Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Réunion du mardi 7 mai 2019 à 16h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • britannique
  • retrait
  • royaume-uni
  • répartition
  • siège

La réunion

Source

La réunion débute à 16 heures 30.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente.

La Commission examine le projet de loi relatif à l'entrée en fonction des représentants au Parlement européen élus en France aux élections de 2019 (n° 1880) (Mme Coralie Dubost, rapporteure).

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Nous examinons cet après-midi, sur le rapport de Mme Coralie Dubost, le projet de loi relatif à l'entrée en fonction des représentants au Parlement européen élus en France aux élections de 2019. M. Laurent Nuñez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur, va présenter les enjeux de ce texte à la commission des Lois.

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Laurent Nuñez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Intérieur

Ce projet de loi correspond à la fois à une nécessité et à une urgence.

Il y a une nécessité : adapter les règles de l'élection européenne à la situation internationale et au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, retrait qui aurait déjà dû avoir lieu. Vous connaissez ce contexte. Suite à la décision britannique de quitter l'Union européenne, il a été procédé à une réattribution des sièges britanniques au Parlement européen entre les différents États-membres en fonction de leur population. Ainsi, la délégation française passe de 74 à 79 élus.

Cependant, les Britanniques peinent à trancher sur les modalités de leur départ. Contrairement à ce qui était prévu, ils n'ont pu encore quitter l'Union européenne, d'une part, et pourraient devoir, d'autre part, procéder à l'élection de leurs représentants au sein du Parlement européen. Cela nous conduit à une situation imprévue par la loi n° 2018-509 du 25 juin 2018 relative à l'élection des représentants au Parlement européen. Le 26 mai prochain, les Français éliront 74 députés européens. Ce nombre passera à 79 seulement lorsque le Royaume-Uni aura quitté effectivement l'Union européenne. Il faut donc instituer le principe de sièges supplémentaires – les cinq sièges qui nous seront attribués une fois le retrait britannique effectif.

Il y a aussi une urgence face à cette situation qu'il n'était pas possible d'anticiper. Notre droit doit donc être adapté avant le 26 mai, date de l'élection européenne. Parler de procédure accélérée n'est donc pas, en l'espèce, un vain mot.

J'aimerais ajouter deux remarques. La première, ce sont des remerciements. Je sais qu'un esprit de consensus anime cette Commission et chaque groupe parlementaire dans le but de permettre à l'élection européenne de se dérouler dans les meilleures conditions. Je voulais donc saluer le travail et l'esprit de responsabilité de chacun. Je souhaitais également vous dire que cet esprit souffle jusqu'à la rue de Vaugirard et que le Sénat partage cette préoccupation avec vous et avec le Gouvernement. Je sais que vous êtes, madame la rapporteure, en lien avec le sénateur Alain Richard, rapporteur de la commission des Lois du Sénat, et que vous aurez des propositions de modification à faire en vue de de la séance publique.

Ma seconde remarque porte sur l'amendement déposé sur le projet de loi. Il porte sur la méthode de répartition des sièges. Nous y reviendrons, mais je devrai donner un avis défavorable. En effet, le débat sur la répartition à la plus forte moyenne ou au plus fort reste a déjà été abordé l'année dernière, lors de l'examen du projet de loi relatif à l'élection des représentants au Parlement européen. Il ne s'agit pas de le rouvrir alors que le Parlement a tranché. Par ailleurs, si l'amendement était adopté, il y aurait deux clefs différentes de répartition proportionnelle des sièges entre les 74 élus et les 5 élus supplémentaires. Nous cherchons de la clarté et de l'homogénéité dans le mode de scrutin ; nous n'y serions pas vraiment…

Voilà, mesdames et messieurs les députés, en quelques mots, ce que je souhaitais dire sur ce texte dont je vous remercie à nouveau d'avoir bien voulu vous saisir si vite.

