Commission des affaires étrangères

Réunion du mardi 7 juillet 2020 à 15h05

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • envoi
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La réunion

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Conclusions de la mission flash sur les conditions de délivrance des passeports aux Français établis hors de France (MM. Alexandre Holroyd et Didier Quentin, co-rapporteurs)

La séance est ouverte à 15 heures 05.

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. Nous sommes aujourd'hui réunis autour d'Alexandre Holroyd et de Didier Quentin, qui ont été chargés par notre commission d'une mission « flash » sur les conditions de délivrance des passeports à l'étranger à l'occasion de la crise sanitaire.

Cette crise a eu des répercussions très fortes sur la délivrance des passeports aux Français de l'étranger, qui sont nombreux à s'être retrouvés sans titre d'identité. Vous estimez, dans votre rapport, qui est très précis et opérationnel, que le retard accumulé du fait de la crise sanitaire est de plusieurs dizaines de milliers de passeports et que le réseau consulaire mettra plusieurs mois à rétablir la situation.

C'est la raison pour laquelle notre commission avait souhaité que des propositions soient faites pour faciliter un retour accéléré à la normale et réformer, à moyen et long terme, la procédure de délivrance des passeports à l'étranger.

Dans cette commission, nous sommes absolument convaincus que la crise sanitaire doit être l'occasion d'initier des changements profonds des modes de fonctionnement du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, puisqu'il s'est avéré que nous n'avons pas été assez réactifs et que nous n'avons pas eu une capacité d'adaptation suffisante. Il est toujours extrêmement important de tirer les conclusions de ce qui a fonctionné et de ce qui a moins bien fonctionné.

Pour remplir la mission qui était la vôtre, vous avez, dans un délai extrêmement limité, rencontré tous les acteurs qui interviennent à chaque étape de la chaîne de délivrance des passeports à nos compatriotes vivant à l'étranger : les consulats, l'Imprimerie nationale, la valise diplomatique, sans oublier, bien sûr, les services centraux du ministère des affaires étrangères et du ministère de l'intérieur, qui se partagent la compétence dans ce domaine. Vous avez également travaillé avec plusieurs consulats, parmi les plus importants.

À l'issue de vos travaux, vous faites deux séries de propositions. Premièrement, rénover les principaux outils informatiques utilisés par les consulats. Le Quai d'Orsay a un grand retard à rattraper sur le plan de la transition numérique. Et deuxièmement : développer l'envoi des passeports sous pli sécurisé, afin d'éviter aux demandeurs de se rendre à nouveau devant leur consulat, dont ils sont parfois très éloignés géographiquement.

Et puis vous avez aussi un mot pour le personnel du réseau consulaire, dont les effectifs diminuent depuis plusieurs années mais dont les missions ne cessent pourtant de s'étendre. Ce personnel a été très fortement sollicité pendant la crise sanitaire et il paraît essentiel pour notre commission des affaires étrangères de leur apporter tout notre soutien, dans l'intérêt du réseau et des services rendus à nos concitoyens à l'étranger.

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Cette mission a été créée il y a dix jours, ce qui nous a conduit à travailler à un bon rythme, je dirais même à marche forcée, afin de rendre nos conclusions avant la fin des travaux de la commission des affaires étrangères. L'appellation de mission « flash » est donc pleinement justifiée.

Alors, pourquoi cette mission ? Vous l'avez déjà indiqué à grands traits, Madame la présidente : plusieurs Français de l'étranger ont alerté leur député, dont mon co-rapporteur Alexandre Holroyd, et même certains députés métropolitains et ultramarins, sur la difficulté d'obtenir un passeport depuis le début de la pandémie de covid-19. Or cette situation leur est préjudiciable, d'abord parce qu'il est compliqué de ne pas avoir de passeport valide à l'étranger, mais aussi parce qu'un grand nombre de nos compatriotes envisagent de rentrer en France durant l'été. Sans passeport, il leur est impossible de concrétiser ce projet, puis de retourner ensuite dans leur pays de résidence.

L'objectif de cette mission était donc triple : premièrement, évaluer la gravité et l'origine exacte du problème ; deuxièmement, identifier les obstacles principaux à un retour au fonctionnement normal ; troisièmement, faire des propositions pour résoudre rapidement les difficultés constatées et d'améliorer, peut-être aussi à plus long terme, la délivrance des passeports à l'étranger.

