La réunion

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La réunion débute à 15 heures 05.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente.

La Commission poursuit l’examen des projets de loi, organique et ordinaire, adoptés par le Sénat, d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 (n° 2762 et 2763) (Mme Marie Guévenoux, rapporteure).

Elle est saisie, sur la loi ordinaire, des amendements identiques CL85 de la rapporteure et CL12 de Mme Panot.

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J'ai longuement expliqué les motifs de mon désaccord avec le Sénat concernant la date limite de dépôt des candidatures pour le second tour des élections municipales. Je ne vois pas quelle raison impérieuse voudrait que nous accélérions ainsi le processus : aucune règle constitutionnelle n'impose un délai minimal ou maximal à partir du premier tour. C'est la pratique, plutôt que le droit, qui impose un dépôt des listes le mardi lors d'un entre-deux-tours limité à une semaine.

La logique plaide pour que nous fixions les règles relatives aux candidatures des premier et second tours respectivement en fonction de la date de l'un et de la date de l'autre. J'aurais pu comprendre le souhait de fixer une date dans la loi plutôt que de la renvoyer à une ordonnance comme le prévoit l'article 2 du projet de loi. Nous pourrons sans doute nous entendre en commission mixte paritaire autour d'une proposition plus raisonnable.

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Pour nous, la priorité doit être la meilleure protection possible des citoyens, des salariés et des élus. À cette fin, il faut éviter de les exposer aux risques de contamination tout en maintenant la continuité démocratique. Réunir les conseillers municipaux dans un délai court n'est pas cohérent avec cette préoccupation. Cela participe, au contraire, à la confusion entretenue par les injonctions contradictoires appelant à tous rester confinés, sauf certains salariés de secteurs économiques non-essentiels.

Parce qu'il s'agit d'un impératif de protection des citoyens et que le report de ces réunions ne remet pas gravement en cause le fonctionnement démocratique, il ne nous semble pas nécessaire d'imposer le dépôt des listes dans ces délais. Nous actons la tenue du premier tour, quand bien même notre avis ne nous a pas été demandé. Il ne nous semble pas que reporter le dépôt des listes pose un problème démocratique, d'autant que dans beaucoup de cas, les majorités sortantes ont été reconduites. Nous devons tous respecter les consignes sanitaires, c'est pourquoi nous proposons de supprimer cet alinéa introduit par le Sénat.

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Madame la rapporteure, vous dites que la fixation de la date limite de dépôt procède de la pratique, mais elle figure dans le code électoral : le mardi, à 18 heures. Il faut donc absolument fixer une date.

Si les élections peuvent se tenir en juin – soyons optimistes –, le code électoral imposera le délai de dépôt des listes au mardi précédent le scrutin. L'avantage de la solution proposée par le Sénat est de nous éviter trois mois de tractations d'ici-là. À moins que vous ne considériez que tout le processus sera annulé, car il ne sera pas possible de tenir le scrutin en juin, mais ce n'est pas l'hypothèse que vous évoquiez ce matin. On peut toujours discuter pour pousser huit jours au-delà du 31 mars, mais il faut arrêter une date qui ne soit pas trop éloignée de celle du premier tour.

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Le principe de ce texte est de préserver les résultats du premier tour et leurs effets, qui constituent la donne du second tour. Ce point d'équilibre posé par le Sénat me semble d'autant plus pertinent que des questions techniques de droit électoral restent ouvertes, notamment concernant les comptes de campagne. Même en période de crise sanitaire, la vie politique et la campagne électorale continuent, y compris sans contact physique, par des moyens dématérialisés.

Par ailleurs, les délais inscrits dans le texte interrogent. Le 10 mai est la date fixée pour décider si le scrutin pourra se tenir un mois et demi plus tard ; retenir le 30 mai serait peut-être suffisant pour une élection au 20 juin.

Enfin, madame la rapporteure, la situation d'urgence nous impose de légiférer rapidement. Le Sénat a trouvé un compromis, qui par essence ne peut satisfaire tout le monde, mais la majorité doit parfois l'entendre. Pour agir vite, nous devons nous accorder sur le texte du Sénat. Dans le cas contraire, vous devrez assumer la responsabilité d'avoir refusé d'agir rapidement en adoptant le projet de loi conforme, et d'avoir allongé la procédure législative de deux ou trois jours au lieu de donner au Gouvernement les moyens d'agir.

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Ce qui détermine le dépôt des listes, le choix de les fusionner ou de les maintenir au second tour, ce sont les résultats du premier tour. Puisque la décision a été prise de conserver les résultats du premier tour, rien n'empêche de constituer les listes qui devront concourir au second dans le délai proposé par le Sénat. C'est matériellement possible sans contrevenir aux règles de confinement, et une fois que ce sera fait, nous pourrons nous concentrer sur l'effort qui nous est demandé.

Nous discutons d'une loi d'urgence. Une manière très simple de l'adopter dans les plus courts délais est de la voter dans les termes du Sénat. Il a été saisi en premier car ce projet concerne les collectivités territoriales, et il faut reconnaître la sagesse des sénateurs qui ont débattu et ont su revenir sur leurs propositions lorsque le Gouvernement leur en a fait la demande. Ainsi, de nombreux sénateurs souhaitaient procéder à l'installation aussi rapide que possible des élus désignés dès le premier tour, mais ils ont entendu les arguments du Gouvernement à l'encontre de cette option.

Pour répondre à l'urgence tout en maintenant les garanties démocratiques, nous devons maintenir l'équilibre trouvé par le Sénat. Il serait terrible que l'histoire retienne que nous avons achoppé uniquement sur la date du 31 mars, alors qu'il y a bien d'autres questions essentielles. L'urgence nous impose d'accepter un compromis républicain et démocratique.

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Je partage l'avis de MM. Bouillon et Schellenberger : il n'y a pas de raison sanitaire de reporter le délai de dépôt des listes, qui est possible de manière dématérialisée.

La question est donc politique. L'exigence démocratique impose le respect des résultats du premier tour et, quelle que soit la date du second tour, il doit être en relation avec ces résultats. Il ne serait pas raisonnable d'imposer le passage en commission mixte paritaire pour ce seul motif, qui n'a pas de fondement valable. L'argumentation de la rapporteure n'est pas solide du point de vue de la prévention sanitaire, et elle n'est pas conforme à notre droit – plutôt qu'à nos pratiques.

Enfin, je crois savoir que le Premier ministre lui-même a déjà déposé sa liste pour le second tour à l'élection municipale du Havre. L'exemple vient d'en haut.

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Notre volonté de converger est pleine et entière. Sur cette question de la date de dépôt des listes, je ne fais aucun procès à quiconque. Nous partageons le souhait de ne pas entrer dans une phase de tractations politiques dans cette période où toutes nos forces doivent se consacrer à la gestion de la crise sanitaire. L'esprit de concorde s'est aussi manifesté lors de l'examen du texte au Sénat : le Gouvernement comme les sénateurs ont accepté des concessions pour trouver des équilibres.

Pour autant, ce serait une erreur profonde d'obliger l'intégralité des candidats à déposer leur liste dans les jours qui viennent. Du point de vue sanitaire et pratique, nous savons tous que, dans les semaines qui viennent, la propagation du virus est inéluctable. Le nombre de personnes atteintes par le virus, qui verront des membres de leurs familles affectés ou qui connaîtront des décès sera malheureusement extrêmement important. Des colistiers et des têtes de liste dans de grandes villes, tels que MM. Christian Estrosi ou Joël Bruneau, ont été atteints.

Il n'est pas raisonnable de demander un dépôt des listes dans les jours qui viennent. Un grand nombre de candidats m'indiquent qu'ils ne souhaitent pas entrer prochainement dans une logique de tractation. Imaginer, en cette période, que les formations politiques puissent consacrer leur énergie à négocier des accords n'aurait aucun sens. Pour ma part, je ne conçois pas d'annoncer la semaine prochaine des accords ou des fusions de listes. Je suis responsable d'une formation politique, et j'ai mobilisé 100 % de mon énergie, ces derniers jours, à préparer ce projet de loi, pas aux élections municipales.

Ce serait d'autant moins raisonnable que l'incertitude plane sur la date du deuxième tour. Bien sûr, nous souhaitons tous que celui-ci puisse se tenir fin juin : cela signifierait que nous aurions vaincu le virus et que nous serions sortis de la crise sanitaire. C'est pourquoi une solution de compromis me semble d'attendre la remise du rapport sanitaire, pour évaluer collectivement s'il est possible de tenir le scrutin en juin. Si tel est le cas, dans les quarante-huit heures qui suivent, les listes pourront être déposées.

Nous avons échangé en amont sur le sujet, y compris avec les sénateurs. Si nous n'aboutissons pas à un texte conforme – ce qui serait certes souhaitable –, nous pourrons trouver un accord en commission mixte paritaire.

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Je soutiens les amendements de la rapporteure et de La France insoumise. Ils sont de bon sens pour deux raisons : dans la situation actuelle, les opérations électorales sont suspendues. Or, le dépôt des candidatures ouvrirait la campagne électorale du second tour. C'est complètement surréaliste dans la situation d'urgence sanitaire ! Nous devrions pourtant être vaccinés après les débats sur la tenue même du premier tour… Je ne comprends pas votre obsession de déposer à tout prix ces listes. Il n'y a ni masques, ni gel hydro-alcoolique dans les hôpitaux, mais la date de dépôt des candidatures pour le deuxième tour des élections muncipales monopolise le personnel politique. Ce n'est pas sérieux !

En outre, vous raisonnez en estimant que le scrutin aura lieu en juin. Rien n'est moins sûr ! Or, le dépôt des candidatures ne peut être décorrélé de la possibilité de tenir ce deuxième tour. S'il fallait tout refaire, y compris le premier tour, vous porteriez atteinte à la sincérité du vote.

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Je soutiens également l'amendement de la rapporteure. La crise sanitaire est grave et la priorité n'est pas de déposer les listes d'ici à mardi prochain.

Quant à envisager la dématérialisation de l'opération de fusion des listes, certains colistiers n'ont pas internet ni même accès à un ordinateur ! Nous nous devons de protéger la santé de nos compatriotes, et non de nous recroqueviller sur des considérations politiques.

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La véritable priorité, c'est d'examiner les dispositions relatives à l'état d'urgence sanitaire, non celles concernant l'organisation des élections municipales. Lorsque celle-ci aura basculé au titre III, laissant la place du titre Ier à l'état d'urgence, notre regard changera. M. Charles de Courson tient toujours de sages propos, mais à situation exceptionnelle – ô combien –, pratiques exceptionnelles. Nous devons porter un regard particulièrement novateur et tenter de trouver des solutions en conséquence.

Comme Mme Batho, je ne vois pas pourquoi on figerait le dépôt des listes de second tour à une date aussi proche. M. Guerini l'a rappelé, certains candidats sont touchés, directement ou indirectement, par la maladie et ne sont pas dans une situation optimale pour fusionner ou déposer leur liste. Quand nous aurons la date du deuxième tour, rien ne nous empêchera de prévoir le délai de dépôt des listes. Il faut clarifier la situation mais il n'est pas sérieux de procéder comme le propose le Sénat !

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Nous aurions moins donné le sentiment d'être obsédés par le sujet si l'ordonnancement du projet de loi avait été différent. Nos débats en séance publique permettront probablement d'y remédier.

Notre groupe n'a pas déposé d'amendement, considérant qu'un point d'équilibre avait été trouvé au Sénat où les débats ont été exigeants et de qualité. Le compromis, l'unité ne peuvent pas être à sens unique. Chacun doit faire des efforts ; nous en faisons sur d'autres articles du projet de loi qui ne nous réjouissent pas ou qui ne suscitent pas notre pleine adhésion.

Certaines listes ont déjà été déposées. Même si un responsable de parti estime que ce n'est pas son sujet, les tractations et les discussions ont parfois lieu avant le premier tour – chacun conçoit sa stratégie au-delà de ce premier tour. Ce n'est pas parce que vous laisserez trois mois qu'il n'y aura pas trois mois de palabres et de négociations politiques. Du reste, il arrive que des candidats meurent, parfois même avant le premier tour – c'est le cas dans la ville où se situe ma permanence. Tout cela est prévu par le code électoral.

Je le répète : le compromis et l'unité ne peuvent se réaliser systématiquement sur les bases de la majorité. Nous devons les construire ensemble et, dans une situation d'urgence, montrer notre capacité à aboutir à un vote conforme. Un résultat contraire serait incompréhensible. Compte tenu du travail du Sénat hier soir, nous étions plutôt venus dans cet état d'esprit, mais l'ouverture d'une séance demain semble me démentir…

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Quand je suis allé déposer ma liste mardi midi, j'ai eu l'impression que tous les candidats en compétition au deuxième tour dans l'arrondissement du Havre étaient présents à la sous-préfecture. Personne ne savait encore si les listes devaient être déposées avant 18 heures – ni le préfet ni les services n'avaient transmis d'information. Dans notre arrondissement, je ne sais donc pas s'il reste des listes à déposer – sans doute très peu, voire aucune…

Le compromis trouvé par les sénateurs, auxquels nous pouvons faire confiance pour leur regard singulier sur la vie communale, est satisfaisant, y compris du point de vue technique – notamment sur les questions essentielles de sécurité. Si l'on veut que les gens puissent se concentrer et ne soient pas en campagne électorale jusqu'au deuxième tour, il est sage de figer la situation au plus vite. Si cela avait été fait mardi, la question aurait été réglée. Cela s'est malheureusement joué à quelques heures…

Donner un peu de temps, c'est bien, mais aller jusqu'à deux ou trois mois serait remettre complètement en cause l'élection. L'idée est là, même si on ne le dit pas. S'il faut reprendre les opérations électorales dans leur intégralité, nous le ferons, mais libérons les esprits des uns et des autres afin qu'ils puissent concentrer leurs forces à combattre avec nos concitoyens, à les motiver et à faire en sorte que le confinement soit une réalité absolue. L'Association des maires de France est favorable à la rédaction proposée par le Sénat. Il serait sage d'aller dans le même sens.

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Contrairement à ce que dit Mme Delphine Batho, il ne s'agit pas de monopoliser les débats. Simplement, le titre comprenant ces dispositions est le premier du projet de loi.

En outre, il ne s'agit pas que des élections municipales ; il s'agit aussi de l'organisation décentralisée de la République : près de 36 000 communes maillent le territoire, et près de 5 000 d'entre elles s'interrogent sur un processus électoral qui avance ou qui recule selon les jours. Il faut le clarifier et ne pas laisser le temps filer parce que c'est aussi celui des petites manoeuvres.

Le processus électoral doit être respecté. Les listes sont normalement déposées le mardi qui suit le premier tour à 18 heures, et la campagne électorale ne dure que trois jours jusqu'au vendredi à minuit. Je crois qu'on peut parfaitement clarifier les choses. Cela éviterait de se bagarrer et on pourrait mettre cette question de côté en sachant qui connaîtra une triangulaire, une quadrangulaire ou autre. On est donc tranquille, sauf si vous pensez en réalité que les élections municipales ne pourront pas avoir lieu avant le 30 juin. Si vous faites ce pari, c'est assez audacieux et je m'en inquiète.

Avec ce chantage à la commission mixte paritaire sur un sujet qui peut paraître secondaire à nos concitoyens alors que nous devons prendre des mesures sanitaires d'urgence et soutenir nos entreprises en difficulté, alors que nos concitoyens sont malades et que certains meurent, vous ne mettez pas le bien commun au premier plan. Je vous le dis comme je le pense !

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Faisons attention à ne pas donner le sentiment que c'est une logique de petites manoeuvres qui l'emporte ! Je vous crois sincères, chers collègues, mais vous n'empêcherez pas une telle idée de se propager. Le Sénat, représentant des collectivités locales, a pris une décision : les électeurs ont tranché au premier tour et, si on considère que le suivant n'est pas remis en cause, il faut évidemment figer les résultats. Nous serions bien inspirés d'adopter une position se rapprochant de celle-ci.

Pour des raisons sanitaires, on n'est peut-être pas à quelques jours près. Mais si on repousse le délai de dépôt des listes jusqu'à la fin de la période envisagée, je le dis franchement : c'est ce qui restera de nos débats. Ce serait dommage car nous avons envie, comme tout le monde, que notre pays réussisse à traverser la crise porté par un sentiment d'unité nationale. Nous voulons être aux côtés de la majorité mais il faudrait vraiment que vous favorisiez un consensus sur ce point.

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Je l'ai dit ce matin : à force de s'adapter aux circonstances, on finit par perdre le fil du raisonnement. Rendons-nous compte de ce que nous sommes en train de faire : parce qu'il y a un désaccord entre le Sénat et la majorité à l'Assemblée nationale, ce débat va retarder de quarante-huit heures la possibilité, pour le Président de la République ou plutôt pour le conseil des ministres, de déclarer l'état d'urgence sanitaire. Voilà la réalité ! Et quelle est l'origine du problème ? Le fait qu'on a décidé d'organiser un second tour sur les résultats du premier, hypothétiquement dans trois mois.

Les deux raisonnements qui ont été tenus peuvent s'entendre. Mme Batho a raison de demander à quoi sert de fixer une date tant qu'on ne sait pas si les élections pourront avoir lieu, et de souligner l'impact potentiel que cela aurait sur des élections qui se tiendraient dans six mois si le premier tour devait être recommencé. Vous allez figer la situation électorale alors que les listes qui auront fusionné ne seront peut-être pas ensemble le coup suivant. L'idée d'organiser le second tour dans trois mois sans qu'on sache s'il aura lieu et, partant, comment les listes doivent être déposées, me paraît lunaire ! Pire encore, M. Guerini a souligné, à juste titre, qu'on ne peut pas exclure le décès de candidats têtes de listes, seuls habilités à déposer celles-ci entre les deux tours. Qu'une telle éventualité intervienne avant le 31 mars, ou plus tard dans la seconde hypothèse, et la liste concernée ne pourra plus se présenter. On nous répète que le second tour aura lieu là où l'élection n'a pas été acquise au premier tour et qu'on pourra fusionner les listes. Que la date retenue soit le 31 mars ou qu'elle soit plus tardive, le problème est exactement le même ! C'est tout aussi incohérent et bizarre – pour rester poli.

Ce qui importe avant tout, c'est que les titres suivants du projet de loi soient adoptés rapidement et que l'état d'urgence sanitaire puisse être déclaré. Or, lors de la dernière Conférence des Présidents, le président de l'Assemblée nationale a envisagé que la commission mixte paritaire ne soit pas conclusive si l'on adopte l'amendement de la rapporteure. On retarde donc de quarante-huit heures la déclaration de l'état d'urgence sanitaire. Franchement, la raison voudrait qu'on n'empêche pas la commission mixte paritaire d'être conclusive. Si elle se tient demain matin, cela ne sera pas un drame national. Mais au moins faut-il ne pas créer un blocage politique, pour ne pas dire politicien – car il s'agit bien d'une préoccupation électorale et même électoraliste – en suivant un raisonnement qui ne me paraît tenable ni constitutionnellement ni démocratiquement. Je pense qu'il faut faire attention à cette question et je me permets de lancer un appel solennel. Quelle image aurions-nous ? Elle serait, cette fois, méritée…

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Tout le monde peut s'exprimer sur cet article. Mais j'invite à aller vite afin que nous puissions examiner ensuite les autres parties du texte. Je ne veux priver personne de son droit de parole. J'en appelle à votre esprit de responsabilité.

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Le droit électoral laisse, en temps normal, quarante-huit heures pour le dépôt des listes en vue du second tour. C'est très court. Ce qui est prévu pour le moment – le 31 mars – permettrait de se rapprocher le plus possible des conditions normales. On figerait la situation et on passerait à autre chose. Si les élections ne pouvaient pas, finalement, avoir lieu avant le 30 juin, on rebattrait les cartes et on recommencerait tout à zéro. On fixe un délai parce qu'on prévoit que les élections pourront se dérouler. Si on pense qu'elles n'auront pas lieu, alors il faut ne rien prévoir du tout – ni la date du 31 mars ni celle du 30 juin.

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Je souhaite que l'on puisse envoyer un message cohérent. Lorsque le comité de scientifiques remettra un rapport au Parlement, à la mi-mai, nous saurons un peu plus ce qu'il en est de l'urgence sanitaire dans notre pays. Nous pourrons fixer en conséquence la date du scrutin et celle du dépôt des listes. Figer les choses alors qu'on ne sait pas quelle sera la situation sanitaire, cela me paraît impossible.

Les communes peuvent fonctionner, heureusement, même si 5 000 d'entre elles n'ont pas encore leur nouvel exécutif. Dans ma commune, le maire, qui ne se représentait pas, est présent sur le terrain pour répondre à l'urgence sanitaire – je pense en particulier au nettoyage et aux missions de police. Les arrêtés nécessaires sont pris par des personnes compétentes et parfaitement conscientes que l'urgence est de gérer la crise sanitaire. Chez moi, aucun élu ne m'a demandé, en cinq jours, la date de dépôt des listes pour le second tour. Arrêtons ce débat et essayons de trouver un accord en séance publique !

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Je soutiens pleinement les amendements identiques.

La tonalité de ce débat, en très fort décalage avec ce que vivent nos concitoyens, me stupéfie. Vous voulez figer absolument la situation au 31 mars alors qu'on voit bien ce qui s'est passé depuis une semaine. Qui aurait imaginé, il y a dix jours, que l'on aurait besoin de prendre autant de décisions en si peu de temps et de demander aux Français de changer de vie à ce point ? On a dû fermer les écoles et les universités, confiner nos concitoyens et faire cesser une partie de l'activité économique. Chacun a vu sa mission remise en cause, soit parce qu'il a fallu travailler deux fois plus – je pense aux soignants, aux pompiers, aux routiers, au secteur de l'agroalimentaire et aux caissiers, grâce à qui on nourrit tout le monde –, soit parce que des gens ont dû oeuvrer à domicile, voire arrêter leur activité, et en assumer toutes les conséquences matérielles et pratiques. Quand on est chef d'entreprise et qu'on a des salariés, on a des inquiétudes. Pour nos concitoyens, ce qui est intéressant dans ce texte, ce sont les titres II et III qui permettront de les accompagner.

La plupart de nos concitoyens ont accepté, quelles que soient leurs missions, de remettre en cause ce qu'ils ont l'habitude de faire, et nous en serions, de notre côté, incapables ? Cela ne me paraîtrait ni cohérent ni décent !

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Je vais vous redonner la parole, Monsieur Peu, même si vous l'avez déjà eue, vous faites comme vous voulez…

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Je veux bien que vous nous fassiez la leçon, mais cette discussion, à mes yeux totalement surréaliste au regard de l'urgence sanitaire dans notre pays, n'a d'autre origine que la décision de La République en marche de déposer un amendement qui remet en cause ce que le Sénat a proposé cette nuit. Ce débat ne devrait pas avoir lieu : retirez votre amendement et passons à la suite !

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Pourquoi votre amendement, madame la rapporteure, est-il inutile et dangereux ? Tout d'abord, si l'échéance du mois de juin ne peut pas être respectée, ce que vous proposez ne sert à rien : une nouvelle loi fixera de nouvelles dates. Ensuite, si nous adoptons votre amendement, c'est la règle actuelle qui continuera à s'appliquer : depuis mardi dernier, à 18 heures, on ne peut plus déposer de listes. Ceux qui l'ont fait pourront-ils « retirer leurs billes » ? C'est une question à laquelle on ne sait pas répondre – je pense néanmoins qu'elle sera négative.

Par ailleurs, comme l'ont souligné beaucoup de collègues, nous allons retarder les choses de deux jours. À quoi joue-t-on ? On ferait mieux de se caler sur le Sénat. Il y a d'autres questions à traiter. Les arguments qui ont été évoqués, notamment sanitaires, ne tiennent pas. C'est la tête de liste qui fait le dépôt. Pensez-vous qu'il est compliqué d'aller à la sous-préfecture pour s'en occuper ? Beaucoup l'ont déjà fait.

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Avant de donner la parole à la rapporteure et de passer au vote, je souhaite répondre à M. Peu.

Premièrement : je ne fais pas la leçon. Je préside la commission des Lois. J'organise les débats, ce qui est légèrement différent.

Deuxièmement : avec la rapporteure et d'autres, depuis trois jours, nous échangeons inlassablement avec le Sénat pour parvenir à un compromis, ce que nous avons réussi à faire sur la quasi-totalité des points grâce à un dialogue fructueux, nourri et poussé. Malheureusement, nous ne sommes pas parvenus à rapprocher les positions sur ce point-là. Il est donc normal que nous exprimions aujourd'hui notre position en commission des Lois.

Troisièmement : je n'ai pas entravé le débat puisque j'ai donné la parole à plus de quinze orateurs !

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Nous constatons combien cette question n'est pas anodine. Nous voulons tous éviter que les Français qui écoutent nos débats considèrent que nous ne serions pas complètement investis dans le règlement de la crise sanitaire et que nous nous soucierions uniquement du dépôt des listes. La sincérité de tous me semble évidente. Je ne souhaite pas que nous nous focalisions sur un point juridique puisqu'il n'y a pas de précédent et que la situation que nous connaissons est inédite. C'est à nous qu'il appartient de décider de ce que nous voulons faire.

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Naturellement, mais il me semble que c'est le cas de nos propositions. Mon inquiétude, partagée par des collègues de la majorité et de l'opposition, c'est qu'en ouvrant un débat sur le dépôt des listes le 31 mars, les Français risquent de nous juger négativement, comme l'a dit Mme Delphine Batho, et déconnectés de la réalité.

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Vous nous menacez pourtant d'une commission mixte paritaire qui nous retardera de deux jours !

