d'une banque de la démocratie. Dans le cas où cette idée prospérerait, quelle est l'articulation entre cette banque de la démocratie et la mission qui serait la vôtre ?

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Jean-Raphaël Alventosa

Ma réponse sera très libre, car je n'ai pas à commenter les votes du Parlement, ni les décisions de l'exécutif. Si jamais la question d'une banque de la démocratie devait se poser à nouveau, comme ce serait sans doute le cas si la médiation échouait, rien n'empêche d'imaginer un système à plusieurs étages.

Au niveau local, le travail serait démultiplié et articulé avec les réseaux informés : celui de la Banque de France, les préfectures… Si un blocage survient à ce niveau, on aurait recours au médiateur, fort de sa connaissance et de sa capacité à actionner tel ou tel levier. Si un blocage devait subsister encore sur quelque sujet, on recourrait à des procédures dont vous définiriez les conditions.

Comme citoyen, plus qu'en technicien invité à mettre en oeuvre une médiation encore inconnue, j'imagine mal une ouverture de crédit d'une banque générale, alors que le marché compte déjà tant de banques. Donnez-moi seulement quelques mois pour revenir devant vous et vous donner mon avis de technicien, s'il s'avérait que la médiation ne fonctionne pas. Dans ce cas, on pourrait imaginer une procédure très ponctuelle, comme il en existe déjà dans certains secteurs, qui serait susceptible de débloquer, sous les conditions que vous poserez, les problèmes de financement de tel ou tel candidat ou de tel ou tel parti – si rien n'a fonctionné.

Il ne me paraît pas très compliqué de mettre en place un réseau qui fonctionne déjà dans beaucoup de secteurs autres que la vie politique. Sur le plan technique, cela ne me semble pas difficile à imaginer.

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La question du financement de la vie politique ne se résume pas à la question du financement des partis politiques. En effet, n'oublions pas que des candidats se présentent parfois hors du cadre des partis politiques, par exemple aux élections législatives ou aux élections municipales. Les termes de l'équation sont, d'un côté, l'absolue nécessité de transparence, de règles claires et précises et, de l'autre côté, la possibilité de monter un projet de candidature pour quelqu'un qui n'agit pas dans le cadre des partis politiques.

Une fois n'est pas coutume, je suis en désaccord avec la garde des sceaux sur ce point, puisqu'elle a déclaré, en séance publique, que, au vu des études menées, elle ne connaissait pas aujourd'hui l'existence de difficultés, pour un candidat, à financer sa campagne. C'est complètement faux.

En vérité, quand vous êtes dans une vague ou quand vous appartenez à un parti installé, vous pouvez en effet trouver facilement de quoi financer votre campagne ; mais, si vous êtes un petit candidat, vous ne le pouvez pas. C'est pourquoi la question de la banque de la démocratie se pose vraiment. Je pressens qu'on ne pourra pas abandonner cette idée, à mon sens assez simple, de trouver un mode de crédit soutenu par l'État pour garantir la vie de notre démocratie.

Le groupe MODEM a réfléchi à cette question, étant pour partie à l'initiative des propositions avancées. Nous allons continuer à travailler intensément sur ce sujet. Car il s'agit d'un sujet clé. J'y vois une condition de la vitalité politique de notre pays.

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Jean-Raphaël Alventosa

Avant de vous voir, j'ai écouté jeudi dernier la ministre. Elle ne me semble pas tout à fait tenir les propos que vous lui prêtez. Elle reconnaît qu'il y a des difficultés.

L'article 30 de la loi crée en effet une institution dédiée, « en cas de défaillance avérée ». Ce dernier mot est bien sûr le plus important. Il n'est d'ailleurs pas question de « banque de la démocratie », terme extrêmement mauvais et qui ferait courir le projet à l'échec.

La position de l'exécutif est la suivante : le dispositif proposé est intéressant, mais n'allons pas trop vite. Il y a beaucoup de mouvements et beaucoup de partis : plus de 500 en effet ! Mais il y a aussi quelques milliers d'établissements bancaires… Avant d'affirmer que leur interaction ne fonctionne pas, il convient de s'en assurer. C'est pourquoi la ministre a dit qu'il fallait attendre un petit peu.