Pour commencer, voici quelques éléments de rappel du cadre de la délivrance des passeports à l'étranger. Chaque année, les consulats français délivrent 350 000 titres d'identité et de voyage, dont 230 000 passeports ordinaires, ce qui représente un nombre conséquent de titres. Ces titres sont délivrés dans les mêmes conditions qu'en métropole, sous réserve d'un certain nombre de souplesses, destinées à tenir compte de la contrainte que représente la « double comparution personnelle » des demandeurs. Cette expression reviendra souvent dans notre rapport. Cette double comparution personnelle des demandeurs comprend une première comparution au moment du dépôt de la demande, et une autre lors du retrait du titre. Or, les Français de l'étranger sont parfois très éloignés de leur consulat, parfois de plusieurs milliers de kilomètres, si on pense aux très grands pays-continents.

La délivrance de passeports à l'étranger se décompose en quatre phases : premièrement, le dépôt de la demande, au guichet des consulats ou, pour les plus grands pays, lors des tournées consulaires, par l'intermédiaire de dispositifs mobiles de recueil des demandes. Deuxièmement, la production du titre, sur laquelle l'Imprimerie nationale dispose d'un monopole. Troisièmement, l'acheminement du titre vers le poste consulaire, en principe par la valise diplomatique mais, aujourd'hui, de façon majoritaire, par livraison directe via Chronopost. Enfin quatrièmement, la remise du titre. Il y a plusieurs formules : soit au guichet du consulat, soit à l'occasion d'une tournée consulaire, soit par un consul honoraire spécialement habilité, soit enfin par envoi à domicile sous pli sécurisé.

Je précise que l'envoi sous pli sécurisé a constitué une « petite révolution » qui date de 2017, et est donc assez récente. Cet envoi est limité à trente-six pays et soumis à plusieurs conditions, dont la demande expresse de bénéficier de cette modalité de remise dès le dépôt de la demande et de fournir, à cette occasion, une enveloppe pré-affranchie. Cela représente une des lourdeurs de ce dispositif parce qu'il faut le faire, je le répète, dès le dépôt de la demande.

La pandémie mondiale de covid-19 a, de fait, mis en tension toute la chaîne de délivrance des passeports à l'étranger. Pourquoi cette mise en tension ? D'abord parce que les consulats ont été nombreux à fermer leurs portes. Ensuite, parce que la valise diplomatique a dû se réorganiser à cause de l'interruption des liaisons aériennes. Et enfin car l'Imprimerie nationale a dû reconfigurer son outil industriel pour honorer les commandes dans le respect des délais. Au total, nous estimons qu'il existe un retard dans la délivrance de 50 000 passeports par rapport à une année normale. C'est donc considérable.

Aujourd'hui, les consulats, puisque c'est à leur niveau que la tension est la plus forte, reprennent progressivement leur activité avec, bien sûr, des pertes de temps et des délais supplémentaires dus notamment à la distanciation physique. En 2019, les cinq plus grands postes consulaires sont Londres, avec 29 812 livraisons de passeports, Genève, avec 12 744 livraisons, Bruxelles, avec 11 139 livraisons, Montréal, avec 8 931 livraisons, et enfin New York, avec 4 150 livraisons. Dans ces cinq plus grands postes consulaires, un retour à la normale n'est pas envisageable avant trois à neuf mois, et dépend de l'évolution de la situation sanitaire.

En attendant, les consulats semblent condamnés à donner la priorité à certaines demandes, naturellement au détriment d'autres demandes, et les Français de l'étranger sont obligés de patienter. Cela explique les interventions que ces derniers peuvent faire auprès des députés des Français établis hors de France, ou même des députés métropolitains et ultramarins.

De notre point de vue, cette situation n'est pas une fatalité. Mais la pandémie mondiale révèle un certain nombre de rigidités dans la procédure de délivrance des passeports qui empêchent les consulats de faire preuve de l'agilité nécessaire à la résolution rapide du problème. Ces rigidités sont principalement de deux ordres : tout d'abord l'obsolescence des outils et des applications informatiques utilisés par les consulats, qui nuit à la productivité des agents comme au vécu des usagers, qui ne comprennent pas toujours ces délais. Ensuite, la comparution personnelle du demandeur au moment du retrait du titre, qui reste la norme dans l'immense majorité des cas, alors que, de notre point de vue, elle ne se justifie ni au regard de la lutte contre la fraude, ni au regard de la qualité du service rendu.