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C'est le Sénat qui a introduit la disposition arrêtant au 31 mars le dépôt des listes, pas nous ! Je respecte parfaitement son travail, comme vous avez pu le constater avec l'ouverture dont j'ai fait montre, mais le problème n'est pas là. Il s'agit de ne pas commettre la « faute » d'ouvrir un débat électoral, pour ne pas dire politicien, dans ces circonstances. Le délai d'ici au 31 mars peut nous paraître court, mais il me semble que les Français le trouveront très long s'ils n'entendent parler que d'accords électoraux d'ici là ! Je préfèrerais que l'on dise purement et simplement que la campagne est gelée, suspendue, qu'elle n'a plus lieu d'être.

Lorsque le comité de scientifiques rendra son avis, au mois de mai, et qu'il sera par hypothèse possible d'organiser le second tour avant l'été, il sera bien temps de déposer les listes. Peut-être peut-on l'inscrire dans la loi sans préciser qu'il s'agit du mardi précédant le scrutin puisque telle semble être votre préoccupation. Il est même possible que ce soit bien plus en amont, mais après le décret de convocation des électeurs. Tel est le sens de mon amendement.

La Commission adopte les amendements identiques CL85 et CL12

Elle est saisie de l'amendement CL43 de Mme Delphine Batho

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Amendement de cohérence visant à substituer aux mots « comité national scientifique » les mots « comité de scientifiques », conformément au code de la santé publique tel qu'il résultera de l'article 5. Nous serons assurés que le comité consulté sera le même que celui qui examine l'ensemble des mesures liées à l'état d'urgence sanitaire.

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Nouveau motif de commission mixte paritaire !

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Peut-être êtes-vous arrivé un peu en retard ou n'avez-vous pas fait attention, mais nous avons adopté, dès le début de la séance, le premier amendement discuté, l'amendement CL42 de Mme Bathot, ce qui interdit tout vote conforme du texte.

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Cela ne m'a pas échappé mais j'acte l'accumulation des divergences. Si un seul point soulève un problème en séance publique, il est aisé de déposer un amendement de retour à la version précédente. Mais, il faut le dire très clairement à ceux qui nous écoutent, on se dirige vers une forme d'affrontement. Il y aura une commission mixte paritaire, ce qui est plutôt dommageable. Quoi qu'il en soit, continuons, et nous verrons bien !

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Je ne crois pas. Vous savez bien que nous travaillons d'une manière fructueuse avec nos collègues sénateurs. La commission mixte paritaire n'est pas vouée inéluctablement à l'échec. Je suis convaincue que nous parviendrons à un compromis qui satisfera tout le monde. En tout cas, je suis certaine que la rapporteure, le président de la commission des Lois du Sénat et moi-même travaillerons jusqu'au bout en ce sens, au service de l'intérêt général.

La Commission adopte l'amendement

Les amendements CL9 et CL10 de M. Raphaël Schellenberger sont retirés

La Commission en vient à l'amendement CL30 de M. Raphaël Schellenberger

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Il s'agit d'inscrire très clairement dans la loi que la première réunion du conseil municipal doit se tenir au plus tard cinq jours après la date de la fin de l'urgence sanitaire fixée par décret, afin d'installer les maires et les adjoints élus au premier tour. Ceci évitera de rédiger un texte de loi ou d'attendre je ne sais quoi.

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Demande de retrait car je ne pense pas qu'il soit nécessaire de poser ainsi un délai pour la première réunion à la suite de l'entrée en fonction des conseillers municipaux élus. Il me semble évident que ces derniers voudront se réunir assez rapidement et qu'ils sont appelés à le faire.

De plus, monsieur Gosselin, je n'ose pas donner un avis favorable : je craindrais que vous me soupçonniez de ne pas vouloir un vote conforme.

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C'est la question de la réunion officielle pour l'installation des conseillers municipaux qui est posée puisque les élus au premier tour ne sont pas installés et que, jusqu'à preuve du contraire, ils ne sont donc pas conseillers municipaux.

La proposition de MM. Schellenberger et Gosselin me semble totalement justifiée. Il n'est pas question de réunir les conseillers municipaux tant que l'état d'urgence sanitaire ne sera pas levé – c'est d'ailleurs pourquoi un dispositif spécial a été prévu pour que la nomination des maires et de leurs adjoints n'ait pas lieu dans l'immédiat.

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Nous déposerons un amendement à peu près identique en séance publique. Pour de nombreuses raisons, des incertitudes pèseront sur ces élections municipales, y compris pour les 60 % de communes dont les résultats définitifs sont connus puisque l'installation des maires est décalée. Il convient donc, à tout le moins, de sécuriser la situation en disposant que les conseils municipaux se réuniront au plus tard cinq jours après la levée de l'état d'urgence.

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D'après vous, madame la rapporteure, et en l'état du texte, à quelle date ces réunions seront-elles possibles ? Il me semble que ce ne sera le cas qu'après les résultats du second tour. Pourriez-vous clarifier ce point, qui justifie un tel amendement ?

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La question tacite de notre discussion est la suivante : quid des conséquences du premier tour ?

Nous avons évoqué les incertitudes qui pèsent sur les communes où un second tour se déroulera. Cet amendement vise à lever celles qui pèsent sur les communes où il n'y en aura pas, où le résultat est définitif, en fixant la date des installations – cinq jours après la levée de l'état d'urgence sanitaire. À défaut, outre que l'on accepterait l'idée de renoncer aux résultats du premier tour dans les communes qui en auront un second, nous laisserions entendre que nous ne serions, là encore, pas certains des conséquences du premier tour !

L'adoption de cet amendement constituerait un message politique fort.

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C'est l'installation du conseil qui permettra juridiquement aux élus du premier tour d'être conseillers municipaux. Tant que cette réunion n'aura pas eu lieu, le processus électoral ne sera pas complet. Vous dites, madame la rapporteure, que les conseils municipaux « peuvent vouloir », mais on ne peut laisser à leur libre appréciation cette décision. Rappelons que c'est le maire sortant, éventuellement battu, qui convoque le conseil nouvellement élu ! Voyez la difficulté : des mesures dilatoires, des maires attendant l'injonction du préfet ne sont pas des hypothèses d'école…

Nous vous proposons de combler ce vide juridique. Puisque nous sommes partis pour modifier le texte, apportons cette sécurité ! Ces cinq jours francs s'appliqueront dans tout le pays, ce qui garantira l'égalité territoriale et le respect du processus électoral.

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Je travaillerai ce point d'ici à la séance publique, en portant une attention particulière à l'articulation avec la fin de l'urgence sanitaire, dans le cas où celle-ci serait prolongée sur certaines parties du territoire national seulement. Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

Monsieur de Courson, l'alinéa 7 apporte une réponse à votre question puisqu'il précise que « les conseillers municipaux et communautaires élus dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 entrent en fonction à une date fixée par décret au plus tard au mois de juin, aussitôt que la situation sanitaire le permet au regard de l'analyse du comité national scientifique ».

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Je maintiens l'amendement. Nous nous associerons éventuellement à celui que vous pourriez déposer en vue de l'examen en séance publique.

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Cet amendement est indispensable : il existe des maires battus qui ne convoqueront pas les conseils municipaux. D'ordinaire, le maire sortant est obligé de le faire entre le vendredi et le dimanche qui suivent l'élection. Si l'on n'impose pas de date, on risque d'assister à des comportements peu civiques.

En revanche, la rédaction doit être modifiée. Si l'état d'urgence sanitaire était levé un samedi, l'installation devrait avoir lieu en pleine semaine. Il conviendrait de préciser que la réunion doit être organisée entre le vendredi et le dimanche qui suivent la levée de l'état d'urgence sanitaire. En outre, pour les élections municipales, le délai de cinq jours ne s'applique pas. Vous pouvez convoquer le mardi soir une réunion pour le vendredi.

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Votre réponse, madame la rapporteure, ne me satisfait pas. Faut-il déduire de la lecture de l'alinéa 7 que le maire sortant ne convoque pas le conseil, mais que les conseillers municipaux et communautaires entrent en fonction à une date fixée par décret ? Cette rédaction est pour le moins étrange et il convient de la modifier !

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À partir du moment où le principe des cinq jours est acté, on peut imaginer que le Gouvernement précisera les modalités dans le décret prévu à l'alinéa 7.

Il nous semble important de poser le principe de la convocation automatique des conseils municipaux élus, immédiatement après la levée de l'état d'urgence sanitaire. La rédaction de notre amendement, même si elle n'est pas optimale d'un point de vue juridique, est suffisante pour expliciter le mécanisme d'exception que nous proposons.

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Le maire, en tant que représentant de l'État dans la commune, peut convoquer le conseil municipal. Cela paraît d'autant plus évident que les pouvoirs des maires actuels seront prorogés. Il faut respecter le parallélisme des compétences et des formes.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CL60 de M. Jean-Christophe Lagarde.

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La campagne électorale du second tour devrait s'étaler sur trois semaines. Le délai de quinze jours que prévoit le texte n'est pas suffisant. Convenons qu'il ne s'agit pas d'une élection normale et qu'il est peu probable que les électeurs se souviendront encore des débats qui se sont tenus avant le premier tour. Il faut donner toutes les garanties démocratiques au débat électoral.

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Le délai de quinze jours est suffisant. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine l'amendement CL128 de Mme Valérie Rabault.

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Nos échanges m'ont laissé entendre que vous étiez favorable à certains amendements. J'ai cru comprendre aussi qu'il serait difficile, pour les listes élues dès le premier tour, de rassembler les pièces nécessaires et de déposer leurs comptes de campagne en temps voulu, d'autant que les experts-comptables éprouvent des difficultés à exercer leur office. Nous proposons donc de reporter cette échéance.

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Les candidats qualifiés ont déjà eu beaucoup de temps pour finaliser leurs comptes du premier tour. Il ne me semble pas nécessaire d'étendre de neuf semaines le délai qui ne servira qu'à retracer les dépenses pour le second tour. Par ailleurs, il me semble que les experts-comptables peuvent assurer leur mission par télétravail.

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En période de crise sanitaire, il est compliqué pour le mandataire financier de régler certaines dépenses ou de récolter des recettes supplémentaires. Il serait raisonnable de reporter la date de dépôt afin que les candidats et les mandataires financiers puissent se réunir et rassembler les pièces justificatives.

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La même philosophie préside à l'amendement suivant, qui aurait pu être présenté en discussion commune. Se réunir pour examiner les factures alors que nous sommes censés observer les gestes barrières et ne pas toucher les mêmes papiers me paraît matériellement impossible.

Il reste désormais aux candidats élus au premier tour un mois et trois semaines pour déposer leurs comptes de campagne. L'Ordre des experts-comptables nous alerte sur le fait que ses membres fonctionnent en mode dégradé, comme toutes les entreprises, et qu'ils ne seront peut-être pas en mesure de certifier les comptes dans les délais. Il me semble logique de reporter l'échéance. À supposer que le second tour se tienne au mois de juin, les cabinets auront juste repris leur activité et il faudra tenir compte des congés d'été : septembre me paraît raisonnable. Il n'est pas nécessaire de renvoyer cela à l'ordonnance. Nous pouvons régler nous-mêmes ce problème technique.

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Sur un plan pratique, le confinement fait obstacle au règlement des comptes de campagne, puisqu'il faut échanger un certain nombre de pièces. Sur un plan juridique, votre approche est à géométrie variable et vous reprenez les arguments seulement lorsqu'ils vous arrangent : vous expliquez qu'il ne faut pas reporter l'échéance parce que la situation est figée, mais vous souhaitez repousser très loin la date de dépôt des listes !

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Pour toutes les raisons invoquées, il convient de donner un peu plus de temps, d'autant que les dépenses électorales ne sont pas figées : j'observe en effet que le texte prévoit d'en remonter le plafond.

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Compte tenu de vos arguments, je propose de travailler ce point pour la séance. Je vous demande de bien vouloir retirer vos amendements.

L'amendement CL128 est retiré, de même que l'amendement CL61 de M. Jean-Christophe Lagarde.

La Commission passe à l'examen de l'amendement CL129 de Mme Valérie Rabault.

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Les équipes sortantes, les maires, certains de leurs adjoints, seront chargés d'administrer leur commune durant cette période que nous souhaitons la plus brève possible. Il est important de garantir aux équipes élues dès le premier tour un droit à l'information, surtout dans les cas où l'alternance aura rendu la situation plus ardue. Il convient de garantir que l'ensemble des décisions, notamment les arrêtés, seront automatiquement transmises aux personnes élues dès le premier tour.

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Cette proposition me semble de bon aloi. Avis favorable.

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Cet amendement pose une question de fond. Prenons l'exemple d'une commune dans laquelle la liste sortante est battue. L'ancien conseil municipal est maintenu jusqu'au mois de juin, si l'on retient une hypothèse optimiste, et la question est de savoir de quels pouvoirs il dispose. Tel que le texte est rédigé, ce n'est pas clair. Je ne dis pas que le problème est simple à régler. Ne pourrait-on pas opter pour un dispositif comparable à celui des délégations spéciales, c'est-à-dire préciser que les anciens exécutifs doivent se contenter d'expédier les affaires courantes, selon l'expression consacrée ? Dans ma circonscription, certaines listes ont battu celles des maires sortants. On me demande si, dans les trois ou quatre mois à venir, l'ancien conseil municipal pourra engager de nouveaux investissements. Le problème se pose dans les communes dont le budget n'a pas été voté.

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Je suis très dubitatif devant cet amendement, qui vise « tout acte pris par le maire ». Pour avoir été, pendant dix-sept ans, maire d'une ville d'une certaine importance, je puis témoigner : un maire est amené à prendre soixante actes par jour, dont certains n'ont absolument aucun intérêt pour l'opposition. La crainte que manifeste cet amendement peut concerner, par exemple, un chantier contesté, comme cela était le cas de la médiathèque qui aurait dû être lancée en 2001, lorsque j'ai été élu maire. J'imagine ce qui se serait passé si le maire sortant, quoique battu, était resté en place en raison de circonstances exceptionnelles, et avait pu lancer ce chantier contre lequel les électeurs venaient de se prononcer. Cela dit, on peut avoir confiance, me semble-t-il, dans le sens républicain de l'ensemble des maires.

Limiter les prérogatives des exécutifs sortants aux affaires courantes rendrait un équilibre difficile. Il me paraîtrait plus judicieux de prévoir la communication aux nouveaux élus des décisions du maire prises sur la base de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales puisque, de toute façon, il faudra qu'il en soit rendu compte lors de la séance du conseil municipal suivant l'élection du nouveau maire. Tous les autres actes que le maire serait amené à prendre, par exemple des arrêtés d'insalubrité – ce qui peut être important en ce moment –, ne seraient pas transmis. De toute façon, ils sont publics ; il n'est donc pas nécessaire de surcharger des administrations qui fonctionnent en mode dégradé.

En tout état de cause, il ne serait pas opportun d'essayer de distinguer entre les affaires courantes et celles qui ne le sont pas. Étant donné la multiplicité des situations dans les communes de France, on risquerait d'empêcher la réalisation d'actes essentiels, notamment du fait des différents délais administratifs. Cela pourrait mettre en péril la rentrée scolaire ou encore empêcher l'organisation du marché de Noël de Strasbourg.

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L'esprit de cet amendement me paraît intéressant du point de vue du « tuilage ». Pour ce qui est de la gestion des affaires courantes, dès lors que la loi proroge les mandats, il n'est pas question de limiter d'une quelconque manière les pouvoirs des maires et des conseils municipaux. Rien, juridiquement, n'empêchera les conseils municipaux de se réunir, y compris pour voter le budget primitif, puisque la date va être décalée au 31 juillet et qu'il n'est pas certain que le second tour des élections municipales aura bien lieu avant la fin du mois de juin. Expédier les affaires courantes aurait pu sembler une hypothèse de bon aloi pour quelques semaines, mais la situation risque de se prolonger plusieurs mois. Il faut avoir en tête que les élus actuels conserveront la plénitude de leurs pouvoirs, sous le contrôle du juge administratif : ce point ne me semble pas pouvoir faire l'objet d'un quelconque débat.

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M. Philippe Gosselin a laissé supposer que les conseils municipaux sortants pourraient se réunir alors même que l'installation des nouveaux exécutifs a été interdite en cette fin de semaine. Je voudrais avoir des précisions sur ce point, très important, car de nombreux maires s'inquiètent à ce propos. On laisse la main aux équipes sortantes, mais cela doit être entendu dans le sens qu'indiquait M. Charles de Courson : elles ne feront qu'expédier les affaires courantes. À aucun moment, me semble-t-il, personne n'a eu l'intention de faire en sorte que la prorogation leur permette de se réunir et de délibérer, voire de préparer les budgets. Dans le cas contraire, il faudrait que vous m'expliquiez pourquoi il était impossible d'installer les nouveaux conseils municipaux.

En ce qui concerne l'amendement CL129, je suis prêt à le retirer pour en améliorer la rédaction d'ici à la séance.

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Je pense que, d'ici au 10 mai, jusqu'à ce que les conditions permettant de lever l'état d'urgence sanitaire soient réunies, il ne sera pas réellement possible de réunir les conseils municipaux. Mais je ne suis pas sûr que, légalement, on puisse totalement empêcher leur tenue. En revanche, entre le moment où l'état d'urgence sanitaire aura été levé et l'organisation du second tour, dans le cadre d'un retour à la normale et sans confinement, je suis quasiment certain que, légalement, et même si ce serait peut-être un détournement de l'esprit de la loi, les conseils municipaux pourront être convoqués. Et, du fait de la prorogation des pouvoirs, ce ne serait pas nécessairement pour la gestion des affaires courantes. Comme le disait Jean-Christophe Lagarde, il faut bien organiser la rentrée scolaire, faire des travaux dépassant le simple entretien pour accueillir les élèves, passer certains marchés publics pour les cantines ou plus largement l'approvisionnement, prendre des décisions concernant les piscines ou les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Cela vaudrait aussi, me semble-t-il, pour les intercommunalités.

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Les conseils municipaux peuvent se réunir. C'est prévu mais ils ne sont pas obligés de le faire. Par ailleurs, un certain nombre de modalités pratiques ont été énumérées à l'article 7 B : le quorum a été abaissé, les mandataires pourront détenir deux procurations, il sera possible de délibérer par visioconférence.

Je vous propose, monsieur Bouillon, que nous retravaillions cet amendement en vue de la séance. D'une part, tel qu'il est rédigé, il pourrait suggérer qu'un candidat élu au premier tour puisse être traité de la même façon qu'un élu de l'opposition, ce qui n'est pas concevable. D'autre part, il paraît difficile de limiter à la gestion des affaires courantes les pouvoirs des maires dont le mandat a été prorogé alors même que, dans le cadre de la crise sanitaire, on peut avoir besoin, tout au contraire, de les renforcer.

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Il ne faut pas confondre la gestion des affaires courantes, qui englobe celle de la crise, et peut nécessiter que le maire dispose de prérogatives exorbitantes du droit commun, et la gestion politique de la collectivité, qui nécessite la délibération du conseil municipal et suppose notamment l'engagement de projets. Toutes les décisions que le maire sera amené à prendre dans les semaines ou les mois qui nous séparent de l'installation du nouvel exécutif ne doivent pas nécessiter de réunion du conseil municipal. Elles entreront soit dans les délégations du maire, soit dans les délégations exceptionnelles que la loi, l'ordonnance ou le décret lui confieront. Voilà ce qu'il importe de préciser.

L'amendement est retiré.

La Commission adopte l'article 1er modifié.

Article 1er bis : Modalités de réunion du conseil municipal pendant la crise sanitaire

La Commission discute de l'amendement CL86 de la rapporteure.

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Cet amendement vise à supprimer la perspective ouverte par le Sénat d'une élection du maire et des adjoints par un vote à distance, par correspondance ou par voie électronique. Je ne crois pas qu'on puisse élire un exécutif local de cette manière : le scrutin secret à plusieurs tours s'oppose à de telles pratiques. On s'attend justement à ce que les échanges entre les conseillers entre les tours de scrutin permettent de modifier les positions initiales. En revanche, une évolution de cet ordre pourrait être retenue avec intérêt dans le fonctionnement courant des collectivités territoriales et pour les scrutins ordinaires, habituellement à main levée. Dans le contexte d'état d'urgence sanitaire que nous connaissons, toutes les procédures qui évitent la concentration physique d'élus pour accomplir leur mission me semblent devoir être explorées, voire privilégiées.

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Vous avez raison, madame la rapporteure : il n'est pas possible d'utiliser ces moyens pour élire des personnes.

En revanche, il faut absolument que vous tranchiez la question de savoir si les maires actuellement en fonction, dont le mandat est prorogé, peuvent réunir le conseil municipal. Selon moi, tant que dure la crise sanitaire, la réponse est non. De nombreux maires nouvellement élus nous appellent pour nous faire part de leur incompréhension : d'un côté la loi prévoit – en tout cas, jusqu'à ce que nous votions le présent texte – que le conseil municipal doit être convoqué pour l'élection du maire et des adjoints, mais, de l'autre, on leur explique que c'est interdit. Il faut les éclairer.

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La disposition introduite par le Sénat que vise à supprimer cet amendement est caduque, puisque l'installation des nouveaux conseils municipaux a été renvoyée à plus tard. En revanche, il faut que les choses soient claires en ce qui concerne les implications de ce report : en réalité, cette décision vaut interdiction de réunir les conseils municipaux pendant la période qui nous sépare de la sortie de la crise sanitaire. Nous devons l'inscrire de façon claire dans le texte. Cela veut dire que le maire, qui d'ordinaire a deux casquettes, celle de président d'une collectivité territoriale et celle d'agent de l'État au niveau communal, ne dispose plus que de la seconde. Il est à la tête d'une administration ; il est le représentant de l'État dans un territoire défini ; c'est en cette qualité qu'il gère les affaires courantes, y compris la crise. Mais il n'est plus à la tête de la collectivité territoriale, parce que, dans l'absolu, on n'a pas besoin de celle-ci pour gérer la crise : ce qu'il faut, ce sont les moyens que le représentant de l'État administre. Cela, il faut l'écrire noir sur blanc dans le projet de loi au cours de la séance publique. Il serait inacceptable qu'un maire puisse réunir le conseil municipal pour prendre des décisions dans le cadre de la gestion de crise alors que l'installation des nouveaux élus n'a pas été autorisée.

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Ce qu'il faudrait savoir, c'est si le mandat actuel des élus locaux est prolongé jusqu'à la sortie de la crise et si les conseils municipaux conservent leurs pouvoirs. Certaines décisions – je pense notamment aux conventions, aux contrats ou à leur renouvellement – doivent impérativement être prises par délibération de cette assemblée, qui doit d'ailleurs être réunie une fois par trimestre. Si on estime que les conseils municipaux ne doivent pas se réunir, il faut prévoir une dérogation pour tous ces sujets et lever cette obligation. Les maires se trouveraient à défaut dans l'illégalité pour n'avoir pas convoqué le conseil municipal.

Si on considère que les élus sortants restent légitimes jusqu'à l'installation de leurs successeurs éventuels, on peut aussi établir que le conseil municipal délibère dans d'autres conditions qu'en se réunissant physiquement dans une salle dédiée, par exemple en visioconférence, avec une technique qui permette au peuple de suivre les délibérations. Il faudrait s'assurer de la faisabilité de la chose, mais ce serait la moins mauvaise des solutions.

À défaut, un problème juridique se posera. S'en tenir à la gestion des affaires courantes ne serait envisageable qu'un ou deux mois. Chacun de nous a été maire ou à tout le moins élu local ; il sait le nombre de questions à traiter dans un conseil municipal qui se réunit à une fréquence mensuelle. Il nous faut trouver des modalités de réunion qui garantissent la sécurité des élus et la transparence des décisions prises.

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Ces débats nous démontrent combien nos modes de décision sont obsolètes, à l'heure pourtant où l'État dématérialise à tour de bras sans s'interroger sur l'accessibilité aux documents concernés.

Que les collectivités ne puissent mettre en place des modalités de prise de décision s'appuyant sur les moyens modernes est incompréhensible. L'alinéa que la rapporteure entend supprimer constitue vraiment une invitation à prendre les décisions autrement.

Dans cet État centralisé qui entend décider de tout, on pourrait au contraire établir que les collectivités choisissent en début de mandat la façon dont elles souhaitent fonctionner.

Certes, l'article est devenu caduc puisque la question de la désignation du maire a été réglée. Mais nous sommes invités à réfléchir à l'opportunité de prendre demain des décisions à distance, en évitant de réunir le conseil municipal pour une délibération technique, comme on le fait parfois aujourd'hui. Ce serait un moyen de réduire notre bilan carbone.

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Monsieur Lecoq, si le titre III est voté, nous habiliterons le Gouvernement en vertu de l'alinéa 46 de l'article 7 à déterminer par ordonnance les modalités de réunion des assemblées délibérantes et des exécutifs locaux. Les questions que vous évoquez trouveront ainsi une réponse.

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Concernant le bilan carbone des réunions de conseil municipal, cher Bertrand Pancher, il ne s'agit que de parcourir quelques centaines de mètres, au pire un ou deux kilomètres pour atteindre le bourg ou le centre-ville, ce qui vient relativiser votre préoccupation.

La question de la validité et de la sérénité des votes est autrement importante. Si on décide d'appliquer de telles modalités de vote aux conseils municipaux, il faut s'interroger sur l'opportunité de le faire aux conseils communautaires et, peut-être, au Parlement. Il faut en débattre : la possibilité de voter à l'Assemblée nationale sans être présent pose de vraies questions.

Sont également concernés les commissions d'appel d'offres, les centres communaux d'action sociale (CCAS) ainsi que les autres instances ou commissions municipales dont les activités seraient bloquées.

Que l'alinéa 8 soit supprimé ou non, des difficultés se présentent, ce qui montre une fois de plus la nécessité de clarifier la notion d'affaires courantes. Il est question ici de modalités de vote, mais encore faudrait-il savoir sur quels sujets il s'agira de prendre des décisions.

La Commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 1er bis modifié.

Article 2 : Habilitation à légiférer par ordonnances sur le report du second tour des élections municipales

La Commission adopte l'amendement de cohérence CL84 de la rapporteure.