La loi comporte aussi un article 28, qui prévoit la possibilité d'établir un diagnostic. Si les choses échouent à cet échelon, il faudra, pour les difficultés « résiduelles » – comme les a qualifiées la ministre, trouver un dispositif : peut-être pas créer une banque, mais du moins mettre au point un mécanisme adéquat.

N'allons cependant pas trop vite. Je ne vais pas défendre l'institution que vous avez écartée avant même d'avoir pris mes fonctions. Il y aura, je l'imagine, quelques difficultés. Si elles ne trouvent pas de solution, il faudra examiner quelles seraient les grandes idées qui seraient étouffées. Cette question s'adresse au demeurant plutôt à vous. Chez le simple citoyen ou professeur que je suis, elle ne suscite pas l'envie subite de créer une banque. Car le marché bancaire est déjà très développé.

Il faudra sans doute revoir le sujet. Mais, pour l'heure, j'adopterais la devise des Britanniques : Wait and see.

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Nous avons évoqué les banques nationales avec déclinaison régionale. Quand je me suis porté candidat en 2017, j'ai sollicité une grande banque nationale : on m'a indiqué que la direction avait décrété que la banque ne prêtait pas aux candidats aux élections. Voilà la réponse que j'ai entendue. Heureusement, il y a beaucoup de choix dans ma circonscription ; j'ai donc pu en trouver une autre.

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Vous avez indiqué que la médiation aura besoin de moyens. Les prochaines élections législatives devraient opposer entre dix et quinze candidats dans chacune des 404 nouvelles circonscriptions. Potentiellement, vous auriez ainsi beaucoup de demandes à traiter en quelques jours. Avez-vous déjà une première idée des moyens matériels et humains qui seront les vôtres pour mener à bien votre mission ?

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Jean-Raphaël Alventosa

Ma connaissance de la situation budgétaire de l'État me conduit à penser que mes moyens seront assez limités. J'aurai en tout cas à coeur de ne pas en demander trop pour démarrer, puisque nous sommes en effet au stade du démarrage. Mon problème est plutôt de savoir quelles charges seront les miennes et avec quels collaborateurs je pourrai travailler. Les moyens seront donnés par le ministère de l'intérieur et ils seront limités.

Mais je n'ai pas besoin de beaucoup de moyens. Nous allons en effet d'abord poser un diagnostic. Au Sénat, j'ai discuté avec quelques experts du sujet. J'ai été heureux de les entendre me dire que ce ne sont pas les élections européennes qui vont créer les premières difficultés. Auparavant, seules quelques élections ponctuelles auront lieu. À deux ou trois personnes, en quelques heures, sinon en quelques jours, nous devrions donc être capables de traiter les cas qui se présenteront.

Pour les européennes, on s'attend à 1 500 ou 2 000 candidatures. J'ai interrogé les responsables de grands groupes, d'écoles et d'université. Selon eux, sur une population donnée, 5 % des problèmes se règlent assez facilement. En revanche, vous pouvez passer votre vie à chercher la solution au 1 % des problèmes qui subsistent.

Pour les élections européennes, je n'ai pas trop de soucis. En revanche, je suis un peu inquiet au sujet des élections municipales. Quand on songe au nombre des candidats, on se rend compte que 5 %, et même 1 % des candidats, ce n'est pas une masse gérable. Mais la solution à cette question relève plutôt d'une modification des règles de financement de la vie politique.

Comptez en tout cas sur mon indépendance et sur mon courage pour dire que, si je n'ai pas les moyens, cela ne peut pas fonctionner. Mais je ne saurais le dire pour l'instant, car peu de moyens sont nécessaires pour mener à bien, dans un premier temps, l'analyse du réseau des acteurs.

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Souhaitez-vous garantir aux candidats l'accès à un prêt dont le montant global corresponde au montant remboursable par l'État ou bien ou plafond des dépenses qu'il est possible d'engager, soit, dans un cas, 47,5 % des dépenses et, dans un autre, 100 % ?

