Commission élargie : finances - affaires culturelles - affaires économiques - développement durable

Réunion du mardi 24 octobre 2017 à 21h05

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION ÉLARGIE

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

(Application de l'article 120 du Règlement)

24 octobre 2017

Présidence de M. Éric Woerth, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, de M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, de M. Roland Lescure, président de la commission des affaires économiques, et de M. Alain Perea, vice-président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

La réunion de la commission élargie commence à vingt et une heures cinq.

projet de loi de finances pour 2018

Recherche et enseignement supérieur

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Mes chers collègues, je voudrais, en notre nom à tous, souhaiter la bienvenue à Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Madame la ministre, je suis heureux de vous accueillir avec M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, M. Bruno Lescure, président de la commission des affaires économiques, et M. Alain Perea, vice-président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, pour examiner les crédits du projet de loi de finances pour 2018 consacrés à la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Cette commission élargie à quatre commissions, ce qui n'est pas si fréquent, obéit à un certain nombre de modalités d'organisation, qui ont été établies en conférence des présidents.

Madame la ministre, vous aurez dix minutes pour vous exprimer sur votre budget. Puis nous donnerons la parole aux rapporteurs des commissions – les rapporteurs spéciaux de la commission des finances, les rapporteurs pour avis des autres commissions – qui disposeront chacun de cinq minutes. Lorsque vous leur aurez répondu, les représentants des sept groupes parlementaires, puis les députés qui le souhaitent, vous poseront leurs questions ; ils auront deux minutes pour le faire.

Mes chers collègues, lorsque nous aurons terminé l'audition de Mme la ministre, nos commissions délibéreront séparément. Nous commencerons par celles qui ont le moins d'amendements. La commission du développement durable et celle des affaires économiques, qui n'en ont pas déposé, se prononceront immédiatement sur les crédits de la mission. La commission des finances, qui a déposé deux amendements, délibérera donc en troisième position. La commission des affaires culturelles, qui en a déposé vingt, délibérera donc en dernière position. Je vous demande donc de rester jusqu'à ce que votre commission se soit prononcée sur les crédits de cette mission.

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Monsieur le président Woerth, madame la ministre, messieurs les présidents des commissions du développement durable, des finances et des affaires économiques, mes chers collègues, l'examen de crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » en commission élargie offre chaque année au Parlement l'occasion d'un échange riche et ouvert sur l'action publique en matière d'enseignement supérieur et de recherche, qui concerne de nombreux départements ministériels et plusieurs des commissions permanentes de notre Assemblée.

Je me félicite que les crédits de la mission interministérielle atteignent l'an prochain un montant total de 27,4 milliards d'euros, soit une hausse de 2,6 % – 700 millions d'euros – qui bénéficiera en particulier aux actions en faveur de la réussite de tous les étudiants, ainsi qu'au soutien à la recherche sur projet et aux grands organismes de recherche.

Cette année, la commission des affaires culturelles et de l'éducation a nommé trois rapporteurs pour avis sur cette mission interministérielle : M. Philippe Berta pour l'enseignement supérieur et la vie étudiante, Mme Danièle Hérin et M. Pierre Henriet pour la recherche. Dans le cadre de leur rapport pour avis, ils se sont attachés à approfondir plus spécifiquement une thématique : pour l'enseignement supérieur, les communautés d'université et d'établissement (ComUE) ; pour le budget de la recherche, le soutien à l'innovation et à la culture scientifique et technique. Je tiens à les remercier ici pour le travail qu'ils ont réalisé sur ces thématiques, tout à fait importantes.

Mes chers collègues de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, je vous rappelle, comme l'a dit le président Woerth, qu'à l'issue de l'audition de Mme la ministre, nous nous réunirons pour examiner un certain nombre d'amendements et nous prononcer sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

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Messieurs les présidents, madame la ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs, chers collègues, la commission des affaires économiques, dont le rapporteur pour avis est M. Richard Lioger, de pouvoir examiner aujourd'hui les crédits des grands organismes de recherche qui dépendent des programmes 150, 172 et 193 de la mission « Recherche et enseignement supérieur » du projet de loi de finances pour 2018.

Nous nous félicitons nous aussi de la hausse des budgets dans leur ensemble, et de l'augmentation significative des crédits de paiements alloués aux trois programmes dont nous sommes responsables.

Je suis particulièrement sensible au fait que l'État confirme ses engagements en faveur des grands programmes européens, en particulier ceux menés dans le cadre de l'Agence spatiale européenne (ASE), et apporte un soutien décisif à l'Agence nationale de la recherche (ANR), principal opérateur public de financement de projets.

Madame la ministre, je souhaiterais terminer mon intervention en vous posant deux questions. La première porte sur l'évolution à moyen terme du budget français de la recherche, la seconde sur la recherche spatiale.

Le Gouvernement envisage-t-il de poursuivre l'effort financier de l'État sur l'ensemble de la mandature, ou tout au moins jusqu'en 2020, année d'achèvement de l'actuelle stratégie nationale de la recherche 2015-2020 ?

Enfin, où en est-on de l'avancement du projet Ariane 6 ? Alors qu'un certain nombre de nos concurrent privés, et notamment SpaceX avec des projets de vaisseaux spatiaux recyclables, multiplient les essais et les annonces médiatiques, pouvez-vous nous assurer que le modèle économique du lanceur européen est toujours aussi solide ?

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Madame la ministre, monsieur le président Woerth, chers collègues présidents de commissions, chers collègues députés, la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire est saisie pour avis des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». En son nom, M. Gérard Menuel a fait un rapport sur la recherche dans les domaines du développement durable et de la gestion des milieux et des ressources – programmes 172, 193 et 190 de la loi de finances. Le projet de ce rapport a été envoyé à tous les membres de cette commission élargie.

Il faut se féliciter de cet excellent budget. Grâce à des crédits supplémentaires de plusieurs centaines de millions d'euros, il permettra de financer de grandes infrastructures de recherche qui contribueront à faire de notre pays un pôle d'excellence, notamment dans le secteur du développement durable. C'est un effort financier remarquable.

La recherche est en effet la pierre angulaire de la transition écologique, comme nous le voyons au quotidien dans notre commission. Cependant, l'actualité récente a montré à plusieurs reprises – je pense aux débats sur les produits phytopharmaceutiques, comme les néonicotinoïdes ou le glyphosate – que les connaissances scientifiques sont encore très insuffisantes sur certains sujets majeurs de sécurité sanitaire, et que leurs sources sont parfois très contestées. Ces enjeux de santé publique mériteraient un investissement supérieur dans des recherches dédiées et indépendantes, pour que les débats de société et les décisions publiques soient mieux éclairés. Que pensez-vous, madame la ministre, de la suggestion de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) de créer, avec des moyens adéquats, un axe de recherche européen consacré à ces sujets de sécurité sanitaire ?

Je terminerai sur une question. Le projet de budget qui nous est présenté ne permet pas d'apporter de réponses aux difficultés que rencontrent certains de nos opérateurs pour renouveler leurs outils de recherche. Par exemple, aucune solution n'a encore été trouvée pour renouveler la flotte océanique française gérée par l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), alors même que nous connaissons toute l'importance que prendra dans les prochaines années l'exploration des mers et des océans. Qu'envisagez-vous pour l'avenir de cet important instrument de travail ?

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Messieurs les présidents, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, avant toute chose, je tenais à vous dire que c'est un plaisir d'être entendue ce soir par la représentation nationale, a fortiori parce que c'est le premier budget de ce nouveau mandat présidentiel. L'exercice a été d'autant plus stimulant que, étant entrés en responsabilité en mai dernier, nous n'avons eu que quelques semaines pour procéder aux arbitrages permettant de vous présenter les objectifs et les moyens des politiques publiques dont j'ai la charge.

Conformément aux souhaits du Président de la République et du Premier ministre, nous avons travaillé pour vous présenter une mission « Recherche et enseignement supérieur » en trois dimensions : sincère dans sa méthode, ambitieuse dans ses objectifs, et engagée dans le mouvement de transformation souhaité par le Président de la République et par nos concitoyens pour les cinq années à venir.

L'ambition de cette mission traduit aussi la volonté de transformation du Gouvernement en matière d'enseignement supérieur et d'amélioration des conditions de vie des étudiants. Pour 2018, je vous présente donc un budget de 24,5 milliards d'euros au total, soit des crédits en croissance nette de 707 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

Cette mission est par nature dédiée à l'avenir, et cette année encore plus que jamais. En effet, nous nous sommes engagés sur une trajectoire triennale, qui portera les crédits de la mission à 28 milliards d'euros à l'horizon 2020, soit un effort de 3,5 milliards d'euros, dont je serai garante.

Notre jeunesse et nos étudiants sont les sources vives de l'avenir de notre pays. C'est pourquoi le premier poste de dépenses pour 2018 est consacré à l'enseignement supérieur, avec 13,4 milliards d'euros. Les crédits du programme 150, dédié à l'enseignement supérieur, augmenteront de 194 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, et la baisse du taux de mise en réserve décidée par le Premier ministre permettra de débloquer en gestion 40 millions d'euros supplémentaires, ce qui permettra de porter l'effort réel à 234 millions d'euros.

Concernant plus spécifiquement le budget des universités, celui-ci prévoit une hausse de 175 millions d'euros supplémentaires, dédiés, dans le principe du respect de l'autonomie, à soutenir le fonctionnement des universités. Ces 175 millions s'ajoutent aux 100 millions qui étaient présents dans le PLF pour 2017 pour accompagner l'accroissement démographique et qui se retrouvent donc dans le PLF pour 2018.

Afin de financer les projets de réhabilitation de l'immobilier des universités, dans le cadre des contrats de plan État région, et la suite de l'opération Campus, une enveloppe de 343 millions d'euros sera consacrée à l'immobilier, en hausse de 59 millions d'euros.

Nous avons aussi souhaité consacrer 2,7 milliards d'euros à la vie étudiante, au titre du programme 231. Le niveau de vie des étudiants a été soutenu par le gel des droits d'inscription et du prix du ticket de restaurant universitaire à la rentrée 2017, et un volet du plan national de vie étudiante (PNVE) vise à réduire le coût de la rentrée 2018 et à améliorer les conditions de vie de nos étudiants. Nous aurons l'occasion de présenter cette réforme devant le Parlement.

Les étudiants les moins favorisés bénéficieront d'une aide de l'État de 2,1 milliards d'euros, directement consacrés aux aides sociales, pour verser des bourses sur critères sociaux à près de 725 000 étudiants, soit 15 000 étudiants supplémentaires, en 2018.

Le format de la mission permet également de financer en année pleine la mise en place de l'aide à la mobilité en master, et de conforter le financement de l'aide à la recherche du premier emploi.

Ces moyens seront mis au service de la transformation du premier cycle, afin d'offrir à chaque étudiant un contrat pédagogique de réussite. Je ne reparlerai pas de l'échec du système qui a conduit cette année à tirer au sort les étudiants pour qu'ils accèdent à l'enseignement supérieur, système que j'ai dénoncé dès le mois de juillet, avant que cet échec ne soit confirmé par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), puis par la Cour des comptes. Je me contenterai de rappeler que 70 % des étudiants échouent à obtenir la licence en trois ans, et que 60 % échouent à l'obtenir en quatre ans. Je ne souhaite pas que l'échec reste l'horizon indépassable de la vie de la majorité de nos étudiants. C'est pourquoi je porterai une réforme en ce sens.

La situation des bacheliers technologiques et professionnels demeure préoccupante. Ils restent les grands évincés du système actuel, et là encore, nous devons y apporter une réponse prompte et ferme.

Il s'agira donc de mieux orienter, de mieux accompagner les étudiants, et d'offrir des solutions adaptées aux talents de chacun, ainsi que de réelles chances d'insertion professionnelle pour tous. Un rapport m'a été remis le 19 octobre dernier, suite à une concertation qui avait débuté le 17 juillet. À l'heure actuelle, je poursuis le dialogue en lien avec tous les acteurs de cette concertation et avec le Premier ministre, afin que nous puissions construire cette réforme et la présenter très prochainement.

Le budget consacré à la recherche illustre aussi la méthode que j'ai souhaité appliquer. Mon souhait est de construire une politique de recherche et d'innovation qui contribue à ouvrir le regard de nos concitoyens sur les prouesses scientifiques et économiques dont nos chercheurs et enseignants chercheurs sont capables.

L'objectif a donc été de fixer le budget de la recherche à 8,4 milliards d'euros pour 2018, soit une augmentation de 501 millions d'euros, ce qui représente 6,3 % de crédits de paiement supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

Nombreux sont ceux qui ont tendance à opposer les financements par projet aux financements de base. Au-delà des querelles théoriques, le seul sujet qui compte pour moi est de garantir aux chercheurs les moyens dont ils ont besoin pour travailler efficacement sans séparer les moyens des projets et les résultats. C'est pourquoi les moyens des organismes de recherche seront portés en 2018 à 5,94 milliards d'euros, en hausse de 70 millions d'euros, dont 25 millions seront directement affectés aux laboratoires.