Elle adopte l'article 2 modifié.

Article 3 : Report de l'élection des représentants des Français de l'étranger

La Commission est saisie de l'amendement CL83 de la rapporteure.

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Il s'agit de supprimer la seconde phrase de l'alinéa 3.

La Commission adopte l'amendement.

Elle est saisie des amendements CL82 et CL98 de M. M'Jid El Guerrab.

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L'amendement CL82 vise à reporter les élections consulaires du mois de juin au mois de septembre 2020.

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Si la réunion d'un conseil municipal semble possible malgré les circonstances exceptionnelles actuelles, la question se pose en revanche pour les élections consulaires, en raison d'un éloignement important. L'idée de notre collègue El Guerrab serait de saisir l'occasion de ces élections pour tester un vote exclusivement par internet.

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L'avis est défavorable sur l'amendement CL82 : les élus consulaires étant appelés à prendre part aux élections sénatoriales, le report de leur élection entraînerait le décalage de celle des sénateurs. Une décision aussi lourde, qui serait d'ailleurs d'ordre organique, ne saurait être prise par amendement.

Quant à l'amendement CL98, je ne suis pas sûre d'en comprendre le sens. Il est en effet déjà possible de prendre part à l'élection consulaire par voie électronique. Je vous demanderai donc de bien vouloir le retirer.

L'amendement CL98 est retiré.

La Commission rejette l'amendement CL82.

Elle adopte l'article 3 modifié.

TITRE II

L'ÉTAT D'URGENCE SANITAIRE

Article 4 (art. L. 1451-1 du code de la santé publique) : Coordination

La Commission adopte l'article 4 sans modification.

Article 5 (art. L. 3131-1, L. 3131-8, L. 3131-10, et L. 3131-20 à L. 3131-28 [nouveaux] du code de la santé publique) : État d'urgence sanitaire

La Commission examine l'amendement CL25 de M. Jean-Luc Mélenchon.

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L'amendement vise à protéger celles et ceux qui sont contraints de travailler.

Vous avez sans doute remarqué que les débrayages et les droits de retrait se multiplient : les travailleurs des chantiers de Saint-Nazaire, les facteurs, les éboueurs d'Otus en Seine-Saint-Denis ont manifesté leur mécontentement de ne pouvoir travailler dans des conditions sanitaires correctes. Quant aux salariés d'Amazon, dont l'activité n'est pourtant pas indispensable, ils font face à un danger grave et imminent : les entrepôts rassemblent entre 500 et 2 000 personnes. Chez Dunlop, en Picardie, des ouvriers ont été contraints de poursuivre leur travail alors qu'un cas de coronavirus avait été détecté chez l'un de leurs collègues. Il est probable que, comme en Italie, nous connaissions dans les jours qui viennent des grèves massives. Comment ne pas comprendre, d'ailleurs, la colère légitime de citoyens, de travailleurs menacés d'être contaminés ?

Philippe Martinez, secrétaire général de la Confédération générale du travail (CGT), a appelé à arrêter toute activité non essentielle, et nous nous associons à cet appel. Laurent Berger, son homologue de la Confédération française démocratique du travail (CFDT), a quant à lui déclaré que la priorité devait être la protection des travailleurs. Nous proposons par cet amendement que le ministre du travail puisse prendre toute mesure pour que les employeurs veillent à ce que les salariés portent des matériels de protection adaptés sur leur lieu de travail. Nous proposons également que les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), quand ils existent, soient consultés.

Beaucoup de nos concitoyens sont concernés : le télétravail n'est en effet possible que pour les cadres, essentiellement, et tous les métiers indispensables à la vie de la nation tels que caissière, éboueur, agent de la RATP, ne peuvent être exercés à distance. Contraints de travailler, ces salariés sont bien souvent dans des conditions totalement anxiogènes et dangereuses pour leur vie.

Alors que des personnes sont verbalisées dans la rue parce qu'elles sortent sans justificatif – la Seine-Saint-Denis est de ce point de vue parfaitement surveillée puisqu'on y compte le plus grand nombre d'infractions constatées –, « en même temps » on laisse les entreprises mettre en danger une quantité massive de salariés, notamment dans les secteurs où l'activité n'est pas aujourd'hui indispensable.

Parmi les pouvoirs spécifiques conférés à l'État par ce texte devrait impérativement figurer celui de contraindre les entreprises à veiller à ce que les activités essentielles s'exercent dans des conditions sanitaires correctes. Celles qui ne le sont pas doivent, quant à elles, cesser.

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L'amendement pose des questions légitimes et appelle l'attention sur des points qui nous préoccupent tous.

S'agissant de l'instauration de l'état d'urgence sanitaire, qui entraîne certaines restrictions à la liberté de se réunir, d'aller et de venir et d'entreprendre, il interroge la logique choisie par le Sénat, qui consiste à énumérer les mesures pouvant être prises par le Premier ministre. Or cette énumération présente le risque d'oublier des catégories. Nous devrons débattre de ce point en séance avec le Gouvernement, pour voir quelles mesures utiles pourraient avoir été oubliées, même si nous n'entrons pas dans un tel niveau de détail. Le Gouvernement devra également nous éclairer sur la disponibilité des masques, que vous évoquiez.

En outre, cet amendement relève plutôt du titre III du projet de loi et des mesures devant être prises de manière transitoire pour lutter contre l'épidémie.

Enfin, l'amendement semble relever davantage des obligations incombant aux entreprises dans le but de garantir la sécurité et la santé de leurs salariés, ce qui n'empêche pas que nous nous en occupions.

Avis défavorable.

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Je partage certaines des préoccupations de Mme Autain concernant la sécurité des travailleurs. Sa proposition pourrait aussi bien être placée à l'article 5 ou faire l'objet d'une habilitation à légiférer par ordonnance, comme le prévoit le titre III, qui comprend des mesures sociales d'urgence pour protéger les travailleurs.

Le titre II donnant des possibilités étendues à la fois au Premier ministre et au ministre de la santé, lequel dispose également de prérogatives en matière sanitaire, l'amendement pourrait être satisfait.

Par ailleurs, en même temps que nos travaux, Muriel Pénicaud, Laurent Berger et Geoffroy Roux de Bézieux ont déclaré conjointement réunir les différents syndicats, et relancer le dialogue social afin de discuter des conditions de sécurité des salariés, en convoquant tous les comités sociaux et économiques (CSE).

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Le chef d'entreprise encourt une responsabilité pénale s'il ne protège pas ses salariés. Nombre d'entre eux choisissent donc le chômage partiel, faute de disposer des équipements de protection nécessaires. Ce point relève, non du domaine de la loi, mais des CHSCT, car les dispositions doivent être définies branche par branche. Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances rectificative, hier, nous avons très longuement discuté du secteur du bâtiment et des travaux publics, dont l'activité s'arrête car la branche ne dispose pas de matériel de protection des salariés.

Si de telles mesures doivent plutôt figurer au titre suivant, il serait plus judicieux de s'en remettre à la négociation entre les partenaires sociaux et à la réunion des CHSCT, entreprise par entreprise. Aucune ne se ressemblant, chacune doit décider de la manière dont elle protège ses salariés. S'ils ne peuvent pas être protégés, le chômage partiel s'impose, mais il faut continuer à faire fonctionner les services indispensables à la vie de nos concitoyens.

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Je suis ravie que certains d'entre vous se rappellent des CHSCT. Après les avoir laminés, vous vous rendez compte, en pleine crise sanitaire, qu'ils peuvent être utiles.

Que l'on change l'emplacement de ma proposition dans le texte, ou que l'on y associe d'autres ministres ne me pose aucun problème. Tel n'est cependant pas le sujet. Soit on décide qu'il y a urgence à intervenir, et les messages du Gouvernement en ce sens sont plus clairs qu'ils ne le sont aujourd'hui, soit on laisse faire, en estimant que chacun se débrouillera car le libéralisme fonctionne très bien ainsi.

Nous estimons que l'urgence est de protéger les travailleurs, et qu'il faut donner au Gouvernement la possibilité d'intervenir. Cela implique, nous l'avons dit, que l'État remplisse ses missions. Or il n'en est pas capable dans les transports publics ou, au stade le plus effrayant, dans les hôpitaux, pour fournir des masques et des gels hydro-alcooliques en nombre suffisant. Pour le reste, la puissance publique doit contrôler, de façon extrêmement ferme, la protection des salariés. Sans cela, nous n'aurons ensuite que les yeux pour pleurer.

M. de Courson met en parallèle le chômage partiel et le fait de travailler dans un environnement dangereux, où les salariés peuvent être contaminés. Si tel est le choix, cela ne va pas du tout. Nous ne vivons pas sur la même planète. La puissance publique devrait aussi garantir des droits et des protections inédites, pour qu'un salarié n'ait pas à choisir entre travailler dans des conditions où il peut être contaminé et mis en très grave danger, et ne pas travailler, donc ne plus percevoir de salaire et ne plus pouvoir vivre. Mettre les salariés devant ce dilemme est effrayant.

Le ministre Bruno Le Maire a annoncé une prime de 1 000 euros pour les personnes qui travaillent. Il aurait été formidable que l'État la donne immédiatement aux personnels hospitaliers. Pour les autres, le message est qu'une prime récompense le fait de prendre le risque d'aller travailler.

Essayons d'assurer les droits, de permettre à tous de vivre dignement, et de protéger l'ensemble des salariés de notre pays !

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Chacun a naturellement envie de reconnaître les mérites de ces salariés, qui, comme les agents de l'État, sont effectivement méritants. Mais de nombreuses entreprises s'inquiètent aujourd'hui de leur trésorerie et de la façon dont elles se maintiendront demain. Le moment n'est pas encore entièrement venu de s'interroger sur les primes à verser, même si la question est légitime.

M. de Courson invitait les entreprises à s'adapter, en convoquant les comités ou en choisissant le chômage partiel. La situation n'est pas aussi simple. La Fédération du bâtiment et la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment de la Manche m'ont interpellé hier après-midi car, pour le moment, les entreprises du secteur se voient répondre qu'elles n'entrent pas dans les critères du chômage technique. Elles doivent apporter la preuve qu'elles remplissent un grand nombre de conditions.

La réalité est bien différente du discours de l'État. La préfecture, à laquelle j'ai demandé de s'engager par écrit, a fait marche arrière, arguant de la nécessité d'aborder ce point avec le ministère. Or si cette difficulté concerne la Manche, elle touche forcément d'autres départements, voire tous. Ces points doivent donc être éclaircis.

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Je suis gêné de discuter de ces considérations au mauvais endroit du texte. Cela ne facilite pas la construction d'un raisonnement. La crise sanitaire nous impose de prendre toutes les mesures barrières pour endiguer la menace invisible de ce coronavirus, tout en maintenant les filières économiques susceptibles, non pas d'accomplir des performances économiques, mais de participer au combat. Nombre d'entre elles sont, en effet, indispensables au quotidien des Français, tant pour l'alimentation de nos foyers que pour le fonctionnement de nos hôpitaux.

Nous avons manqué d'un discours très clair : l'essentiel est d'instaurer des mesures barrières, on ne fait plus tout ce qui est superflu, telles les sorties après le travail. En temps de crise sanitaire, nous ne pouvons plus nous le permettre. Il en va de même dans l'entreprise. Les salariés ne peuvent plus y faire certains actes ou profiter de certains temps de rencontre ou d'espaces d'échange, mais il faut préserver l'essentiel au service de la nation, avec le fonctionnement de certains outils de production.

Parce que le discours a manqué de clarté, un trouble s'installe dans les territoires. Nos discussions doivent rétablir cette clarté, pour montrer que les chefs d'entreprise ont une responsabilité – ils en sont tout sauf inconscients, ils doivent mettre en place les mesures de protection individuelle de leurs salariés. Mais il nous revient, par-dessus tout, de maintenir une activité économique sans laquelle nous ne parviendrons pas à combattre le virus. C'est une réalité qu'il faut aussi répéter.

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Tout en m'associant à l'amendement qu'ont déposé nos collègues, je souhaiterais que la rapporteure précise si elle est ouverte à une nouvelle rédaction, qui trouverait sa place à l'article L. 3131-23 du code de la santé publique, c'est-à-dire dans la liste des sujets qui peuvent faire l'objet d'un décret du Premier ministre pendant l'état d'urgence sanitaire. Il s'agirait d'ajouter un alinéa disposant que le Premier ministre peut ordonner toute mesure de protection de la santé des travailleurs dans les secteurs indispensables à la continuité de la vie de la nation.

Nous entendons les appels au dialogue social et les mesures prises, mais elles sont notoirement insuffisantes dans de très nombreux secteurs d'activité, pourtant décisifs.

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Le débat sur les mesures est légitime.

Le Sénat a tenté d'énoncer de grandes catégories. Sa liste fait débat, si j'en juge par les discussions intervenues la nuit dernière entre le Gouvernement et les sénateurs. Certains aspects ont pu être oubliés, qu'il nous faudra ajouter. Par ailleurs, sur le plan opérationnel, une liste nous contraint davantage.

Nous devrons éclaircir ce point en séance, à la lumière de ce que nous diront le ministre de la santé et les autres ministres présents.

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Comment demander à trois employés, collés les uns aux autres dans le même camion, de travailler sans masque ni lunettes, alors que, tous les jours à la télévision, ils entendent dire qu'il existe un risque de contamination à moins d'un mètre cinquante ? Soit on est capable de protéger les salariés dont l'activité est indispensable au bon fonctionnement du pays, soit on arrête l'activité. On ne peut pas demander à des personnes de prendre un risque vital.

Alors qu'on n'est pas capable de donner des masques aux personnels de santé, on ne peut pas en vouloir aux autres salariés de ne pas venir travailler, et aux patrons de ne pas prendre le risque que les employés se contaminent. Dans le BTP, les patrons ont arrêté de travailler, non seulement en raison de la réduction des commandes, mais parce que les employés n'étaient pas protégés. Ils ont raison.

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Il faut nous demander ce qu'est une activité économique indispensable pendant une crise sanitaire où le Gouvernement a fait le choix du confinement total. Ce qui doit motiver le maintien de certaines activités, c'est non pas la continuité de la vie économique mais la lutte contre la pandémie. Il faut assumer de mettre à l'arrêt certains secteurs économiques privés et de consacrer toutes les ressources collectives pour compenser les pertes. C'est le meilleur moyen d'enrayer la propagation du virus. Quant aux personnes qui doivent continuer à travailler pour répondre aux besoins de base, une protection doit leur être assurée.

Il est contradictoire de dire aux gens « restez chez vous » puis de les accuser ensuite de « défaitisme » s'ils refusent d'être exposés, comme la ministre du travail l'a fait devant les fédérations du bâtiment !

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Je comprends vos interrogations.

Il est beaucoup question des masques. Ils apparaissent comme un totem rassurant, mais ils ne constituent pas forcément la meilleure solution pour protéger les salariés dans certains secteurs. Des responsables de la grande distribution ont installé des écrans en plexiglas autour des caisses qui s'avèrent parfaitement efficaces. Des solutions existent, y compris dans le bâtiment. La ministre du travail réfléchit avec les trois fédérations concernées à l'élaboration d'un guide de bonnes pratiques qui permettrait de sécuriser les travailleurs au quotidien, notamment à travers le dédoublement des équipes ou les rotations.

S'agissant des activités économiques indispensables, le message a été clair. La priorité a été donnée à la distanciation sociale. Elle a justifié les premières mesures de fermeture – restaurants, cafés, salles de spectacle. Elle explique l'encouragement donné au télétravail, qui permet aux gens de continuer à travailler sans affecter tout le tissu de la société. Quant à ceux qui ne peuvent pas télétravailler, on leur demande d'aller travailler mais bien évidemment dans certaines conditions de sécurité. Il n'y a pas que les personnels hospitaliers qui sont indispensables, il y a aussi tous les salariés de l'agroalimentaire, du transport de marchandises et de passagers, des secteurs de la production et les fonctionnaires qui assurent des missions régaliennes. Les activités qui ne peuvent pas s'arrêter sont très nombreuses. Prenons l'exemple de la fabrication de pièces pour la réparation de voitures, de la production d'emballages, de la restauration collective qui prépare les repas pour les centres hospitalo-universitaires – CHU – ou les EHPAD. Il importe à travers le dialogue social, et en responsabilité, de trouver des solutions inédites pour protéger ces salariés.

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Cet amendement fait écho à une question qui se pose très largement dans le pays : dans une période de confinement total, quelles activités économiques poursuivre ? Espérons que nos débats permettront de mettre fin à une situation extrêmement ambiguë. Des chefs d'entreprise du bâtiment, se sentant responsables pénalement, ont décidé de mettre leurs équipes en chômage partiel mais les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) leur ont opposé qu'elles refuseraient de les indemniser, ce qui met en jeu leur survie.

Laurent Berger nous a rappelé qu'il y avait une différence entre réparer un robinet et refaire une salle de bains, autrement dit entre activités essentielles et activités non essentielles. Cela vaut dans beaucoup de professions, et il importe de rassurer salariés et chefs d'entreprises.

Des négociations sont en cours entre la ministre du travail et les fédérations du bâtiment. Avant qu'elles aboutissent à un guide de bonnes pratiques, il faut donner des directives aux DIRECCTE au sujet du chômage partiel. Si le confinement doit être total, seules les activités économiques essentielles doivent être poursuivies. Une clarification s'impose.

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Dans les semaines qui viennent, il est essentiel que chacun soit dans son rôle : ceux qui soignent doivent sauver des vies, ceux qui travaillent doivent faire tourner le pays, ceux qui restent chez eux doivent arrêter de voir leurs amis.

Si certaines activités doivent être maintenues, ce n'est pas parce qu'il faudrait poursuivre la vie économique de notre pays mais parce qu'elles sont nécessaires. Prenons l'exemple de travaux concernant les circuits d'eau ou d'électricité dans un hôpital. Nous avons besoin que des entreprises du BTP puissent continuer à intervenir, car notre pays risquerait sinon de ne plus pouvoir faire face à la crise sanitaire. Évitons les débats caricaturaux.

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L'imbroglio que vit le secteur du BTP montre combien la clarté fait défaut. Le message des autorités est, d'un côté, « Restez chez vous », ce que chacun a tendance à s'appliquer à soi-même, quel que soit le métier qu'il exerce, et, de l'autre, « les activités essentielles doivent se poursuivre ». Salariés et entrepreneurs du BTP font face à des injonctions contradictoires : il y a les négociations entre les fédérations et le ministère du travail ; il y a les décisions, variables d'une région à l'autre, des préfectures. Des salariés restent chez eux parce que des maîtres d'ouvrage l'ont demandé aux entreprises qui les emploient ; des artisans partis travailler sur leurs chantiers sont stoppés par des gendarmes. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire, dans ces conditions, d'employer un vocabulaire désobligeant à leur égard.

Pour tous les employeurs, qu'ils soient publics ou privés, la question de la protection des salariés est compliquée. L'État employeur n'est pas en mesure d'assurer la sécurité des personnes qui travaillent dans les hôpitaux ; des policiers et des gendarmes s'inquiètent de leurs conditions de travail. La réponse ne peut se résumer à un appel au bon sens : il faut non seulement de la démocratie parlementaire mais aussi de la démocratie sociale. Elle ne saurait passer non plus par une prime versée aux salariés exposés, qui s'apparenterait à un salaire de la peur.

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Avec la suppression des CHSCT, nous n'avons nullement balayé d'un revers de la main la prise en compte de la sécurité des salariés. Toutes ces questions peuvent être abordées au sein de la nouvelle instance qu'est le comité social et économique, au sein duquel le dialogue social se poursuit. Il est à même d'apporter des réponses aux salariés inquiets.

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Certaines activités essentielles à la nation sont liées aux entreprises du bâtiment. Pensons à la réparation de chaudières ou au remplacement d'un robinet. Or leurs salariés sont exposés : ils n'ont aucun matériel de protection pour se rendre dans les foyers confinés et se retrouvent à plusieurs dans une même camionnette sans respecter les distances de sécurité. La pénurie est telle que, dans la presse quotidienne régionale de mon département, des appels sont lancés pour obtenir masques et lunettes.

Les entreprises du bâtiment demandent simplement une période transitoire de quinze jours pour leur laisser le temps de s'organiser.

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Il y a un manque de moyens, qu'il s'agisse des masques ou d'autres produits. Dans certaines pharmacies, on ne peut pas obtenir de gel car il n'y a tout simplement pas assez de bouteilles en plastique. Ce n'est pas une vue de l'esprit mais bel et bien la réalité. La chaîne d'approvisionnement se heurte à des difficultés avérées. Le débat sur la protection des salariés est évidemment essentiel mais, les choses traînant depuis plusieurs jours, on a, de fait, un effet en chaîne : certaines pièces détachées et matières premières n'arrivent pas, en particulier quand elles proviennent de l'étranger. Des entreprises ferment, non pas parce que les salariés ne sont pas protégés, mais parce qu'elles ne sont plus en mesure de travailler. Encore quelques jours et il n'y aura plus à protéger qui que ce soit, car l'économie sera à l'arrêt. Si on se réfère aux informations de plusieurs journaux régionaux, des services publics locaux, des EHPAD manquent déjà d'un certain nombre de produits. Les chaînes d'approvisionnement deviennent difficiles à assurer. Il faut offrir un peu de souplesse aux entreprises. Au risque de verser dans la provocation, je dirais que celles-ci ne sont pas nécessairement dirigées par des tortionnaires, qu'on n'a pas toujours affaire à des gens voulant réinstaurer l'esclavage ou des conditions de travail dignes du XIXe siècle. Faisons un peu confiance aux chefs d'entreprise. Si j'en crois les fédérations de ma circonscription, il est nécessaire d'opérer un ajustement. Laissons-leur un peu de temps avant qu'il ne soit trop tard.

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Les messages doivent être très clairs. Les chefs d'entreprise connaissant la loi : ils savent qu'ils doivent protéger leurs personnels. On a suffisamment évoqué ce sujet lors de la discussion sur les CHSCT pour savoir qui est responsable de quoi. Cela étant, les chefs d'entreprise disent aujourd'hui qu'ils ne disposent pas d'outils de protection. On ne peut donc pas dire qu'ils ne veulent pas protéger leurs personnels : il leur est pour l'instant impossible de le faire – peut-être, d'ici deux à trois jours, le ravitaillement aura-t-il lieu ? Le Gouvernement a affirmé vouloir protéger les entreprises et mettre en sécurité les travailleurs. Au nom de ces principes, certaines entreprises ont entendu mettre leurs salariés au chômage partiel. Or, l'administration leur a répondu que cette demande n'est pas recevable. Pourquoi un chef d'entreprise ne peut-il pas recourir à ce dispositif pour protéger son personnel et éviter de mettre en péril son entreprise ? Il y a là une question à clarifier. Le ministre apportera-t-il les réponses ce soir, en séance ? Le Premier ministre introduira-t-il ces dispositions dans les ordonnances ? Cette possibilité doit être accordée d'office, sous peine de contredire tous les messages officiels – ceux-ci s'apparenteraient alors à de la communication. Les gens ont entendu des messages forts concernant la protection de la population et des travailleurs. Les ministres ont affirmé que les « travailleurs » – le mot a été utilisé je ne sais combien de fois – doivent être protégés, à l'instar des entreprises, pour que l'économie reparte au plus vite quand on sortira de la crise. Dont acte : mettons-y les moyens. On a même entendu des membres du Gouvernement nous dire que les moyens seront engagés, qu'on paiera le prix qu'il faut. Faisons-le et inscrivons-le, éventuellement, dans la loi.

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Il y a des sujets essentiels – parmi lesquels le manque de masques et d'équipements – et de grandes peurs. Tout le monde réclame des masques. C'est un sujet que j'évoque avec le préfet de la Meuse dans le cadre de notre conversation téléphonique quotidienne. Les syndicats de police, les associations, les éboueurs, les caissières, par exemple, veulent des masques. Il faut évidemment établir des priorités. À côté de cela, on constate de grandes peurs. Comment ne pas être frappé de voir des gens seuls au volant ou des marcheurs porter un masque ? Il y a là un problème de rationalité. Il faut traiter tout ça avec beaucoup de souplesse. Ce n'est pas le moment de polémiquer. Offrir des possibilités d'adaptation à des professions qui le demandent est une solution certainement préférable au fait de désigner certains types d'entreprises comme des boucs émissaires.

La Commission rejette l'amendement CL25.

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Vous avez été dix-sept à intervenir – soit l'ensemble des députés présents dans la salle – sur cette question il est vrai essentielle. Nous ne pourrons pas procéder de la sorte pour chaque amendement. Je compte sur vous pour réserver votre intervention sur les sujets qui vous préoccupent personnellement.

La Commission est saisie de l'amendement CL20 de Mme Mathilde Panot.

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Cet amendement, que j'ai évoqué dans la discussion générale, concerne les outre-mer. Il vise à habiliter le représentant de l'État à prendre, pour des motifs tenant à la santé publique, « toute mesure proportionnée aux risques encourus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu afin de prévenir et de limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé de la population […] ». Cela nous permet de vous interpeller sur la protection sanitaire due à l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes, notamment dans les territoires d'outre-mer, où la réaction aux nombreuses alertes survenues a été trop lente. Il faut se mettre au diapason des mesures prises ailleurs et adopter la célérité nécessaire à la gestion de la crise.

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Il me semble que votre amendement est largement satisfait par l'article 5 bis A et par l'article 6, qui prévoient les modalités de l'adaptation du régime de l'état d'urgence sanitaire aux collectivités d'outre-mer. Par ailleurs, je vous renvoie aux alinéas 31 et 32 de l'article 5. Dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, l'article L. 3131-25 du code de la santé publique institue un système utile d'habilitation des préfets – ce qui correspond précisément à votre demande – pour prendre certaines des mesures générales et individuelles. Défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine en discussion commune les amendements CL102 de M. Charles de Courson et CL44 de Mme Delphine Batho.