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. Nous avons essayé de faire un rapport très proche de l'usager et très pratique dans sa portée. Nos recommandations vont dans le sens d'un assouplissement de la procédure de délivrance des passeports à l'étranger.

Le premier chantier qui nous apparaît essentiel, à défaut d'être original, est la nécessaire modernisation des outils informatiques utilisés par les consulats pour délivrer les passeports. Dans ce domaine, nous voudrions faire trois propositions opérationnelles.

La première est d'accélérer la modernisation de l'application de prise de rendez-vous en ligne des consulats. Cela peut paraître trivial, mais le retour de tous les consulats est unanime. Cette application est peu ergonomique, peu intuitive, peu flexible et pose un véritable problème aujourd'hui, alors que les consulats doivent prioriser les demandes, ce que l'application ne permet pas. Une solution efficace, qui nous paraît envisageable, est tout simplement de déconcentrer la gestion de cette application au niveau des postes, en leur donnant la liberté, s'ils le veulent, d'externaliser cette solution auprès du prestataire de leur choix. Je rappelle que cette application a pour seule vocation d'organiser les rendez-vous, ce qui ne nous semble pas extrêmement compliqué.

Une deuxième idée est d'étendre le service de pré-demande en ligne, qui existe déjà dans les mairies en métropole, pour tous les renouvellements de passeports à l'étranger. D'après certains consuls généraux que nous avons auditionnés, cette piste de modernisation pourrait réduire par deux le temps des rendez-vous aux consulats. Elle permettrait donc d'augmenter le nombre de rendez-vous disponibles, les démarches effectuées par les agents, et évidemment, terme peu agréable, la « productivité générale » du système.

La troisième idée est d'accélérer la mise à jour de l'application « Titres électroniques sécurisés », dite « TES », qui permet aux agents consulaires de recueillir et d'instruire les demandes. Cette application, qui est développée par le ministère de l'intérieur, fonctionne assez mal sur les systèmes d'exploitation du Quai d'Orsay. Le travail des agents du Quai d'Orsay à l'étranger est handicapé par les lenteurs, les bugs soudains et fréquents et les redémarrages violents de la machine. Selon un consul général que nous avons auditionné, chaque agent perd en moyenne deux heures par semaine à cause des difficultés provoquées par « TES ». Je vous laisse imaginer à quel point il serait plus utile pour l'intérêt général que ces deux heures soient employées de manière productive.

Il est donc urgent dans notre esprit que le ministère de l'intérieur mette à jour cette application. Il y travaille, mais il est nécessaire qu'il le fasse le plus rapidement possible. Et de manière plus générale, il semble impératif qu'à l'avenir, les deux directions du numérique des deux ministères se parlent plus fréquemment, afin que l'on ne déroule pas une modernisation dans un des réseaux et pas dans l'autre et que l'on évite les problèmes d'incompatibilité, qui sont néfastes à l'action de l'État.

Le deuxième chantier sur lequel nous avons travaillé porte sur le développement de l'envoi des passeports sous pli sécurisé à domicile. Didier Quentin a rappelé la genèse de cette modalité d'envoi. Cette solution est certainement plus pratique pour les demandeurs et devrait être moins chronophage pour les agents.

Pourtant, aucun des cinq consulats généraux que nous avons interrogés n'a dépassé le seuil des 5 % de remise de passeport sous forme de pli sécurisé, à cause des conditions requises pour bénéficier de cet envoi à domicile et de son coût un peu plus élevé, puisque l'utilisateur doit lui-même amener une enveloppe et effectuer le paiement nécessaire.

À court terme, et de manière exceptionnelle, nous recommandons de proposer aux Français de l'étranger, qui sont en attente de remise d'un passeport, de leur donner le choix de changer la modalité qu'ils ont choisie à l'origine. Je m'explique : il existe aujourd'hui un stock de plusieurs milliers de passeports dans les consulats qui doivent être remis. Or, le choix de la modalité de remise est fait par l'utilisateur au moment de la demande initiale et ne peut pas être changé ensuite. Je pense que, compte tenu de la situation actuelle, pour liquider les stocks, cette possibilité doit leur être offerte dans les délais les plus brefs.