Cet effort traduit une volonté d'apporter de l'oxygène à notre recherche, en budgétant les moyens au meilleur niveau possible.

Cet effort budgétaire traduit aussi une autre exigence, celle d'apurer les dettes structurelles qui proliféraient dans un certain nombre d'organismes de recherche, notamment internationaux, sans pour autant fragiliser leur capacité d'investissement.

La progression des crédits permettra d'accroître le financement des appels à projet de l'Agence nationale de la recherche (ANR) qui seront renforcés de 140 millions d'euros, portant son budget global à 750millions d'euros. Les instituts Carnot verront, quant à eux, leurs crédits augmenter de 8,8 %. Ces instituts fonctionnent selon une mécanique vertueuse, l'abondement public venant en soutien de projets issus de financements privés, selon les résultats du laboratoire. Un tel modèle donne d'excellents résultats.

Les crédits de la mission couvriront en 2018 l'intégralité des charges réelles. Il n'y a pas de sous-budgétisation ni de reports de charges masqués. Les charges réelles seront donc bien couvertes par des crédits réels. À cet égard, mesdames et messieurs les députés, j'appelle votre attention sur le fait que, cette année, le glissement vieillesse technicité (GVT) est intégralement budgété, ce qui est une première et représente environ 50 millions d'euros. J'ai la ferme conviction que seule une méthode budgétaire fondée sur la sincérité pourra permettre d'atteindre et de réaliser les objectifs ambitieux de politique publique.

Ce budget 2018 permet de poser des jalons pour la suite du quinquennat, à travers la mobilisation du Grand Plan d'investissement qui sera sollicité à hauteur de 1,5 milliard d'euros pour la transformation de l'enseignement supérieur, à hauteur de 2,4 milliards d'euros pour la recherche, et de 3,6 milliards d'euros pour l'innovation. Des programmes de recherche prioritaires, ainsi que des équipements de recherche, seront ainsi financés. L'Agence nationale de la recherche sera l'un des opérateurs de ce Grand Plan d'investissement.

Le ministère accompagnera les politiques de valorisation, afin de faire de ces moyens financiers des leviers d'entraînement économique.

Pour conclure, je vous dirai que ce budget est au service de la réussite des étudiants, du maintien de la puissance scientifique française, et enfin du soutien à l'innovation-dans tous ses aspects – enseignement supérieur, recherche ou développement économique.

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Madame la ministre, je vous félicite d'avoir parfaitement respecté le temps qui vous était imparti. Avant de donner la parole à Mme de Montchalin, je voudrais vous poser une question relative aux droits d'inscription. Cette question revient fréquemment, et le Gouvernement s'est déjà exprimé dessus, du moins en partie. Pouvez-vous donc me dire quels en seront les enjeux financiers, dans les années qui viennent ? Vous me répondrez si vous le souhaitez, au moment qui vous paraîtra le plus opportun.

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Je tiens à préciser d'emblée que la liste des personnes auditionnées mentionnées dans le rapport n'est pas complète. Les idées qui sont exprimées dans ce rapport – qui n'est pas définitif – peuvent donc venir d'autres personnes que celles qui ont été citées.

Dans le cadre de la stratégie Horizon 2020, la France, ainsi que ses partenaires européens, ont réaffirmé l'objectif d'une dépense intérieure de recherche et de développement atteignant 3 % du PIB en 2020. Actuellement, la France se situe aux alentours de 2,2 %, ce qui constitue un progrès, mais montre aussi que nous avons encore du chemin à parcourir.

Les crédits de la mission vont s'accroître de plus de 700 millions d'euros, dont 500 millions pour la partie « recherche », dont les sept programmes bénéficient de 11,5 milliards d'euros, dans la continuité de l'effort déjà entrepris en 2017.

Ce budget continuera à augmenter pour atteindre 28 milliards d'euros en 2020. Ainsi, en trois ans, l'effort du Gouvernement et de la majorité en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche atteindra près de 3,5 milliards d'euros.

Au-delà de l'effort budgétaire, je voudrais saluer, madame la ministre, un budget sincère qui met fin à la plupart des sous-budgétisations chroniques, que ce soit vis-à-vis des organismes internationaux – je pense en particulier à l'Agence spatiale européenne (ASE) –, mais aussi vis-à-vis des personnels et des chercheurs puisque le GVT est, pour la première fois, pleinement pris en compte.

Par ailleurs, alors que les chercheurs, les syndicats et les responsables des centres de recherche, que j'ai rencontrés tout au long de cet automne, nous alertent régulièrement sur la nécessité de maintenir des financements récurrents de fonctionnement pour les laboratoires, 25 millions d'euros qui vont venir abonder ces moyens récurrents. L'ambition de ce budget semble claire et elle est positive : il s'agit enfin de donner vraiment des moyens aux chercheurs, et non d'embaucher à tout prix davantage de chercheurs. Ces moyens seront complétés par des ressources du Grand Plan d'investissement, à hauteur de 2,4 milliards d'euros sur cinq ans. Des programmes de recherche prioritaires, ainsi que des équipements de recherche seront ainsi financés.

Mais ce budget ne tombe pas non plus dans le piège qui consisterait à opposer systématiquement financements récurrents et appels à projets. L'ANR est en effet un outil utile pour favoriser le développement et l'excellence de nombreux programmes de recherche en appui de la stratégie nationale de recherche. Ce qui a dysfonctionné au cours des dernières années est avant tout lié à une raréfaction des crédits qui a conduit à un effondrement du taux de sélection : l'ANR ne peut remplir correctement son rôle lorsque celui-ci descend à 10 % ou 12 %. Il faut qu'il soit de 20 % minimum, et c'est dans cette optique que le budget alloue 133 millions d'euros supplémentaires à l'ANR cette année.

Je voudrais cependant souligner que les financements de l'ANR posent également un autre problème qui est celui des coûts overhead, ou coûts indirects, qu'il faut nécessairement inclure pour financer dans leur totalité les projets de recherche. La moyenne européenne est aujourd'hui comprise entre 20 % et 25 % du total des financements accordés à un projet, alors que nous sommes souvent à moins de 10 %. Cela ne suffit pas pour que les laboratoires financent complètement ces projets et les vivent comme de bonnes nouvelles.

Le crédit d'impôt recherche (CIR) est le second point que je souhaite aborder. Son montant estimé pour 2018 est de 5,8 milliards d'euros. Certes, sa neutralité sectorielle est un vrai avantage. Néanmoins, il serait intéressant, à la fois pour localiser la recherche en France, mais aussi pour stimuler une embauche de jeunes docteurs sortant de nos meilleurs laboratoires, de renforcer son articulation avec l'ensemble de notre politique industrielle et d'innovation. Voilà pourquoi j'ai l'intention de déposer un amendement visant à demander aux entreprises, dans le cadre de leur déclaration de CIR, de présenter en détail leur politique de recrutement liée à leur projet de recherche, en insistant notamment sur la part de jeunes docteurs diplômés en France. Je crois en effet que la publication de ces pratiques de recrutement peut contribuer à faire changer les comportements.

Je conclurai en disant que l'architecture budgétaire de la mission et la coopération des différents acteurs ne sont pas toujours, c'est un euphémisme, d'une clarté parfaite. L'autonomie n'a de sens que si les acteurs bénéficiaires de cette autonomie s'en emparent pour se différencier, et non pour démultiplier sans limites les mêmes projets sans réelle coordination. Il est essentiel désormais de rétablir les grands organismes de recherche dans leur rôle de fer de lance de la conduite des grands projets de recherche en appui d'une stratégie nationale cohérente.

Ce constat d'un émiettement excessif des programmes de recherche – je pense par exemple au plan « Cancer » conduit par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) et répliqué par certaines universités avec le soutien des collectivités locales, comme celle de Bordeaux – peut également être fait en ce qui concerne les institutions de valorisation de la recherche comme les instituts Carnot, les sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT), les instituts de recherche technologique (IRT) ou les pôles de compétitivité. La superposition et la multiplication des acteurs et des structures de financement – initiatives d'excellence (IDEX), laboratoires d'excellence (LABEX), Programme d'investissements d'avenir (PIA), Commissariat général à l'investissement (CGI), ANR – constituent un obstacle à la lisibilité et à l'efficacité de notre système de recherche. Il semble également très important de comprendre comment votre budget va s'articuler avec le Grand Plan d'investissement et avec le fonds pour l'innovation de rupture annoncé par Bruno Le Maire. Il y a, me semble-t-il, un vrai travail à faire pour revoir et simplifier l'ensemble de la chaîne qui conduit de la recherche fondamentale au développement commercial, en passant par la recherche appliquée et par l'innovation. À chaque étape, nous avons des idées, mais les dysfonctionnements demeurent.

Madame la ministre, pourriez-vous nous préciser quels sont vos projets, d'une part pour réorganiser les coopérations entre centres de recherche, laboratoires et université, d'autre part pour rationaliser les nombreuses structures de valorisation de la recherche qui existent actuellement, et dont certaines ont créé plus de complexité que de résultats ?

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Messieurs les présidents, madame la ministre, mesdames et messieurs, dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la vie étudiante, les enjeux pour la compétitivité du pays et l'épanouissement de la jeunesse sont considérables. L'économie de la connaissance est plus que jamais une réalité, et doit s'appuyer sur un système d'enseignement supérieur et de recherche performant et adaptés aux marchés de demain. En outre, la qualité et l'effectivité de l'insertion professionnelle des étudiants sont étroitement corrélées à l'obtention d'un diplôme supérieur.

Nous savons que les défis à relever en cette matière sont nombreux, et l'actualité récente nous le rappelle. Le premier été du quinquennat a en effet été marqué par des dysfonctionnements majeurs autour de la plateforme d'accès à l'enseignement supérieur, Admission Post Bac (APB), sévèrement jugés par la CNIL et par la Cour des comptes, et révélateurs des lacunes profondes du système de l'enseignement supérieur.

Nous faisons aujourd'hui le constat d'une orientation inadaptée qui se double d'une sélection par l'échec, inacceptable pour les jeunes qui veulent poursuivre des études, et pour notre Nation dans son ensemble. Si les estimations économiques sur le coût de ce gâchis varient selon les sources, il est certain que plusieurs centaines de millions d'euros pourraient être économisées et utilisées à de meilleures fins si les lacunes du système en matière d'orientation et d'information des lycéens et des collégiens étaient comblées.

Lorsqu'une politique publique ne donne pas les résultats escomptés, deux réponses sont généralement proposées : la réponse « il faut plus de crédits ! », qui n'interroge pas toujours sur l'efficience de la dépense publique et l'optimisation des services rendus aux citoyens ou aux usagers ; la réponse « il faut faire plus et mieux avec moins ! », qui se révèle dans certaines situations décourageante et contre-productive pour les opérateurs concernés, et qui freine l'implication et la motivation des acteurs de terrain.

Nous voulons éviter ces deux écueils, non seulement en accompagnant budgétairement les opérateurs, autant que le contexte général des finances publiques nous y autorise, tout en transformant profondément un système qui, par de nombreux aspects, se révèle à bout de souffle et très inefficient.

Le budget 2018 traduit et concilie à mon sens ces deux aspirations.

D'une part, les crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » vont s'accroître de plus de 700 millions d'euros en 2018, dont 234 millions d'euros pour la partie « Enseignement supérieur ». Ils atteindront ainsi 27,6 milliards d'euros en crédits de paiement, dont 16,1 milliards pour les deux programmes qui regroupent les dépenses de l'enseignement supérieur et de la vie étudiante. Ce budget augmentera encore en 2019 et en 2020.

Ces moyens seront également renforcés par les crédits prévus dans le grand plan d'investissement (GPI), qui consacrera au cours du quinquennat 1,55 milliard d'euros à l'enseignement supérieur, dont 450 millions qui seront alloués à la réforme des cursus universitaires, en particulier à la diversification des parcours en premier cycle et à la réforme du système d'orientation. Nous le savons : les capacités d'absorption du système arrivent aujourd'hui à saturation et ce système est devenu profondément inégalitaire. Ainsi, alors que dans les formations courtes professionnalisantes comme le diplôme universitaire de technologie (DUT) et le brevet de technicien supérieur (BTS), le taux de passage entre la première et la deuxième année est élevé, de plus de 75 %, il n'est que de 40 % en licence, avec de très fortes inégalités entre les étudiants issus d'un baccalauréat général, d'un baccalauréat technologique ou d'un bac professionnel, ces derniers n'étant que 6 % à passer en deuxième année.