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Le texte issu des travaux du Sénat définit l'état d'urgence sanitaire, à l'alinéa 11 de l'article 5, comme une « catastrophe sanitaire mettant en péril par sa nature et sa gravité la santé de la population. » Il nous semble que cette définition est assez floue. Notre amendement a pour objet de la préciser, en retenant les critères de la nature, de la gravité, de « l'ampleur » – terme que l'amendement suivant de Delphine Batho vise à introduire – de la situation sanitaire et de son « caractère non maîtrisé par le système médical », qui mettent « en péril la vie d'une partie de la population et le fonctionnement de la vie de la nation. »

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C'est, en quelque sorte, un amendement de repli par rapport à celui de Charles de Courson qui, si ma mémoire est bonne, s'inspire des remarques formulées par la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) sur le projet de loi. Cette instance nous invitait à mieux définir les circonstances de l'état d'urgence sanitaire et son caractère très exceptionnel. Un débat a eu lieu au Sénat hier, où il a été proposé d'introduire la notion de « catastrophe sanitaire exceptionnelle ». La solution me paraît plutôt être – comme Charles de Courson et moi-même nous efforçons de le faire – de définir les circonstances qui établissent le caractère très exceptionnel de la catastrophe sanitaire.

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Je suis défavorable à l'amendement de M. de Courson. En effet, la définition actuelle paraît déjà précise puisque le texte évoque une « catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ». Par ailleurs, la loi du 3 avril 1955, qui constitue un autre régime légal permettant l'application de pouvoirs exceptionnels, comporte, en son article 1er, un degré de précision similaire.

Je n'ai pas d'objection majeure contre l'amendement de Mme Batho, mais il me semble que la rédaction actuelle est suffisamment précise. La nature et la gravité d'une catastrophe comprennent son ampleur. Je vous demande donc de retirer votre amendement.

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Nous soutenons ces amendements. La CNCDH a émis des remarques qui nous paraissent tout à fait fondées. Monsieur de Courson, je souhaiterais avoir une précision : qui apprécierait le caractère non maîtrisé du système médical ? Si c'est l'autorité compétente pour décréter l'état d'urgence, cela poserait un problème.

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Comme le rappelait Mme Batho, je n'ai pas inventé cette définition : je me suis appuyé sur les recommandations de la CNCDH, qui nous suggère ces précisions pour protéger les libertés publiques, pour éviter qu'on applique l'état d'urgence sanitaire dans n'importe quelles conditions. À titre d'exemple, la loi de 1955 relative à l'état d'urgence était extrêmement vague : il a fallu qu'on l'encadre et qu'on lui donne une base constitutionnelle.

Tout le monde est d'accord sur les critères de la « nature » et de la « gravité » figurant à l'alinéa 11. Reste l'« ampleur », car le phénomène peut être très grave mais circonscrit, ne concerner que quelques dizaines de personnes : dans un tel cas de figure, compte tenu de la rédaction actuelle, l'état d'urgence sanitaire pourrait être déclaré. C'est pourquoi Delphine Batho et moi-même proposons d'ajouter ce critère. Par ailleurs, même si la condition tenant à l'ampleur est satisfaite, il n'est pas nécessairement utile de déclencher l'état d'urgence sanitaire si le système de santé est capable de faire face. Nous proposons donc d'ajouter le critère du « caractère non maîtrisé par le système médical ».

Notre objectif est qu'on ne puisse pas utiliser les dispositions qui seront contenues dans le décret à d'autres fins que celles prévues initialement. Si quelqu'un conteste le décret, il s'appuiera sur la définition qu'on a retenue de l'état de catastrophe sanitaire. La rédaction proposée me paraît plus prudente, car l'ampleur n'est pas contenue dans la gravité – le phénomène peut entraîner un taux de mortalité élevé, mais au sein d'une petite minorité de la population, et être très localisé, par exemple dans les DOM-TOM où, on l'a vu, des épidémies ont frappé seulement certaines îles. Il me paraît donc prudent d'encadrer cette disposition, comme on l'a fait pour la loi de 1955, qui a été élaborée, rappelons-le, pendant la guerre d'Algérie.

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Aussi intéressante que soit notre discussion, le Sénat l'a, en réalité, renvoyée à un débat futur. En effet, si l'état d'urgence sanitaire est déclaré dès la promulgation de loi, les dispositions contenues dans le texte sont valables pour l'année qui vient, si bien que nous nous retrouverons dans un an pour discuter de la construction d'un statut pérenne de l'état d'urgence sanitaire. Ainsi, nous pouvons agir dans l'urgence, tout en nous laissant le temps de discuter de la nécessité ou non de créer un état d'urgence sanitaire mobilisable de façon permanente. C'est une solution sage pour ne pas se précipiter et faire des erreurs.

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Je partage l'avis de M. Schellenberger. Nous sommes obligés de légiférer dans l'urgence et, comme je l'ai dit ce matin en discussion générale, nous créons un droit exceptionnel pour une situation exceptionnelle. Il me semble dès lors inapproprié de préciser davantage. Prenons le mot « ampleur », par exemple. Dans le cas du cluster en Savoie, aurait-on pu considérer que l'ampleur était suffisante, alors même que, d'après la rédaction actuelle de l'article, nous pouvons déjà prendre des mesures sur tout ou partie du territoire ? L'article est bien calibré. Le Sénat a bien fait de mettre un terme à ces dispositions en avril 2021, pour nous obliger à légiférer de nouveau et à réexaminer avec précision le sujet, à la lumière sans doute d'une commission d'enquête, ce que nous ne pouvons pas faire dans les quarante-huit heures qui nous sont imparties. Laissons l'article en l'état et légiférons plus tard, afin de définir ce qu'est l'état d'urgence sanitaire, en tirant les leçons, malheureusement, de l'épisode que nous traversons.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle examine l'amendement CL14 de Mme Mathilde Panot.

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L'amendement vise à maintenir un contrôle démocratique, malgré la nécessité de réagir promptement en cas d'état d'urgence sanitaire.

L'état d'urgence sanitaire proposé au vote crée un nouveau statut en droit français, donnant de larges pouvoirs au Gouvernement, notamment en matière de restrictions des droits et des libertés constitutionnellement garanties. Pour renforcer les garanties démocratiques de cet état d'exception, nous souhaitons que l'état d'urgence sanitaire soit par principe déclaré à la suite d'un vote à l'Assemblée nationale et au Sénat. Le vote pourrait également avoir lieu à l'issue de la réunion d'un quorum représentatif des forces à l'Assemblée nationale et au Sénat ou dans l'une des deux assemblées.

Nous souhaitons également que l'état d'urgence sanitaire nécessite un vote du Parlement douze jours après son entrée en vigueur pour être renouvelé, et non après un mois comme prévu ici, puis tous les douze jours pour sa prorogation, une telle exigence s'alignant sur le régime mis en place par la loi de 1955 sur l'état d'urgence. Nous demandons la création d'un comité parlementaire de suivi permanent composé de parlementaires, dès le déclenchement de l'état d'urgence sanitaire. Enfin, il faut intégrer les mesures de sécurité démocratiques retirées suite à l'avis du Conseil d'État concernant l'information sans délai des mesures prises par le Gouvernement dans le cadre de cet état d'urgence sanitaire.

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Avis défavorable. Raphaël Schellenberger a eu raison d'insister sur la disposition prise par le Sénat, selon laquelle l'état d'urgence sanitaire est un régime juridique provisoire amené à être redéfini dans un climat plus serein. Votre amendement concerne plusieurs sujets différents. Au vu de la crise que nous traversons, il me semble pertinent que le conseil des ministres puisse déclarer l'état d'urgence sanitaire. Par ailleurs, votre amendement est en partie satisfait, puisque, dans un souci d'opérationnalité, le Sénat a déclaré à l'article 5 bis l'état d'urgence sanitaire, de manière dérogatoire par rapport au cadre légal prévu à l'article 5. S'agissant du renouvellement de l'autorisation tous les douze jours, nous voyons bien à quel point il serait peu opérant. Pour ce qui est du contrôle enfin, qui nous préoccupe tous, le Sénat a adopté un article 13 dans le titre IV sur ce sujet.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL45 de Mme Delphine Batho, CL72 de M. Fabien Roussel et CL120 de M. Bertrand Pancher.

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Les dispositions de l'article 5 s'appliquent au bout de deux mois, au cas où l'état d'urgence sanitaire, résultant des dispositions de l'article 5 bis, devrait être prorogé. La définition de l'état d'urgence sanitaire n'est donc pas une espèce d'ovni législatif qui ne trouvera jamais à s'appliquer.

L'amendement vise à ce que l'état d'urgence soit déclaré en conseil des ministres, sur la base du rapport du ministre chargé de la santé, seulement après avis du comité de scientifiques mentionné à l'article L. 3131-26. Cela me semble correspondre à la pratique actuelle, dans la mesure où les décisions ont été prises après que les scientifiques ont été consultés.

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L'Italie, qui a un peu d'avance sur nous, dit aujourd'hui qu'ils n'ont pas frappé assez fort ni assez vite, pour arrêter beaucoup d'activités économiques qui n'étaient pas essentielles. Ils ont décidé de réunir les organisations syndicales et patronales, afin de trouver un accord national pour définir les secteurs stratégiques et les conditions de sécurité dans lesquelles les salariés doivent travailler. Nous devons tendre vers cet exemple, au lieu de déléguer localement aux entreprises le soin de décider si elles doivent poursuivre leur activité et sous quelle forme. Réunissons au plus vite les organisations syndicales et patronales pour qu'elles se mettent d'accord ensemble sur la définition des secteurs stratégiques indispensables au pays et les conditions de sécurité à assurer à nos salariés.

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La déclaration d'état d'urgence sanitaire donne au Premier ministre beaucoup de pouvoirs, notamment celui de limiter la liberté d'aller et venir, celle d'entreprendre, de réunion. Il permet également de procéder à des réquisitions. Toutes ces mesures fortes sont évidemment indispensables en cette période, mais doivent être bornées par l'expertise sanitaire. C'est pourquoi nous vous proposons de renforcer l'éclairage du Gouvernement, en amont de sa prise de décision, par un avis du Haut Conseil de la santé publique, instance spécialisée qui peut déjà être consultée par les ministères concernés et les présidents de Commission. Il serait pertinent de transformer cette faculté de consultation par l'exécutif en une obligation.

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Avis défavorable. Même si je comprends votre intention, je pense que nous devons être très prudents et veiller à ne pas entraver le caractère opérationnel de mesures prises dans l'urgence. S'il paraît naturel que des scientifiques se prononcent après la déclaration de l'état d'urgence sanitaire, en l'espèce, il aurait été probablement difficile d'attendre cet avis pour le déclencher.

Monsieur Roussel, il me semble également qu'il faut laisser le politique prendre ses responsabilités dans l'urgence, afin qu'il puisse décider rapidement de l'état d'urgence sanitaire, pris sur la base du rapport du ministre de la santé. L'état d'urgence sanitaire est bel et bien motivé.

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Actuellement, cela se passe plutôt mal sur le terrain, avec des mouvements de grève, des demandes de droit de retrait tantôt refusées tantôt acceptées. Après les mobilisations de ces derniers jours, les chantiers de Saint-Nazaire ont décidé d'arrêter pendant quinze jours leur production. Il a fallu en arriver à une grève ! Je comprends bien que vous laissiez la décision aux politiques. Mais aujourd'hui, les politiques, c'est le Gouvernement, point barre ! Si cette décision ne vient que du ministre et qu'il renvoie aux entreprises la décision de travailler ou non, cela ne passe pas. Dans une crise aussi grave, les consignes doivent être claires et se prendre avec les partenaires sociaux au niveau national, de sorte que les décisions soient partagées et appliquées, sans quoi c'est du grand cafouillage.

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Les Français seront d'autant plus motivés et mobilisés que les décisions seront transparentes. Comment ne pas être frappés quand on voit que certains pays, notamment la Corée du Sud, se mobilisent et obtiennent de bons résultats, parce que des informations sont diffusées en permanence, notamment sur l'état sanitaire ? Pourquoi accepter de s'engager dans un état d'urgence sanitaire, très privatif de libertés et particulièrement contraignant, sans se fonder sur un avis du Haut Conseil de la santé publique, dont la publicité permettrait à l'ensemble des Français de s'engager en connaissance de cause ? Nous ne demandons pas un avis conforme, madame la rapporteure, mais seulement un avis public. Voilà une nouvelle illustration du centralisme français ! À toujours faire peser les décisions sur les mêmes têtes, ne nous étonnons pas que certaines réactions aillent à l'encontre de la mobilisation générale qui est souhaitée !

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Le problème, c'est que le Gouvernement a pris sa décision avec le conseil scientifique, mais qu'on ne sait pas exactement ce qu'a dit ce conseil : c'est resté relativement opaque. Ses avis ont certes fini par être publiés, mais pas au moment où la décision a été prise. Le Président de la République a fait un discours jeudi ; le samedi, on a assisté au rétropédalage du Premier ministre avant d'entendre, lundi, un nouveau discours du Président de la République. J'imagine que n'importe qui, placé dans la même situation, aurait rencontré les mêmes difficultés mais il faut, à l'avenir, que la décision soit transparente, collective et concertée. Tout ce qui va dans le sens d'une décision collective, où chacun a un rôle précis à jouer, me semble être une bonne chose.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle examine l'amendement CL46 de Mme Delphine Batho.

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Cet amendement reprend la même idée : permettez-moi donc d'insister. Le cadre de l'état d'urgence, tel que l'a défini la loi de 1955, concerne des troubles très graves à l'ordre public, comme les attentats terroristes que la France a hélas connus ces dernières années. Mais nous parlons ici d'une épidémie – ou d'un phénomène du même ordre – justifiant une évaluation scientifique. Il faut, pour que la situation de catastrophe sanitaire soit déclarée, que les risques qu'un tel phénomène fait peser sur la santé de la population soient évalués. Je propose donc, après l'alinéa 12, d'insérer l'alinéa suivant : « Un comité de scientifiques est consulté avant toute déclaration de l'état d'urgence sanitaire. Son avis est rendu public. »

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Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable.

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Nous reviendrons sur cette question dans l'hémicycle mais je ne comprends pas pourquoi vous refusez qu'un avis scientifique éclaire les Français sur ce qui motive les décisions du Gouvernement.

Nous l'avons bien vu : quand le Président de la République et le Gouvernement ont commencé à dire qu'il y avait un problème, beaucoup de Français, en tout cas dans ma banlieue populaire, ont estimé que c'était bidon, qu'on se moquait d'eux, qu'on essayait de leur faire oublier quelque chose – je ne dois pas être le seul à avoir constaté ce genre de réaction. Quand le Président de la République est intervenu pour dire qu'on allait fermer les écoles, les gens ont commencé à se dire qu'il y avait peut-être un problème, mais ils ne mesuraient pas encore la gravité de la situation. C'est quand le confinement a été annoncé que l'immense majorité des Français a fini par comprendre.

J'ai rappelé ce matin que nous sommes des Gaulois, toujours prêts à contester et à tout mettre en question. Publier un avis scientifique serait le meilleur moyen d'éclairer les gens : je ne comprends donc pas que cette proposition ne fasse pas l'objet d'un consensus. Cet amendement ne dit pas que le Gouvernement doit déclarer l'état d'urgence sanitaire après l'avis conforme du comité de scientifiques : il dit seulement qu'il doit recueillir son avis. Nous-mêmes, en tant que parlementaires, avons besoin de nous faire une opinion. Il y a parmi nous des médecins et des épidémiologistes, mais beaucoup d'entre nous ne connaissent pas ces sujets et ont besoin d'un avis scientifique pour savoir si la décision politique est légitime ou pas. Je ne comprends pas votre refus.

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Ce qui me gêne, ce n'est pas qu'un avis scientifique éclairé soit communiqué le plus largement possible. Mais je crains qu'un tel amendement ne retarde la décision politique, alors qu'il convient d'agir vite face à de telles situations.

Le texte prévoit qu'en cas de déclaration de l'état d'urgence sanitaire, il est réuni sans délai un comité de scientifiques. Je ne voudrais pas qu'en rendant obligatoire la constitution puis la consultation d'un conseil scientifique en amont on retarde le déclenchement de l'état d'urgence sanitaire en conseil des ministres.

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Madame la rapporteure, j'admets qu'il n'était pas très commode de suivre les débats qui ont eu lieu cette nuit au Sénat, mais il n'est pas interdit de lire ce que nos collègues sénateurs ont voté. Vous répondez n'importe quoi !

Ce que le Sénat a voté, c'est que le présent projet de loi déclare, pour cette fois, l'état d'urgence sanitaire : point ! Nous débattons depuis une demi-heure de principes qui vaudront pour les crises à venir, de dispositions de portée générale, alors que le présent texte a une portée particulière et un caractère d'urgence.

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Je comprends votre préoccupation, mes chers collègues. Dans la crise sanitaire que nous sommes en train de vivre, il se trouve que la création du comité scientifique a précédé la déclaration de l'état d'urgence sanitaire. C'est en effet le présent texte, si nous le votons – et j'ai cru comprendre que tout le monde était prêt à le faire – qui va déclencher l'état d'urgence sanitaire.

Pour gérer la crise actuelle, il n'est pas nécessaire d'inscrire dans ce texte le principe d'une consultation en amont du comité scientifique, dans la mesure où ce conseil existe déjà. Pour l'avenir, nous serons sans doute amenés à revoir le dispositif que nous sommes en train de créer, lorsque nous l'aurons évalué. Dans six mois ou un an, nous verrons si un tel comité est indispensable pour tous les types de crise. Il se peut que certaines crises sanitaires éclatent du jour au lendemain sans qu'aucun comité scientifique n'ait pu les anticiper. Dans un tel contexte, il faut que les pouvoirs publics puissent déclarer l'état d'urgence sans avoir à consulter quelque comité que ce soit.

Il ne faudrait pas que, à l'occasion d'une autre crise, la consultation d'un comité scientifique retarde la décision politique, et donc l'adoption de mesures de protection de nos concitoyens. La question mérite d'être débattue et nous pourrons interroger le ministre en séance publique, mais comprenons bien que ce débat concerne d'éventuelles crises à venir et non la crise actuelle.

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Ce débat m'étonne un peu. Le Président de la République a dit qu'il avait besoin d'un conseil scientifique pour prendre sa décision, alors officialisons les choses ! Nous sommes en train d'organiser en catastrophe un état d'urgence auquel personne n'avait pensé et qui donne les pleins pouvoirs au Gouvernement sur des sujets qui ne sont pas neutres, comme la garde à vue, la situation des personnes incarcérées ou les libertés publiques. Il y a urgence, mais ce n'est pas une raison pour faire n'importe quoi.

Ce que propose cet amendement n'est pas extraordinaire : il demande tout simplement qu'un comité scientifique soit consulté. Cela peut être fait en trois minutes et n'exclut pas l'urgence. Nous sommes en train d'écrire la loi et nous savons très bien qu'un conseil scientifique est nécessaire, alors inscrivons-le tout de suite.

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Je partage l'avis de François Pupponi. Nous l'avions déjà constaté hier, lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative (PLFR), mais cela se confirme : la majorité a bien du mal à adopter des amendements qui n'émanent pas de ses rangs ! Hier, nous avons adopté à l'unanimité un PLFR sur lequel un seul amendement ne provenant pas de la majorité avait été voté. Cela pose un problème, à l'heure où nous recherchons l'unité nationale et où tout le monde joue le jeu. Le fait de demander l'avis d'un comité scientifique au moment de déclarer l'état d'urgence sanitaire me paraît aller de soi et je ne comprends pas que cette proposition suscite autant de débats.

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Mes chers collègues, la parole politique est-elle crédible ? Hélas, vous savez bien que la réponse est négative et que le peuple français ne croit plus ses élus. L'amendement de Mme Batho a le mérite d'aider le pouvoir politique : celui-ci pourra justifier ses décisions en s'appuyant sur un avis scientifique qu'il rendra public. Cet amendement apporte une protection et ce serait une bonne chose que nous le votions tous ensemble, parce qu'il va dans le bon sens.

Madame la rapporteure, si j'ai bien compris votre intervention, vous n'êtes pas opposée à cette idée sur le fond. Vous non plus, « Madame la majorité » ! (Sourires) J'ai envie de vous appeler ainsi, Madame Dubost, parce que vous décidez de tout et que, titulaire d'une délégation, vous avez la majorité à vous toute seule. Cet amendement ne mange pas de pain et il protègera la parole des gouvernements successifs.

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J'ai énormément de respect pour le Sénat, qui a fait du bon travail sur cet article, mais nous sommes à l'Assemblée nationale, et celle-ci a toute latitude pour continuer à améliorer le texte.

Par ailleurs, il est faux de dire, et j'aimerais donc que cet argument cesse d'être avancé dans les discussions, que le texte dont nous sommes en train de débattre n'aura pas à s'appliquer. Je serais la première à le souhaiter, mais ce n'est pas vrai. Ce texte s'appliquera pendant deux mois à partir de son adoption. Au bout de deux mois, il faudra de nouveau réunir le Parlement. Supposons que nous sortions de l'état d'urgence par décret en juin mais que nous connaissions une nouvelle vague à l'automne, comme M. Jean-Christophe Lagarde l'a avancé : une nouvelle décision sera prise en conseil des ministres avant le 1er avril 2021, date d'expiration de ces dispositions. Il faut donc arrêter de dire que ces dispositions ne seront pas appliquées !

Il n'y a aucune raison de ne pas inscrire la pratique actuelle dans la loi. Le rapport que fait le ministre de la santé en conseil des ministres pour signaler qu'il arrive quelque chose de grave se fonde bien sur un avis scientifique. Tout ce que nous demandons, c'est que cet avis scientifique soit public.

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J'approuve totalement ce que vient de dire Mme Batho. Je lui ferai toutefois observer que ce n'est pas moi qui ai annoncé la deuxième vague mais les scientifiques. Ceux-ci expliquent que, comme lors d'épidémies précédentes, cela peut se reproduire à l'automne puis au printemps suivant.

Par ailleurs, un consensus, cela se construit. Lorsque le Premier ministre nous a expliqué, en vidéoconférence, qu'il proposait de prendre une décision lourde, à savoir le report du deuxième tour des élections municipales, le premier qui a pris la parole, c'est le président du comité scientifique : c'est en l'écoutant que nous avons été convaincus qu'il fallait prendre cette décision. En revanche, si le ministre de la santé – avec tout le respect qu'on lui doit car il fait un travail exceptionnel en ce moment – avait proposé de reporter les élections en se fondant sur un rapport de ses services, peut-être sa parole m'aurait-elle paru plus sujette à caution.

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Personne ici ne remet en cause le rôle extrêmement important joué par le comité scientifique, et toutes nos décisions se sont appuyées sur ses avis. Mais prendre cette décision en Commission, hors présence des ministres, n'est pas la bonne manière de procéder. Nous devons en discuter avec les ministres en séance car il sera important qu'ils puissent nous dire sur quoi ils fondent leurs décisions, quels sont leurs rapports avec le comité scientifique. Je propose donc de reporter cette discussion à la séance.

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Madame Batho, je pense que nous ne nous sommes pas comprises : nous votons l'état d'urgence sanitaire pour deux mois et le Parlement pourra le proroger d'un mois. Mais, selon l'article 6 bis adopté par le Sénat, ce dispositif juridique temporaire ne sera valable que jusqu'au 1er avril 2021, date à laquelle il pourra être soit pérennisé par le Parlement, soit abandonné si l'on estime qu'il n'est pas utile à la démocratie. Cela permettra surtout de tirer les conséquences de la gestion de cette crise sanitaire, ce qui pourrait être utile à nos successeurs. Le caractère temporaire de ce dispositif juridique me paraît donc constituer une première garantie. Ainsi, notre débat concerne davantage les crises sanitaires qui pourraient advenir dans les décennies ou les siècles à venir.

Par ailleurs, ce que vous demandez au travers de cet amendement existe déjà de facto puisque le comité scientifique est en place alors que nous n'avons pas encore déclaré l'état d'urgence sanitaire. Parlons-en en séance : peut-être trouverons-nous un consensus sur ce sujet avec les ministres.

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Cela donne le sentiment, sur quelque chose qui ne paraît pas exorbitant compte tenu de tout ce à quoi nous allons consentir par la suite – du moins, nous ne nous y opposerons pas –, d'une incapacité presque pathologique à accepter des amendements qui ne viennent pas de votre majorité. Cela existe déjà : alors inscrivons-le ! Ce n'est un problème pour personne ! C'est quand même incroyable ! Construisons ensemble l'unité républicaine ! Il faut un tout petit peu de rapprochement entre les points de vue, sinon cela ne marchera pas !

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Effectivement, discutons ensemble : vous avez compris que je cherchais juste à assurer que cela n'alourdirait pas inutilement le processus de décision. Nous devons avoir ce dialogue avec le Gouvernement et pas seulement entre députés.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine l'amendement CL73 de M. Fabien Roussel.

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L'article 5 a pour objet de déclarer l'état d'urgence sanitaire pour une période d'un mois. Chacun est bien conscient du caractère exceptionnel et de l'ampleur des mesures prises du fait de cet état d'urgence. Il nous apparaît donc nécessaire, comme cela fut décidé dans la loi de 1955, de raccourcir ce délai à douze jours. J'ajoute que notre assemblée est réunie, ce qui démontre que l'on peut faire vivre la démocratie même dans une telle période. Nous nous réunirons encore la semaine prochaine, notamment pour les questions au Gouvernement, et la semaine suivante : rien n'empêche donc de revenir devant le Parlement au terme d'un délai de douze jours. Nous souscrivons à l'idée d'un état d'urgence au regard de la gravité de la situation mais nous souhaitons en raccourcir la durée et renforcer le contrôle démocratique sur ce dispositif exceptionnel pour notre pays et ses traditions démocratiques.