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. Avez-vous, cher collègue, une idée du nombre exact de passeports en attente de remise ? Puisque vous dites qu'il existe un stock de passeports à remettre, avez-vous un chiffre précis ?

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. Nous n'avons pas de chiffre total exact. À Londres par exemple, plus de 2 000 passeports sont en attente de remise. On constate une pression particulière sur les grands postes puisque leur productivité est d'autant plus réduite que les mesures de distanciation sociale qui sont mises en œuvre aujourd'hui réduisent leurs capacités à poursuivre un processus qui, en temps normal, est quasi industriel. Chaque mois, sont remis dans ces grands postes plusieurs milliers de documents, avec des créneaux de dix minutes qui se suivent les uns après les autres et des queues qui sont gérées de façon très efficace. Ce processus de remise est en l'occurrence très touché par la crise.

À moyen terme, il nous paraît essentiel de faire de l'envoi sous pli sécurisé le mode de remise par défaut des titres d'identité. Pour cela, il est nécessaire, d'abord, de donner la liberté aux demandeurs de changer de procédure de remise après le dépôt de demande. Le système actuel est beaucoup trop rigide, sans raison particulière pour le justifier. Cette option de remise sous pli sécurisé devra également être proposée pour la remise des nouvelles cartes d'identité qui, comme les passeports, seront munies de puce électronique. Cela se fera à un horizon un peu plus lointain puisque l'on parle de l'été 2021 pour la mise en place de ces nouvelles cartes d'identité avec puce électronique. L'envoi sous pli sécurisé nous paraît très important dans la mesure où il rejoint notre désir collectif d'inciter les Français à s'inscrire sur les registres consulaires puisque, je veux le rappeler, cette modalité d'envoi est uniquement réservée aux Français inscrits sur les registres consulaires.

À plus long terme, nous pensons qu'il faut envisager et expérimenter l'envoi direct des passeports depuis le centre de production de l'Imprimerie nationale à Douai jusqu'au domicile des demandeurs, sans passer par le poste diplomatique. Cette nouvelle procédure présente plusieurs intérêts. Elle est plus sécurisée, puisqu'elle réduit le nombre de manipulations et le nombre d'envois par voie postale. Aujourd'hui, le passeport produit à Douai est expédié par voie postale, par Chronopost pour l'essentiel, une première fois au consulat, où il est réouvert, changé d'enveloppe, etc., puis une deuxième fois jusqu'au domicile du demandeur via le système de poste nationale. Nous réduirions donc le risque d'erreur à expérimenter un envoi plus direct. Cette nouvelle procédure est aussi moins coûteuse, puisqu'elle supprimerait le travail de manutention et de ré-adressage effectué par les consulats, ce qui permettrait de libérer des effectifs pour remplir d'autres missions toutes aussi importantes. Cette modalité d'envoi devra naturellement être limitée à des pays répondant à des critères de sécurité et de fiabilité des réseaux de fret.

Nous proposons de commencer par une expérimentation limitée à trois grands postes, Londres, Genève et Bruxelles, puisque ce sont les trois premiers postes en termes de volume, que ce sont trois postes situés dans des pays voisins de la France, où les conditions de fret sont par ailleurs parfaitement sécurisées.

Pour conclure, nous voudrions faire une dernière proposition. Depuis plusieurs années, les effectifs consulaires ne cessent de diminuer avec des risques considérables de fragilisation du réseau et des services offerts aux Français résidant hors de France. La crise sanitaire, je crois, nous rappelle l'importance et le dévouement de ces personnels. Si nous insistons beaucoup sur la transition numérique, c'est justement pour leur rendre des capacités d'action concrètes et le contact humain qui est au cœur de leur mission et de la réussite de ce réseau. La stabilisation des effectifs et la création de vacations à court terme permettraient de soutenir les postes dans lesquels les demandes de passeports sont en hausse, au moment où d'autres personnels partent en congé, et devraient assurer la pérennité du réseau.