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Nous avons à examiner aujourd'hui un projet de loi pour lequel nous disposons d'une marge très limitée. Elle l'est d'abord en termes de délai puisque la loi devra être promulguée avant la date de l'élection européenne, le 26 mai prochain. Sur le fond du droit, nous nous bornons à faire application de la décision du Conseil européen qui fait varier le nombre de membres de la délégation française à Strasbourg de 74 à 79 membres, suivant que le Royaume-Uni est encore membre de l'Union européenne ou non. Quant aux faits, chacun les aura lus dans les journaux et entendus résumés à l'instant. Tout cela n'est donc pas le plus satisfaisant en termes de lisibilité. Mais nous sommes bien conscients de ce que tous les gouvernements et tous les parlements de l'Union européenne partagent ces mêmes conditions.

Je peux confirmer à la commission des Lois m'être rapprochée du sénateur Alain Richard, qui rapportera le projet de loi devant le Sénat. Notre objectif est bien de nous entendre en amont sur une rédaction qui pourra être adoptée en termes identiques par les deux assemblées.

Monsieur le ministre, je n'aurai que deux questions à vous adresser. L'objet de ce texte est principalement de prévoir la situation de ceux qui seront les candidats appelés à entrer au Parlement européen à la date de retrait effectif du Royaume-Uni. Leur statut sera celui de suivant de liste. Pouvez-vous nous confirmer qu'il ne leur donnera, comme l'indique le Conseil d'État dans son avis, aucun droit ni aucun devoir ?

En outre, il est possible que le Royaume-Uni ne quitte finalement l'Union européenne qu'après les élections municipales et sénatoriales de 2020. Qu'adviendrait-il dans le cas où un « remplaçant européen » était élu à une fonction incompatible ? Quand devrait-il exercer son option ? Et, si on pousse le raisonnement : peut-on être à la fois remplaçant européen et suppléant de parlementaire national ?

J'ai fait le choix de ne présenter aucun amendement en Commission de façon à bénéficier d'un maximum de temps de réflexion pour la séance publique. Je suis à l'écoute de toutes les remarques qui pourraient être formulées par l'ensemble des commissaires.

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Je voudrais dire combien je suis heureux et honoré d'être accueilli dans cette Commission, devant laquelle j'interviens pour la première fois.

Si nous sommes réunis cet après-midi, c'est évidemment à cause du Brexit. Comme le ministre et la rapporteure l'ont rappelé, cela fait de nombreux mois que les 27 États membres de l'Union européenne sont contraints de composer avec les incertitudes qui minent la politique intérieure britannique et retardent l'effectivité du Brexit.

Face à ces incertitudes, je crois qu'il est nécessaire de redire que ce retrait est un choix souverain qu'il faut respecter, mais que c'est le choix du peuple britannique pour lui-même. Il ne saurait se faire aux dépens des intérêts français et européens. Parmi les intérêts français figure notamment la représentation de notre pays au Parlement européen. Comme vous le savez, du retrait britannique de l'Union européenne a découlé une redistribution des sièges au Parlement européen et un rééquilibrage de la représentation des États membres dans cette institution. Avec 74 sièges, celle de la France ne correspondait plus à son poids démographique. L'allocation de cinq sièges supplémentaires nous permettra de renforcer notre position et notre influence dans les institutions européennes. Il faut s'en féliciter.

Il restait cependant à sécuriser ces cinq sièges et à définir leur statut juridique dans le temps qui nous sépare d'un retrait britannique effectif. Je crois que c'est chose faite avec ce texte. Il va sans dire que ses dispositions ne modifient en rien les règles électorales en vigueur et ne répondent qu'à une situation aussi inédite que regrettable, à savoir la prorogation du délai de sortie du Royaume-Uni à une date postérieure aux élections européennes.

Pour toutes ces raisons, au nom du groupe LaREM, nous apportons un soutien large et sans réserve à ce projet de loi.