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La durée d'un mois me paraît appropriée. Le Conseil d'État a d'ailleurs conseillé de passer de douze jours à un mois dans son avis et le Sénat lui-même n'a pas modifié cette disposition : cela me paraît approprié vu le contexte de crise sanitaire que nous pourrions être amenés à revivre. Avis défavorable.

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Il est très important de soutenir cet amendement, quelle que soit la position du Sénat, parce qu'il ne faut pas se dessaisir d'un contrôle démocratique dans une telle période. Le ministre lui-même a dit hier que personne ne savait comment se déroulerait la suite et quelles seraient les solutions à apporter. Le Parlement doit donc assurer tous les douze jours, et non pas une fois par mois, un contrôle du Gouvernement dans l'usage qu'il fait des restrictions des libertés et de l'État de droit autorisées par l'état d'urgence sanitaire. Nous soutiendrons donc cet amendement de bon sens.

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À chaque fois qu'on le peut, il faut être instruit de ce qui s'est passé, par exemple lors de la mise en oeuvre en 2015 de la loi de 1955 sur l'état d'urgence : le contrôle du Parlement, loin d'empêcher la mise en oeuvre des mesures exceptionnelles décidées par l'exécutif, a constitué une forme de garantie démocratique de sa validité. L'acquiescement démocratique n'est pas un affaiblissement de l'action de l'exécutif, mais bien sa condition. Nous devons nous garder de produire des exceptions au dispositif d'exception. Être aligné sur le dispositif de 1955 ne me paraît pas être une mauvaise idée, au contraire !

La Commission rejette l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CL63 de M. Jean-Christophe Lagarde.

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C'est un amendement d'appel un peu provocateur. Je suis toujours étonné de la difficulté française à tirer les leçons du passé. Il y a dix ans, j'ai présidé une commission d'enquête concernant le H1N1. La crise que nous vivons était prévisible et annoncée ; aujourd'hui c'est le Covid-19 mais cela pourrait être la variole, et nos institutions ne s'y sont pas préparées. Nous sommes en train de créer un état d'urgence sanitaire alors qu'on savait clairement que cela arriverait un jour.

Je défendrai cet amendement en séance car je souhaite que le président de l'Assemblée nationale soit là. Que le délai soit de douze jours ou d'un mois, nous pouvons être en situation de ne pas pouvoir nous réunir lors d'une autre crise sanitaire. Les transports peuvent être complètement arrêtés, et beaucoup de parlementaires n'auraient pas la possibilité de se rendre à Paris. Nous avons donc besoin d'avoir la possibilité de dématérialiser nos débats, comme le conseil des ministres le fait déjà. Nous devons nous doter rapidement des moyens de débattre à distance – je crois que c'est l'intention du président de l'Assemblée nationale. Aujourd'hui, la plupart de nos collègues sont privés de la possibilité de venir délibérer. Sophie Auconie et moi représentons les membres de notre groupe, qui nous regardent avec une certaine frustration. Nous avons besoin d'un dispositif permettant, en cas de crise, et en cas de crise seulement, de délibérer à distance de façon dématérialisée.

Tel est le sens de cet amendement qui, évidemment, sera retiré une fois qu'il sera défendu en séance.

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J'ai compris que c'était un amendement d'appel pour la séance ; demande de retrait.

L'amendement est retiré.

La Commission examine l'amendement CL105 de M. Bertrand Pancher.

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J'aime bien toute forme de pouvoir, à condition que ce pouvoir soit en liberté surveillée, notamment quand il y a une concentration de pouvoirs, ce qui sera le cas avec l'état d'urgence sanitaire. Celui-ci pose des limites très importantes à un certain nombre de libertés fondamentales – liberté d'aller et venir, liberté de réunion, liberté de culte, liberté d'entreprendre. Eu égard à ces restrictions sans équivalent dans notre arsenal législatif, il convient d'en borner l'usage. C'est la raison pour laquelle nous proposons que la prolongation de l'état d'urgence sanitaire par le Parlement ne puisse être accordée que pour une période de trois mois renouvelable. Il faut borner les périodes de prolongation : on peut parfaitement, avec des formes très souples, donner une légitimité démocratique à l'état d'urgence sanitaire.

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Avis défavorable car c'est au Parlement de fixer la prorogation de l'état d'urgence sanitaire. Il ne s'agit pas de le contraindre à une durée d'ores et déjà définie.

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Madame la rapporteure, pouvez-vous nous expliquer la procédure de prorogation au-delà d'un mois ? Y a-t-il de nouveau un avis du conseil scientifique, et est-il rendu public ? Tel que le texte est rédigé, le Gouvernement peut le faire, bien sûr, mais il peut aussi ne pas le faire. Pourriez-vous nous préciser ce point ?

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C'est effectivement le débat que nous aurons avec le Gouvernement.

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Sur ce point, il ne s'agit pas seulement d'avoir un débat : nous devons savoir ce qui, juridiquement, borne ou ne borne pas, permet ou ne permet pas la prorogation de l'état d'urgence. Les choses sont très floues, et je crains que nous ne nous apprêtions à mettre le doigt dans un engrenage qui pourrait avoir des conséquences fâcheuses.

Bertrand Pancher a raison de souligner que l'état d'urgence comporte de sérieuses restrictions en matière de circulation, de liberté de culte ou de liberté d'entreprendre. Ces restrictions sont parfaitement justifiées à condition qu'elles soient limitées dans le temps et que certains grands principes soient respectés.

J'entends ce que nous dit la rapporteure sur le fait que nous pourrons en discuter avec le Gouvernement, mais il y a désormais tant de points dont nous allons débattre que la séance va être longue…

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Ce ne serait pas la première fois, cher collègue – et c'est normal, c'est notre rôle !

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Bien sûr, madame la présidente, et je ne me plains pas. Ce qui me paraît préoccupant, c'est de renvoyer à la séance publique de très nombreuses questions laissées sans réponse.

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Je rappelle qu'en matière d'état d'urgence, la loi de 1955 ne définit pas de délai de prorogation : c'est le Parlement qui, à chaque fois qu'il est décidé de proroger, fixe la durée de prorogation. Entre 2015 et 2017, l'état d'urgence a, à plusieurs reprises, été prorogé pour trois mois, mais également pour six mois. À titre personnel, j'estime qu'il faut à chaque fois laisser au Parlement la latitude de déterminer quelle est la durée de prorogation la plus appropriée, plutôt que de fixer un délai contraint dès le départ.

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Nous allons devoir déterminer en séance si le comité scientifique doit être créé avant ou après que ne soit prise la décision de proroger, et si ce comité doit être consulté à chaque fois qu'on doit déclencher ou proroger l'état d'urgence sanitaire. Dans un mois, les parlementaires que nous sommes devront se prononcer sur la prorogation éventuelle de l'état d'urgence sanitaire : sur la base de quels éléments allons-nous prendre notre décision si nous ne disposons pas pour cela d'un avis scientifique ?

Quand un état d'urgence doit être décidé à la suite d'événements autres que sanitaires – une vague d'attentats, par exemple –, tous les éléments dont nous avons besoin pour nous prononcer nous sont connus, mais il en va tout autrement quand il s'agit d'une crise sanitaire, nécessitant la prise en compte d'informations d'ordre scientifique, alors que nous n'avons pas de compétences approfondies dans ce domaine.

J'insiste sur le fait que, ce soir, nous devrons veiller à inscrire dans la loi que le comité scientifique devra se réunir à chaque fois que nous aurons à nous prononcer sur une éventuelle prorogation, afin de nous faire bénéficier de son éclairage. C'est le bon sens !

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Je rappelle que l'article 5 bis commence par la phrase suivante : « Par dérogation aux dispositions de l'article L.3131-21 du code de la santé publique, l'état d'urgence sanitaire est déclaré pour une durée de deux mois à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. » Cela règle la question !

Les alinéas suivants sont ainsi rédigés : « Un décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé » – cela aussi apporte un certain nombre de réponses – « détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur. »

« La prorogation de l'état d'urgence au-delà de la durée prévue au premier alinéa du présent article ne peut être autorisée que par la loi. »

Puisqu'on s'entend dire à longueur d'année qu'on légifère trop, qu'on écrit la loi de façon trop détaillée, qu'on est trop tatillon, nous ferions aussi bien de nous dire que, de toute façon, la décision de prorogation de l'état d'urgence fera l'objet d'un débat au Parlement et que l'une des conditions de la réussite de ce débat réside dans l'éclairage scientifique dont nous pourrons disposer. Nous nous apprêtons à voter des dispositions pour une durée d'un an. Laissons un peu de liberté au législateur futur que nous sommes !

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La lecture des amendements de Mme Batho et de M. Pancher montre qu'il nous serait difficile de déterminer dès maintenant quel serait l'organe de consultation le plus adapté, puisque le premier de ces amendements propose qu'il s'agisse du comité de scientifiques mentionné à l'article L.3131-26 et le second, le Haut conseil de la santé publique.

Tout le monde s'accorde à penser que notre décision devrait s'appuyer sur une base scientifique, conformément à la méthode mise en oeuvre par le Gouvernement depuis le début de la gestion de cette crise, mais il reste à savoir à quelle instance scientifique il devrait être fait appel. C'est pourquoi je suggère que nous travaillions sur ce point avant la séance publique.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CL31 de M. Fabien Roussel.

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L'amendement CL31 est un amendement de repli par rapport à l'amendement CL72 que j'ai défendu tout à l'heure. Il vise à ce que les présidents de groupes parlementaires des deux chambres ou leurs représentants soient consultés préalablement aux décisions prises par le Premier ministre – conformément à ce qui a été fait par celui-ci à trois ou quatre reprises depuis le début de la crise. En d'autres termes, il s'agit d'inscrire dans la loi ce qui nous apparaît comme une très bonne pratique.

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Effectivement, la pratique qui est ici visée est saluée par tous les groupes. Cependant, j'estime que ce n'est pas notre rôle que de prévoir des dispositifs trop contraignants, d'autant que le projet de loi comporte déjà des garde-fous : premièrement, le principe selon lequel la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ne peut se faire que par la loi ; deuxièmement, le contrôle parlementaire prévu à l'article 13 du projet de loi. Je suis donc défavorable à cet amendement.

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Gardons-nous de la tentation de surlégiférer, à laquelle nous pourrions succomber en voulant inscrire dans la loi des pratiques existantes. À cet égard, la rédaction de l'amendement est révélatrice à plus d'un titre. Premièrement, pour ce qui est du périmètre de consultation, l'amendement prévoit d'inscrire dans la loi que les présidents de groupes parlementaires doivent être consultés. Il est à craindre que l'étape suivante ne consiste à dire que, lors de la réunion autour du Premier ministre, il n'y avait pas que les présidents de groupes parlementaires, mais aussi les chefs de formations politiques et les représentants d'associations d'élus locaux, et à se demander s'il ne faudrait pas l'écrire dans la loi. On finirait peut-être même par proposer d'écrire dans la loi la composition exacte de cet organe consultatif…

Deuxièmement, le terme même de « consultation » peut donner lieu à différentes interprétations, comme on a pu le voir ces derniers jours. Si cela signifie que l'on a réuni différentes personnes, cela ne permet pas de savoir, par exemple, si la question de la tenue du premier tour leur a été posée formellement.

En voulant inscrire trop de choses dans la loi, on risque de créer de nombreuses difficultés. Comme l'a souligné tout à l'heure M. Schellenberger, en tant que législateur, il nous reviendra de déterminer, au moment de prendre une décision sur une éventuelle prorogation de l'état d'urgence, si nous disposons pour cela de tous les éléments d'information nécessaires.

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À première vue, la proposition consistant à consacrer une bonne pratique existante paraît louable. Cela dit, on peut aussi penser que les conditions dans lesquelles la décision de prorogation pourrait être prise relèvent de la responsabilité du Parlement et de la Conférence des Présidents, et je ne suis donc pas certaine qu'il faille inscrire dans la loi le principe d'une consultation – j'ai même été tentée de proposer un sous-amendement visant à remplacer le mot « consultation » par le mot « information ». Sachant que le débat en séance publique portera sur le comité scientifique, cet amendement me semble intéressant.

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Sans vouloir couper les cheveux en quatre, l'expérience des derniers jours a montré que nous pouvions être amenés à assumer des décisions prises précédemment, y compris des décisions auxquelles nous n'avons pris aucune part. Nous sommes tous conscients de la difficulté objective à évaluer les choses et de la nécessité de prendre rapidement des décisions, mais force est de constater que nous sommes parfois mis devant le fait accompli et tenus de prendre position sur certains points sans disposer des éléments d'information qui nous seraient nécessaires pour le faire.

Les amendements que nous examinons actuellement ont vocation à encadrer au maximum les conditions dans lesquelles la décision de prorogation pourrait être prise. Cela me paraît effectivement relever du domaine de la loi, sur laquelle nous devons pouvoir nous reposer en raison du fait qu'elle est votée par la représentation nationale, dont elle tire sa légitimité. Cela n'a rien d'un détail en une période où nous avons besoin de construire collectivement de la confiance, au sein de cette assemblée et en dehors, sur des décisions comportant d'énormes enjeux en termes de respect des droits et des libertés.

Nous ne pouvons pas nous contenter de considérer que les choses ont plutôt bien marché jusqu'à présent, et continuer à tâtonner : au contraire, nous devons nous doter de cadres bien définis afin d'être en mesure d'assumer ou pas les décisions qui seront prises.

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On constate que, sur le plan politique, chacun a su faire preuve d'un comportement permettant de préserver l'unité de la Nation autour des mesures d'urgence, et j'estime que les consultations auxquelles il a été procédé dans le cadre du fonctionnement démocratique de nos institutions n'y sont pas étrangères.

À l'inverse, il semble que, depuis deux jours, l'unité nationale soit soumise à certaines tensions dans le cadre des relations sociales. Nous avons tous pu observer qu'il n'y a pas eu de consultation des syndicats de salariés et des représentants du patronat. Le ministre de l'économie, Bruno Le Maire, nous a dit que le Gouvernement allait essayer de rattraper les choses, notamment en ce qui concerne la filière du bâtiment, qui pose un gros problème, mais on voit bien que, même en décrétant l'état d'urgence sanitaire, le fait de travailler en consultation avec les partenaires sociaux dans le monde du travail, et avec les représentants politiques dans le domaine démocratique et institutionnel, revêt une extrême importance pour parvenir à l'unité nationale.

Dans ces conditions, je ne comprends vraiment pas en quoi une bonne pratique reconnue par tous ne pourrait pas être inscrite dans la loi, d'autant qu'il est proposé de réunir autour du Premier ministre les présidents de groupe du Parlement : si ce n'est pas nous qui formulons une telle proposition, je ne vois pas qui d'autre le fera – et en tout état de cause, nous avons la légitimité pour le faire.

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Si je comprends la philosophie de cet amendement inspiré par le bon sens, il me semble que limiter la consultation aux présidents de groupes parlementaires n'est pas représentatif de l'Assemblée nationale. À mon avis, il conviendrait donc de sous-amender cette proposition en prévoyant également la consultation des chefs de partis politiques représentés à l'Assemblée nationale. Cela permettrait à des mouvements politiques qui n'ont pas de groupe de faire entendre leur voix.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement CL67 de Mme Emmanuelle Ménard.

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Il s'agit de l'amendement que j'ai évoqué ce matin dans la discussion générale ; il vise à créer, dans la longue liste des mesures que le Premier ministre pourra prendre pour lutter efficacement contre l'épidémie de Covid-19, la possibilité d'avoir recours au couvre-feu.

Actuellement, comme je le répète depuis deux jours, le confinement n'est pas suffisamment respecté. Les chiffres le prouvent : 226 000 contrôles ont été effectués en France entre mardi midi et ce matin, et 18 000 procès-verbaux ont été dressés – ce sont les chiffres du ministère de l'intérieur –, sans compter tous ceux qui sont passés à travers les gouttes, et tous ceux qui ne sont plus contrôlés depuis hier puisque les polices municipales ont appris hier matin qu'elles n'étaient pas habilitées à le faire. J'espère d'ailleurs que nous voterons tous la mesure prévue à l'article 5 de ce texte, afin de remédier à cette situation.

Aujourd'hui, pour faciliter la tâche de nos forces de l'ordre et, plus important encore, pour lutter efficacement contre la propagation de l'épidémie, il nous faut instaurer la possibilité d'un couvre-feu. Personne, hormis les forces de sécurité et le personnel médical, n'a actuellement à être dehors à la nuit tombée et, comme toutes les autorités médicales le répètent, il n'existe pas de méthode plus fiable et plus efficace pour lutter contre le Covid-19 que le confinement total. Le couvre-feu contribuera à rendre encore plus efficaces ces mesures de confinement. D'ailleurs, même le ministre de l'intérieur commence à y réfléchir et à s'y montrer favorable, puisqu'il a annoncé en conférence de presse cet après-midi qu'il était d'accord pour accompagner les mesures locales visant à faire respecter le confinement, comme par exemple le couvre-feu à Nice. Je ne peux que m'en féliciter ; j'espère que certains maires prendront cette mesure quand elle s'avèrera nécessaire, et que le ministère de l'intérieur appuiera leur démarche.

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Votre amendement est satisfait par l'alinéa 18 de l'article 5, qui permet au Premier ministre d'« interdire la circulation des personnes et des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par décret » – c'est la formulation qui a été retenue dans la loi du 3 avril 1955 pour instituer des couvre-feux ; je demande donc son retrait.

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Je voudrais sensibiliser à la problématique du confinement dans les foyers où règne la violence conjugale. Celle-ci est en nette augmentation du fait de la promiscuité de leurs auteurs avec les victimes et les enfants, l'alcool jouant un rôle non négligeable en la matière – lorsqu'on est confiné toute la journée et que l'on ne peut pas sortir, on boit un peu plus que d'habitude et que de raison. La violence conjugale est un vrai sujet ; ce n'est pas l'objet de cet amendement, mais il me semble important que nous soyons sensibles à cette problématique et que nous en profitions pour saluer collectivement le travail remarquable effectué par les associations, malgré cette situation de crise sanitaire, pour soutenir ces femmes et ces enfants qui se trouvent en difficulté dans le cadre du confinement.

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La formulation présente dans le texte dont nous discutons me semble appropriée, parce qu'elle permet de circonscrire à certains lieux cette mesure de couvre-feu qui, prise à l'échelle nationale, ne serait pas pertinente. Seuls certains territoires particuliers posent problème ; ce n'est pas le cas de tous, et il y en a dans lesquels les mesures de confinement sont très bien acceptées. C'est une question sensible, qui risque de nous faire atteindre le point de non-retour en matière de limitation des libertés de nos concitoyens.

Il faut aussi faire attention à ce qu'une telle mesure ne soit pas contre-productive : le problème n'est pas que certains de nos concitoyens aient besoin de sortir un quart d'heure par jour pour faire une activité physique ; bien au contraire, cela leur permettra de rester plus longtemps en meilleure santé. Il y a un problème quand ils se croisent, se rencontrent, s'arrêtent et échangent. Avant de réduire la plage horaire sur laquelle il est possible de sortir, ce qui risque de l'engorger en mettant plus de monde dehors, il faut peut-être réfléchir à deux fois. Il vaut mieux que la possibilité de sortie s'étale sur des plages horaires plus larges, car il ne s'agit pas d'un problème d'ordre public classique tel que ceux que l'on traite en général avec le couvre-feu : ce qu'il faut juguler, ce sont les liens sociaux, les interactions, les rencontres physiques. Circonscrire ces mesures de confinement horaire à des lieux particuliers, qui posent particulièrement problème, me semble plus que nécessaire ; en revanche, la mise en place d'un couvre-feu national me paraît constituer une mesure bien trop ferme et trop forte, eu égard au respect global de ces règles sur le territoire national.

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Dans certains territoires et en particulier dans certains quartiers difficiles, le confinement n'est pas respecté, surtout le soir où des délits sont commis. Il faut que nous nous attachions à protéger les biens et les personnes, et ainsi à prendre des mesures plus coercitives. Dans certaines villes, des policiers et des pompiers ont été caillassés malgré le confinement. L'instauration d'un couvre-feu à partir de 20 heures ne nuirait à personne, sauf aux dealers, voleurs ou autres délinquants qui profitent de cette situation de crise sanitaire. La commune de Vallauris a pris un arrêté pour imposer un couvre-feu à partir de ce soir ; celles de Cannes et Nice y réfléchissent. L'État doit instaurer cette mesure qui permettrait de faire respecter les règles de confinement qui s'imposent.

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Notre collègue évoque à juste titre des communes qui prendraient un certain nombre de mesures de couvre-feu. Cela fait partie des compétences de base qui sont conférées au maire par le code général des collectivités territoriales, au titre de ses pouvoirs de police. Sous réserve d'un contrôle de leur légalité par les services préfectoraux, rien ne s'oppose à la mise en place de ce type de mesures au cas par cas, en fonction de nécessités propres à telle ou telle ville – qui peuvent être liées à des questions d'ordre public, de tranquillité ou de salubrité. Ce cas par cas est possible et pourrait s'avérer souhaitable dans certaines circonstances particulières et locales.

Cependant, généraliser une telle mesure comporterait un grand risque en restreignant encore davantage les libertés individuelles d'aller et de venir. Des complications pourraient survenir dans un certain nombre de cas, par exemple celui de personnels qui rentrent la nuit du travail parce qu'ils sont encore en trois-huit ou viennent d'alimenter tel ou tel magasin, ou celui des soignants ou des forces de l'ordre qui ont besoin de se déplacer sans être nécessairement identifiés en tant que tels. Tout cela risque de donner lieu à un nombre important de conflits juridiques. Libre aux collectivités et aux communes concernées de recourir à ces restrictions très fortes de libertés, mais leur généralisation ne me semble pas souhaitable.

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J'approuve ce qui vient d'être dit sur le fait que l'état d'urgence sanitaire est déjà en soi suffisamment contraignant à l'égard des libertés individuelles pour ne pas être étendu sans que cela se justifie d'un point de vue sanitaire, mais je voudrais profiter de ce débat pour dire qu'il faut faire attention, si l'on veut fabriquer du consensus et de l'unité nationale, à ne pas stigmatiser des quartiers, des villes ou des populations. Je viens d'une circonscription à propos de laquelle un journal étranger – suisse – a écrit ce matin un article absolument honteux et qui m'a révolté, alors que les voyages en jet privé viennent d'augmenter de 400 % en quarante-huit heures et que certains se sont rendus dans leur résidence secondaire. Il me semble facile, lorsqu'on se trouve dans sa maison de campagne de cinq pièces, de jeter l'opprobre sur des gens qui vivent à huit dans un studio, les uns sur les autres. Il faut que nous soyons attentifs à prendre en considération l'ensemble de la population et les difficultés spécifiques qui se présentent à chacun : tout le monde ne vit pas dans les mêmes conditions, et nous devons essayer de mener une politique de la main tendue et de l'écoute plutôt que de montrer du doigt et de stigmatiser.

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Il n'est pas question d'ostraciser certains quartiers ; je ne l'ai d'ailleurs pas fait lorsque j'ai défendu mon amendement. Cependant, je constate – pour en discuter régulièrement avec les forces de l'ordre qui sont sur le terrain – que certaines personnes s'amusent à jouer au chat et à la souris ; pour certains, ce n'est pas tout à fait conscient, mais pour d'autres, c'est véritablement un jeu.

Des témoignages montrent que sous prétexte de faire leurs courses ou leur jogging, d'aller à la pharmacie puis à la boulangerie, ou de sortir leur chien, certaines personnes sont hors de chez elles dix fois par jour, et ne prennent absolument pas au sérieux cette histoire de confinement. L'autorisation signée par soi-même permet à ceux qui le souhaitent de contourner facilement les règles. Ce n'est pas le cas de tout le monde, loin de là, mais les chiffres du ministère de l'intérieur sont éloquents : 226 000 contrôles pour des personnes hors de chez elle, cela signifie que 226 000 personnes ne respectent potentiellement pas les règles de confinement, et n'ont pas conscience qu'outre la leur, elles mettent en danger la vie d'autrui – chacun fait ce qu'il veut avec la sienne.

Dans certains quartiers – il n'est pas question d'ostraciser, puisque je parle ici du centre-ville de Béziers et non de la Seine-Saint-Denis ou de quelque autre région –, une partie de la population ne prend pas la mesure de la situation, alors qu'il en va de leur santé et de celle de leurs proches. Les policiers de Béziers et les gendarmes des zones alentours sont quotidiennement confrontés à des refus de confinement ; les forces de l'ordre ont autre chose à faire et nous devons les soutenir dans leur mission. Je n'ai pas dit qu'il fallait rendre le couvre-feu obligatoire au niveau national, mais il faut le rendre possible lorsque les maires, qui constatent au plus près du terrain la réalité des choses, le souhaitent. Le ministre de l'intérieur doit les soutenir, comme il a annoncé qu'il le ferait à Nice avec M. Estrosi.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement CL121 de M. Éric Diard.

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J'émets un avis favorable à cet amendement rédactionnel, sous réserve que le terme d'« urgence » soit remplacé par celui de « catastrophe », puisqu'il s'agit de « lutter contre ».

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Nous sommes favorables à cette rectification.

La Commission adopte l'amendement rectifié.

Elle est saisie de l'amendement CL3 de M. Schellenberger.

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J'aurais préféré ne jamais avoir à vous soumettre cet amendement, dont l'objet est d'appeler l'attention de la représentation nationale sur la situation dramatique dans le Haut-Rhin et en Alsace, suite à l'explosion du nombre de patients touchés par le Covid-19, du nombre de personnes placées en réanimation et, malheureusement, du nombre de décès.

Il est proposé de ramener le délai d'inhumation de six à quatre jours au plus après le décès afin de mieux gérer cette crise dans la crise et de maintenir, dans un délai réduit, la dignité face à la mort.