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. Vos propositions, qui ont le mérite d'être très concrètes, devront maintenant être mises en œuvre, si notre commission en est d'accord. J'ai une inquiétude concernant le stock de passeports qui s'est accumulé dans les consulats: comment imaginez-vous pouvoir écouler ce stock ?

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D'après les remontées d'informations que nous avons eues de la part des différents postes, et notamment des trois principaux consulats généraux, Bruxelles, Genève et Londres, le retour à la normale mettra trois à six mois, voire jusqu'à neuf mois. Il y aurait éventuellement d'autres suggestions à faire, par exemple au niveau de la délivrance des passeports d'urgence et des laissez-passer. On pourrait élargir les conditions de délivrance des titres d'urgence, même s'il y a quand même déjà dans nos postes une certaine souplesse dans ce domaine.

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. S'agissant de l'écoulement du stock de passeports existant, il y a une question clé : aujourd'hui, pour bénéficier de l'envoi par pli sécurisé, il faut que le demandeur remette une enveloppe et paye au guichet du poste, puisqu'il n'existe pas de moyen de paiement en ligne dans les consulats.

Je pense que le Quai d'Orsay pourrait, peut-être en accord avec Bercy, accepter de prendre en charge le coût de l'envoi des passeports en stock, que l'on n'a pas pu envoyer immédiatement. C'est un coût qui me paraît mineur par rapport à la libération que cela créera dans les services. Si on ne le fait pas, le personnel consulaire va être occupé pendant des semaines afin de remettre des passeports. Il serait donc bon de libérer les agents et d'accepter que l'État paye une enveloppe et un timbre pour les quelques milliers de passeports que nous avons accumulés. Cette mesure permettrait de traiter le retard que nous avons en réaffectant le personnel, libéré grâce à cette prise en charge par l'État, au recueil des demandes, c'est-à-dire à la première comparution, qui est essentielle.

Je pense qu'il y a là une vraie piste et je pense qu'elle sera d'autant plus soutenue par les demandeurs si on leur dit qu'ils recevront leur passeport par la poste et que cet envoi sera réglé aux frais de l'État. C'est une situation exceptionnelle et, dans ce cas de figure, il faut libérer des agents consulaires pour qu'ils puissent faire le travail pour lequel ils sont absolument indispensables, c'est-à-dire non pas de réadresser des stocks de passeports par la poste, mais de prendre en charge les demandes et de traiter les dossiers.

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. Cela me semble absolument indispensable. Vous avez de très bonnes propositions sur le moyen et long terme, mais il faut régler au préalable la question du stock. Il faut des réponses inédites, d'urgence ou à caractère exceptionnel, face à des circonstances exceptionnelles. Je trouve que c'est une très bonne piste.

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. Je veux donner une illustration précise des contraintes que peut générer la double comparution personnelle. Dans ma circonscription, lorsque l'on habite en Inde, en Chine ou en Australie, et qu'on veut refaire le passeport d'un enfant de quatre ans, les parents doivent prendre un billet d'avion, faire une demi-journée d'avion vue la dimension des territoires, aller faire la demande de passeport, dormir à l'hôtel sur place, reprendre l'avion le lendemain et répéter ces démarches quinze jours à six semaines plus tard, lorsque le passeport arrive au consulat. C'est un temps et une somme d'argent perdus considérables. Au-delà de l'urgence générée par la situation actuelle, votre rapport permet d'ouvrir la réflexion sur les demandes de renouvellement de passeport. Comment font nos voisins au sein de l'Union européenne ? Quelle est la procédure ? Ont-ils trouvé un moyen plus malin, plus simple, plus efficace de renouveler les passeports à l'étranger ?

Ma deuxième question concerne le risque de fraude, qui se pose aussi pour les demandes de visa. Dans un certain nombre de pays, la demande de visa se fait avec un relevé d'empreintes biométriques qui est externalisé à une société tierce. Ne pourrait-on pas imaginer que la demande de passeport soit également totalement sortie de nos consulats et faite par une société tierce, puis envoyée à l'Imprimerie nationale, avec un contrôle ? Ce contrôle pourrait se faire à Nantes et non pas au consulat sur place. L'Imprimerie nationale recevrait ainsi l'accord pour éditer le passeport, qui pourrait ainsi être envoyé directement dans les pays où le service postal est de qualité, et par l'intermédiaire du consulat dans les autres pays.