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Jean-Raphaël Alventosa

Ni l'un ni l'autre ! Ma seule tâche est de faire en sorte que les candidats puissent ouvrir un compte et obtenir un prêt.

Si des difficultés de financement apparaissent, il existe d'autres solutions, tant sur le plan réglementaire que sur le plan législatif. Si les règles de financement de la vie politique se trouvaient déstabilisées par un nombre trop grand de candidats ne pouvant obtenir un compte, vous seriez saisis de la question. Mais les statistiques nous indiquent qu'il n'y en a que très peu. Ceux qui font le nécessaire obtiennent un compte ; mais une minorité n'y arrive pas.

Un très petit nombre de candidats, de partis et de mouvements ne peuvent obtenir de crédits. Pour en obtenir un, vous devez faire état des ressources dont vous disposez. Un parti doit ainsi produire une consolidation de ses comptes. Or celle-ci répond à des normes comptables très strictes. S'il y a des centaines de partis, le problème de la consolidation, c'est-à-dire de la garantie apportée au prêteur, se pose naturellement. Mais il est aussi très facile d'apporter des réponses techniques. Même si elles méritent d'être posées, beaucoup de questions ne sont pas de mon ressort.

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Votre carrière au service de l'État est impressionnante.

S'agissant de votre mission, mon expérience me conduit à penser que les décisions sont d'abord prises au niveau local, dans de petites agences. Vous avez déclaré que vous n'envisagiez pas que le système fonctionne sans dialogue avec les banques. Mais comment allez-vous décliner ce dialogue ? Comment allez-vous vous assurer que l'information redescend dans les coins les plus perdus de notre territoire ?

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Jean-Raphaël Alventosa

Je vais m'efforcer de travailler dans les deux sens. Je commencerai par la tête, c'est-à-dire par les fédérations bancaires et par les grands réseaux nationaux, qui fonctionnent bien et connaissent la réglementation. Je verrai ensuite comment faire redescendre cette connaissance dans les réseaux.

Ce sera facile de vérifier si cela fonctionne ou non. Je pourrai prendre ma valise et aller voir, avec mon collaborateur ou ma collaboratrice, au fin fond du territoire, là où il n'y a parfois qu'une banque. Nous verrons si la fiche, l'orientation ou la directive adressée par son directeur général ou par son président a bien été reçue. Si ce n'est pas le cas, la médiation pourrait faire comprendre, avec votre aide et avec celle des acteurs intéressés par la transparence, que le réseau a des fuites.

Je procéderai aussi à l'envers en cherchant à savoir, par les préfectures et par les services départementaux de la Banque de France, quels peuvent être ces territoires abandonnés, oubliés, martyrisés par tel ou tel réseau bancaire. Je braquerai alors les projecteurs sur ces régions pour comprendre l'origine du dysfonctionnement.

Il y aura des points plus difficiles. Mais le centralisme présente aussi quelques avantages et notre administration nationale devrait pouvoir les régler. Dans le rapport que vous avez demandé, j'établirai au demeurant le diagnostic des cas qui restent sans solution.

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Comme mes collègues, je tenais à vous féliciter pour votre parcours exemplaire.

En dehors de la consolidation des comptes, avez-vous déjà pu, par le biais de rapports ou d'enquêtes, identifier les raisons alléguées par les banques pour refuser l'octroi d'un crédit à un candidat ou à un parti ?

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Jean-Raphaël Alventosa

Mon parcours est tout à fait banal et semblable à ceux de beaucoup de fonctionnaires de l'État. J'ai simplement la possibilité d'en faire état.

Les banques peuvent alléguer trois types de risques.

Premièrement, il y aurait le risque au crédit, lorsqu'elles peuvent craindre que le candidat ne les rembourse pas. Mais cet argument ne tient pas. Comme les médias en font état, l'emprunt est souvent utilisé comme un simple relais de trésorerie dans l'attente du remboursement de l'État. Pour que celui-ci ait lieu, il faut respecter des règles, dont le champ dépasse mes compétences. La France a en effet cette solution originale par rapport à beaucoup d'autres pays que les dépenses sont prises en charge si le candidat dépasse 5 % des suffrages. La thèse du risque de crédit ne tient donc pas.