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Nous subissons ici, comme tout le monde, la décision, ou plutôt la non-décision, britannique. Il est nécessaire d'adapter notre droit électoral pour l'élection des représentants français au Parlement européen et de revenir temporairement, du moins l'espère-t-on, à 74 représentants de la France à Strasbourg. Cette question du Brexit et de la date de sortie du Royaume-Uni, même si nous n'allons pas rouvrir le débat, a néanmoins montré les failles que dénonçait le groupe Les Républicains.

Tout d'abord, le Président de la République s'est trouvé parfaitement marginalisé, au moment du Conseil européen, sur cette question. Nous ne pouvons que regretter cet isolement de la France.

Par ailleurs, monsieur le ministre, vous vous êtes dit défavorable à l'amendement du groupe Socialistes au motif qu'il ne pouvait y avoir deux modes d'élection pour une même assemblée. Nous ne pouvons qu'approuver ces propos et nous espérons que vous tiendrez les mêmes lors de la révision de la Constitution, quand nous débattrons du mode d'élection des députés à l'Assemblée nationale ! Je vous rappelle que le projet du Gouvernement vise précisément à instaurer deux modes d'élection – l'un majoritaire, l'autre proportionnel. Nous espérons que ce qui est vrai aujourd'hui sera également vrai demain.

L'examen de ce projet de loi nous donne l'occasion de faire un premier bilan de la réforme proposée par Mme Nathalie Loiseau, naguère ministre des affaires européennes et aujourd'hui tête de liste de la majorité aux élections européennes. Le mode de scrutin a été modifié en faveur d'une liste nationale unique. Ce qui nous avait été présenté à l'époque pour justifier ce changement s'avère aujourd'hui parfaitement fallacieux : on avait expliqué que cette liste unique nationale allait favoriser la participation. Or, l'ensemble des sondages tend à prouver que l'abstention progressera par rapport à l'élection européenne précédente où s'opposaient des listes régionales !

On nous avait également expliqué que ce scrutin de liste nationale allait cibler les débats sur les enjeux européens. Force est de constater que nous n'avons jamais aussi peu parlé d'Europe. La faute en incombe d'abord au Président de la République, qui a fait durer la séquence du grand débat national en évitant d'évoquer ce thème.

On avait enfin prétendu que cela susciterait un plus grand intérêt des Français pour cette élection. Là encore, c'était faux car tel n'est malheureusement pas le cas.

Ainsi, vous avez changé le mode de scrutin sous des prétextes fallacieux. On verra quel sera le nombre de votants le 26 mai. Mais les indicateurs sont mauvais. Ce manque d'intérêt pour le scrutin européen est aussi dû, en partie, à la liste du parti majoritaire qui n'a toujours pas présenté son projet à trois semaines de l'élection ! À ce jour, elle ne veut toujours pas dire non plus dans quel groupe parlementaire ses membres siègeront à Strasbourg.

Ce manque d'attrait pour les sujets européens, qui peut entraîner une baisse de la participation, découle peut-être d'un manque de clarté et du flou entretenu par certains dans la majorité… Nous ne pouvons que le regretter.

Dernier point sur ce changement de mode de scrutin : nous avions largement alerté sur la sous-représentation de nombre de territoires à l'issue de l'élection. Force est de constater qu'au vu des personnes éligibles, en fonction de leur place et selon les scores attribués par les sondages aux différentes listes, des régions seront très peu représentées à Bruxelles tandis que d'autres, en particulier l'Île-de-France, obtiendront nombre d'élus. Ma région des Hauts-de-France n'aura par exemple que deux ou trois représentants au Parlement européen. Nous ne pouvons que le regretter alors que le scrutin régional nous permettait auparavant de bénéficier d'une représentation à peu près égale des territoires. Mis bout à bout, tout cela ne va pas dans le bon sens.