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. Nous avons travaillé sur un problème précis, mais qui nous paraît absolument essentiel, car il n'est pas possible que des Français à l'étranger puissent rester sans passeport et document valide pendant six mois. Comment font les autres pays ? Une étude comparative serait intéressante dans le cadre de travaux plus approfondis. À notre connaissance, la majorité des autres pays n'imposent pas la double comparution. C'est une particularité française, mais il reste à le confirmer pour chaque pays. En tout cas, ce n'est pas le cas au Royaume-Uni si j'ai bien compris, ni en Italie, ni en Espagne.

L'articulation entre les visas et les passeports mérite aussi des travaux supplémentaires. J'y mettrais quand même un astérisque, car il faut faire la distinction entre les deux. Un passeport français a une valeur immense sur le marché noir car il ouvre des droits infinis, et à vie. Il requiert donc un contrôle et une attention particulière sur les risques de fraude puisque, une fois que le passeport est remis, si une erreur a lieu dans la procédure, il n'y a plus de recours possible. C'est cette procédure qui définit un citoyen français. Le passeport français ainsi que la carte d'identité française sont des documents au cœur de l'aspect régalien de l'État. C'est le document, par excellence, qui ouvre tous les droits à la citoyenneté française. Cela peut justifier que nous gardions la main sur la production de ces passeports. C'est d'ailleurs ce qui prévaut chez nos voisins allemands et britanniques, où il y a véritablement un contrôle très fort sur la production et l'acheminement des passeports.

Le visa est également d'importance mais d'une importance plus relative par rapport à ce document qu'est le passeport. Une réflexion doit donc à mon avis être menée à long terme, en faisant attention à ce que le degré de sécurité soit associé à l'importance du document. Le passeport et la carte d'identité n'ont aucun égal parmi tous les documents administratifs que l'on peut demander à l'administration française.

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. Les cas de fraude ont été considérablement réduits ces dernières années grâce aux nouvelles formules de passeports, qui seront bientôt valables également pour les cartes nationales d'identité. La fraude devient donc maintenant tout à fait résiduelle. Cela fait vieillir les nombreux films policiers où l'on voyait les malfrats dégrafer la photo d'un passeport pour en recoller une autre. Il y a de moins en moins de cas où l'on peut organiser des trafics de faux passeports. C'est devenu un exercice complexe.

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. Depuis de nombreuses années, notre réseau consulaire subit des coupes et des réductions de moyens qui, bien sûr, doivent nous interpeller. À plusieurs reprises, lors des travaux de notre commission, nous avons estimé que nous étions à l'os au niveau des moyens. Il faudrait peut-être revoir les ressources que nous attribuons à notre diplomatie, s'interroger sur cette course effrénée menée depuis de nombreuses années qui entraîne la réduction de la capacité de notre réseau consulaire et trouver des enveloppes pour fortifier et donner des moyens réels à notre diplomatie.

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. Nous avons sans doute besoin de moyens supplémentaires : c'est une des conclusions du groupe de travail sur les réseaux mis en œuvre en œuvre par notre commission pour suivre la crise sanitaire. C'était déjà une des conclusions de la mission « flash » sur la gestion des postes diplomatiques, que j'ai eu le plaisir de conduire avec Anne Genetet, dans laquelle nous avions alerté sur la situation des secrétaires généraux d'ambassade. Nous devons faire des efforts en matière de dotation pour les personnels. C'est une discussion que nous devrons à nouveau avoir lors du prochain budget.

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. Il y a deux questions différentes. D'abord, une question qui porte sur le réseau et je partage entièrement ce que notre collègue Alain David a dit et que nous écrivons dans notre rapport. Il y a une deuxième question aussi, qui porte sur l'efficacité d'un processus qui a maintenant une dimension quasi industrielle. On parle d'un volume de 350 000 titres d'identité à l'étranger. Il y a des modalités d'amélioration, ne serait-ce que pour donner plus d'oxygène à notre réseau consulaire, qui en a besoin.