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Le sujet est légitime et très sensible. Vous proposez d'ajouter cette mesure à la liste de celles que peut prendre le Premier ministre, ce qui renvoie au débat que nous devrons avoir avec le Gouvernement sur la définition des grandes catégories de mesures. Votre amendement démontre qu'en essayant de dresser des listes, même avec les meilleures intentions, nous finissons par oublier des éléments. Cette question pourra également être évoquée lors de la discussion de l'article 7, qui porte sur les délais.

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Réduire ce délai dans la loi permettra-t-il d'apporter les solutions aux terribles difficultés auxquelles les familles sont confrontées ? Je m'interroge sur l'efficacité pratique de cet amendement.

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Les capacités des entreprises de pompes funèbres ne sont pas illimitées. En réduisant le délai d'inhumation, ne risquons-nous pas de nous placer dans une situation impossible ? Il est peut-être préférable de retirer cet amendement et de soulever la question en séance publique, afin d'éviter d'aggraver la situation. Je lisais dans la presse qu'en Alsace, le nombre de décès a doublé. Il y a donc déjà d'énormes problèmes de gestion des obsèques par les pompes funèbres. Mais M. Schellenberger connaît mieux que nous la situation.

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Je retire cet amendement, nous en redébattrons en séance publique. Ce ne sera pas une discussion facile, et je ne prétends pas apporter la solution par cet amendement, mais nous devons en parler car c'est un problème de dignité. Si nous décidons d'allonger le délai d'inhumation, dans quelles conditions cela se fera-t-il ?

Une fausse nouvelle a circulé sur les réseaux sociaux en Alsace selon laquelle les patinoires seraient mobilisées pour y stocker les cadavres. C'est d'une invraisemblable indignité, c'est archi-faux, mais c'est le genre d'information qui circule dans le territoire et nous devons nous battre pour rétablir la vérité.

Que nous décidions d'allonger le délai d'inhumation ou de le raccourcir, nous devrons faire un choix. Tout doit être fait pour ne pas en arriver à de telles mesures, mais si elles sont nécessaires, nous devons veiller à préserver la dignité.

J'ai également demandé à un bureau d'études de nos collectivités territoriales de nous éclairer sur la réalité des chiffres. Le nombre de décès dus au Covid-19 communiqué chaque jour correspond aux cas recensés médicalement, mais il est déconnecté de la réalité : le nombre de décès explose dans le territoire. Pour piloter ces questions dans le respect de la dignité humaine, nous avons besoin d'éléments d'information. J'espère que l'INSEE pourra accélérer le délai de communication des statistiques d'état civil pour les ramener d'un mois à une semaine.

L'amendement est retiré.

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Sarcelles abrite une importante communauté assyro-chaldéenne. Or les chrétiens d'Orient ont la particularité de vivre en famille, faisant cohabiter deux ou trois générations sous le même toit. Le taux de mortalité dans cette communauté est donc très important car les personnes âgées qui vivent avec de jeunes enfants sont touchées. Cinq décès ont ainsi été enregistrés au cours de la semaine, et même si le nombre de personnes assistant aux obsèques est restreint, les gens s'y étreignent. Nous devons nous interroger sur l'organisation des obsèques, car ce sont des occasions au cours desquelles le virus se propage. Il sera donc utile d'en débattre en séance publique.

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Il s'agit d'un sujet délicat, à manier avec beaucoup de précautions, je le sais pour avoir été rapporteur du projet de loi réformant le droit funéraire. Il touche à la sensibilité des familles, aux convictions religieuses, et il n'est pas simple de trouver un équilibre. Je ne sais pas s'il est préférable de raccourcir ou rallonger le délai : plus il est court, plus nous risquons de saturer les entreprises de pompes funèbres.

Nous devons aussi considérer la question de la crémation, car l'amendement ne porte que sur le délai d'inhumation. Or les règles doivent évoluer de pair. Les funérariums ont aussi des capacités limitées. Je ne veux heurter personne, nous cherchons tous la meilleure formule et M. Schellenberger le fait intelligemment, mais la bonne réponse ne porte sans doute pas sur les seules inhumations. Il nous faudrait disposer d'éléments statistiques sur la surmortalité des personnes âgées, en plus des décès directement imputés au Covid-19.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l'amendement CL122 de M. Le Bohec, puis l'amendement CL75 de M. Fabien Roussel.

Elle en vient à l'amendement CL15 de M. Mélenchon.

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Il s'agit d'imposer le caractère proportionné et nécessaire des restrictions générales pouvant être imposées aux libertés fondamentales, ainsi que des mesures individuelles pouvant être prises par les représentants de l'État sur les territoires concernés. Cette exigence démocratique fondamentale doit figurer dans la loi.

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Avis favorable, un amendement de même nature a été adopté s'agissant des mesures dont pourra décider le Premier ministre.

La Commission adopte l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CL16 de Mme Panot.

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Nous proposons d'élargir la composition du comité scientifique prévu par cet article afin d'y adjoindre toutes les compétences existantes au sein de la société civile dans le domaine des droits humains ou des interventions sanitaires et sociales. Il existe une complémentarité entre les institutions scientifiques, sociales, chargées de la défense des droits ou des questions de santé, et nous estimons également nécessaire de prévoir la présence des représentants des usagers du système de santé ainsi que du Défenseur des droits, dont l'expertise en matière d'accès au droit est essentielle.

Cet amendement fait suite à une sollicitation des collectifs investis dans l'Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament, et s'inspire de l'expérience d'une population aguerrie aux pandémies : les associations accompagnant les malades du SIDA. Les formes de solidarité et d'auto-organisation qu'elles ont développé pourraient enrichir les réflexions du comité scientifique.

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Avis défavorable, l'alinéa 33 de l'article, visé par cet amendement, prévoit la nomination des personnes qualifiées par décret.

Je partage toutefois votre souhait d'être informés de la composition de ce comité scientifique, et je rappelle que le projet de loi prévoit que le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat en nommeront chacun un membre.

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Au-delà du processus de nomination, c'est la qualité des personnes que nous souhaitons préciser par cet amendement. La réaction de la population aux consignes sanitaires a démontré qu'il était nécessaire de ne pas se fonder uniquement sur une approche médicale, mais aussi sur les sciences sociales, afin d'anticiper la réaction des différentes catégories sociales. Il est nécessaire d'adopter une approche extrêmement fine, et l'expérience des collectifs qui ont organisé des réseaux de solidarité dans un contexte où les contacts physiques sont proscrits serait extrêmement utile. Cette question ne peut pas être renvoyée à un simple décret.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine l'amendement CL47 de Mme Delphine Batho.

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Il s'agit d'une autre rédaction pour résoudre le même problème. Le projet de loi prévoit la création d'un comité scientifique en cas de déclaration d'un état d'urgence sanitaire. L'amendement précise que ce comité doit être créé préalablement à la déclaration de l'état d'urgence, puis maintenu sur toute sa durée. Je maintiens mon amendement, mais nous reverrons le sujet en séance publique pour trouver la bonne solution.

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Effectivement, nous avons déjà eu ce débat et nous devons en discuter avec le Gouvernement : la constitution préalable du comité est-elle la bonne formule ? Ou rendra-t-elle la déclaration de l'état d'urgence sanitaire plus tardive et moins opérationnelle ? Quelle est la bonne formule pour que le comité fournisse régulièrement des avis ? Nous sommes d'accord sur l'esprit.

La Commission rejette l'amendement.

Elle passe à l'amendement CL123 de M. Gaël Le Bohec.

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L'amendement vise à compléter la première phrase de l'alinéa 33 par « pluridisciplinaire » afin que le champ d'expertise scientifique soit suffisamment large pour évaluer le bien-fondé d'une déclaration d'état d'urgence sanitaire et ses éventuelles conséquences médicales, mais aussi économiques, sociales et financières.

En outre, l'amendement vise à ce que le comité de scientifiques soit paritaire.

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Je l'ai déjà dit, je ne veux pas rigidifier par la loi la composition du comité, qui relève du domaine réglementaire. J'y suis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis, suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette successivement les amendements CL107 de M. François Pupponi, CL48 et CL50 de Mme Delphine Batho.

La Commission en vient à la discussion commune des amendements CL49 de Mme Delphine Batho et CL76 de M. Fabien Roussel.

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De façon extrêmement maladroite, le projet de loi dispose que les avis du comité scientifique sont rendus publics « périodiquement ». Il serait préférable de supprimer ce terme car cela laisse entendre qu'on diffère la publicité des avis, alors qu'il faudrait qu'ils soient rendus publics sans délai.

Nous devons nous adapter en permanence, d'autant que la situation est inédite. Il ne s'agit donc pas d'un reproche mais, tout de même, l'avis du comité scientifique en date du 12 mars a été rendu public par le ministre de la santé le 17. Il aurait été extrêmement utile qu'il le soit dès le 12 car le comité recommandait déjà la fermeture des établissements scolaires, celle des bars et des restaurants, le tout dès le lendemain. Or cette mesure a été annoncée le 12 au soir pour les établissements scolaires pour une entrée en application le 16, et le 14 au soir pour les bars et restaurants.

En pareilles circonstances, une publicité plus rapide des avis du comité scientifique sera de nature à aider le Gouvernement à convaincre la population que des mesures difficiles doivent être prises.

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Je comprends l'esprit de vos amendements. S'agissant des modalités de consultation du comité, de la périodicité de ses avis et de leur publication, nous allons y travailler en vue de la séance.

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Au cours de la période que vous citez, madame Batho, le comité a été extrêmement sollicité et il ne dispose pas, contrairement à nous, d'un service de compte rendu qui prend note de nos débats et peut les publier rapidement. Or les scientifiques ont probablement des discussions aussi animées que les nôtres. Bien entendu, nous pouvons en rediscuter en séance publique, mais le terme « périodiquement » leur permettait de disposer d'une marge de manoeuvre pour restituer l'étendue de leurs échanges et les fondements de leurs avis, tout en offrant une forme de régularité dans la transparence vis-à-vis de nos concitoyens.

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J'ai entendu les propos du ministre de la santé au Sénat. Je comprends bien que les avis rendus publics comprennent l'avis majoritaire et les autres, qui le complètent. Ces recommandations scientifiques, qui éclairent la décision politique, ont des conséquences lourdes sur certaines libertés fondamentales. Nous devrions donc trouver les moyens de doter le comité scientifique d'un secrétariat, quitte à distinguer recommandations et avis.

Les décisions prises constituent des changements majeurs pour nos concitoyens – fermetures d'écoles ou de restaurants : il est donc normal que les avis soient rendus publics rapidement, et non une semaine plus tard. Même si nous légiférons surtout pour l'année à venir, nous devons garder en tête la situation où un autre gouvernement refuserait de donner suite à des recommandations scientifiques unanimes ou majoritaires.

En outre, le décret devra appliquer les méthodes scientifiques – de revue par les pairs – et préciser comment les avis minoritaires seront pris en compte en cas d'avis divergents. Dans les publications scientifiques, ces derniers sont toujours publiés, de façon transparente. Nous devons traiter ce point important.

L'amendement CL49 est retiré.

La Commission rejette l'amendement CL76.

L'amendement CL109 de M. François Pupponi est retiré.

La Commission examine l'amendement CL74 de M. Fabien Roussel.

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Dans le même esprit, nous considérons que les partenaires sociaux ne sont pas un frein à la prise de décision et qu'ils peuvent même faciliter la mise en oeuvre de l'urgence sanitaire. Ils doivent donc participer à la concertation. Il n'y a pas de contradiction entre état d'urgence et consultation démocratique et sociale.

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Pour répondre aux précédentes questions, le contrôle du Parlement est assuré par le titre IV, ajouté par le Sénat. L'article 13 dispose qu'à la demande de l'Assemblée nationale ou du Sénat, les autorités administratives communiquent toutes les mesures prises ou mises en oeuvre en application de la présente loi. Le deuxième alinéa de ce même article prévoit que l'Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire en ce qui concerne le contrôle et l'évaluation des mesures, ainsi que les conséquences sanitaires de l'épidémie de Covid-19.

Monsieur Peu, la création d'un comité national de suivi risque d'alourdir le dispositif. Nous en débattrons en séance publique, mais mon avis est défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 5 modifié.

Article 5 bis A : Habilitation à légiférer par ordonnance pour l'adaptation de l'état d'urgence sanitaire dans les collectivités régies par l'article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie

La Commission adopte l'article 5 bis A sans modification.

Article 5 bis : Proclamation de l'état d'urgence sanitaire pour une durée de deux mois

La Commission examine les amendements identiques CL51 de Mme Delphine Batho et CL111 de M. Bertrand Pancher.

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Le Sénat a proposé que l'on décrète l'état d'urgence sanitaire pour deux mois. À mon sens, il serait utile de faire un point devant le Parlement dans un mois. C'est l'objet de l'amendement CL51. La Nation doit être unie et cette unité passe aussi par la représentation nationale.

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Je retire l'amendement CL111 car vous allez nous donner la même réponse. Nous en rediscuterons en séance publique.

L'amendement CL111 est retiré.

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L'état d'urgence sanitaire doit être déclenché pour un mois par décret en conseil des ministres, toute prorogation devant faire l'objet d'un vote du Parlement. Le Sénat a introduit une nouvelle disposition pour tenir compte de la situation actuelle afin que nous soyons rapidement opérationnels. Le Parlement est ici à l'origine du déclenchement de l'état d'urgence – il ne s'agit donc pas d'un décret – et nous réunir pour le proroger dans un délai très court serait contre-productif. J'y suis défavorable.

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Je comprends que la rapporteure est favorable aux dispositions de l'article 13. À l'initiative du Sénat, ce dernier met en place un véritable contrôle parlementaire de la loi dont nous débattons. Si c'est le cas, je retire mon amendement puisque le Parlement disposera d'autres moyens pour exercer ses prérogatives.

L'amendement CL51 est retiré.

La Commission examine l'amendement CL71 de la rapporteure.

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Cet amendement technique permettra de mettre fin à l'état d'urgence sanitaire, qui serait déclenché après l'adoption de ce projet de loi, par un décret en conseil des ministres avant l'expiration du délai fixé par le premier alinéa de l'article que nous sommes en train d'examiner.

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C'est ma première prise de parole. Elle sera pour remercier la rapporteure : ce qu'elle propose me semble bien vu.

La Commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 5 bis modifié.

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Il nous reste 52 amendements à examiner, c'est-à-dire à peu près la moitié. Le texte adopté par notre Commission sera probablement disponible assez tard, et il faut évidemment laisser le temps nécessaire pour l'exercice du droit d'amendement. J'ai eu un échange avec le président de l'Assemblée nationale : il m'a indiqué que, compte tenu de la durée de nos travaux et de leur rythme d'avancement, la séance publique aura lieu demain à 9 heures 30, non ce soir. Nous pouvons continuer nos travaux sereinement et d'une manière complète. Chaque groupe politique pourra déposer des amendements tout aussi sereinement.

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Compte tenu de la durée de nos échanges, je concentrerai mes amendements en séance publique sur les points dont nous voyons qu'ils sont à résoudre, afin que l'on puisse programmer la commission mixte paritaire dans des délais raisonnables.

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Je vous en remercie. J'espère que votre position est partagée. Il me semble que nos débats, assez longs, montrent quels sont les points sur lesquels un consensus est possible si nous travaillons tous ensemble. Nous pourrons concentrer les débats en séance publique sur ces sujets.

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Ce que vous avez annoncé nous soulage tous, mais il faut aussi parler des conséquences. Même si nous faisons tous preuve de bonne volonté, beaucoup de points nécessiteront une réponse du ministre en séance publique. La réunion de demain matin ne suffira pas pour examiner tout le texte. Il y aura ensuite une commission mixte paritaire puisque nous avons adopté des amendements, mais nous ne savons pas quelle en sera l'issue. À quelle date cela nous amènerait-il en cas de nouvelle lecture ? Je m'interroge sur la concordance entre le calendrier parlementaire et la nécessité de faire aboutir nos travaux sur ce texte pour sécuriser juridiquement les mesures du Gouvernement.

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Autre élément : il n'est pas sûr que l'examen du projet de loi de finances rectificative au Sénat se termine par une adoption conforme. Une commission mixte paritaire pourrait aussi être nécessaire pour ce texte. Les sénateurs ont adopté en commission des Finances deux amendements que nous avions rejetés, en particulier au sujet de la déductibilité des heures supplémentaires : il reste à savoir s'ils seront maintenus en séance publique. S'ils étaient retirés, notre tâche en serait simplifiée.

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Je n'aime pas lire dans les boules de cristal, mais nos débats vont s'achever dans les heures qui viennent. Pour sécuriser le texte sur le plan constitutionnel, il faut laisser un délai permettant d'exercer le droit d'amendement. Notre objectif est de sécuriser les mesures prises par le Gouvernement ; il faut aussi sécuriser le texte que nous allons voter. Les débats en séance publique ne pourront donc commencer que demain matin. Une vigilance de chacun et des efforts partagés permettront, je l'espère, d'adopter un texte dans l'après-midi. On pourrait alors réunir une commission mixte paritaire dans la soirée et adopter ses conclusions dimanche. Je suis optimiste : la commission mixte paritaire peut être conclusive si chacune des chambres y met du sien – ce dont je ne doute pas.

Article 6 : Application aux îles Wallis et Futuna

La Commission adopte l'article 6 sans modification.

Article 6 bis A (art. L. 6141-7-3 du code de la santé publique) : Fondations hospitalières

La Commission adopte l'amendement 6 bis A sans modification.

Article 6 bis : Date de caducité de l'état d'urgence sanitaire

La Commission examine l'amendement CL70 de Mme Valérie Rabault.

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Nous proposons de faire référence au mois de janvier 2021, au lieu du mois d'avril, en ce qui concerne la date de caducité de l'état d'urgence sanitaire. Une durée d'un an nous paraît excessive : s'arrêter au 1er janvier 2021 serait largement suffisant.

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Le Sénat a créé, en ce qui concerne l'état d'urgence sanitaire, un régime juridique provisoire qui expirerait en avril 2021. Vous proposez d'avancer la date au mois de janvier. Cela ne me paraît pas réaliste au vu du calendrier parlementaire : l'automne étant consacré au projet de loi de financement de la sécurité sociale et au projet de loi de finances, nous devrions en réalité examiner la question dès le mois de septembre. Je ne pense pas que ce serait un bon équilibre, notamment compte tenu des échanges que nous avons eus dans cette Commission. Nous ne le souhaitons pas, évidemment, mais la crise sanitaire pourrait ne pas être réglée à ce moment-là. Je préférerais donc que le régime juridique provisoire que nous allons adopter puisse perdurer jusqu'en avril 2021.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement CL62 de M. Jean-Christophe Lagarde.

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Je suis persuadé que nous aurons beaucoup d'enseignements à tirer de cette crise. Mon amendement prévoit qu'une commission d'enquête parlementaire doit être créée six mois avant l'expiration du délai dont nous venons de parler. Cela nous permettra d'adapter et de pérenniser les dispositions que nous sommes en train d'adopter dans l'urgence.

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La création d'une commission d'enquête est une décision interne à chaque assemblée, elle ne relève pas du domaine de la loi. J'ajoute, même si je suis bien d'accord que ce n'est pas la même chose, qu'une mission d'information a déjà été créée par la Conférence des Présidents.

L'amendement CL62 est retiré.

La Commission adopte l'article 6 bis sans modification.

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Nous avons fini l'examen du titre II sur l'état d'urgence sanitaire.

Avant d'aborder le titre III sur les mesures d'urgence économique et d'adaptation à la lutte contre l'épidémie de Covid-19, je vous propose de suspendre notre réunion pendant cinq minutes.

La réunion, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à dix-neuf heures quarante.

MESURES D'URGENCE ÉCONOMIQUE ET D'ADAPTATION À LA LUTTE CONTRE L'ÉPIDÉMIE DE COVID-19

Article 7 A : Modalités de gestion budgétaire des collectivités territoriales au cours de la crise sanitaire

La Commission adopte l'article 7 A sans modification.

Article 7 B : Modalités de délibération des collectivités territoriales au cours de la crise sanitaire

La Commission examine l'amendement CL87 de la rapporteure

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Les collectivités doivent pouvoir recourir à des modalités de vote à distance pendant l'état d'urgence sanitaire dès lors qu'il n'est pas question de mesures nominatives. Je vous propose d'ouvrir cette possibilité pour tous les scrutins qui se tiennent habituellement à main levée – pour autant évidemment que les collectivités le souhaitent : il ne s'agit en aucun cas d'une obligation.

La Commission adopte l'amendement

Elle adopte l'article 7 B modifié

Après l'article 7 B

La Commission examine l'amendement CL5 de M. Raphaël Schellenberger

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Cet amendement revient sur nos discussions précédentes : dès lors que la sécurité des personnels est assurée, les activités économiques doivent être préservées. Sa rédaction, plus générale, acte le principe selon lequel il convient à la fois de maintenir l'activité économique, vitale pour lutter contre le coronavirus, tout en faisant le maximum, quitte à user de la contrainte, pour protéger les salariés, en limitant notamment les interactions liées à l'exercice de leur activité, y compris lorsqu'ils sont en contact avec le public comme, par exemple, les caissières ou les agents de collecte des déchets.

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Je suis bien entendu d'accord sur le principe mais sa portée est plus politique que juridique. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement

Article 7 : Habilitations à légiférer par ordonnances pour limiter les effets économiques et sociaux de la crise sanitaire

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l'amendement CL8 de M. Fabien Roussel

Elle examine l'amendement CL130 de Mme Valérie Rabault

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Suite à notre discussion avec M. Bruno Le Maire hier, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, nous avons quelques inquiétudes, notamment pour les professions paramédicales. Les ergothérapeutes, les ostéopathes, les kinésithérapeutes, par exemple, ne peuvent plus accueillir leurs patients, ne serait-ce que parce qu'ils ne disposent pas de masques. Nous voudrions être sûrs que ces professions pourront émarger au fonds d'urgence que nous avons créé dans le projet de loi de finances rectificative.

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Je serai souvent amenée à répondre à ce type d'amendement par une demande de retrait. Nous devrons obtenir du Gouvernement de plus amples informations sur les mesures envisagées : je ne saurai vous dire pour l'heure ce qui sera prévu dans les ordonnances.

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Nous avons déjà eu ce débat lors de la discussion sur le projet de loi de finances rectificative : qui bénéficiera du chômage partiel ? La position du Gouvernement a d'ailleurs évolué dans un sens plus libéral. On a beaucoup parlé d'élargir le champ au secteur du bâtiment et des travaux publics, M. Bruno Le Maire souhaitant distinguer les activités où les salariés peuvent continuer à travailler du fait de l'absence de risque sanitaire, et les activités de chantiers, pour lesquels ils pourraient bénéficier du chômage partiel. Bon nombre de petites entreprises, qui ne bénéficient pas de ce dispositif pour l'heure, nous demandent si le Gouvernement est prêt à élargir ce champ, et si oui, dans quelle mesure. Il faut absolument que, d'ici à la séance publique, le Gouvernement indique précisément qui en bénéficiera – qu'il s'agisse du premier ou du second fonds.

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Des architectes, des maîtres d'oeuvre m'ont alerté sur le fait que leurs chantiers ne pouvaient pas être poursuivis afin de ne pas favoriser la propagation du virus, ou parce que des clients en interdisaient l'accès. Or, pour l'instant, certaines demandes de chômage partiel ne sont pas prises en compte. La loi n'est pas encore votée, certes, mais il faut impérativement prévoir les souplesses nécessaires, et faire en sorte que les ordonnances intègrent cet effet domino. Nous en reparlerons en séance publique.

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Nous partageons tous cette préoccupation et nous avons tous été sollicités par de nombreuses professions. Des précisions s'imposent effectivement et le Gouvernement aura l'occasion de les donner en séance publique.

L'amendement est retiré

La Commission examine l'amendement CL53 de Mme Delphine Batho

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Les alinéas 7 et 8 posent un énorme problème. Nous avons longuement discuté de la nécessité du dialogue social, de l'engagement des partenaires sociaux : il a même été fait référence à la déclaration qu'ont signée aujourd'hui toutes les organisations syndicales et le patronat. J'y reviendrai lorsqu'il sera question de ces alinéas. En attendant, je souhaite compléter l'alinéa 4 en précisant que toutes ces mesures dérogatoires ont une « durée limitée à la situation exceptionnelle résultant de l'état d'urgence sanitaire et à ses conséquences économiques immédiates ». Faute de quoi, nous nous engagerions vers une dérogation « permanente » aux règles de l'ordre public social et au droit du travail, ce qui est la porte ouverte à n'importe quoi.

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Là encore, je demande le retrait de cet amendement. Il est clair que ce projet de loi, ne serait-ce que par son titre, sollicite l'utilisation des ordonnances dans le seul but de répondre à la crise sanitaire. Je ne pense donc pas que cet amendement soit utile, mais je m'en assurerai auprès du Gouvernement en séance publique.

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Qu'elle soit introduite aux alinéas 4, 7 ou 8, cette précision est essentielle : invoquer l'urgence sanitaire dans le titre de la loi ne saurait suffire. Nous revenons tout de même sur des acquis sociaux : les congés payés, les 35 heures… Si le Gouvernement indique qu'il s'agit de mesures provisoires, encore faut-il définir ce qu'est le provisoire. Sinon, on peut craindre qu'elles ne prennent un caractère définitif.

La Commission rejette l'amendement

Elle examine l'amendement CL77 de M. Fabien Roussel

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Il faut à tout prix éviter les effets d'aubaine : certains pourraient être tentés, même si de tels comportements seront certainement minoritaires, de profiter de cette crise pour rompre des contrats à durée déterminée, licencier, supprimer des emplois. Plutôt que de limiter les ruptures des contrats de travail, nous proposons une formulation moins sibylline en interdisant toutes les ruptures de contrat de travail fondées sur des motifs liés à la crise sanitaire et économique.

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Pour les mêmes raisons, demande de retrait : nous devrons débattre en séance publique de toutes ces questions légitimes afin d'obtenir des précisions.