Le groupe Les Républicains approuvera l'article unique de ce projet de loi tout en regrettant que ses mises en garde n'aient pas été prises en compte au moment du changement de mode de scrutin. Cette attitude nous a conduits dans l'impasse.

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Le 11 avril dernier, lors d'un conseil européen extraordinaire, il a été décidé de reporter le départ du Royaume-Uni de l'Union européenne au 31 octobre prochain. Cette date permettra la constitution de la future Commission européenne, mais elle nous contraint à revoir les modalités d'attribution des sièges lors de l'élection du 26 mai.

En effet, sur les 751 représentants que compte le Parlement européen, 27 sièges britanniques ont été répartis entre treize États selon le principe démographique. La France passe ainsi de 74 à 79 sièges et, selon cette règle, nos 79 représentants seront élus en même temps, quelle que soit la situation du Royaume-Uni. Nous aurons bien à élire 79 représentants, même si cinq d'entre eux entreront en fonction de manière différée.

L'article unique de ce projet de loi précise, d'une part, le mode de désignation de ces cinq représentants supplémentaire de la France dont l'entrée en fonction sera reportée et, d'autre part, les modalités de proclamation des résultats. Le groupe MODEM et apparentés apporte son soutien à ce texte et le votera dans sa rédaction actuelle.

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Ce projet de loi est la conséquence nécessaire de la prorogation du report du Brexit. Comme l'a dit la rapporteure, nous sommes assez contraints. Il prévoit la méthode de désignation des cinq sièges supplémentaires accordés à la France. Suite au départ prochain du Royaume-Uni de l'Union européenne, il était en effet nécessaire, en attendant que ce départ soit effectif, que soit reportée l'entrée en fonction des candidats ayant obtenu les cinq derniers sièges pourvus en France. Le groupe UDI, Agir et Indépendants (UAI) est favorable à l'adoption de ce texte.

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Ce projet de loi vise à tirer toutes les conséquences, en termes d'élections européennes, de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne. Ainsi, certains des sièges qui lui étaient attribués jusqu'ici devraient être prochainement vacants. La date de sortie a changé : normalement prévue le 29 mars, puis le 12 avril, elle est aujourd'hui repoussée au 31 octobre. Sauf nouvelles plus récentes, le gouvernement britannique a dit soumettre à nouveau différentes options au vote des Communes, en espérant éviter le scrutin des européennes dans le pays le 23 mai.

Le nombre de sièges au Parlement européen est déterminé pour chaque État membre, conformément à l'article 14 du Traité, de manière dégressive et proportionnelle. Le Parlement européen, dont la résolution a été validée par le Conseil européen, proposait de consacrer 27 des sièges libérés à une nouvelle répartition entre États membres. À ce titre, la France devrait bénéficier de sièges supplémentaires. En s'en voyant attribuer cinq, elle passerait à 79 élus. Les autres sièges sont gelés en prévision de prochains élargissements de l'Union européenne. L'entrée en fonction des cinq représentants supplémentaires se fera à la date du retrait effectif du Royaume-Uni.

Mais, si ce projet est bien de nature très technique, il recèle aussi une dimension politique puisqu'il traduit notre façon d'assurer la représentation des différentes forces au sein de cette assemblée parlementaire. Certes, le nombre de sièges à répartir est minime, mais la méthode reste, dans son principe, significative. Or, cette répartition peut se faire en effet soit à la plus forte moyenne, soit au plus fort reste.

Ces deux méthodes comportent une première étape identique, à savoir la répartition au quotient électoral. Puis elles divergent pour la répartition des sièges restants. Le groupe Socialistes et apparentés propose de privilégier la méthode du plus fort reste, chaque siège restant étant attribué successivement à la liste qui dispose du plus grand nombre de suffrages non utilisés lors de l'étape de répartition du quotient.

Il s'agit certes d'une proposition modeste au regard des enjeux. Mais elle marque notre volonté d'assurer une plus grande représentativité à l'ensemble des listes et, partant, au vote des électeurs. Je rappelle, pour mémoire, que seules les listes qui franchissent le seuil de 5 % de suffrages exprimés bénéficient d'élus.