De ce point de vue, la réforme visant à instaurer des prérequis et à accompagner les élèves grâce à un véritable « contrat de réussite » passé avec chacun d'entre eux, ainsi que le développement des filières professionnelles, permettront non seulement d'éviter un gâchis humain mais également de contribuer à une diminution de la pression démographique sur les universités, dont je rappelle qu'elle va se traduire par l'arrivée de 350 000 étudiants supplémentaires d'ici dix ans. Pourriez-vous, madame la ministre, nous préciser votre engagement à créer 100 000 places supplémentaires dans de nouvelles filières courtes professionnalisantes ?

Par ailleurs, le développement des ressources propres des établissements m'apparaît être un autre enjeu majeur pour le financement de l'enseignement supérieur. Si la voie des fondations est encore embryonnaire et sans doute peu adaptée au contexte culturel français, le développement de la formation continue apparaît comme une voie prometteuse, insuffisamment déployée dans nos universités dans une période de mutations économiques profondes.

Sur l'ensemble des questions touchant au développement des ressources propres des établissements, pourriez-vous nous indiquer vos pistes de travail, madame la ministre, notamment en ce qui concerne le développement indispensable de la formation continue ?

Enfin, je conclurai en évoquant la vie étudiante et les aides accordées aux étudiants. Dans le cadre du projet de budget pour 2018, le choix a été fait de maîtriser les charges qui pèsent sur les étudiants : gel des droits d'inscription, du ticket de restaurant universitaire et des loyers des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS). Ces mesures de stabilisation des coûts pour les étudiants sont tout à fait légitimes. Parallèlement, il existe un besoin massif de nouveaux logements étudiants et de maintien des moyens des CROUS pour assurer des conditions de vie dignes à nos étudiants.

À cet égard, le grand plan d'investissement prévoit la construction de 60 000 logements pour les étudiants et de 20 000 logements pour les jeunes actifs. C'est un effort considérable, mais il peut être nécessaire d'aller encore plus loin. Le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) pourrait par exemple amplifier son effort de construction dans les années à venir si l'État s'engageait financièrement ou par la mise à disposition de foncier. De manière générale, les CROUS, déjà pénalisés par le gel du ticket de restauration, ne pourront assumer éternellement une hausse de leurs dépenses sans une hausse correspondante de leurs moyens humains et financiers.

Pourriez-vous nous préciser, madame la ministre, quelle sera la stratégie du Gouvernement pour que le CNOUS et les CROUS continuent à bénéficier des moyens nécessaires pour maintenir la qualité de leurs services et amplifier leurs efforts en faveur de la construction de nouveaux logements ?

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J'ai conduit cette mission d'avis sur les crédits de la recherche en collaboration avec Pierre Henriet. Depuis plusieurs années, les organismes nationaux de recherche des universités souffrent de plusieurs handicaps : une politique de financement sur projets mise en place par l'Agence nationale de la recherche (ANR), qui bénéficie à des équipes de recherche au détriment des soutiens de base aux laboratoires, un faible taux de sélection des projets soumis par les chercheurs à l'ANR qui décourage les chercheurs, en particulier les jeunes, une diminution des crédits accordés aux établissements de recherche, des suppressions de postes d'enseignant-chercheur et de chercheur, des créations d'emploi qui, de fait, se traduisent par l'utilisation de la masse salariale correspondante pour combler les augmentations de salaire décidées – mais non compensées – par l'État dans le cadre du glissement vieillesse-technicité (GVT). Il en résulte souvent des départs à la retraite non remplacés.

Ces dix dernières années, le budget de la recherche est resté stable à coûts constants, et a donc diminué du fait de l'évolution du coût de la vie. Nous nous réjouissons, madame la ministre, que dès votre premier budget du quinquennat, vous apportiez des solutions à ces freins à la recherche en augmentant de manière significative le budget qui lui est consacré. En effet, les crédits accordés à l'ANR augmenteront de 32,7 millions d'euros, permettant ainsi la hausse du taux de sélection des projets pour les chercheurs. Les crédits attribués au soutien de base seront augmentés de 25 millions d'euros, ce qui permettra aux laboratoires et aux établissements d'assurer un fonctionnement plus harmonieux entre les équipes d'un même laboratoire, et d'aider en particulier les jeunes chercheurs. Les retards de remboursement du GVT seront compensés, ce qui résout enfin le déficit de fonctionnement des établissements et qui permettra de stopper l'hémorragie des postes. L'interaction entre les universités et les organismes nationaux de recherche dans le cadre des travaux des unités mixtes de recherche (UMR) est l'une des clés de l'excellence de la recherche française. Ces UMR permettent de faire travailler ensemble les organismes qui mènent une politique nationale de recherche avec les universités, lesquelles mènent une politique de territoire. La collaboration de ces deux politiques fait la force de la recherche française. Quelle évaluation comptez-vous faire, madame la ministre, de l'utilisation de ces augmentations de crédits du soutien de base ?

Nous avons centré notre mission d'avis sur les crédits de la recherche autour de deux aspects : l'innovation et la culture scientifique, technique et industrielle. L'innovation, tout d'abord : à votre ministère de plein exercice qui regroupe l'enseignement supérieur et la recherche a été ajouté pour la première fois le terme d'innovation. On peut s'en réjouir, étant donné l'importance et l'impact que la recherche peut avoir sur l'économie. En effet, il faut souligner qu'un euro investi dans la recherche génère une valeur ajoutée de 3,81 euros, et qu'un emploi créé dans ce secteur se traduit par la création de 3,2 emplois induits dans l'économie.

Vous avez par exemple augmenté la participation de l'État dans les instituts Carnot, d'où un abondement de fonds privés et publics afin de valoriser la collaboration entre la recherche et l'entreprise. Quelles mesures pensez-vous prendre pour inciter au transfert de la recherche vers l'entreprise, en particulier pour favoriser l'innovation, et pour inciter à la création de start-up issues de laboratoires ?

Enfin, la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle et la vulgarisation de la recherche s'avèrent indispensables pour le citoyen mais aussi parmi les élèves et les étudiants. Le citoyen est confronté à la remise en cause de preuves scientifiques concernant la théorie de l'évolution, l'efficacité des vaccins ou le réchauffement climatique. Les étudiants et plus particulièrement les étudiantes s'éloignent aujourd'hui des carrières scientifiques. Le financement de la culture scientifique, technique et industrielle est actuellement réparti entre plusieurs structures nationales et dans les régions : il est difficile, dans ces conditions, de distinguer la cohérence de cette politique.

Troisième et dernière question : comment pensez-vous assurer le suivi et l'évaluation du budget de la culture scientifique, en particulier de la stratégie nationale de la culture scientifique adoptée en mars ?

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Je ne reviendrai pas sur l'évolution des crédits du budget de l'enseignement supérieur que mon collègue de la commission des finances a déjà présentés. À l'augmentation de 200 millions d'euros, je serais néanmoins tenté d'ajouter les 142,5 millions d'euros ouverts sur le programme 421 « Soutien des progrès de l'enseignement et de la recherche » de la mission « Investissements d'avenir », qui bénéficient dans leur quasi-totalité à des établissements relevant du ministère de l'enseignement supérieur. Un rattachement de ce programme à la mission « Recherche et enseignement supérieur » permettrait d'ailleurs une plus grande lisibilité de cette politique publique si importante pour l'avenir de notre pays.

J'ai souhaité consacrer mon rapport à la question des regroupements d'universités, et plus précisément aux communautés d'universités et d'établissements (ComUE), dispositifs créés par la loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, dite « loi Fioraso ». La volonté de mettre en cohérence les acteurs de l'enseignement supérieur et de la recherche d'un territoire est une ambition déjà ancienne et légitime pour gagner en complémentarité et en lisibilité, pour accroître notre potentiel de recherche et pour susciter diverses innovations pédagogiques. Cette loi fait suite à l'instauration des pôles universitaires européens auxquels avaient succédé les pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) en 2006. La loi Fioraso propose trois modalités de regroupement visant les universités, les écoles d'ingénieurs et les établissements de recherche : la possibilité de fusion, la possibilité d'association et la structuration en ComUE. Notre rapport ne porte que sur ce dernier objet de regroupement, la ComUE, qui est le mode retenu par une vingtaine de sites.

La mise en place des ComUE aurait pu offrir l'occasion de nouvelles formations interdisciplinaires, d'un accès au titre de master-ingénieur, d'un transfert de bonnes pratiques de professionnalisation entre écoles et universités, d'un continuum entre recherche fondamentale et recherche appliquée, d'un potentiel accru de valorisation, ou encore d'une généralisation des meilleures offres de plateformes à destination de la vie étudiante. Or, si des avancées ont été observées dans ces directions, grâce en particulier au renforcement unanimement salué du dialogue entre les acteurs des sites, le dispositif demeure parcouru de tensions.

À l'origine de ces tensions se trouvent des objectifs multiples, parfois contradictoires dans leur mise en oeuvre, avec un calendrier contraint qui a d'emblée affecté ces nouvelles structures. L'un des principaux facteurs de complexité auxquels se heurtent les acteurs était et reste la concomitance de la création de ce cadre juridique pour une meilleure coordination territoriale des acteurs d'une part, et du lancement du deuxième plan d'investissement d'avenir (PIA) par le Commissariat général à l'investissement qui vise l'excellence et la visibilité à l'internationale d'autre part. Les acteurs auditionnés ont souvent regretté le manque d'articulation des messages délivrés par le commissariat général à l'investissement rattaché au premier ministre et chargé du pilotage des investissements d'avenir avec les messages délivrés par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui pilote les politiques de site. Dès lors, si la coordination territoriale peut reposer sur un modèle de ComUE dit « de services », qui développe des actions communes entre les membres, le jury international qui, de son côté, attribue les IDEX et les I-SITES pour le plan d'investissements d'avenir, promeut une gouvernance toujours plus intégrée. La volonté de coopération accrue des acteurs, née avec les ComUE, se trouve de plus limitée par un cadre juridique conduisant à une gouvernance pour le moins complexe. Les exigences du PIA pour le maintien des IDEX et des I-SITES renforcent l'urgence d'une réforme pour les regroupements concernés.

Cette évolution s'explique par le mélange sous-jacent entre la volonté de maintenir un enseignement de proximité et la volonté de créer des champions internationaux, qui engendre des difficultés dans l'application de ces deux objectifs. On peut choisir de les poursuivre en même temps, mais cela implique de mettre chacune de leurs logiques pleinement en oeuvre sur un périmètre défini ; on ne saurait se contenter d'un entre-deux tiède sur un périmètre global, qui ne serait satisfaisant ni pour l'un ni pour l'autre de ces objectifs. Il nous faut clarifier le modèle auquel nous souhaitons parvenir, nos priorités, notre but, puis déterminer les moyens et le périmètre pour les atteindre.

Le temps de la réforme est donc venu et le Gouvernement, partageant cette analyse, semble décidé à donner une place importante à l'expérimentation, une solution pragmatique qui permet de repartir du terrain.

Quelle appréciation portez-vous sur l'articulation entre l'exercice ComUE et l'exercice PIA ? En d'autres termes, considérez-vous que votre ministère a suffisamment de poids sur les critères d'attribution des crédits du PIA ?

Plus généralement, quel jugement portez-vous sur l'outil que constituent les ComUE ? S'agit-il juste d'une couche bureaucratique supplémentaire ou bien d'une étape nécessaire ayant permis d'insuffler une dynamique qu'il convient maintenant d'amplifier ?

Quels sont les projets du Gouvernement sur ce sujet ? En quoi consistera l'expérimentation ? À quelles obligations organisationnelles les établissements pourront-ils déroger ? Enfin, quel calendrier envisagez-vous ? N'est-il pas nécessaire d'accélérer le mouvement, les attentes des établissements étant des plus fortes en ce domaine ?

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Mon parcours professionnel comme président d'université puis au CNRS m'avait rendu, en tant qu'enseignant-chercheur, particulièrement sensible à la question des grands organismes de recherche, mais, pendant près de dix ans, j'ai pris quelque distance par rapport à ce milieu. J'avoue avoir retrouvé un milieu assez apaisé. Les intervenants précédents ont déjà dit beaucoup de choses et je tâcherai donc de faire preuve d'originalité. Il y a une dizaine d'année, le rapport entre les universités et les centres de recherche était extrêmement tendu. Comme l'a rappelé Mme Hérin, c'est pourtant l'une des solutions d'avenir de l'enseignement supérieur et de la recherche, en particulier au niveau régional, étant donné le bon travail qu'accomplissent de concert les grands organismes de recherche et les universités. Je tiens à souligner cette profonde amélioration, même s'il reste des progrès à faire.