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Un chef d'entreprise peut-il licencier des personnels pour un motif lié à l'état d'urgence sanitaire, madame la rapporteure ? Est-ce une raison légitime ? Si vous répondez non, cet amendement est dans une large mesure inutile. Mais si c'est oui…

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La question de M. de Courson est intéressante mais elle peut appeler différentes réponses : in fine, c'est toujours un motif économique qui est invoqué. Peut-il être justifié sur la base de l'épidémie ? Cela peut être subtil mais il me semble préférable de discuter des mesures propres à empêcher que cela n'arrive. Une fois les choses sécurisées, le juge du travail pourra dire le droit aux employeurs qui seraient tentés de profiter de la crise pour faire autre chose que de s'occuper de leur entreprise.

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Je voudrais rapporter le cas, assez compliqué, d'un chef d'entreprise des Hauts-de-France qui travaille dans le domaine de la restauration collective. Compte tenu des dispositions proposées aux salariés – droits de retrait, possibilité de garder les enfants, etc. – il a le plus grand mal à mobiliser ses équipes pour répondre aux besoins des EHPAD ou des hôpitaux : 3 000 salariés sur 8 500 manquent à l'appel. Si on ne se mobilise pas, ce sera, pour lui, le début de la catastrophe. Le système est parfois utilisé abusivement, sans réfléchir aux difficultés que cela crée aussi pour les entreprises. Or, il faut évidemment nourrir les résidents des EHPAD et les personnes hospitalisées, ce qui devient de plus en plus difficile pour les entreprises.

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Il ne s'agit pas de nier les difficultés que les chefs d'entreprise ou leurs salariés peuvent rencontrer. Mais là où il est seulement prévu que les mesures peuvent avoir pour objet de limiter les ruptures des contrats de travail liées à la crise, nous souhaitons interdire les ruptures des contrats de travail pour des motifs liés à l'état d'urgence sanitaire. Devant un tribunal de commerce ou les prud'hommes, ces motifs de rupture ne seront pas objectivés de la même manière que les motifs économiques. Il faut purement et simplement interdire ces ruptures, ce qui coupera court à tout effet d'aubaine.

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En ces moments difficiles, nos compatriotes ont besoin de protection. Il faut aller plus loin : une interdiction temporaire de licenciement, sauf pour faute grave, serait un signal envoyé par la majorité aux Français qui se trouvent en première ligne. L'interdiction de licenciement va aussi dans le sens des mesures de confinement que le Gouvernement a prises, fort légitimement.

Par ailleurs, comment les demandeurs d'emploi pourraient-ils conduire sereinement leurs recherches dans un contexte où les recrutements se feront particulièrement rares ? En adoptant une telle mesure, nous protégerons les Français.

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Je comprends l'intention de M. Fabien Roussel, mais il faut imaginer que le motif lié à l'état d'urgence sanitaire ne serait pas considéré par le juge comme réel et sérieux et qu'en toute hypothèse, la rupture serait requalifiée en licenciement abusif. On en revient à la case « ordonnances Pénicaud » et au plafonnement des indemnités prud'homales : il est un prix que certains employeurs peuvent payer pour licencier abusivement.

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Je rejoins les propos de MM. Vallaud et Schellenberger. Notre droit du travail est plutôt bien construit et permet de sanctionner les abus. La crise aura des effets démultiplicateurs et entraînera toutes sortes de situations. Une entreprise qui traversait un moment difficile mais avait un carnet de commandes à deux mois verra ces bonnes perspectives s'écrouler. À l'inverse, la crise sanitaire permettra à un fournisseur qui était bloqué et ne pouvait honorer certains contrats de rebondir en les rendant caducs. Il est risqué de poser, a priori, une interdiction générale.

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Il est vingt heures. Chaque soir, nos concitoyens applaudissent à leur fenêtre les personnels soignants. Je vous propose de nous joindre à eux.

Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent.

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Il n'est pas évident de prendre la parole après un tel moment. L'unité nationale, cela consiste aussi à soutenir ceux qui font tout leur possible pour nous.

Je me demande si la portée de cet amendement, tel qu'il est rédigé, ne serait pas finalement moins grande que celle de l'article. Les mesures ayant pour objet de limiter les ruptures des contrats de travail auront un effet bien plus important que l'interdiction des ruptures décidées sur un motif lié à l'état d'urgence sanitaire. En fin de compte, le texte est plus protecteur qu'il ne le serait s'il était ainsi amendé.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL78 de M. Fabien Roussel.

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Cet amendement de repli précise que les entreprises devront demander au préalable l'autorisation de licenciement à l'inspection du travail. À défaut d'être interdits, les licenciements seront davantage encadrés.

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Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi l'avis sera défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL52 de Mme Delphine Batho.

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Il existe, de toute évidence, une volonté d'éviter les faillites, de protéger les employeurs et leur activité. Il doit être tout aussi clair que le but de ces dispositions d'urgence est d'empêcher des licenciements.

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Les mesures prises par ordonnances auront pour objet de limiter les ruptures des contrats de travail. J'ai bien conscience que la remarque qui va suivre, de nature purement juridique, n'est pas tout à fait à la hauteur de nos débats, mais le licenciement doit rester une option lorsque la relation de travail est devenue problématique. Or, votre amendement aurait pour effet d'empêcher les licenciements pour faute suite à un manquement grave aux obligations professionnelles.

Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement, à défaut de quoi l'avis sera défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient à l'examen de l'amendement CL33 de M. Fabien Roussel.

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L'examen du projet de loi de finances rectificative nous a déjà donné l'occasion d'évoquer la situation dans laquelle se retrouve le monde du spectacle : associations, entreprises, intermittents. L'arrêt de toute une série de manifestations culturelles, d'ordinaire nombreuses en cette période, empêche les intermittents d'effectuer les 507 heures qui leur permettent d'acquérir les droits au chômage pendant les périodes de non-activité. Pour éviter une hécatombe sociale, nous proposons d'intégrer les intermittents dans le dispositif de chômage partiel prévu par le Gouvernement.

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Demande de retrait pour les mêmes raisons que précédemment.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle est saisie de l'amendement CL110 de Mme Jeanine Dubié.

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Nous avons un problème d'articulation entre la rédaction de l'alinéa 5 et le projet de loi de finances rectificative que nous avons adopté hier. La stratégie du programme 356 « Prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire » y est ainsi décrite : « La crise sanitaire exceptionnelle et ses conséquences économiques mettent en effet en péril la pérennité de nombreuses entreprises et donc d'un très grand nombre d'emplois. Dans ce contexte, un dispositif exceptionnel de prise en charge de l'activité partielle est mis en place, pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille. Il prend en charge de manière intégrale le chômage partiel des salariés (70 % du salaire brut) et ce jusqu'à 4,5 SMIC. Ce nouveau dispositif de chômage partiel concerne également les assistants maternels et les employés à domicile.

Or, l'alinéa 5 précise que les mesures ont pour objet de renforcer le recours à l'activité partielle « notamment en adaptant de manière temporaire le régime social applicable aux indemnités versées dans ce cadre, en l'étendant à de nouvelles catégories de bénéficiaires ». Ce n'est pas la même chose puisqu'il n'est plus question ici de soutenir toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, mais d'étendre le dispositif à d'autres bénéficiaires.

Cela mérite à tout le moins une explication du Gouvernement. Pourriez-vous, madame la rapporteure, prendre l'initiative de coordonner ce qui a été voté hier avec le PLFR et le présent projet de loi, afin que l'alinéa 5 de l'article 7 précise que ces mesures concernent toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, y compris les assistants maternels et les employés à domicile ?

Cela éviterait bien des polémiques. Les parlementaires ont été saisis par les fédérations du bâtiment et des travaux publics qui s'inquiètent de ne pouvoir recourir à ce dispositif. La réponse de M. Bruno Le Maire, hier soir, en séance publique, manquait de précision, ce qui suscite beaucoup d'inquiétude. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?

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En effet, c'est un point que nous devons regarder. Nous allons demander au Gouvernement d'harmoniser sa réponse.

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Afin que nous ayons un débat intéressant, pourriez-vous déposer un amendement de coordination qui reprendrait la stratégie du programme 356 telle qu'exposée dans le projet de loi de finances rectificative ?

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Nous allons effectivement travailler à un amendement.

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Ce serait une bonne chose de proposer un amendement général. Sinon, nous allons tous, et c'est bien légitime, nous lancer dans un inventaire des différentes catégories car nous avons envie de parler – et nous l'avons déjà fait – du BTP, des artisans, des petites entreprises du bâtiment, mais aussi des assistantes maternelles, des orthophonistes, des kinés, etc., sans jamais réussir à être exhaustif. Il serait bien d'avancer d'ici à la séance publique, même si les délais sont extrêmement contraints. Cela faciliterait les choses.

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Le texte voté hier concernait uniquement les salariés. Des questions ont été posées concernant les indépendants mais, si j'en juge d'après l'exposé des motifs du projet de loi de finances rectificative et le texte que nous sommes en train d'examiner, je ne crois pas qu'ils puissent bénéficier du dispositif.

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Notre collègue Charles de Courson a raison : la rédaction actuelle semble se limiter aux salariés. Nous sommes bien d'accord sur le fait qu'ils doivent en bénéficier, mais l'objet de mon propos, comme celui de beaucoup de nos collègues, est de mettre également en débat le sort des indépendants. En effet, de nombreuses questions se posent en ce qui les concerne. L'aide de 1 500 euros, versée à travers le fonds d'indemnisation, ne va pas toutes les résoudre. Du reste, ce n'est pas le même sujet. Il serait bon que nous tentions d'avoir une vue globale.

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Je retire mon amendement, quitte à le déposer de nouveau en séance, et j'attends impatiemment de lire celui de notre rapporteure…

L'amendement est retiré.

La Commission examine l'amendement CL81 de M. Fabien Roussel.

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Nous voulons appeler l'attention, comme nous l'avons fait hier au moment de l'examen du projet de loi de finances rectificative, sur les conséquences de l'indemnisation à hauteur de 70 % du salaire brut. Comme vous le savez, à la suite de la décision du Premier ministre, samedi dernier, de fermer les commerces non essentiels, le chômage partiel touche un grand nombre de salariés, notamment ceux des bars et restaurants qui doivent vivre avec des salaires très faibles – certes un peu améliorés par les pourboires ou les heures supplémentaires mais, en net, cela fait peu. De nombreuses personnes, dans ma circonscription, m'ont fait part de cette difficulté : quand votre salaire net est de 1 700 euros, une indemnisation à hauteur de 70 % du brut et 84 % du net, cela représente, environ une perte de 250 euros. Cette somme, c'est la différence entre vivre et survivre. Si cette situation devait perdurer, des familles entières – et, parmi elles, de nombreuses familles monoparentales – se retrouveraient dans des difficultés extrêmes.

Par ailleurs, les facilités accordées aux entreprises, notamment les aménagements de délai pour le paiement des loyers et le remboursement de certains emprunts, ne valent pas pour les particuliers : rien n'est prévu, pour l'instant, en ce qui concerne les loyers ou les prêts à la consommation. Si les salariés que j'évoquais n'ont plus ni les pourboires ni les heures supplémentaires et ne touchent que 84 % de leur salaire net, cela va créer des situations sociales dramatiques. Nous demandons que la prise en charge du chômage partiel couvre 100 % du salaire.

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Je demande le retrait de cet amendement qui vise à rendre obligatoires les dispositifs de formation professionnelle. Je ne suis pas sûre que cela soit parfaitement opérationnel vu le contexte de confinement que nous connaissons actuellement. Cependant, encore une fois, il est important que le débat sur cette question ait lieu et que le Gouvernement apporte des précisions. Nous en reparlons en séance publique.

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient aux amendements identiques CL79 de M. Fabien Roussel et CL96 de M. Jean-Luc Mélenchon.

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Nous ne trouvons pas juste de prévoir dès maintenant, par ordonnance, des mesures comme celles qui figurent dans l'alinéa 7, à savoir, notamment, permettre aux employeurs de modifier ou d'imposer les dates de congés payés, quand bien même ce serait dans la limite de six jours ouvrables. Peut-être, au moment de la sortie de crise, et compte tenu de l'état dans lequel sera le pays, faudra-t-il demander à tous les Français de se retrousser les manches et de participer à la solidarité en travaillant quelques jours de plus ; mais le prévoir à ce stade, c'est aller vite en besogne. Et puis, s'il faut parler de solidarité, ne nous contentons pas de demander aux salariés de sacrifier des jours de congé : tout le monde doit participer à la solidarité nationale, y compris les grandes fortunes, en rétablissant l'ISF. Parlons, dans ce texte, de toutes les dimensions de la solidarité, ou bien d'aucune – ce que nous proposons en demandant la suppression de cet alinéa.

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L'amendement CL96 propose lui aussi de supprimer cet alinéa. Deux choses nous posent principalement problème dans le texte qui nous est présenté dans le moment d'urgence que connaît le pays : premièrement le défaut de contrôle démocratique – l'état d'urgence sanitaire devrait être revu par le Parlement tous les douze jours, et non tous les mois ; deuxièmement, l'habilitation à prendre des mesures par ordonnance, notamment à l'alinéa 7, qui permet effectivement à l'employeur de décider unilatéralement de modifier les dates des congés, des jours de RTT et des repos. Nous devons plus que jamais nous serrer les coudes, être solidaires : ce n'est pas le moment d'ébranler des acquis sociaux extrêmement importants, qui sont la base de notre droit du travail. Il n'est pas opportun d'envoyer ce signal au pays ; il faut donc supprimer cette possibilité d'ordonnance.

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Avis défavorable, pour une raison simple : le Sénat, qui partageait vos craintes, a déjà limité à six jours ouvrables le volume des congés qui pouvaient être imposés par l'employeur. Cette position me paraît équilibrée. L'entreprise encaissera bien l'essentiel du choc dû au confinement – car celui-ci durera bien plus de six jours –, avec le soutien de l'État, à travers les dispositifs d'aide dont vous avez fait mention.

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Le groupe UDI, Agir et indépendants présentera un amendement qui visera non à supprimer l'alinéa 7, mais à faire en sorte que la suppression de six jours de congés ne puisse avoir lieu qu'après la conclusion d'un accord de branche. Cela nous paraîtrait de bon aloi : au moins serons-nous assurés qu'il n'y aura pas d'abus.

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Le groupe Socialistes et apparentés présentera lui aussi plusieurs amendements à l'alinéa 7, lequel ne concerne pas seulement les congés payés, madame la rapporteure : il remet aussi en cause les 35 heures – quand on parle des RTT, c'est bien de cela qu'il s'agit –, les jours de repos, le compte épargne-temps et les conventions et accords collectifs. Nous présenterons donc un amendement de suppression, puis des amendements de repli.

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Je suis d'accord avec ce qui vient d'être dit : toucher à la fois aux congés payés, aux RTT, autrement dit aux 35 heures, et aux jours de repos, c'est quand même énorme. C'est d'autant plus grave que les personnes qui doivent continuer à travailler sont touchées de plein fouet par la crise que nous vivons – les mesures de protection ne sont parfois pas assurées. Ceux qui sont confinés ne sont pas tous non plus dans des situations idéales – Stéphane Peu en parlait tout à l'heure : certains vivent à plusieurs dans de très petits espaces, parfois même avec des punaises de lit, comme me l'a écrit quelqu'un, dans des logements indignes : ce ne sont pas des vacances que les gens sont en train de prendre. Sans oublier ceux qui vont perdre des proches, ceux qui s'inscrivent dans la réserve sanitaire pour aider, et d'autres encore se mobilisent pour aider leurs voisins et voisines. Je suis résolument opposée à toute idée de porter atteinte à ce qui constitue un des fondements essentiels de notre système de solidarité.

La Commission rejette les amendements.

Elle est saisie de l'amendement CL125 de M. Gaël Le Bohec.

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Cet amendement vise à compléter l'alinéa 7 en précisant, d'une part, que les dérogations ne devront pas porter une atteinte excessive aux contrats en cours – conformément à l'avis du Conseil d'État –, d'autre part, qu'elles devront respecter la directive 200388CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003.

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Votre amendement est satisfait : le droit de l'Union européenne s'impose quoi qu'il arrive aux lois et aux ordonnances prises par les autorités nationales. Par ailleurs, je ne pense pas qu'il soit question, dans le cadre de ce texte, de bouleverser l'économie du contrat de travail en réduisant drastiquement le droit au repos. Cela dit, je vous invite, une fois encore, à déposer de nouveau cet amendement en séance pour obtenir une réponse du Gouvernement.

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Madame la rapporteure, peut-on modifier des conventions collectives par une loi ? Ne s'agit-il pas de contrats de droit privé, protégés par la Constitution au titre du droit de propriété et de la liberté contractuelle ? Une partie de l'alinéa 7 vise, sans encadrer le dispositif, les conventions et accords collectifs, ainsi que le statut général de la fonction publique. Ce dernier étant défini par la loi, cela ne pose pas de problème : une loi peut en modifier une autre. Mais les conventions collectives relèvent du droit privé : dans quelle mesure peut-on les modifier par une loi ? On peut envisager d'encadrer les conventions futures, mais qu'en est-il de celles qui sont en vigueur ?

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Je ne voudrais pas trop m'avancer, mais il me semble que les conventions collectives sont supplétives du champ légal : quand une loi sur le droit du travail vient modifier des pans s'appliquant à une convention collective, celle-ci s'en trouve nécessairement adaptée. Je prendrai un exemple hors crise sanitaire : si l'on devait modifier les congés de maternité et de parentalité en les rendant mieux disant, les conventions collectives, y compris celles qui proposaient plus que les dispositions antérieures, s'adapteraient à ce nouveau champ législatif.

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Pourquoi permettre aux employeurs de modifier les conventions collectives ? Pourquoi le faire maintenant et de cette manière ? J'aimerais comprendre quelle est la logique de ces dispositions.

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Je souhaite répondre à « Mme la majorité », comme on la surnomme, que les conventions collectives couvrent des champs qui ne sont pas prévus par la loi. Une loi intervient pour l'avenir, mais on ne peut modifier unilatéralement des contrats. Un problème similaire se posera d'ailleurs avec d'autres alinéas. Les conventions collectives ne sont pas supplétives… Ce n'est qu'une question, mais j'aimerais connaître la position de notre rapporteure.

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Mme la rapporteure a demandé le retrait de l'amendement afin que le débat puisse se tenir plus longuement en séance. Nous allons donc pouvoir passer au vote.

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Je n'ai pas eu la réponse à ma question, madame la présidente !

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Vous l'aurez peut-être demain, monsieur Roussel. Nous avons déjà éclairé plusieurs points.

La Commission rejette l'amendement CL125.

Puis elle examine l'amendement CL54 de Mme Delphine Batho.

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Il est question depuis le début de nos échanges de l'articulation entre les décisions prises au titre de l'état d'urgence sanitaire et le rendu d'un avis scientifique. Les alinéas 7 et 8 posent à cet égard un problème politique majeur.

Il est inenvisageable de déroger à toutes les règles de la république sociale sur décision unilatérale de l'employeur. La situation actuelle, exceptionnelle, va provoquer un choc économique qui n'en est encore qu'à son commencement. Qu'il faille dans de telles circonstances prévoir des modalités de mobilisation générale au sein des entreprises en rognant sur les vacances et en travaillant sans compter ses heures, y compris le dimanche, je vous l'accorde, et tous les salariés y sont prêts. Mais cela doit se faire par le dialogue social.

Cet amendement, dans lequel je reprends une suggestion de la CFDT, vise donc à ce que ces conditions dérogatoires du droit commun soient décidées ensemble, et je suis convaincue que nous pouvons y arriver. Profiter des circonstances pour remettre en cause des droits sociaux fondamentaux comme tente de le faire, maladroitement, la ministre du travail est non seulement regrettable et injuste ; c'est aussi et surtout une faute, au moment où les circonstances requièrent au contraire le concours de tous, organisations syndicales, salariés et employeurs.

Nous avons connu une crise – certes d'une autre ampleur – dans l'industrie automobile. Pour y faire face, des accords exceptionnels de compétitivité ont été conclus qui ont permis de limiter la casse, et tout le monde s'est retroussé les manches. Il me semble que c'est cet état d'esprit que nous devons privilégier aujourd'hui.

Le ministre de l'économie disait l'autre matin qu'en cas de tensions sociales, il était préférable de prendre une journée pour discuter des règles au lieu de laisser le conflit s'installer. Plutôt que d'un esprit revanchard contre les acquis sociaux fondamentaux, nous avons besoin d'unité et de mobilisation générale. Chacun assumera ses responsabilités et fournira les efforts nécessaires.

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Je vous demanderai de bien vouloir retirer cet amendement. S'il me paraît essentiel d'associer les partenaires sociaux, et le Gouvernement s'y emploie d'ailleurs dans les discussions menées actuellement, la conclusion d'un accord collectif ne me paraît pas être la manière la plus réactive de répondre à la crise sanitaire. Le confinement rend en outre l'exercice assez difficile.

Je suggère que vous évoquiez le sujet directement avec le Gouvernement en séance publique.

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Chacun ici en convient : nous sommes en situation de guerre sanitaire. Dans ces circonstances exceptionnelles, toute la stratégie du Gouvernement consiste à aider les entreprises à conserver leurs compétences au moyen d'un dispositif qui est le plus généreux d'Europe : nous avons débloqué près de 9 milliards d'euros pour les mesures de chômage partiel. Les entreprises tiennent à conserver leurs salariés au moment de la reprise de l'activité économique ; elles n'ont aucun intérêt à leur faire de mauvaises manières.

Les possibilités données sont donc elles aussi exceptionnelles, et la majorité n'envisage aucunement de remettre en cause de façon pérenne le droit du travail, en particulier en matière de congés.

Obliger les entreprises à conclure un accord collectif ne serait d'ailleurs pas opérant au vu des conditions de confinement que nous connaissons. Il me paraît donc malvenu d'introduire une telle rigidité en pleine crise sanitaire.

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Nous avons été nombreux à évoquer le droit commun du travail en abordant ce titre, et tel est bien notre état d'esprit : il faut agir avec intelligence, relancer le dialogue social et, pour certains, redécouvrir les corps intermédiaires, peut-être un peu trop oubliés.

Nous devons toutefois consacrer nos efforts à une ardente obligation : quand viendra le temps de la reconstruction, dans quelques semaines, je l'espère, il faudra, comme après d'autres guerres, et même si comparaison n'est pas raison, reconstruire, remettre sur pied des entreprises, préserver les compétences, être vigilants sur les coups boursiers qui pourraient nous confisquer le contrôle de certaines entreprises.

Si des questions demeurent et qu'il reste quelques ajustements à faire, force est de reconnaître que l'État joue pleinement son rôle protecteur. De leur côté, les chefs d'entreprise ont pour l'essentiel à coeur de maintenir l'outil de travail ; ils sont soucieux de le pérenniser. On peut bien sûr défendre une vision marxiste et XIXe siècle, mais pour ma part je ne côtoie pas de patrons bourreaux dans mon département. Rappelons que sans création de richesse, il n'y aura pas de partage.

Conserver les compétences suppose des efforts, et les chefs d'entreprise vont en faire. En contraignant les salariés avec toutes les précautions requises comme c'est ici le cas, il me semble qu'on les respecte.

Enfin, imposer la conclusion d'un accord collectif, qui est un dispositif lourd, ne me paraît pas tout à fait adapté aux circonstances.

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Mes chers collègues, pourquoi n'ajouterions-nous pas un alinéa ouvrant aux partenaires sociaux la possibilité de déroger durant la crise sanitaire à toutes les règles du code du travail ? Cela ne présenterait aucun risque, puisque cette faculté serait strictement limitée dans le temps.

On croit toujours que l'intelligence vient d'en haut, mais les entreprises sont incroyablement diverses : une telle mesure permettrait aux partenaires sociaux d'adapter l'organisation du travail à la situation de crise.

J'ai le sentiment que ce qui choque dans l'alinéa 7, c'est que l'on permette à l'employeur d'imposer unilatéralement certaines contraintes. C'est cela qui peut choquer. Pourquoi ne pas ouvrir aux partenaires sociaux la possibilité de rédiger à toutes les règles existantes durant le temps de la crise ? Faisons confiance à la base !

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S'il n'y a pas d'accord, il n'y a pas d'accord… Tu ne m'as pas écouté, camarade. (Sourires.)

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Chers collègues, plusieurs orateurs ont souhaité s'exprimer sur cet amendement et il nous en reste trente-cinq à examiner. Afin que chacun puisse se reposer et que l'administration puisse établir le texte de la Commission et le mettre à disposition de nos collègues qui doivent encore l'amender, je vous demanderai de ne pas retarder le débat.

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Pour notre part, nous avions préjugé que de nombreux amendements seraient renvoyés à la séance publique, et c'est pourquoi la plupart des nôtres seront déposés en séance.

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Vous n'êtes pas un habitué de la commission des Lois : nous y sommes très actifs !

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De ce que je vois, beaucoup d'amendements sont renvoyés en séance, sur des sujets importants.

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Nous en avons au contraire adopté un certain nombre !

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Personne ne disconviendra qu'il faille faire des efforts en pareilles circonstances. Les premiers à les consentir aujourd'hui sont les ouvriers, les artisans, les caissières, les éboueurs, les gaziers, tous ceux grâce à qui le pays tient encore debout.

Ce qui est demandé dans cet amendement, c'est que les efforts consentis soient négociés, car en période de crise, la démocratie sociale reste tout aussi indispensable que la démocratie parlementaire. Il faut et l'un, et l'autre. Les partenaires sociaux, syndicats de salariés et organisations patronales, se sont entendus sur le principe de cet accord collectif, qui pourrait être conclu rapidement dans des conditions simplifiées. Le Gouvernement ne s'est-il pas entretenu avec le secteur du bâtiment et des travaux publics ? Ne sommes-nous pas ici en train de débattre ? Il n'y a donc aucune raison que les partenaires sociaux ne puissent pas le faire.