Tel est le sens de l'amendement que nous allons présenter, dont nous espérons qu'il puisse être adopté avec le soutien de la rapporteure.

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L'essentiel a été dit par notre collègue Marietta Karamanli. Nous avons pour préoccupation que la répartition proposée garantisse la pluralité.

Lors de l'examen de la loi sur le mode de scrutin pour l'élection européenne, nous avions déjà porté des propositions tendant à instituer un seuil plus bas, comme cela se fait dans la plupart des autres pays européens. Je rappelle que la France, avec un seuil de 5 %, est une exception. En Allemagne, par exemple, on peut avoir des élus dès le premier point de pourcentage obtenu.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine est favorable à une méthode qui permette de garantir la plus grande pluralité. De ce point de vue, la répartition au plus fort reste lui paraît la meilleure.

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De notre point de vue également, au-delà des aspects techniques, nous devons répondre à un problème de représentation. L'enjeu est de garantir la diversité et la pluralité des points de vue. Pour La France insoumise ce débat doit nous donner l'occasion de réfléchir à la question de savoir pourquoi nous devons discuter d'un tel texte – sans savoir d'ailleurs s'il aura une effectivité, puisqu'à l'heure actuelle, nous ignorons si ces cinq places seront ou non attribuées à terme. Ce moment politique du débat européen nous invite à nous interroger sur la question de la démocratie et de la représentation. Pourquoi en arrive-t-on à ce qui est, de notre point de vue, un échec collectif, poussé à son paroxysme par l'intransigeance de l'Union européenne ? Car elle a choisi de faire payer le plus chèrement possible au peuple britannique son choix démocratique.

Tout l'enjeu est de savoir quelle Union européenne est possible et souhaitable. Cela va plus loin qu'une simple opération consistant à se partager, d'une certaine manière, les sièges des représentants britanniques, tels des vautours autour d'un cadavre. Disant cela, je ne fais de procès à personne.

Pour nous, ce débat doit permettre d'aborder ces questions. Mais je crains que nous ne laissions passer l'occasion de nous interroger sur les raisons pour lesquelles nous nous retrouvons à devoir nous partager ces quelques sièges, sans chercher à comprendre quelles sont les réponses qu'on devrait apporter pour ne pas avoir à le faire. Il faudrait, au contraire, étendre le projet européen à d'autres États et le renforcer.

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Laurent Nuñez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Intérieur

S'agissant tout d'abord des questions posées par la rapporteure, je vous confirme que le statut de suivant de liste ne confère aucun des droits et devoirs attachés au mandat de représentant au Parlement européen. Il sera possible d'être à la fois suivant de liste pour les sièges au Parlement européen et suppléant de parlementaire national. Concernant les personnes qui deviendraient maire ou sénateur et seraient ainsi en situation d'incompatibilité, le délai pour se départir de leur mandat serait de trente jours à compter de leur entrée en fonction car il y a bien une incompatibilité en la matière.

Monsieur le député Dumont, dans le cas que nous examinons, nous parlons de la même liste. Adopter l'amendement proposé par Mme Karamanli conduirait à instituer deux modes de scrutin pour une même liste. Tel était le sens de ma remarque, qu'il ne faut pas interpréter au-delà ! Quant à vos observations sur la réforme qui a institué la liste unique, nous espérons bien que la participation augmente de ce fait. Et, comme vous le disiez vous-même, nous ferons les comptes le jour de l'élection. La campagne entre dans sa pleine activité et tous les sujets européens sont bien mis sur la table. Je souligne enfin que nous aurions été bien ennuyés pour savoir comment répartir cinq sièges entre huit circonscriptions régionales.