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. Je crois qu'il faut que la définition du processus précède l'organisation, autrement dit que l'on repense les procédures avant de poser la question des moyens. Aujourd'hui, nous avons des organisations qui ont toujours existé et que nous avons essayé d'adapter. L'évolution des processus, mais également de ce que l'on attend d'eux, est très mal définie. Alexandre Holroyd fait bien la différence entre le niveau de sécurité attendu d'un passeport et le niveau de sécurité attendu d'un visa, par exemple, qui suppose de mettre en œuvre des moyens différents. Nous avons l'impression de subir car on commence par parler de l'organisation dont on dispose pour ensuite examiner si elle est en mesure de répondre à de nouveaux processus. Je suis tout à fait d'accord avec Alain David : il faut remettre des ressources. Mais le point qui est fondamental, et sur lequel nous sommes médiocres par rapport à certains voisins, l'Allemagne en particulier, c'est que nous n'avons pas cette vision d'ensemble et cette capacité de s'adapter ensemble.

Vous avez souligné le fait que l'application « TES » du ministère de l'intérieur n'est pas compatible avec le système d'exploitation du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. C'est une honte. Nous sommes en France, au XXIe siècle. Le pire est que, même en soulevant ce problème, nous avons neuf chances sur dix d'obtenir un nouveau système permettant aux anciens systèmes de mieux fonctionner, c'est-à-dire un service recréant le même phénomène, plutôt que de mettre en place un progiciel de gestion intégrée qui permette à plusieurs organisations de communiquer. La première chose qu'il faut faire, lorsqu'est créé un système informatique dans une grosse organisation, c'est pourtant de mettre les informaticiens de côté. Il est souhaitable de ne pas consulter les informaticiens pendant six mois, afin de définir les processus. Par la suite, les informaticiens sont convoqués. Il faut que l'État apprenne à s'adapter dans le domaine informatique, ainsi que tout le monde le fait au XXIe siècle.

Je souhaiterais faire une petite remarque qui me paraît fondamentale : je ne crois pas qu'il faille céder aux procédures d'urgence pour gérer le stock de passeports. Les procédures d'urgence, et notamment la délivrance de laissez-passer, doivent rester indépendantes de tout cela. Ce sont des procédures qui doivent être constamment tenues hors du système habituel, de façon à ce que, lorsque le système se bloque, on puisse y avoir recours.

Je pose maintenant mes deux questions. Tout d'abord, je ne comprends pas pourquoi nous avons réussi à mettre en place de manière assez souple la déterritorialisation de la carte nationale d'identité et non celle des passeports. Depuis deux ans, si je suis Français à l'étranger, je peux demander une carte d'identité dans n'importe quelle mairie et la récupérer dans n'importe quelle mairie. Je ne suis pas obligé de faire cette demande dans le service d'état civil où je suis immatriculé. Imaginez le soulagement. Cela signifie que je peux faire fabriquer ma carte d'identité pendant les vacances. Je ne comprends pas pourquoi la déterritorialisation a bien réussi sur les cartes d'identité et pas pour les passeports. D'autant plus que la carte nationale d'identité est plus forte que le passeport en termes de justificatif de nationalité française. Le passeport est un document qui est un standard international, alors que la carte nationale d'identité est plus probante que le passeport.

Deuxièmement, il y a tout de même, en particulier pour les cartes d'identité et pour un certain nombre de démarches comme les certificats de vie, une confiance qui s'instaure entre les administrations de l'Union Européenne, en termes de qualité de vérification ou de remise. C'est le cas en particulier entre la France et l'Allemagne : un certificat de vie peut être fait par une mairie allemande. Cette question ne peut-elle pas être travaillée au niveau de l'Union européenne pour mettre en place une reconnaissance de la fiabilité et de la sûreté entre administrations de pays différents ?

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. En ce qui concerne l'informatique, je partage ce qu'a dit Frédéric Petit, même si mes compétences dans ce domaine ont des limites. Je ferais cependant une distinction. Il y a d'une part des logiciels qui a priori ne présentent pas le moindre risque en matière de sécurité : des logiciels pour prendre des rendez-vous ou faire des vidéoconférences se trouvent sur le marché sans aucun impact sur la sécurité. D'autre part, il y a les logiciels comme « TES », c'est-à-dire des logiciels qui sont le réceptacle de toutes les données privées et biométriques de notre population et qui posent une question totalement différente. Il y a là un véritable enjeu de sécurité avec des aspects technologiques qui m'échappent. Cette deuxième catégorie de logiciels nécessite une attention particulière.