Je salue à mon tour l'effort du Gouvernement concernant le budget de l'État affecté à la recherche. Mme la ministre en a rappelé le montant : 27,67 milliards d'euros, soit une hausse de plus de 700 millions d'euros par rapport à 2017. Je me félicite tout particulièrement des moyens alloués à l'Agence nationale de la recherche, qui est le principal opérateur du financement sur projets. Rappelons qu'en 2013 et 2014 l'Agence avait souffert de deux baisses consécutives de 12 % des dotations de l'État ; la situation s'est progressivement rétablie en 2015, mais il subsistait encore un certain nombre de problèmes concernant les crédits de paiement.

Pour pouvoir honorer ses échéances de paiement, l'opérateur en a été réduit à fortement solliciter sa trésorerie, actuellement proche de zéro. Il était donc temps de mettre un terme à cette anomalie ; c'est pourquoi je me félicite que la dotation de l'ANR en crédits de paiement soit relevée de plus de 20 % pour atteindre 733 millions d'euros.

Aux côtés des activités des organismes de recherche spécialisés, l'ANR doit s'affirmer aujourd'hui plus que jamais comme le guichet central du financement de l'excellence scientifique. Au-delà des seuls crédits alloués, il faut faire en sorte que le soutien accordé à un projet s'accompagne de la couverture de coûts indirects par les établissements hébergeurs – Amélie de Montchalin a abordé tout à l'heure cette question du préciput, et nous sommes ravis de constater qu'avec l'augmentation de ses crédits, l'ANR, lors de son audition, s'est déclarée tout à fait prête, si elle y est autorisée, à augmenter aux alentours de 20 % les préciputs qui sont non seulement très importants pour les laboratoires de recherche, mais aussi pour le fonctionnement des universités.

Au-delà de l'ANR, je souhaiterais, madame la ministre, évoquer brièvement la situation financière des organismes de recherche spécialisés. La dotation de la plupart d'entre eux a été revalorisée ; ils vous en remercient et vous félicitent. Entre 2017 et 2018, l'augmentation est de 26,7 millions pour le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et de 5,7 millions pour l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA). Ces différentes hausses aideront les organismes à couvrir le fameux glissement vieillesse technicité. En même temps, j'ai été très impressionné par la manière dont ils ont abordé cette question du GVT : tous ont trouvé les ressources pour payer ces frais supplémentaires qui correspondent à l'évolution naturelle des carrières ; il faut à cet égard souligner le travail accompli par l'ensemble des organismes de recherche et par les universités pour bien maîtriser leurs masses salariales.

Permettez-moi toutefois de citer l'exemple de l'INRIA, un institut de pointe dans le domaine numérique qui, compte tenu de la mise en réserve de ses crédits que l'État a appliquée pour un montant de 2,7 millions d'euros, a reçu une dotation inférieure à son montant de 2013, dans un cadre budgétaire contraint ; les effectifs scientifiques de l'INRIA ont diminué de près de 9 % entre 2013 et 2016, bien que la plupart des chercheurs et des directeurs d'organismes de recherche savent qu'il faut constamment continuer à recruter et éviter toute interruption d'une année sur l'autre, car la recherche scientifique nécessite un renouvellement régulier et un apport de jeunes chercheurs.

L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), dont la subvention pour 2018 est supérieure de 7 millions d'euros à celle qui avait été prévue en 2017, n'est pas certain de pouvoir financer l'intégralité des grandes missions qui lui incombent à la demande du précédent gouvernement. Pour un organisme de recherche, la mise en réserve, même à des taux réduits, des crédits alloués par la loi de finances peut obérer sensiblement ses capacités d'intervention. Il serait donc souhaitable que le Gouvernement applique peu, voire pas du tout, cette procédure de gel aux établissements les plus en difficulté.

Enfin, une partie de mon avis budgétaire est consacré cette année aux instituts de recherche technologique. Comme les précédents rapporteurs, j'invite à la rationalisation de cette valorisation de la recherche. Les gouvernements successifs ont créé des outils dont certains sont certes très efficients mais le moment est venu d'en dresser le bilan.

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Les enjeux environnementaux comme la gestion des milieux et des ressources ou la lutte contre le changement climatique devraient constituer une source de mobilisation budgétaire. Le sont-ils réellement ? Les mesures qui permettent de concrétiser nos ambitions sont-elles prioritaires dans ce PLF ? Dans un contexte contraint et en ne portant un premier regard que sur le seul programme 172 consacré aux recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires, la réponse est affirmative. Le programme 172 augmente de 3,2 % en autorisations d'engagement et de 5,4 % en crédits de paiement. Le programme 193 consacré à la recherche spatiale serait renforcé de 155 millions d'euros, tenant ainsi compte, entre autres, du besoin de développement des satellites de météorologie. Le programme 190 relatif à la recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et des mobilités durables, affiche une progression de 57 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 23,6 millions en crédits de paiement. L'effort budgétaire est donc réel. Traduit-il pour autant l'augmentation nécessaire des moyens de la recherche publique française ? Les budgets concernant ces secteurs sont déjà des budgets de rattrapage, et je veux étayer ces informations par quelques exemples concernant le programme Horizon 2020.

L'Union européenne a retenu une stratégie mise en oeuvre sur le plan national par l'ANR, qui décline dans ses actions et sa coordination ces engagements stratégiques liés, en particulier, au changement climatique mais aussi à la promotion des énergies propres, au renouveau industriel, à la sécurité alimentaire, au défi démographique ou encore aux transports et systèmes urbains durables. Ces engagements déclinés en actions mériteraient nettement plus de moyens pour répondre aux objectifs environnementaux. Cependant, en interrogeant l'ANR et les différentes institutions concernées par le déploiement de crédits, il apparaît manifestement que la notion de développement durable est bien intégrée à chacune des missions affectées aux différents instituts. Cela se vérifie par exemple au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) avec les recherches sur les batteries au lithium, sur le photovoltaïque ou encore sur la filière hydrogène. C'est aussi vrai à l'Institut français du pétrole Énergies nouvelles (IFP-EN) au sujet de l'éolien en mer, des moteurs à énergie électrique et les biocarburants de nouvelle génération.

Je veux toutefois mettre en garde les commissaires concernant les crédits de fonctionnement alloués aux opérateurs de recherche. L'évolution des dotations annuelles accordées à plusieurs d'entre eux les ont amenés à des restructurations internes et à d'importants efforts en termes de fonctionnement, alors qu'ils sont légitimement sollicités pour de nombreuses missions nouvelles : je pense à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), à l'INSERM, à l'Institut national de recherches en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA), à l'IFP-EN et au CEA pour sa partie relative aux énergies alternatives.

Dans le contexte actuel, l'ANSES, qui est de plus en plus sollicitée, n'aura pas les moyens de s'adapter aux variations des flux des dossiers, et cela devient un problème structurel. L'IRSTEA, quant à lui, se trouve confronté à des pratiques de financement institutionnel qui pèsent fortement sur ses équilibres financiers. Comme d'autres opérateurs de recherche, cet institut ne parvient même pas à couvrir les frais de personnel correspondant aux appels à projets publics émanant des ministères opérationnels. Consciente de ce problème, l'ANR a mis en place des mécanismes pour prendre en charge une partie des coûts indirects incombant à ces établissements publics lorsque les contrats relèvent d'appels à projets.

Depuis plusieurs années, l'IFP-EN consent des efforts de gestion interne considérables tout en engageant des recherches partenariales dans le secteur des énergies vertes. Cet institut reçoit au titre du programme 190 une dotation de quelque 130 millions d'euros et bénéficie de recettes propres supérieures à ce montant, qui proviennent notamment des redevances payées pour l'exploitation de ses onze mille brevets vivants et des dividendes versés par ses différentes filiales. Pourtant, ces ressources propres, qui varient sensiblement d'une année à l'autre, ne suffisent plus pour compenser la baisse continue, dans le passé, de la subvention allouée au titre du programme 90 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables », qui a reculé de 26,5 % entre 2006 et 2017. La réponse de l'État à cette situation ne peut pas se réduire à vendre les filiales construites en partenariat par cet institut, mais plus certainement en les aidant à se développer.

Ma question est simple, madame la ministre : que faites-vous pour aider notre recherche publique à conserver ses capacités d'excellence ?

Pour conclure, permettez-moi quelques réflexions sur les facteurs qui freinent la réalisation des ambitions légitimes qui sont affichées concernant le mix énergétique, par exemple. De trop nombreuses contraintes, en particulier administratives, freinent l'élaboration de bon nombre de projets et découragent l'initiative locale concernant l'éolien, la méthanisation ou encore l'installation de panneaux photovoltaïques.

Autre remarque : dans ce seul secteur des énergies renouvelables, nos organismes de recherche sont performants mais leurs résultats en processus de construction et en mise au point de prototypes ont beaucoup de mal à être valorisés dans notre propre pays. Les résultats de notre recherche sont trop peu transposés dans l'industrie nationale. Force est de constater que ce sont surtout des investisseurs américains, chinois ou russes qui récupèrent les fruits de la recherche publique française. Quels sont les blocages français, madame la ministre ? Que faire pour les lever ? Comment faire mieux profiter nos concitoyens des retombées et des réussites des laboratoires publics ? Ce sont autant de questions et de sujets de réflexion qui mériteraient peut-être la constitution d'une mission parlementaire.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Un certain nombre de questions tournent autour du principe de la simplification, concernant les outils de valorisation, la manière dont le crédit impôt-recherche (CIR) peut être mis au service de l'emploi des doctorants, et les moyens à envisager pour inciter à l'innovation.

Parmi les différents outils mis à la disposition de la recherche et de l'enseignement supérieur ces dernières années, notamment dans le cadre des PIA, nombreux sont ceux qui ont trait à la valorisation. On a tendance à regrouper sous un terme générique les sociétés d'accélération de transfert de technologies (SATT), les instituts de recherche technologique (IRT) ou encore les instituts Carnot, mais, en réalité, il existe autant de situations que de structures. Mon objectif consiste donc à interroger la pertinence et la véritable valeur ajoutée de ces structures sur chacun des sites. Plutôt que de décider d'abandonner les IRT et de maintenir les SATT, ou inversement, je souhaite que perdurent les outils qui fonctionnent. Il n'est pas pour autant nécessaire de multiplier les outils pour que la valorisation fonctionne mieux.

Le CIR comporte un volet spécifique consacré au financement de bourses doctorales, notamment dans le cadre des conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE), mais aussi à l'accompagnement des doctorants vers l'emploi. Sur ce point précis, il me paraît important que nous disposions d'outils statistiques qui nous permettent d'évaluer cet accompagnement vers l'emploi des doctorants, mais le premier outil dont l'État doit se doter consiste à faire inscrire le doctorat au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP), de sorte que les entreprises sachent quelles sont les compétences professionnelles rattachées au diplôme en question. Actuellement, les diplômes les plus élevés du RNCP sont ceux d'ingénieur et de master ; il n'existe pas de référentiel national des compétences professionnelles pour le doctorat. Ce doit donc être notre priorité.

Pour ce qui est de l'incitation à l'innovation, nous entendons mettre en place le plus simplement les préconisations issues du rapport Beylat-Tambourin qui visent à faciliter les allers-retours entre le monde académique et celui de la recherche-développement dans les entreprises. C'est en établissant ces passerelles que nous favoriserons le dialogue entre ces deux mondes.

Mon deuxième point concerne l'accompagnement de la recherche et celui des étudiants. L'enseignement supérieur a besoin de conforter son autonomie et, pour cela, les établissements doivent être capables de définir des stratégies propres et, impérativement, continuer à mêler la formation et la recherche. Augmenter les ressources propres est très important : si je puis me permettre de schématiser, les financements en provenance de l'État doivent soutenir la recherche de base et la recherche fondamentale, celle qui vise à préparer l'avenir et de potentielles innovations à long terme ; les ressources propres, quant à elles, doivent être recherchées par les établissements pour, au contraire, faciliter le transfert d'une recherche quasi aboutie vers le marché – or, pour cela, il faut associer des financements publics et privés.

De la même manière, lorsqu'on développe des filières d'enseignement académique, il me paraît important qu'elles soient soutenues par de l'argent public, car il s'agit de maintenir à un haut niveau la capacité de produire de la connaissance. Mais, à chaque fois que nous aurons à créer des formations à vocation technique ou professionnelle, il faudra que nous soyons capables de le faire avec les entreprises, avec les territoires et donc en connaissant les besoins de ces derniers en matière d'emploi. Je ne souhaite donc pas opposer les financements de base, qui doivent, j'y insiste, continuer à venir de l'État et garantir la création des connaissances et leur transmission, et les financements qui doivent servir de levier pour obtenir des ressources propres qui ont vocation à nourrir l'économie. L'insertion professionnelle au service de l'emploi est l'une des missions de l'université et doit bien entendu être défendue, construite et financée à la fois par le monde de l'entreprise et le monde socio-économique en général.