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Je vous remercie, monsieur le ministre, pour vos réponses. Je vous rejoins aussi sur vos observations en réponse aux commentaires qui ont été faits. Je pense qu'il y a une véritable différence entre ce texte et la réforme envisagée des élections législatives en France. Vous ne pouvez donc pas, monsieur Dumont, semer la confusion entre un texte qui consisterait, si l'amendement de madame Karamanli était adopté, à appliquer deux méthodes proportionnelles différentes de décompte à une seule et même voix, et une réforme qui prévoirait de panacher les scrutins majoritaire et proportionnel pour donner plus de poids à un même bulletin. Dans le premier cas, il n'y aurait alors effectivement plus aucune lisibilité pour le citoyen… Ce n'est pas souhaitable.

Mais je veux aussi vous remercier, Monsieur Dumont, pour avoir dit que la campagne européenne dépendait essentiellement du programme de la liste LaREM. Soyez rassuré, il paraîtra jeudi. Merci d'avoir rappelé que nous sommes pro-européens, que notre programme sera dense et qu'il intéressera les Français !

Enfin, je dois dire, madame Obono, que j'ai été surprise par vos propos et les termes choisis, notamment celui de « cadavre ». Je n'aurais pas employé ce mot à propos des sièges britanniques. C'est particulièrement triste. Mais ce qui est intéressant dans ce que vous avez dit, c'est qu'il y a effectivement une grande difficulté à sortir de l'Union : peut-être le Brexit a-t-il mal été présenté aux Britanniques. Nous connaissons la presse là-bas, qui ne cesse de reprendre des fake news, alimentant le doute avec tout ce que cela peut entraîner en politique intérieure. Même si je n'aurais jamais parlé de « députés cadavériques », je reconnais les grandes difficultés dans lesquelles se trouve le Royaume-Uni.

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Nos collègues des Républicains ont mis en cause le Président de la République dans les négociations sur le Brexit. Or, sans son intervention, nous restions dans l'incertitude au moins jusqu'en 2020, voire 2021. Vos alliés en Allemagne plaidaient en effet pour que nous repoussions ce délai jusqu'à l'année prochaine, ce qui aurait gêné le début de la prochaine mandature et la capacité à refonder l'Union européenne.

Sur l'abstention, permettez-moi de vous appeler à un peu de modestie. L'abstention sur les sujets européens vient en partie de l'abandon du projet européen par votre parti, depuis 2005 au moins. De fait, compte tenu de la fracturation importante qui existe sur les sujets européens au sein de votre famille politique, c'est le Rassemblement national qui s'en est emparé. Qui a trahi le projet européen ? Ce ne sont pas les peuples qui s'en détournent mais les partis politiques qui, comme le vôtre, ont cessé de nourrir une ambition pour l'Europe.

Quant à la question du rattachement à un groupe politique du Parlement européen, il faut que vous apportiez vous-mêmes quelques éclaircissements. MM. François-Xavier Bellamy et Laurent Wauquiez défendent très régulièrement M. Viktor Orbán, qui annonce vouloir faire une alliance avec M. Matteo Salvini… Avec qui allez-vous faire alliance au Parlement européen ? Avec l'extrême droite ? Chacun peut se poser la question !

Je conclurai sur la représentation des Franciliens. Regardez votre liste : quatre candidats, parmi les dix premiers, sont issus de l'Île-de-France et de la région parisienne. Regardez la nôtre : nous avons su présenter des candidats de toutes les régions de France. Permettez-moi donc, là encore, de vous appeler à un petit peu de modestie !