Même dans des circonstances exceptionnelles, le maintien de l'ordre public social est indispensable, et il ne me paraît pas souhaitable d'ouvrir les dérogations que vous suggérez, camarade de Courson… Que celles qui sont proposées fassent l'objet d'un accord collectif contribue au contraire au renforcement du dialogue social. Parce que nous pensons que pour réussir à faire face à la crise il faut s'appuyer sur le consensus, nous soutiendrons cet amendement, et proposerons une disposition similaire en séance.

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Je partage les propos de Philippe Gosselin. Nous devons poser un cadre, celui d'une ordonnance, et, sur tous ces sujets, obtenir une réponse du ministre qui sera présent au banc demain.

L'alinéa 7 peut certes susciter des réactions, mais il pose aussi des bornes. Il ne va pas, comme l'imaginait M. de Courson, jusqu'à remettre à plat le contrat social, ce dont nous devons nous prémunir. Il s'agit plutôt de donner certaines libertés, certaines largesses supplémentaires, notamment pour relancer la machine par la suite car, malheureusement, il nous faut déjà penser l'après-crise.

Le texte pose une borne, qu'il semble important de rappeler : six jours ouvrables sur cinq semaines, cela fait un cinquième des congés payés. Des discussions se tiendront sur le cadre social et le droit social de la relance, mais il importe d'ores et déjà de fixer des limites.

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Mon intervention permettra de considérer l'amendement CL80 comme défendu car il porte sur le même sujet.

Delphine Batho a bien présenté l'état d'esprit qui doit prévaloir dans le pays, et qui dépend aussi de la loi que nous voterons. Si nous voulons que tout le monde, dans le pays et dans les collectifs de travail, se rassemble autour de la table, se retrousse les manches et fasse des efforts, encore faut-il que cela se fasse dans un état d'esprit commun et partagé, pas par des mesures autoritaires ou unilatérales.

Il ne semble pas en outre que cette demande émane des syndicats de salariés – certainement pas ! – ni même des représentants du patronat. Ce ne serait pas la première fois que cette majorité voudrait aller au-devant des demandes des partenaires sociaux, pour durcir le droit du travail ou le faire régresser.

Ne profitons pas d'une crise, qui nécessite l'unité, le rassemblement, par le dialogue et la conviction, pour faire passer des mesures, qui, dans l'immense majorité des entreprises, ne seront pas prises au pied de la lettre car le dialogue social prévaudra, mais qui, dans d'autres structures, pourront malheureusement servir de prétexte à des décisions autoritaires qui iraient à l'encontre de l'état d'esprit que nous devons rechercher dans le pays pour faire face à la crise à laquelle nous sommes confrontés.

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Je n'aime pas la métaphore de la guerre : la situation actuelle ne s'y prête pas car nous avons davantage besoin d'apporter du soin que de faire la guerre. Mais si on l'utilise, encore faut-il prendre en compte les réalités historiques : au sortir du second conflit mondial qui a secoué notre pays, il a fallu reconstruire tout un pays et une force de travail, malgré des générations dévastées. Tous et toutes montraient la volonté d'une unité, comme l'atteste le gouvernement constitué par le Conseil national de la Résistance. Or qu'avons-nous vu ? Des grèves, des mobilisations sociales, un rapport de force. Tant il est vrai que l'unité et la cohésion pour faire front, ensemble, à une situation particulière, en l'occurrence au confinement et au soutien aux services hospitaliers n'annihilent pas les rapports de force sociaux. Nous en avons débattu tout à l'heure, en évoquant ceux qui doivent se rendre sur leur lieu de travail, parce qu'ils ne peuvent pas télétravailler. Il y a bien là une question de classe.

Il est donc faux de penser que défendre l'intérêt général, commun à tous, annihile les rapports de force sociaux. Les dispositions que vous introduisez, avec ces habilitations et votre remise en cause du droit du travail, traduisent une vision sociale et l'idée que le dialogue social vient du rapport de force. La négociation a lieu car les salariés peuvent se mobiliser. Aujourd'hui, une telle mobilisation est possible sur les lieux ouverts car les salariés commencent à se mettre en grève, en refusant de travailler dans de telles conditions. Autrement, aucun rapport de force ne conduirait à une négociation.

C'est ainsi, camarade Courson, vous le savez très bien, que les choses se sont passées dans l'histoire du XIXe et du XXe siècles, et qu'elles se déroulent au XXIe siècle. Cela ne signifie pas que nous n'avons pas la volonté de faire société, ou de défendre certains droits, mais c'est la réalité des rapports de force. Prétendre que cela n'existe pas et faire passer ces ordonnances est une erreur, car vous remettez en cause la volonté commune d'avancer ensemble. Dans tous les cas, cela ne se passera pas de cette manière au sortir de l'épidémie.

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Je me réjouis que nous ayons un gouvernement pro-entreprises car, nonobstant une dialectique de gauche que nous connaissons depuis trop longtemps, aucun chômeur n'a retrouvé un emploi sans qu'une entreprise prospère ne l'ait embauché, et aucun salarié n'a perdu le sien autrement que parce que sa société s'est cassé la figure… Une entreprise, pour vivre, doit trouver un équilibre. Nous parlons de six jours de congés, de RTT, qui ne seraient pas pris au moment souhaité par le salarié.

Au demeurant, une telle mesure n'a rien d'urgent. Nous sommes dans une situation de crise sanitaire et de confinement, qui durera un mois à un mois et demi, peut-être deux, si l'on en juge par ce qui se passe dans d'autres pays. Les partenaires sociaux ont tout le temps de discuter, y compris de façon dématérialisée, des conditions d'acquisition des congés pays, et de construire un accord collectif. Il serait regrettable de donner ce droit unilatéral à l'employeur.

Dans une toute petite entreprise, avec un à deux salariés, ces conditions seront fixées par la discussion – aucun employeur ne pourra faire autrement. Dans une entreprise plus grande, où travaillent dix, vingt ou cinquante salariés, des règles peuvent être nécessaires. L'échange entre les partenaires sociaux et le cadrage d'un accord collectif, me paraissent très bénéfiques. Nous présenterons d'ailleurs un amendement en ce sens.

Oui, les entreprises doivent vivre, car sans elles, il n'y a pas de salariés. Oui, il faut leur permettre par tous les moyens de survivre et de surmonter cette crise économique, liée à la crise sanitaire. Mais empêcher un dialogue social qui permette de s'adapter au mieux, ou ne pas le prévoir, serait une erreur.

Je le dis d'autant plus que notre pays compte des syndicats responsables, notamment la CFDT ou l'UNSA. Nous savons bien que certains syndicats ne signeront jamais rien – je ne suis pas sûr, monsieur Lecoq, que M. Martinez soit à la tête d'un syndicat responsable. (Sourires.) Dans cette période de crise, nous devons miser sur des partenaires responsables.

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Pour l'heure, nous avons besoin d'entraide et de coopération, pas de décisions unilatérales qui créeront des crispations.

Dans sa rédaction actuelle, l'alinéa 7 ne comporte aucune circonstance de temps ou de secteur économique : il s'appliquerait par exemple aux salariés d'Amazon. Qui plus est, il n'est pas constitutionnel. Nous pouvons certes prendre le risque d'adopter des dispositions inconstitutionnelles, mais la République sociale figure bien dans la Constitution.

Enfin, l'alinéa 53 dispose, par un souci de rapidité compréhensible, que « les projets d'ordonnance pris sur le fondement du présent article sont dispensés de toute consultation obligatoire prévue par une disposition législative ou réglementaire ». Il est donc raisonnable, comme les partenaires sociaux le demandent depuis ce matin, de leur donner la main sur les mesures qui doivent être prises en vue de déroger au cadre habituel du droit du travail. C'est à eux qu'il revient d'en décider, non au Gouvernement, de façon unilatérale.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine les amendements identiques CL80 de M. Fabien Roussel et CL92 de M. Jean-Luc Mélenchon.

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Je m'interrogeais sur les raisons qui poussaient le Gouvernement à aller plus loin que ce que demandent les partenaires sociaux. J'ai pu entendre qu'il a été question, plutôt que du chômage partiel ou d'arrêts maladie, de forcer les salariés à prendre des congés, ce qui n'est dans l'intérêt ni de l'entreprise ni du salarié, mais seulement dans celui des comptes publics… Ce qui paraît contradictoire à l'engagement « quoi qu'il en coûte » du Président de la République.

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Ma collègue, Mathilde Panot l'a évoqué tout à l'heure, l'alinéa 8 vise à permettre à certaines entreprises « de déroger aux règles d'ordre public et aux stipulations conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical. » C'est pour nous un grave problème. Ces dispositions seront introduites sans la moindre concertation, ni dans le cadre du dialogue social avec les organisations syndicales, ni entre les salariés eux-mêmes. Or c'est d'abord cette voix que l'on doit entendre dans un moment où l'on demande à une partie de la population de faire de grands efforts.

Il a été dit que ces mesures ne seraient que temporaires et liées à l'urgence. Nous avons pourtant l'expérience de mesures temporaires, pouvant, comme l'état d'urgence, être prorogées, qui ont ensuite été introduites dans la loi, car elles étaient finalement bien pratiques ; le temps de la reconstruction économique promettant d'être long, elles risquent de devenir la norme. Le caractère temporaire n'est donc en rien une garantie.

Par ailleurs, nous le disons depuis le début de ce débat, il y a un avant et un après crise, y compris dans la manière dont nous considérons l'utilité sociale et économique de certains secteurs. Il faut commencer à repenser, de manière radicale, la place des salariés, la part, aujourd'hui cruciale, qu'ils ont, pour nous permettre de faire face à cette situation, et la façon d'organiser la répartition des ressources en fonction de ceux qui produisent la ressource vitale, qui nous permettra de tenir dans la durée. Cette réflexion détermine la façon dont nous pourrons entamer la reconstruction par la suite. Si, dès le départ, vous introduisez des dispositifs qui contraindront et restreindront les droits sociaux des premières personnes concernées, vous décidez que rien ne changera dans le monde d'après. Cela est problématique, non seulement pour les personnes concernées, mais aussi pour la société dans son ensemble.

La Commission rejette ces amendements.

Elle adopte l'article 7.

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Il nous reste un peu plus de trente amendements à examiner, alors que nous étions convenus de finir cette réunion vers vingt et une heure trente. Nous n'atteindrons pas notre objectif si les prises de parole durent deux minutes et demie ou trois minutes, faute de quoi nous travaillerons demain dans de mauvaises conditions. Si nous voulons que la séance publique se déroule correctement demain, nous devons disposer d'un texte pour exercer notre droit d'amendement et de députés qui soient capables de débattre. Je vous prie donc de respecter vos engagements, afin d'avancer dans l'examen du texte.

Après l'article 7

La Commission est saisie de l'amendement CL29 de M. Sébastien Huyghe.

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Beaucoup d'entreprises vont se trouver en difficulté. Certaines s'abriteront peut-être derrière le virus et les problèmes qu'elles rencontrent pour s'exonérer de leurs engagements contractuels, mais il nous paraît indispensable de rappeler la notion de bonne foi, telle qu'elle figure à l'article 1104 du code civil. Il faut étudier les difficultés qui se présentent, en prenant en considération cette notion, qui est essentielle. À défaut, l'ensemble du système contractuel – et, avec lui, le commerce et la vie économique – s'effondrerait.

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Demande de retrait. Je comprends votre objectif mais ces dispositions recouperaient l'une des ordonnances que nous venons, en adoptant l'article 7, d'habiliter le Gouvernement à prendre. Cette ordonnance porte sur les obligations des personnes morales de droit privé exerçant une activité économique à l'égard de leurs clients et fournisseurs, notamment en termes de délais de paiement, de pénalités et de contreparties. Si vous jugez cette habilitation trop restreinte pour atteindre vos objectifs, vous pourrez en parler au Gouvernement au cours de la séance publique de demain.

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Je maintiens cet amendement d'appel destiné à clarifier la situation.

La Commission rejette l'amendement.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l'amendement CL35 de M. Fabien Roussel.

Article 7 bis : Dérogation à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

La Commission adopte l'article 7 bis sans modification.

Après l'article 7 bis

La Commission examine l'amendement CL28 de M. Jean-Luc Mélenchon.

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L'amendement ne propose pas de reporter les nouvelles règles de l'assurance chômage, mais de les abroger. C'est ce que demandent les syndicats et la plupart des associations de chômeurs et de précaires. Si, à un moment où la précarité s'aggrave, ces règles ne peuvent s'appliquer, de l'avis même du Gouvernement, il ne reste plus qu'à les abroger.

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Nous venons de voter un article d'adaptation du droit. Vous avez légitimement insisté pour que ces adaptations soient provisoires, attachées à la crise sanitaire. Il ne me semble pas très cohérent de demander maintenant l'abrogation d'une loi au motif – ou, plus exactement, au prétexte – de l'épidémie. Défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, elle rejette les amendements CL36, CL37 et CL38 de M. Matthieu Orphelin.

Article 8 : Extension de quatre mois des délais des habilitations octroyées au Gouvernement pour légiférer par ordonnance

La Commission est saisie de l'amendement CL57 de Mme Delphine Batho.

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L'article 8 est inspiré par une conception extensive des délais dans lesquels les mesures peuvent être prises par ordonnance et les projets de loi de ratification peuvent être déposés. Quand on le lit, on se demande pourquoi le Gouvernement demande des habilitations aussi larges à procéder par ordonnance. Le Conseil d'État a relevé, dans son avis, que les administrations centrales sont débordées. J'entends cet argument, mais si ces dispositions ne sont pas extrêmement urgentes, il faut se conformer à la procédure législative ordinaire ; il n'y a pas de raison de recourir aux ordonnances.

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Je crois que vous faites une lecture erronée de l'article 8. Celui-ci ne s'applique pas aux ordonnances – motivées par la crise – que nous venons de voter, car elles ne seront pas en vigueur à la date de publication de la présente loi. Ce qui est visé ici, ce sont les habilitations accordées antérieurement à légiférer sur des sujets importants, que la crise sanitaire a naturellement fait reculer dans l'ordre des priorités de l'administration. À titre d'exemple, je ne pense pas qu'on se consacre pleinement, à l'heure actuelle, à transposer des directives européennes. Une fois l'épidémie vaincue, nous devrons respecter ces obligations et conduire des politiques publiques. Le Gouvernement doit demeurer en capacité de le faire une fois la crise passée. Défavorable.

L'amendement est retiré.

La Commission adopte l'article 8 sans modification.

Après l'article 8

La Commission examine l'amendement CL13 de M. Jean-Luc Mélenchon.

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Nous proposons, par cet amendement, de reporter l'application des ordonnances sur la justice pénale des mineurs. Ces derniers font partie des populations particulièrement vulnérables et précarisées en ces temps d'épidémie et de confinement. L'accompagnement spécifique qu'on doit leur offrir durant l'épidémie doit s'inscrire dans le temps. Par ailleurs, les acteurs concernés, dans l'ensemble des secteurs, nous font part de difficultés. Nous n'avons pu débattre de ce sujet au printemps, du fait des événements. Cela rend impossible, de notre point de vue, l'application des ordonnances. Elles doivent faire l'objet, avant leur mise en oeuvre, d'un dialogue et d'un débat avec les personnes concernées, les représentants des organes professionnels. Il nous semble beaucoup plus judicieux de repousser la date de leur entrée en vigueur.

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Avis défavorable. Le report de l'entrée en vigueur du code de la justice pénale des mineurs portant réforme de l'ordonnance du 2 février 1945 doit en effet être envisagé pour quelques mois, au vu de la crise sanitaire, mais sans aller jusqu'à septembre 2022. Nous sommes ici plusieurs commissaires aux lois à souhaiter débattre de ce texte sous cette législature !

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient à l'amendement CL6 de M. Raphaël Schellenberger.

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Il s'agit d'un amendement d'appel en vue de la séance, qui vise à interpeller le Gouvernement au sujet de la filière du transport. À un moment ou à un autre, il faudra prioriser les secteurs desservis par le transport, qui deviendra certainement très vite le maillon faible de notre système productif. L'amendement se concentre sur la filière agricole, qui est au fondement de notre système alimentaire, même si la filière médicale et pharmaceutique – cela va de soi – est également essentielle. Il est fondamental d'avoir un débat sur ce sujet ; dans ma circonscription, des entreprises signalent des tensions dans le secteur agroalimentaire.

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Demande de retrait, même si je partage pleinement votre intention.

L'amendement est retiré.

Article 9 : Prorogation des mandats des chefs d'établissements régis par le code de l'éducation

La Commission adopte l'article 9 sans modification.

Article 10 : Prolongation de 180 jours des titres de séjour sur le territoire français

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l'amendement CL114 de M. Bertrand Pancher.

Elle est saisie de l'amendement CL115 de M. M'Jid El Guerrab.

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Cet amendement vise à prolonger la durée de validité des titres de séjour, compte tenu de l'engorgement des administrations.

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J'y suis défavorable. Vous souhaitez que le droit au séjour attaché à une attestation de demande d'asile soit prolongé dans l'hypothèse où celle-ci expirerait au plus tard le 1er juillet. Cela me semble sortir du cadre de l'état d'urgence. Par parallélisme avec les dispositions électorales, qui prévoient que nous ferons un point le 10 mai pour fixer la date du second tour des élections municipales, il me semble cohérent de prévoir un bilan et un éventuel renouvellement de la dérogation à la mi-mai 2020. Défavorable.

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Qu'en est-il des cartes d'identité et des passeports ? Je n'ai rien vu dans le texte à ce sujet. Or on ne peut plus entrer dans les mairies et les préfectures.

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Il n'en est pas fait mention dans le texte. Il faudra interroger le Gouvernement.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine l'amendement CL94 de M. M'Jid El Guerrab.

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Cet amendement traite également de la prolongation des titres de séjour, pour que les étrangers présents sur notre sol aient le temps de retourner dans leur pays.

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Il faudra nous apporter une explication, car des personnes bénéficiant de titres de séjour en France ne peuvent pas repartir dans leur pays d'origine. Comment comptez-vous régler ce problème ?

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L'article 10 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnances toute mesure afin de prolonger la durée de validité des visas de long séjour, titres de séjour, autorisations provisoires de séjour, récépissés de demande de titre de séjour. On habilitera le Gouvernement à prendre des dispositions qui couvriront les cas que vous évoquez. J'ai échangé avec le Gouvernement, qui a à l'esprit ces préoccupations et a bien l'intention de faciliter les procédures administratives pour ces personnes.

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Compte tenu de la qualité de votre réponse, madame la présidente, je pense que M'Jid El Guerrab n'aura pas d'objections à ce qu'on retire l'amendement.

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Le texte habilite le Gouvernement à prolonger la durée de validité des titres en question dans la limite de six mois. Nous proposons de porter ce terme à neuf mois pour faciliter le retour de ces personnes. Je rappelle que nous avons voté dans la loi de finances rectificative une avance considérable – de 500 millions d'euros – au profit du transport aérien, compte tenu de l'estimation du Gouvernement, qui s'attend à une interruption de trafic de quatre mois. Je ne sais pas comment les gens pourront retourner chez eux.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 10 sans modification.

Après l'article 10

La Commission examine l'amendement CL41 de Mme Aude Amadou.

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L'amendement vise à suspendre pour trois mois la prise d'empreintes digitales rendue obligatoire par le règlement européen n° 6032013 du 26 juin 2013 dit « EURODAC ».

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Demande de retrait. Votre amendement est satisfait par l'article 10, qui prévoit l'extension automatique et générale, pour cent quatre-vingts jours, de l'ensemble des titres de séjour dont bénéficient les étrangers en situation régulière sur le territoire national. Par ailleurs, vous précisez vous-même, dans votre exposé sommaire, que la prise d'empreintes n'est plus réalisée, ce qui correspond à une suspension de fait de la contrainte prévue par le règlement « EURODAC ».

L'amendement est retiré.

La Commission passe à l'examen de l'amendement CL116 de M. Bertrand Pancher.

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L'amendement vise à prononcer un moratoire sur la notification de refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire et l'interdiction de retour sur le territoire et de transfert Dublin, compte tenu de l'impossibilité de déposer un recours et d'accéder à la justice, dans les délais fixés par la loi, et de la fermeture des centres de rétention administrative.

La Commission rejette l'amendement.

Article 11 : Réduction de la période d'exploitation en salle des oeuvres cinématographiques

La Commission adopte l'article 11 sans modification.

Après l'article 11

La Commission examine l'amendement CL108 de M. François Pupponi.

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C'est un amendement d'appel. M. Bruno Le Maire, lors du vote de la loi de finances rectificative, a dit être en train de négocier avec la fédération française de l'assurance, pour voir comment les caisses pourraient participer à l'effort national, étant donné que l'assurance perte d'exploitation ne joue pas dans le cas de crises sanitaires. Madame la rapporteure, avez-vous une position sur cette question ?

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle étudie l'amendement CL17 de M. Jean-Luc Mélenchon.

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Prises dans des circonstances exceptionnelles, les mesures d'état d'urgence sanitaire ont un impact certain sur les libertés fondamentales. C'est pourquoi nous voulons inscrire une clause de caducité dans la loi.

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Il ne me semble pas raisonnable d'envisager des dates couperets. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

TITRE IV

CONTRÔLE PARLEMENTAIRE

Article 12 : Prolongation de deux mois des commissions d'enquête en cours

La Commission adopte l'article 12 sans modification.

Article 13 : Contrôle du Parlement sur les mesures d'état d'urgence sanitaire

La Commission adopte l'article 13 sans modification.

Après l'article 13

La Commission examine l'amendement CL117 de Mme Françoise Dumas.

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Si les intermittents du spectacle sont éligibles à l'indemnisation, qu'en sera-t-il des auteurs, privés de toute ressource pendant la période de fermeture des lieux de spectacle ? C'est un amendement d'appel. Je ne sais si notre rapporteure a une idée pour soutenir les auteurs…

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Je répondrai avec humilité que la commission des Affaires culturelles aurait probablement un avis plus fondé que le mien. Une jurisprudence de la commission des Lois veut que nous ne demandions pas de rapport au Gouvernement, mais que nous effectuions nos mission de contrôle nous-même.

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Je retire mon amendement pour le redéposer en séance.

L'amendement est retiré.

La Commission passe à l'examen de l'amendement CL119 de M. Jean Lassalle.

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Cet amendement d'appel demande au Gouvernement la remise d'un rapport au Parlement détaillant l'ensemble des mesures pouvant être prises pour renforcer le soutien à l'aide sociale à l'enfance.

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Avis défavorable. Le Gouvernement détaillera les mesures prises pour faire face à l'épidémie de Covid-19 en séance publique demain.

La Commission rejette l'amendement.

Elle adopte enfin l'ensemble du projet de loi ordinaire modifié.

La Commission en vient à l'examen du projet de loi organique d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 (n° 2763

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Chers collègues, la loi organique d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 ne comporte qu'un article unique, sur lequel il n'y a pas d'amendement.

Article unique : Délais de transmission et de jugement des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC

La Commission adopte l'article unique sans modification.

Après l'article unique

Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, les amendements CL1 de M. Jean-Christophe Lagarde et CL2 de M. Laurent Furst sont successivement rejetés.

La Commission adopte le projet de loi organique sans modification.

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La séance publique ouvrira demain, samedi 21 mars, à neuf heures trente, heure à laquelle le délai de dépôt des amendements a été fixé. Comme vous l'avez tous souhaité, j'ai formulé la demande, au nom de la commission des Lois, que la discussion en séance publique s'engage d'abord sur les dispositions du titre II, relatives à l'état d'urgence sanitaire. Nous débattrons ensuite du titre III relatif à l'urgence économique, puis du titre I sur les élections et enfin du titre IV sur le contrôle parlementaire.

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Si l'ordre de discussion des titres me semble tout à fait pertinent, cela signifie-t-il que le texte sera également réordonné en ce sens ?

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Vers quelle heure le texte de la Commission sera-t-il disponible pour le dépôt des amendements ?

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Monsieur Schellenberger, nous étions précisément en train d'échanger sur ce sujet avec M. Stanislas Guerini. L'urgence étant bel et bien celle de la crise sanitaire, nous allons réfléchir à un réordonnancement des titres.

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J'entends vos remarques et je partage votre logique politique. En revanche, nous devons évaluer les conséquences d'un tel remaniement du texte et voir s'il est faisable de le faire dans le peu de temps qui nous est imparti.

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Le texte devrait être mis en ligne dans une heure. Les services de l'Assemblée nationale font leur maximum.

Je vous remercie pour la qualité de nos débats, qui ont été très intéressants et respectueux les uns des autres.

La réunion se termine à 21 heures 35.

Membres présents ou excusés

Groupe La République en Marche (LaREM

Mme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des Lois

Mme Marie Guévenoux, rapporteure

M. Stanislas Guérini, représentant le président de groupe

Mme Coralie Dubost

Mme Fadila Khattabi

Groupe les Républicains (LR

M. Philippe Gosselin, représentant le président de groupe

M. Raphaël Schellenberger

Groupe Mouvement Démocrate et apparentés (Modem

Mme Isabelle Florennes, représentant le président de groupe

Groupe Socialistes et apparentés (Soc

M. Christophe Bouillon, représentant le président de groupe

Mme Christine Pirès-Beaune

M. Boris Vallaud

Groupe UDI, Agir et Indépendants (UDI-A&I

M. Jean-Christophe Lagarde, président de groupe

Mme Sophie Auconie

Groupe Libertés et Territoires (LT

M. Bertrand Pancher, représentant le président de groupe

M. Charles de Courson

M. François Pupponi

Groupe la France insoumise (FI

Mme Clémentine Autain, représentant le président de groupe

Mme Danièle Obono

Mme Mathilde Panot

Groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR

M. Fabien Roussel, représentant le président de groupe

M. Stéphane Peu

M. Jean-Paul Lecoq

Députés non-inscrits (NI

Mme Delphine Batho

Mme Emmanuelle Ménard

M. Ludovic Pajot