Les grands organismes de recherche doivent conserver leur capacité à piloter de grands programmes nationaux pour lesquels on peut mobiliser, notamment, des financements liés aux grands plans d'investissements ou des financements que nous souhaitons co-construire avec nos partenaires européens sur des sujets de la plus haute importance comme l'antibiorésistance ou la sécurité sanitaire. Dans le même temps, les organismes de recherche nationaux sont ceux qui ont la capacité d'avoir une vision matricielle de ce qui se passe dans l'ensemble des territoires, en particulier par le biais des laboratoires de recherche mixtes avec les universités. Ce sont des missions de pilotage de schémas et de plans nationaux et européens qu'il faut confier à ces organismes qui doivent être à même de savoir comment déployer ces plans dans une logique matricielle auprès des universités. Il faut donc soutenir la recherche de base des laboratoires, soutenir la recherche sur projets, enfin préparer le prochain programme-cadre européen de façon que les sujets qui intéressent la recherche française et sur lesquels nous avons de réelles possibilités d'être leaders et innovants, fassent partie des priorités de l'Europe.

J'en viens aux étudiants. Il n'y a rien de plus terrible que de conduire la jeunesse vers l'échec. C'est pourquoi nous devons supprimer la sélection par le tirage au sort et la sélection par l'échec, et préparer une réforme destinée à favoriser la réussite des étudiants. Il convient à cette fin d'accroître leur autonomie ; c'est pourquoi, dans le cadre du plan logement, il a été prévu de construire 60 000 logements pour les étudiants, mais aussi de leur garantir une caution, de faciliter les baux liés à la mobilité étudiante, en particulier dans le cas d'étudiants qui doivent faire des stages, donc se déplacer et trouver à se loger pendant six mois, ou encore de favoriser la colocation intergénérationnelle. Il s'agit de soutenir le plus possible la mobilité des étudiants, y compris des plus jeunes qui doivent se déplacer pour poursuivre leurs études.

Le troisième volet de ma réponse concerne le pilotage. Je pense en particulier à la question qui m'a été posée sur les grandes infrastructures de recherche liées à la flotte océanique. Les moyens de cette flotte, qui étaient dispersés au sein de plusieurs organismes de recherche, ont été concentrés et confiés à l'IFREMER pour une meilleure coordination. Le budget de la flotte est ainsi porté à un peu plus de 61 millions d'euros – ce qui permet de parler de grande infrastructure de recherche, laquelle est indispensable au développement de programmes spécifiques.

De même, pour ce qui est du Grand Plan d'investissement et du rôle du Commissariat général à l'investissement, il est essentiel que nos choix servent les politiques publiques et donc que les ministres concernés déterminent le moment où utiliser ces financements et de quelle manière. Il faut par ailleurs préserver des jurys à même de choisir les meilleurs projets de façon impartiale, sur le fondement des cahiers des charges qui auront été définis.

J'en viens aux communautés d'universités et d'établissements (ComUE) : là encore, la situation est diverse. Il faut bien comprendre que c'était une obligation de choisir soit une fusion, soit une convention d'association valant rattachement, soit la création d'une ComUE. Or, comme l'ensemble des acteurs de l'enseignement supérieur et de la recherche ont eu deux ans pour faire ce choix, ils se sont précipités vers le modèle qui leur paraissait le moins contraignant si leur projet n'était pas prêt, ou le modèle le plus à même de défendre un projet si ce dernier était déjà prêt. Ainsi, certaines ComUE fonctionnent bien parce qu'elles promeuvent un projet, tandis que d'autres, constituées seulement parce qu'il fallait appliquer la loi, n'ont pas changé grand-chose, ce qui justifie qu'on examine leur cas, d'autant plus que des moyens leur ont été alloués.

Si la visibilité internationale de grandes universités de recherche – indispensable au rayonnement de la France –, et le nécessaire maillage de l'enseignement supérieur sur le territoire n'obéissent pas à la même exigence, les deux ne sont pas incompatibles. Aussi ai-je demandé à chaque site d'enseignement supérieur et de recherche de proposer un projet et de promouvoir une ambition commune qui serait la signature de ces établissements. Cette signature se composerait non seulement des activités d'enseignement et de recherche proposées, mais aussi de l'ancrage de ces universités dans leur territoire. Il ne s'agit donc pas d'opposer l'excellence des universités de grande taille situées dans de grandes métropoles et la faiblesse des universités territoriales, mais bien de réaffirmer qu'il existe plusieurs formes d'excellence, toutes devant être mises au service de la formation et de la recherche.

Reste qu'il est normal que quelques universités nous permettent de rayonner à l'international dans toutes les disciplines, et des universités dont la vocation sera d'avoir une signature et d'être reconnues comme des universités d'excellence dans des domaines particuliers, en lien avec le territoire où elles se trouvent, ou bien dans des domaines relevant d'une stratégie qu'elles auront elles-mêmes construite. C'est en fonction de la même exigence que pour les projets des très grandes universités que seront autorisées pour les universités territoriales des expérimentations en matière de gouvernance. En effet si, lorsqu'on construit un projet, la première question qui se pose est de savoir qui en est le chef, le projet est mort avant de commencer. Il faut en effet d'abord construire le projet et lorsqu'un ensemble d'acteurs le soutient, peu importe qui en est le chef. Il suffit que la gouvernance permette une stratégie à long terme. Pour cela, je ferai entièrement confiance aux acteurs pour faire des propositions mais sur lesquelles, je le répète, mon exigence sera totale.

Je terminerai par la politique spatiale de la France, qui s'inscrit bien sûr dans le cadre de la politique spatiale européenne. Certes, SpaceX est un nouveau concurrent dans le domaine des lanceurs, mais la concurrence est un phénomène bien connu du monde industriel. Il nous faut donc maîtriser les coûts, les délais et toujours avoir un temps d'avance en matière d'innovation. Nous faisons par conséquent totalement confiance au projet Ariane 6 qui nous paraît toujours autant d'actualité. SpaceX est un lanceur américain qui ne pratique pas les mêmes tarifs pour les lancements institutionnels que pour les lancements commerciaux, ce qui est totalement contraire au droit de la concurrence en vigueur en France et en Europe, où les lancements doivent être au même prix, qu'ils soient institutionnels ou bien commerciaux. D'autres concurrents sont en train d'émerger, notamment en Chine. Reste que notre industrie spatiale est capable de répondre à ces défis – surtout si nous continuons à soutenir l'innovation.

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Vous me pardonnerez certaines redites, mais lorsque les constats sont positifs, notamment pour notre jeunesse, ils méritent d'être répétés.

Le montant des crédits pour la recherche et l'enseignement supérieur pour 2018 est conforme aux engagements du Président de la République et du Gouvernement. Les moyens ont été renforcés de plus de 700 millions d'euros. Cette augmentation témoigne d'une vraie politique volontariste de la part du Gouvernement, mais elle est aussi, et surtout, le symbole d'un budget tourné vers l'avenir. Enfin, il s'agit d'un budget, et donc d'un projet, en faveur de la réussite de nos étudiants. Certains diront que ce n'est pas assez, mais ce budget donne du sens au projet d'accompagnement des étudiants.

Vous l'avez souligné, madame la ministre, votre boussole, c'est la réussite étudiante. Je vous assure que cette boussole est aussi la nôtre.

Notre système d'enseignement supérieur et de recherche est confronté à un double défi : celui de l'excellence en matière de formation, d'insertion professionnelle et de mobilité sociale et celui de l'excellence en matière de recherche fondamentale et d'innovation. Nous devions donner aux acteurs de terrain les moyens de le relever, le présent budget les leur donne.

La recherche est renforcée avec plus de 500 millions d'euros alloués à l'avenir et au rayonnement de la science. Nous assumons totalement cette prise de risque. De plus, près de 200 millions d'euros supplémentaires sont octroyés à l'enseignement supérieur et nous ne pouvons que nous en réjouir.

Madame la ministre, afin de faire du contrat de réussite étudiant un levier d'efficacité, pouvez-vous préciser la modulation de l'organisation du premier cycle ?

Je tiens pour finir à souligner votre engagement et votre implication personnelle pour faire augmenter ces crédits. C'est pourquoi les députés du groupe La République en Marche les voteront en toute confiance.

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Madame la ministre, vous avez annoncé que le budget de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation augmenterait de 700 millions d'euros en 2018 par rapport au budget initial pour 2017. Vous présentez cette augmentation comme permettant de faire face, notamment, à l'accueil d'étudiants toujours plus nombreux dans les universités. En réalité, seuls 200 millions d'euros seront destinés directement à l'enseignement supérieur et à la vie étudiante.

Le budget de la recherche est par ailleurs augmenté de 500 millions d'euros par rapport à 2017. C'est positif. Toutefois, cela ne permettra pas de revenir à un taux de succès satisfaisant des appels à projet de l'Agence nationale de la recherche (ANR). Surtout, cela permettra simplement de reconstituer les fonds de roulement des organismes hélas devenus exsangues au cours du quinquennat Hollande et de payer à hauteur de 300 millions d'euros des engagements internationaux.

En 2018, les universités, les grands établissements et les écoles disposeront de 128 millions d'euros supplémentaires pour assurer leurs dépenses de masse salariale et de fonctionnement, soit une augmentation d'environ 1 %. Hélas, un tel choix budgétaire ne répond absolument pas au défi de la démographie étudiante. C'est dommage, car c'est important. De plus, vous ne parlez pas vraiment d'un sujet qui reste central et qui avait également été négligé par le gouvernement précédent : les liens entre les universités et l'entreprise et la nécessité de se préoccuper, à tous les étages de notre enseignement supérieur, de l'insertion professionnelle des étudiants. Quelles sont vos intentions en la matière ?

Un autre poids financier pèse sur l'enseignement supérieur et la recherche à plus long terme : le patrimoine immobilier des établissements, géré par les différents acteurs, est vieillissant – vous le savez : vous avez été présidente d'université – et des investissements se révèlent donc nécessaires : la réfection de ce patrimoine doit être anticipée, pilotée et priorisée. Là aussi, que comptez-vous faire ?

En somme, l'enseignement supérieur a besoin que le Gouvernement en fasse une véritable priorité. Tout ne se résume évidemment pas aux questions budgétaires mais il est étonnant de constater que ce budget manque d'ambition et de souffle pour un secteur qui pourtant est stratégique pour construire l'avenir de la France.

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Le groupe du Mouvement démocrate et apparentés est satisfait de voir le budget du ministère de la recherche et de l'enseignement supérieur augmenter. C'est particulièrement nécessaire au moment où vous souhaitez engager notre enseignement supérieur dans un vaste plan de réformes qui devraient toucher aussi bien la vie étudiante que le premier cycle ou encore les regroupements de nos établissements et universités, sans oublier, bien sûr, la recherche, nécessaire au rayonnement de nos établissements.

Ces réformes réclament un effort important de la nation, amorcé par ce premier budget de la législature. Nous nous félicitons de constater, à l'instar du rapporteur pour avis Philippe Berta, que le budget de l'enseignement supérieur augmente de plus de 205 millions d'euros. Cette augmentation permettra, nous l'espérons, à nos établissements supérieurs d'accroître leur autonomie, notamment par le biais de politiques de sites ambitieuses.

Nous nous étonnons néanmoins que les moyens alloués au programme 421 « Investissements d'avenir » n'aient pas été réaffectés au budget de votre ministère.

N'oublions pas non plus les personnels dont la situation mérite d'être suivie de très près.

Madame la ministre, vous nous avez fait part, au cours de vos auditions et à l'occasion de vos interventions dans la presse, de votre volontarisme pour refonder notre université. Pouvez-vous vous engager à poursuivre cet effort tout au long de ces prochaines années pour donner tous les moyens de réussir à nos étudiants, nos enseignants et nos chercheurs ?

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Au nom du groupe Les Constructifs, je tiens à vous faire part de ce que je n'entends pas être comme le renard de la fable qui considère que les raisins qu'il ne peut atteindre « sont trop verts […] et bons pour des goujats ». Je trouve au contraire que le projet de budget qui nous est ici présenté va dans le bon sens. Dans le contexte de contrainte budgétaire que vous savez, une augmentation de 700 millions d'euros est un effort significatif qui témoigne d'une volonté, d'une ambition. De même, un plan d'investissements de 7,6 milliards d'euros sur cinq ans montre à quel point on est engagé pour l'avenir de notre jeunesse et son insertion dans la société. L'ensemble des propositions qui sont faites et des décisions qui sont prises concernant l'amélioration de la condition étudiante, qu'il s'agisse des 60 000 logements supplémentaires ou des aides financières dont devraient bénéficier 15 000 étudiants boursiers, sont bien sûr importantes, par les temps qui courent, pour contribuer à la réussite de la jeunesse.