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Je suis quelque peu agacé par la façon dont la majorité est en train d'instrumentaliser le débat sur un projet de loi technique pour apporter, au sein de la commission des Lois, une tentative de correction à sa campagne européenne. Les membres de la majorité avaient oublié que les Français étaient libres de leur choix. Ils ne se laisseront pas enfermer dans l'alternative, imposée par la majorité, entre leur supposé projet – qu'on attend encore ! – et un projet de rejet porté par le Rassemblement national. Je croyais qu'au sein de cette Commission il était possible de travailler sérieusement sur les textes de loi dans le respect de vrais clivages politiques…

Cette Commission n'est pas le lieu pour mener des campagnes électorales. Certes, vous n'aviez pas vu venir que les Français auraient envie choisir – et envie de choisir les candidats des Républicains. Mais ne tirez pas profit des réunions de la commission des Lois pour essayer de rattraper des mois et des mois d'erreurs de stratégie de campagne !

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Revenons-en à l'objet de notre réunion, à savoir l'examen d'un projet de loi relatif à l'entrée en fonction des représentants au Parlement européen élus en France aux élections de 2019.

La Commission en vient à l'examen de l'article unique du projet de loi.

Article unique : Modalités d'entrée en fonction des députés européens élus en France une fois effectif le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne

La Commission examine l'amendement CL1 de Mme Marietta Karamanli.

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Par cet amendement, nous souhaitons que la répartition se fasse selon la règle du plus fort reste au nom de la pluralité nécessaire à ces élections. Nous souhaitons que cette modification puisse être intégrée au projet de loi.

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L'adoption de cet amendement plongerait les spécialistes du droit électoral dans une grande perplexité. Il y est proposé, en effet, de continuer à allouer les 74 sièges de la France au Parlement européen selon la méthode de la plus forte moyenne, mais de procéder ensuite à la répartition des cinq sièges supplémentaires selon la méthode du plus fort reste. Autrement dit, cela reviendrait à appliquer deux modes de scrutins différents à une même élection.

Au-delà de la critique éventuellement politique que peut susciter une telle option, notamment en termes d'intelligibilité pour le citoyen, je souligne aussi les difficultés juridiques qu'il y aurait à la mettre en oeuvre. En effet, s'il s'agit de reprendre la totalité des votes émis pour les cinq sièges seulement au plus fort reste, cela signifiera un siège de plus aux cinq listes arrivées en tête : ce n'est pas du tout favorable au pluralisme. S'il s'agit en revanche de basculer d'une méthode à l'autre entre le soixante-quatorzième et le soixante-quinzième siège, cela apparaît peu réaliste. Je ne suis même pas sûre que ce soit mathématiquement possible.

Je suggère le retrait, à défaut avis défavorable.

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Laurent Nuñez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Intérieur

Avis défavorable également.

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Il n'y a qu'un scrutin et non pas deux. C'est la répartition des cinq sièges restant qui serait différente.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article unique sans modification.

En conséquence, le projet de loi est adopté sans modification.

La réunion s'achève à 17 heures 10.

Information relative à la Commission

La Commission a désigné M. Rémy Rebeyrotte rapporteur sur le projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace (n° 1844).

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Pieyre-Alexandre Anglade, Mme Yaël Braun-Pivet, M. Xavier Breton, M. Vincent Bru, Mme Coralie Dubost, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Isabelle Florennes, Mme Marie Guévenoux, M. Dimitri Houbron, M. Sacha Houlié, M. Sébastien Huyghe, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Marietta Karamanli, M. Guillaume Larrivé, Mme Alexandra Louis, M. Fabien Matras, M. Jean-Michel Mis, M. Pierre Morel-À-L'Huissier, Mme Danièle Obono, Mme George Pau-Langevin, M. Stéphane Peu, M. Bruno Questel, M. Rémy Rebeyrotte, M. Robin Reda, M. Pacôme Rupin, M. Raphaël Schellenberger, M. Jean Terlier, M. Guillaume Vuilletet

Excusés. - Mme Huguette Bello, M. Éric Ciotti, M. Christophe Euzet, Mme Paula Forteza, M. Mansour Kamardine, M. Aurélien Pradié, Mme Maina Sage, M. Jean-Luc Warsmann

Assistaient également à la réunion. - M. Pascal Brindeau, M. Pierre-Henri Dumont