Mais il est vrai que, ces dernières années, beaucoup de candidats se sont présentés, de manière libre, et n'ont pas obtenu 5 % des suffrages. Cette question vous regarde, à vrai dire. Faut-il ouvrir un crédit à toute personne qui décide de se présenter ? Où irons-nous si nous ouvrons un crédit à toutes les personnes désireuses de se faire entendre ?

Deuxièmement, il y aurait un risque de non-conformité à la réglementation, au motif que les personnalités politiques seraient des personnalités complexes qui nécessitent une vigilance particulière. Cet argument ne tient pas non plus. En effet, vous n'êtes pas concernés par la réglementation sur la lutte contre le blanchiment, contre la corruption ou contre le terrorisme. L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution doit donc faire son travail auprès des banques, en leur indiquant que ces arguments ne sont pas utilisables. S'ils sont utilisés, les services de l'État ne sont pas sans moyens pour agir. Mais vous n'êtes pas concernés par cette réglementation. Pour l'invoquer, il faudrait que les arguments soient plus solides.

Troisièmement, il y aurait un risque réputationnel ou risque d'image. Une banque locale peut l'invoquer, au vu de la réputation personnelle du candidat dans la localité. Ce risque peut être invoqué, mais il faudra qu'il corresponde à la définition fixée en droit national, européen et international. Ces mots ont en effet un sens précis. Les problèmes d'image et de réputation font référence à la solvabilité des banques et aux exigences de fonds propres. Or je vois mal comment un candidat pourrait mettre en cause la réputation de la banque sur ce terrain.

Il faudra donc analyser de manière très précise les arguments qui peuvent exister. S'ils résistent, nous nous heurterons à une vraie difficulté ; peut-être faudra-t-il imaginer d'autres procédures. Mais, pour l'instant, les arguments présentés ne me semblent pas résister à l'analyse.

La preuve en est que des banques elles-mêmes se disent désireuses d'intervenir sur ce marché. Il faudra en faire la liste pour les solliciter de préférence. S'agissant du réseau bancaire comme des arguments employés, un diagnostic assez précis est nécessaire. De manière générale, la ministre a été assez claire : il n'y a pas de défaillance avérée. Mais, de manière ponctuelle, nous pourrions constater des défaillances vérifiées. Nous verrons.

Délibérant à huis clos, la Commission procède au vote par scrutin secret, en application de l'article 29–1 du Règlement, sur la nomination de M. Jean-Raphaël Alventosa à la fonction de médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques. Les résultats de ce scrutin ont été annoncés, simultanément à ceux de la commission des Lois du Sénat, au cours de la réunion qui s'est tenue le même jour à 14h15 :

Nombre de votants : 16

Bulletins blancs, nuls ou abstentions : 1

Suffrages exprimés : 15

Avis favorables : 12

Avis défavorables : 3

La réunion s'achève à 12 heures 50.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Erwan Balanant, Mme Yaël Braun-Pivet, Mme Émilie Chalas, M. Éric Diard, Mme Coralie Dubost, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Sébastien Huyghe, M. Guillaume Larrivé, M. Philippe Latombe, M. Fabien Matras, M. Jean-Michel Mis, M. Paul Molac, M. Bruno Questel, M. Rémy Rebeyrotte, M. Robin Reda, M. Raphaël Schellenberger, M. Jean Terlier, Mme Cécile Untermaier, M. Arnaud Viala, M. Guillaume Vuilletet, Mme Hélène Zannier

Excusés. - Mme Huguette Bello, M. Éric Ciotti, M. Richard Ferrand, M. Marc Fesneau, Mme Paula Forteza, Mme Marie Guévenoux, M. Mansour Kamardine, Mme Marietta Karamanli, M. Jean-Christophe Lagarde, Mme Maina Sage

Assistait également à la réunion. - M. Thibault Bazin