Je saisis l'occasion qui m'est offerte pour appeler l'attention du Gouvernement sur plusieurs points concernant le territoire dont je suis originaire, la Nouvelle-Calédonie, points importants dans le cadre du référendum de 2018 qui doit conduire notre pays à décider s'il se sépare de la République ou non – ce que, bien sûr, à titre personnel, je ne souhaite pas. Je pense en particulier à l'antenne de l'université dans la province Nord, opération de rééquilibrage essentielle, antenne qui doit disposer des moyens de fonctionnement nécessaires dès 2018. Je pense également à la politique de sites de l'université, la Nouvelle-Calédonie étant en la matière l'un des territoires d'outre-mer les plus avancés, mais qui n'a bénéficié que d'un nombre réduit de postes, et qu'il conviendrait de mieux accompagner dans le cadre du contrat pluriannuel qui devra prochainement être signé avec l'université. Je terminerai en évoquant une anomalie statistique : la Nouvelle-Calédonie ne compte que 27 % de boursiers contre 44 % pour la métropole et 56 % à 60 % pour l'ensemble de l'outre-mer. Cette anomalie s'explique par l'inadéquation du plafond de revenus à la réalité économique du pays. Il faudrait donc le réviser.

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Nous nous réjouissons évidemment de l'augmentation du budget pour l'enseignement supérieur et la recherche. Je note toutefois que les 700 millions d'euros que vous nous annoncez, nous avons un peu de mal à les trouver : j'ai l'impression que vous ne tenez pas compte de la diminution parallèle des crédits de la mission de 331 millions d'euros. Par ailleurs, je constate qu'une grande partie de la hausse de votre budget est la conséquence de mesures votées lors de l'examen des précédents projets de loi de finances : contribution aux grandes organisations internationales telles que le Centre européen de recherche nucléaire (CERN) ou l'Observatoire européen austral (OEA), reconduction de mesures salariales votées l'année dernière, mais aussi mesures concernant la recherche spatiale…

Avec 32,7 millions d'euros supplémentaires, l'ANR est le seul opérateur à connaître une hausse du nombre d'emplois, mais au détriment du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), auquel on retire 21 équivalents temps plein travaillé (ETPT), ou de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA). C'est un choix qui profitera aux équipes lauréates au sein des laboratoires, et je m'en félicite, mais il ne répond pas aux besoins pérennes des laboratoires.

Nous nous demandons s'il ne faut pas faire un peu mieux car si le budget de la recherche française a certes été maintenu depuis dix ans, celui de l'Allemagne a augmenté pendant ce temps de 75 %. Or les résultats de la recherche de demain seront fonction des efforts que nous consentons aujourd'hui.

C'est pourquoi nous nous demandons s'il ne faudrait pas consacrer plus de fonds pour donner une certaine visibilité aux chercheurs, ingénieurs et techniciens, pour réduire la précarité des agents et des chercheurs, pour revaloriser les carrières des chercheurs, notamment ceux qui ont un salaire assez modeste après tant d'années d'études. Nous souhaitons par ailleurs que soit davantage promu, auprès des jeunes, le goût pour la science et la technologie – je crois d'ailleurs que plusieurs rapporteurs ont consacré à ce sujet une part importante de leur rapport. Enfin nous souhaitons que soit facilitée l'insertion professionnelle des jeunes diplômés parce que, là encore, il est triste, quand on est diplômé, de ne pas trouver d'emploi.

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Madame la ministre, vous fixez comme priorité « la réussite et l'insertion des étudiants », mais, dans les faits, le budget de l'enseignement supérieur est seulement passé de 12,4 à 13,4 milliards d'euros en dix ans, alors qu'il y a 20 % d'étudiants en plus ; le budget par étudiant a par conséquent chuté de 10 % en dix ans. En outre, vous faites aux riches un cadeau fiscal de 5 milliards d'euros et vous n'augmentez le budget que de 700 millions d'euros, soit très peu par rapport aux ambitions affichées. Comment, dans ces conditions, pensez-vous répondre à la demande et aux besoins croissants d'études supérieures de qualité ?

Vous souhaitez le renforcement de l'autonomie des établissements mais, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU), cette autonomie n'est toujours pas accompagnée du transfert de moyens suffisants pour couvrir le glissement vieillesse technicité (GVT). Et, alors que vous proposez 61 millions d'euros – alors qu'il en faudrait au moins 200 – pour absorber l'augmentation de la masse salariale, comment, madame la ministre, pensez-vous mettre un terme aux déficits budgétaires d'universités comme celles de Limoges, de Toulouse ou de Bourgogne ?

Vous souhaitez le rayonnement de la recherche française, mais des postes et des financements habituellement attribués aux établissements publics de recherche comme le CNRS, sont transférés à l'ANR, échelon administratif de répartition des crédits entre les programmes de recherche, qui envisage la recherche de façon concurrentielle et qui constitue une perte de temps en tâches administratives pour les chercheurs.

Enfin vous orientez la hausse des crédits pour la recherche vers l'aéronautique civile et vers le financement des grands instruments internationaux de recherche aux dépens des laboratoires.

Il est nécessaire de répondre sur tous ces points, madame la ministre, si nous voulons avoir un enseignement supérieur de qualité et ouvert à tous, si nous voulons nous donner les moyens d'une recherche libre de toute compétition et l'orienter vers les vrais enjeux de notre société, qu'il s'agisse du climat ou d'agriculture saine.

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Vous présentez un budget en augmentation, madame la ministre, mais qui ne correspond pas à la démographie étudiante – c'était d'ailleurs aussi le cas des précédents budgets. De 2008 à 2018, la dépense par étudiant a baissé de 10 %, ce qui joue certainement un rôle dans l'échec massif après la première année d'enseignement supérieur.

Vous avez évoqué la réforme à laquelle vous travaillez avec le ministre de l'éducation nationale. Prendra-t-elle en compte les questions d'orientation au niveau du lycée, afin d'établir une passerelle plus solide avec l'université. Va-t-on reconsidérer l'accès des élèves de la filière professionnelle à l'enseignement supérieur ? Avez-vous un premier bilan à nous présenter de l'application de la loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, dite « loi Fioraso », en ce qui concerne l'intégration de la filière professionnelle au sein des instituts universitaires de technologie (IUT) ? Enfin, quels sont vos projets sur l'encadrement lors de la première année d'enseignement supérieur pour les étudiants et les étudiantes ?

Les lois Pécresse et Fioraso ont instauré l'autonomie, la mise en concurrence des universités. Vous avez déclaré tout à l'heure que toutes les universités devaient tendre vers l'excellence mais va-t-on, dans toutes les universités, c'est-à-dire quelle que soit leur dimension, assurer la transmission du savoir par des enseignants-chercheurs – ce qui a fait la force de l'université française pendant toute une période.

Enfin, en ce qui concerne la vie des étudiants, au-delà de la construction de logements accessibles, il faut peut-être réhabiliter l'idée de campus. Les grandes cités universitaires telles qu'elles étaient conçues favorisaient la solidarité entre les étudiants, entre salariés et non-salariés, favorisaient la mise en coopération du savoir. Dans ces campus peuvent également se créer des formes de tutorat. La France est en outre très en retard en matière de pratique sportive au sein des universités.

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Si l'on s'intéresse à la réussite et à l'insertion professionnelle des étudiants, on ne peut pas se contenter de diviser les crédits du programme 150 par le nombre d'étudiants. En effet, ce programme est en partie consacré à la recherche et, de plus, si l'on veut calculer un montant par étudiant, il faut tenir compte de l'ensemble des mesures sociales prises par ailleurs.

Nous devons trouver les financements pour accompagner la réussite des étudiants, car le véritable problème n'est pas tant l'argent qui leur est consacré que le fait que l'on ne travaille pas vraiment la question de la réussite.

Sans préjuger de ce que sera la réforme, la concertation a fourni des pistes intéressantes, en particulier concernant la passerelle à construire entre l'éducation nationale et l'enseignement supérieur. On en parle depuis longtemps ; il est temps qu'elle devienne une réalité.

J'ai été interrogé sur les premiers résultats de la loi dite « Fioraso ». Aujourd'hui, on compte 3 % de bacheliers technologiques dans les IUT, et 18 % de bacheliers professionnels dans les BTS. C'est une amélioration, mais cela ne correspond sans doute pas encore aux débouchés dont ces bacheliers ont besoin. Une intéressante expérimentation qui a eu lieu dans cinq académies, l'an dernier, se poursuivra dans vingt-trois autres. Elles visent à demander aux conseils de classe de recommander les bacheliers professionnels afin qu'ils soient acceptés en BTS : 69 % des jeunes ainsi recommandés y ont à ce jour été admis. Cela me semble particulièrement prometteur.

La réussite étudiante constitue un investissement dans l'avenir. Nous devons être en mesure de rénover l'accueil des étudiants et le contenu des premiers cycles afin d'offrir des solutions plus personnalisées.

En matière d'emplois, pendant longtemps, le GVT n'étant pas compensée, les établissements devaient y consacrer une partie de leur masse salariale au lieu de maintenir un taux d'emploi suffisant d'enseignants-chercheurs et de chercheurs. Nous avons voulu corriger le tir dans ce budget : le GVT sera compensé.

Pour ce qui concerne les postes dans les organismes de recherche, je tiens à saluer le travail effectué par M. Alain Fuchs à la tête du CNRS : les emplois des ingénieurs, techniciens et administratifs (ITA) aussi bien que des chercheurs ont été maintenus durant tout son mandant. Je ne dis pas que tout est toujours simple ou facile, mais lorsque des choix courageux sont faits, les établissements sont en capacité de maintenir l'emploi. Dans les universités, je confirme que l'objectif reste de servir à la fois la recherche et la formation, car elles ont évidemment vocation à créer de la connaissance et à la transmettre – les emplois dont je parle sont donc bien ceux des enseignants-chercheurs.

S'agissant du lien entre les universités et les entreprises, je répète qu'il est extrêmement important que les universités travaillent avec leurs territoires de plusieurs façons. Parce qu'elles doivent préparer les jeunes à une bonne insertion professionnelle, elles doivent connaître les besoins en emplois de leur territoire, et, plus généralement, ceux du pays et de l'Europe. Il faut former les étudiants dans les bonnes filières. Nous devons encore travailler sur ce problème car, aujourd'hui, ces données n'orientent pas vraiment les choix de nos jeunes. Il me paraît donc essentiel que l'orientation et l'information indiquent aussi où sont les emplois afin que les étudiants puissent choisir des filières qui y mènent.

La recherche doit être à la fois libre, et orientée sur des grands sujets de société : c'est l'idée d'augmenter à nouveau les dotations de base, mais aussi le taux de succès de l'Agence nationale de la recherche (ANR) – dans le premier cas, nous parlons d'une recherche totalement libre ; dans le second, d'une recherche mise au service de défis sociétaux français, européens ou internationaux.

S'agissant du patrimoine immobilier, les contrats de plan État-région (CPER) permettront de consacrer 343 millions d'euros aux universités, et 300 millions supplémentaires seront débloqués pour les universités dans le cadre du Grand Plan d'investissement (GPI) afin que les universités valorisent leur patrimoine. De plus, sachant que 1,8 milliard d'euros sont prévus dans le GPI pour la rénovation énergétique des bâtiments de l'État, et que l'enseignement supérieur occupe la moitié de leur surface, l'université bénéficiera de 900 millions d'euros supplémentaires.

Les annulations de crédits du PLF pour 2017 n'ont rien à voir avec le PLF pour 2018. En simplifiant, on peut même considérer que pour calculer les crédits à dépenser en 2018, il est possible d'additionner l'augmentation des crédits pour 2018 et les 330 millions d'euros d'annulations de crédits de 2017, ce qui signifie que, finalement, en crédits de paiement, le budget augmente d'1 milliard d'euros !

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Je souhaite appeler votre attention sur le programme 142 « Enseignement supérieur et recherche agricoles ». En augmentation de 5 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, ce programme illustre à lui seul la philosophie du Gouvernement visant à favoriser une économie innovante grâce au levier de la recherche et du développement.

Notre réseau d'enseignement supérieur agricole est constitué de douze établissements publics et de six établissements privés sous contrat avec l'État ainsi que de deux organismes publics de recherche : l'Institut national de recherche agronomique (INRA) et l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA). L'agriculture française dispose d'un réel potentiel pour rentrer dans la nouvelle économie de l'innovation.

Ma question porte sur le financement par l'État de la recherche agricole et la nécessité de créer une synergie entre ces organismes afin que leur potentiel puisse éclore et qu'il favorise l'agriculture du XXIe siècle. Madame la ministre, sachant que le niveau de la recherche dépend étroitement des crédits octroyés par la puissance publique, comment se matérialise budgétairement et concrètement dans cette mission votre volonté de susciter l'investissement innovant de long terme dans le domaine agricole ?

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Madame la ministre, l'avis que Danièle Hérin et moi-même avons présenté au nom de la commission des affaires culturelles et de l'éducation met l'accent sur la compétence « innovation » qui se trouve, depuis la nouvelle législature, au coeur de votre ministère.

La diffusion et le transfert des innovations au bénéfice de l'ensemble du tissu social et économique constituent en conséquence l'une des priorités de la stratégie de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Cette compétence transdisciplinaire se retrouve notamment dans le programme 172 et constitue un pilier fondateur pour lier la recherche et l'économie française. Il a été difficile de faire un état des lieux de cette compétence « Innovation » dans notre rapport, étant donné la structure transversale de la mission, et la récente apparition de la compétence au sein du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation (ESRI).

Les sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT), nouvelles structures au nombre de quatorze à ce jour, alimentent essentiellement des PME et ETI, dont 90 % de l'activité se concentre au niveau régional. Ce modèle fondateur permet de valoriser le travail de la recherche au sein de l'économie locale.

Mis à part les SATT, d'autres organismes publics mènent des projets d'innovations. Des dispositifs sont-ils mis en place afin de saisir plus précisément la part de cette « Innovation » dans le budget de la recherche ?

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L'avenir industriel de la France passe par la recherche. À la lecture du budget 2018, je salue le fait que les missions budgétaires de la recherche et de l'enseignement supérieur augmentent en volume ; c'est une bonne chose.

Nous nous rejoignons, madame la ministre, pour considérer que la recherche et développement, qu'elle soit fondamentale ou applicative, vient nourrir l'innovation industrielle et qu'elle procure un avantage concurrentiel à nos PME, à nos ETI, et à nos grands groupes industriels positionnés en situation stratégique – ce qui leur permet de générer de la croissance, et donc de l'emploi.

C'est pourquoi j'ai été surpris de découvrir que le programme 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle » était amputé de 32 millions d'euros, et ce d'autant plus que ce coup de rabot concerne uniquement l'action 3 « Soutien de la recherche industrielle stratégique », action qui vise pourtant à soutenir, je cite la page 422 du petit « bleu » que vous avez entre les mains, « les secteurs liés à la croissance et à l'emploi ».

Concrètement, ce coup de rabot a deux effets. Il se traduit d'abord par une baisse de financement pour les projets de recherche et développement des entreprises et des clusters, et, ensuite, par une baisse des moyens alloués aux soixante-huit pôles de compétitivité organisés en écosystème territoriaux avec des vraies valeurs ajoutées stratégiques et industrielles territoriales dont la mission est aussi de favoriser l'émergence de l'innovation, donc de l'emploi et de la croissance, et de faire se parler le monde académique et le monde industriel.

Pouvez-vous nous rassurer et nous confirmer que ce choix n'hypothèque pas l'avenir industriel pour reprendre mon propos introductif, et surtout nous expliquer les motivations précises de cette baisse ?

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Ce budget, qui me satisfait, constitue une première pierre dans le vaste chantier de la rénovation de notre enseignement supérieur. Le rapport du recteur Daniel Filâtre sur la réforme du premier cycle de l'enseignement fait explicitement état des moyens qui devront être investis pour rendre ce cycle plus attractif et à même d'offrir à nos étudiants des filières de qualité qui aboutissent à une réelle insertion sur le marché de l'emploi.

À la lecture du programme 150, on peut noter une augmentation d'environ 50 millions d'euros concernant l'action 1 « Formation initiale et continue du baccalauréat à la licence ». Selon les chiffres publiés récemment, l'enseignement supérieur devra intégrer 350 000 étudiants supplémentaires d'ici à 2025, dont 285 000 pour les seules universités. Madame la ministre, les nouveaux moyens alloués seront-ils suffisants pour répondre aux défis de l'augmentation de la démographie étudiante et permettre de mener simultanément l'ensemble des réformes prévues ?

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Madame la ministre, le Président de la République s'était engagé pendant la campagne électorale à sanctuariser les moyens de l'enseignement supérieur et de la recherche, Au mois de juillet dernier, nous avons eu droit une première entaille dans ce contrat avec 200 millions d'euros de coupes nouvelles en plus des 130 millions de la réserve de précaution.

Pour 2018, vous disposerez d'un peu plus de 200 millions d'euros pour les programmes 150 et 231. Ces crédits permettront de financer les 1 000 emplois créés à la rentrée 2017 – ceux que nous avons votés l'an dernier –, les mesures liées à la fonction publique en termes de point d'indice et de revalorisation des carrières des personnels, et puis l'impact du glissement vieillissement technicité. Mais il y a un problème, madame la ministre : il manque 1 milliard d'euros.

Ce milliard manque pour financer les mesures les plus importantes, à savoir l'accueil de 40 000 étudiants supplémentaires, pour 300 millions d'euros, le développement des licences professionnelles, et la réforme de l'entrée dans l'enseignement supérieur, celle du premier cycle à hauteur de 700 millions d'euros.

Je veux évoquer la montée de la pauvreté et la précarité dans le milieu étudiant. L'Observatoire de la vie étudiante nous dit aujourd'hui que 50 % des étudiants vivent avec moins de 400 euros par mois, que 50 % d'entre eux déclarent travailler pour financer leurs études, et qu'un tiers disent renoncer à des soins par manque d'argent. La première décision du Gouvernement a pourtant consisté à baisser de 5 euros les APL pour 800 000 étudiants !

En 2018, le taux de boursiers dans l'enseignement supérieur sera de l'ordre de 35 % – en raison de l'augmentation des effectifs des étudiants, ce taux a tendance à stagner ces dernières années. Comment comptez-vous faire passer ce taux de 35 % à 50 % ? C'est un objectif inclusif, ambitieux, mais aussi généreux, qu'il faut atteindre si l'on veut traiter la pauvreté, la précarité des étudiants.

Partagez-vous les positions défendues par le rapporteur spécial sur les droits d'inscription ? Son rapport propose une évolution des droits d'inscription pour certains étudiants étrangers, et une réflexion sur l'idée d'instaurer des droits progressifs au niveau master.

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Les universités d'outre-mer « trustent » les dernières places du classement des universités françaises. Je ne citerai pas l'intégralité du classement, mais l'université de La Réunion, celle de mon département, se place au soixante-dixième rang sur soixante-seize, et les universités des Caraïbes ou de la Polynésie sont situées dans le classement bien après elle.

Cette situation, évidemment inacceptable, n'a fait l'objet d'aucune remarque ni d'aucune politique publique particulière de la part des gouvernements précédents, et je constate que votre budget n'aborde pas davantage ce point. Pourtant, on connaît les difficultés rencontrées sur place. On pourrait donner l'exemple de l'absence de structures technologiques supérieures, en particulier des instituts de technologie supérieure. Dans mon département, il y a seulement quatre IUT pour 800 000 habitants : les bacheliers technologiques et professionnels s'inscrivent donc massivement à l'université où l'on constate ensuite un très important taux d'échec – le taux de réussite en première année dans toutes les universités ultramarines confondues, est largement en dessous de 30 %.

Dans le cadre de votre budget, prévoyez-vous de mettre en place une politique spécifique et spéciale en particulier pour les universités d'outre-mer, qui sont les dernières des classements depuis quelques années maintenant ?

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Ma question porte sur le financement de la recherche médicale, et plus particulièrement sur le financement de la recherche en oncologie pédiatrique.

Le plan « Cancer » 2014-2019 met en avant la lutte contre le cancer chez l'enfant, mais la recherche dans ce domaine n'en est encore qu'à ses balbutiements. Les chercheurs déplorent en effet un manque cruel de moyens pour mener à bien leurs projets. Les appels à projets restent rares, et ils regrettent de devoir consacrer une trop grande partie de leur temps à la quête de financements plutôt qu'à la recherche elle-même.

Aujourd'hui de nombreuses associations sont sollicitées pour apporter des financements faute de moyens publics suffisants. Ne pourrions-nous pas définir un financement dédié spécifique, clair et transparent pour la recherche oncopédiatrique ?

L'État doit garantir des crédits récurrents aux équipes de recherche confirmées. Cet investissement spécifique pallierait d'autres difficultés, notamment le détournement des jeunes chercheurs faute de débouchés. Ce financement de la recherche sur les cancers et leucémies de l'enfant aurait aussi des effets sur l'ensemble des maladies pédiatriques rares, mais également sur le cancer de l'adulte.

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Madame la ministre, je tiens à vous interroger sur le plan national de vie étudiante (PNVE). J'ai bien noté, parmi tant d'autres efforts, celui considérable que le Gouvernement consent s'agissant des crédits consacrés à la vie étudiante, en hausse de 11,4 millions d'euros afin de financer les nouvelles aides à la mobilité en master et l'aide à la recherche du premier emploi (ARPE).

En revanche, ces crédits ne comprennent pas le financement du PNVE, dont je salue l'ambition car il comprendra des mesures concernant la santé, le logement, le transport ou encore la sécurité sociale étudiante. Sa date de mise en oeuvre, à la rentrée 2018 ou 2019, n'est pas encore arrêtée, mais votre ministère assure qu'il sera financé par des crédits supplémentaires. Disposez-vous d'éléments relatifs à ce financement que vous pourriez nous communiquer ?

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Madame la ministre, sur les 700 millions d'euros que vous avez obtenus, 175 millions iront directement aux facultés, mais 113 millions doivent d'ores et déjà couvrir la hausse naturelle des charges salariales. En conséquence, la somme résiduelle ne permettra sans doute pas de faire face à l'afflux d'étudiants, estimé à 40 000, et qui sera peut-être double si l'on inclut les bacs professionnels.

La situation est d'autant plus préoccupante que quinze universités sont aujourd'hui en grave déficit, et qu'un certain nombre d'entre elles ont dû effectuer des prélèvements sur leur fonds de roulement. La question de l'accès à l'université est posée. Votre prédécesseur, refusant de trancher ce sujet très sensible, avait obtenu 100 millions supplémentaires pour accueillir les nouveaux étudiants, ce qui n'a pas suffi. La solution n'est donc pas là, vous l'avez dit, d'ailleurs, en rappelant le désastre que représente l'échec universitaire, désastre à la fois humain et financier.

Le 31 août dernier, le Président de la République a annoncé dans une interview accordée au Point : « Nous ferons en sorte que l'on arrête par exemple de faire croire à tout le monde que l'université est la solution pour tout le monde. Et on ne tirera plus les gens au sort. » Le Gouvernement a annoncé que cette décision serait effective dès cet automne. La fin du tirage au sort implique une sorte de sélection que vous appelez « prérequis », sans plus de précisions sur son contenu ou sur le calendrier dans lequel elle sera mise en place.

Madame la ministre, vous avez mis en avant le fait que les élèves et futurs étudiants ne répondant pas aux critères fixés par cette sorte de sélection pourraient suivre des cours de rattrapage durant l'été. Le flou autour de cette annonce pose plusieurs questions dont qui ont toutes des répercussions budgétaires : quel personnel sera en charge de l'encadrement, quel sera le coût de ces cours, et surtout quelle sera la part du budget affectée à cette nouveauté ?

Enfin, qu'en est-il de l'application du droit à la poursuite d'études mises en oeuvre sous la précédente mandature ? Pouvez-vous nous présenter un bref bilan d'étape sur cette disposition, si elle est en vigueur ?

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Si je salue l'augmentation de 700 millions d'euros du budget de la recherche, je constate que nos étudiants doivent faire face à une véritable difficulté récurrente en matière de logement.

La situation très tendue de l'offre de logements dans la plupart des régions, combinée à la baisse des aides pour les étudiants fragilise davantage ceux, très nombreux, qui se trouvent dans des situations financières délicates. Le logement est le poste de dépenses qui augmentent le plus, notamment à Paris, Lyon, Strasbourg, Rennes ou encore Montpellier. Ce poste ne représente pas moins de 53 % du budget d'un étudiant. Se loger coûterait en moyenne 669 euros par mois en région parisienne, et 412 euros dans les autres villes.

Madame la ministre, quelles solutions pourraient être envisagées à très court terme pour améliorer la situation de celles et ceux qui sont l'avenir de la France ?

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Je me réjouis des inflexions prises dans le domaine de la recherche, car il s'agit de maintenir l'excellence de notre pays dans un contexte international de plus en plus concurrentiel. J'ai été interpellé au sujet de la place de la France dans un domaine où elle était traditionnellement en avance, mais où elle prend un retard significatif depuis plusieurs années : la géodésie.

Notre pays tarde à investir dans les nouvelles technologies, telles que la télémétrie laser, pour un secteur où il est désormais question de précision centimétrique voire millimétrique, et dont les enjeux, liés à la détermination des références d'espace et de temps, touchent un champ d'application extrêmement large. Les spécialistes de ce domaine pointent la faiblesse des moyens humains et financiers alloués aux structures à vocation de recherche fondamentale qui participent pour notre pays à des réseaux d'observation mondiaux.

Cette situation fait prendre du retard à la communauté scientifique et à la mise en place de certaines applications à forte plus-value. Pourtant les applications sociétales de la détermination des références spatio-temporelles ne sont plus à démontrer, puisqu'elles ont, entre autres applications, largement contribué à la prise de conscience des conséquences du changement climatique par la mesure des variations du niveau moyen des mers. Il apparaît qu'une volonté politique coordonnée à haut niveau est indispensable pour préparer l'avenir dans ce secteur et maintenir la visibilité et la crédibilité de la France au niveau international.

Madame la ministre, pouvez-vous nous faire part des ambitions du Gouvernement dans ce domaine ?

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Madame la ministre, je souhaitais vous interroger sur l'accompagnement proposé par l'État aux quinze universités françaises en difficulté financière, mais, lors de vos interventions précédentes, vous avez déjà apporté un certain nombre de réponses que j'estime très positives ; je n'ai donc plus de question à poser.

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Le plan « France médecine génomique 2025 » bénéficiera d'un budget de 400 millions d'euros sur cinq ans – 25 millions d'euros sont prévus pour 2018. Avez-vous une idée de la trajectoire pluriannuelle du financement des séquences à très haut débit et du développement de ce projet ? Notre rapporteure spéciale indique dans son rapport que le budget de l'INSERM, devrait être abondé dès 2018 pour permettre le lancement du projet.

L'idée de la sanctuarisation du budget de la recherche en santé revient depuis un certain temps. Estimez qu'il s'agit une piste intéressante et que l'on pourrait, par exemple, élaborer un sous-objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) dédié à la recherche en santé ?

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L'innovation dont être au coeur de notre société. À l'heure de la mondialisation et de la mutation de notre modèle économique, l'innovation est devenue le facteur clé de nos entreprises. Nous trouvons les réponses aux problématiques de mobilité, aux enjeux de notre industrie, aux problèmes de notre agriculture grâce à l'innovation. Cela impose d'accompagner nos start-up et nos PME innovantes dans leurs projets. Cela impose de former des étudiants créatifs et capables de transformer les idées en produits nouveaux.

Je ne fais pas partie de ceux qui pensent que l'on naît créatif. Je crois que l'on apprend à l'être si une réelle ambition est à l'oeuvre en la matière et si une véritable pédagogie de l'innovation est mise en place. Cela impose de disposer d'universités et d'écoles d'ingénieurs attractives afin d'accueillir les meilleurs intervenants mais aussi les meilleurs étudiants. C'est tout le sens du budget qui nous est présenté.

La mission « Recherche et enseignement supérieur » comprend neuf programmes. Deux programmes en particulier concernent la politique de l'innovation : les programmes 172 et 192. Madame la ministre, s'agissant du programme 172, pourriez-vous nous présenter les moyens permettant la mise en oeuvre de la stratégie nationale de recherche France-Europe 2020 ? S'agissant du programme 192, pourriez-vous vous exposer les moyens permettant d'accompagner les PME innovantes ?

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Si l'effort budgétaire accompli cette année est conséquent – 700 millions d'euros –, certains s'inquiètent de savoir s'il se prolongera au cours des prochaines années afin d'accompagner le dynamisme du secteur de la recherche et de l'enseignement supérieur, qui se traduit par l'accueil de 40 000 étudiants supplémentaires par an. Ne pensez-vous pas qu'une programmation pluriannuelle serait de nature à rassurer les acteurs de ce secteur ?

Par ailleurs, si la qualité de la concertation qui a été menée sur la réforme du premier cycle de l'enseignement supérieur et pour l'amélioration de la réussite des étudiants a été unanimement saluée, et va vous permettre de présenter votre plan dans quelques semaines, je trouve pour ma part que la concertation a été assez timide sur le développement de l'apprentissage et de l'alternance dans l'enseignement supérieur, un domaine dans lequel nous sommes un peu en retard. Avez-vous l'intention de conforter la dynamique de cet axe ?

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Le programme Erasmus, qui permet aux étudiants de partir étudier à l'étranger dans le cadre d'un échange universitaire, souffle cette année ses trente bougies. Afin de renforcer l'identité européenne partagée que les étudiants se forgent grâce à ce programme – et, partant, la solidarité européenne – et de permettre à plus de jeunes de découvrir d'autres pays, le Président de la République a indiqué durant la campagne présidentielle qu'il souhaitait un Erasmus élargi – ce qu'il a eu l'occasion de confirmer par la suite, dans ses discours sur l'Europe.

Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, si ce budget permettra d'augmenter le nombre de bénéficiaires du programme Erasmus et quel plan d'action vous compter lancer dans les prochains mois afin de permettre à plus de jeunes de partir étudier dans l'Union européenne ?

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Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Je vais m'efforcer de répondre de la façon la plus exhaustive possible à chacun d'entre vous, en commençant par les questions les plus techniques.

Sur le programme 142 – « Enseignement supérieur et recherche agricoles » – et les synergies et rapprochements qui pourraient s'opérer entre l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA) et l'INRA, une lettre de mission a été adressée aux présidents respectifs de ces deux instituts, afin qu'ils engagent une réflexion sur ce point. Par ailleurs, il n'y a pas eu de baisse du budget : la majeure partie des crédits de l'IRSTEA et de l'INRA font partie du programme 172 et non du programme 142 ; ces crédits, en hausse de 0,8 %, s'élèvent à 693,5 millions d'euros pour l'INRA et à 60,8 millions d'euros pour l'IRSTEA.

Pour ce qui est de la baisse des crédits du programme 192, il s'agit en fait des crédits du Fonds unique interministériel (FUI), qui sera avantageusement remplacé par le fonds pour l'innovation de rupture. Néanmoins, deux appels à projets (AAP) seront maintenus, afin de pouvoir maintenir les liens entre la recherche académique et la recherche en entreprise.

La recherche oncopédiatrique est au coeur du plan « Cancer », qui est financé de deux façons différentes : d'une part, 40 millions d'euros provenant du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, d'autre part, 40 millions d'euros du ministère de la santé, le tout complété par des fonds de l'INSERM à hauteur de 29,6 millions d'euros. C'est dans ce cadre, et grâce à ces fonds, que seront traités les problèmes spécifiques de l'oncopédiatrie – sans compter, bien sûr, les ressources additionnelles du grand plan d'investissement, réparties par l'ANR.

En ce qui concerne le plan « France médecine génomique 2025 » et les séquenceurs à très haut débit, je rappelle qu'aucun financement n'avait été initialement prévu, et que nous en mettons un en place cette année, en consacrant 4 millions d'euros à ce plan.

Comme vous l'avez dit, le plan national de vie étudiante (PNVE) concerne à la fois le logement, le transport, la santé, la culture et le sport : il s'agit donc d'un plan éminemment interministériel, sur lequel nous aurons l'occasion de faire des annonces, puisqu'il fait partie intégrante du Plan de réussite scolaire que le Premier ministre exposera prochainement.

Vous avez raison de dire que le logement est le poste de dépenses le plus important pour les étudiants. Je rappelle que le précédent gouvernement avait lancé un plan portant sur la création de 40 000 logements et que, 26 800 logements ayant été livrés au 31 décembre 2016, il restait à construire le tiers des logements pour achever ce plan ; en 2017, nous avons poursuivi l'effort, et atteindrons le chiffre de 42 600 logements en décembre 2017. Par ailleurs, nous nous sommes engagés sur un nouveau plan consistant en la création de 60 000 logements et, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous nous efforçons également de faciliter la caution, la colocation et la colocation intergénérationnelle afin de soutenir le logement étudiant.

Pour la première fois cette année ont été prises des mesures visant à garantir le droit à la poursuite d'études en master – ce qui constitue la mise en oeuvre d'une décision prise par le précédent gouvernement. Tout n'a pas parfaitement fonctionné, ce qui s'explique par la nouveauté de cette mesure, mais la très grande majorité des étudiants ont trouvé une place en master, et nous continuons à prendre en charge les étudiants qui rencontreraient encore des difficultés : en l'occurrence, nous sommes confrontés à un problème de procédure, la loi telle qu'elle est rédigée n'autorisant pas les recteurs à affecter des étudiants au cycle master, mais seulement au cycle licence. Nous avons incité les recteurs à travailler avec les présidents d'université, qui sont les seuls à pouvoir affecter des étudiants au cycle master.

Quand le Président de la République dit, dans une interview au Point, que tout le monde n'a pas sa place à l'université, il ne fait que rappeler qu'en l'absence d'accompagnement et de préparation, seuls 6 % des titulaires d'un bac professionnel ont une chance de poursuivre avec succès leurs études dans le cadre d'un cycle licence – un constat l'a conduit à prendre l'engagement de prévoir 100 000 places supplémentaires dans les formations professionnelles, qui font partie de l'enseignement supérieur au même titre que les licences générales. Au sujet des formations professionnelles en apprentissage et en alternance, nous venons de commencer des concertations avec Jean-Michel Blanquer, Muriel Pénicaud et Bruno Le Maire, sur la formation professionnelle, la formation continue et la formation en alternance. Une réflexion va être engagée avec les futurs employeurs, mais aussi les établissements d'enseignement supérieur, afin de faire en sorte que ces formations soient aussi adaptées que possible aux emplois sur lesquels elles sont susceptibles de déboucher.

En ce qui concerne le programme Horizon 2020, nous avons pour objectif de pouvoir travailler sur le prochain programme-cadre européen – le FP9. Dans ce cadre, nous devons mettre en avant les sujets de la mobilité étudiante et de l'augmentation de cette mobilité dans le cadre d'Erasmus, ainsi que le soutien à des programmes de recherche qui donneront à la France l'occasion de mettre en valeur son savoir-faire.

J'ai été interrogée au sujet de la diffusion et du transfert de la connaissance, ainsi que sur l'identification, au sein du budget, de la part de financement relevant de cette mission de valorisation. Il s'agit là d'un exercice difficile, dans la mesure où nous avons affaire à des structures extrêmement morcelées correspondant à la fois aux instruments de valorisation des organismes de recherche, aux sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT), dont les organismes de recherche et les universités sont membres fondateurs, et à d'autres outils – bref, un véritable millefeuille. Bruno Le Maire et moi-même avons demandé à ce que soit établi un rapport sur le mode de fonctionnement de ces différents outils, qui sera mis à la disposition des parlementaires dès que possible.

Reprenant à notre compte les engagements pris par le précédent gouvernement, nous assumons dans le cadre de ce budget la création de 1 000 emplois en année pleine pour 2018. Nous reconduisons également la mesure consistant, dans le précédent budget, à prévoir 100 millions d'euros afin d'accueillir 30 000 étudiants supplémentaires. Les crédits prévus par le précédent gouvernement pour créer des emplois ayant en fait essentiellement servi à financer le glissement vieillesse technicité (GVT), nous préférons cette année afficher le financement du GVT.

Il faut faire preuve de prudence quand on cite des chiffres, car certains peuvent avoir un effet contraire à celui que l'on attendait. Ainsi, lorsqu'il est dit que 50 % des étudiants travaillent, il ne faut pas oublier que ce chiffre comprend les contrats liés aux stages et aux contrats d'apprentissage : s'il y a effectivement trop d'étudiants qui travaillent pour gagner leur vie, il n'y en a pas 50 %.

Le fait qu'un tiers des étudiants doivent renoncer aux soins est une réalité. Nous travaillons sur cette question, et aurons prochainement des propositions à formuler. Je précise que 39 % des étudiants sont actuellement bénéficiaires d'aides sociales, soit 1,1 % de plus que l'an dernier ; en dix ans, ce sont 220 000 étudiants supplémentaires qui ont été pris en charge par l'État au titre des aides sociales.

Enfin, je dois vous avouer que je ne suis pas en mesure d'apporter d'éléments précis en réponse à la question qui m'a été posée au sujet de la géodésie – tout au plus puis-je vous confirmer que le budget pour 2018 prévoit le financement des grandes infrastructures de recherche qui doivent être celles intervenant en la matière.

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Il est presque rassurant de constater que vous n'avez pas réponse à tout, madame la ministre ! (Sourires.)

La réunion de la commission élargie s'achève à vingt-trois heures quinze.

Le Directeur du service des comptes rendus des commissions,

Nicolas VÉRON© Assemblée nationale