Sur les titres d'urgence, je partage aussi l'avis de Frédéric Petit, d'autant plus qu'un risque de sécurité existe puisqu'un passeport d'urgence est un passeport vierge, qui est rempli sur place. Ils représentent un danger de sécurité beaucoup plus important, car sont ainsi mis en circulation des documents vierges qui peuvent être complétés. Didier Quentin et moi-même sommes très à cheval sur l'idée de maintenir des conditions de sécurité extrêmes concernant la circulation de documents vierges ayant tous les paramètres d'un passeport ou d'une pièce d'identité. Il faut véritablement limiter cette utilisation à des urgences absolues et garder des processus très sécurisés, notamment le transport par valise sécurisée. Au sein de la valise diplomatique, il y a des niveaux différents de sécurité. Pour ces documents-là, c'est le grade le plus élevé qui est employé, c'est-à-dire l'accompagnement personnel. Il ne faut pas que des palettes de passeports vierges se retrouvent dans la nature.

La déterritorialisation des passeports est une réalité en France depuis 2009, en parallèle de l'introduction des passeports biométriques. Je pense que Frédéric Petit fait référence à la condition de résider dans la circonscription consulaire du poste pour bénéficier de l'envoi du passeport sous pli sécurisé. Je suis plus sceptique sur cette question. S'il est permis de faire certaines démarches particulières à l'étranger comme l'envoi par courrier sécurisé, c'est que l'on reconnaît des particularités aux Français de l'étranger. Étendre le bénéfice de ce mode de remise deviendrait assez vite ingérable, dans la mesure où les Français en métropole demanderaient des passeports à Bruxelles pour se les faire envoyer par courrier. Les plus grosses communautés françaises à l'étranger sont toutes situées dans des pays avoisinants, au Royaume-Uni, en Suisse, en Belgique et en Allemagne. Il risque d'y avoir un problème assez considérable de service au niveau du consulat qui, au lieu de remplir sa mission consulaire, commencerait à remplir des missions normalement dévolues aux mairies.

Nous progressons dans la reconnaissance mutuelle des cartes d'identité. Un règlement européen a été voté et va être mis en œuvre à partir de l'été 2021 en France. L'arrivée de la nouvelle carte d'identité, dotée d'une puce électronique, correspond à une obligation européenne, qui résulte d'une standardisation à l'échelle européenne qui favorise la reconnaissance mutuelle. D'ici à l'été 2021, cette nouvelle carte d'identité sera mise en place partout et cela réglera beaucoup de questions. Je rappelle qu'un passeport renferme des données biométriques. Par conséquent, s'il est égaré ou s'il y a un problème, il peut difficilement être réutilisé par un autre utilisateur. Ce n'est pas le cas de la carte d'identité, tant qu'elle ne renferme pas une puce. La carte d'identité peut donc plus facilement être utilisée abusivement. L'arrivée d'une nouvelle carte d'identité contenant une puce résoudra ce problème.

La reconnaissance mutuelle des documents européens est une grande question. C'est une question que nous ne nous sommes pas posée dans le cadre de cette mission. Cette reconnaissance mutuelle existe dans un certain nombre de pays, à travers la production de documents plurilingues pour les Français de l'étranger. Il peut être demandé des actes de vie plurilingues qui sont reconnus par plusieurs administrations en Europe. Le processus est assez lourd, ce qui n'est pas qu'une particularité française. Ayant eu la chance de faire beaucoup de démarches administratives en Allemagne récemment, l'administration allemande est aussi réticente à l'idée de recevoir des documents qui viennent de l'administration française, même, parfois, quand ils sont plurilingues. Il y a un vrai travail de fond à faire pour qu'il y ait davantage de reconnaissance mutuelle entre pays européens de documents « généraux », comme des certificats de vie, de mariage, des actes de naissance. Il y a des progrès à faire en la matière.

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. Il est possible de faire sa demande de passeport en France dans n'importe quelle mairie à partir du moment où la mairie est équipée d'un dispositif de recueil des demandes. C'est une fausse question. C'est valable pour la carte nationale d'identité et pour le passeport.

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. À propos de la délivrance des titres d'urgence, je partage les réserves d'Alexandre Holroyd en ce qui concerne les risques que comportent des passeports vierges, même si différents postes nous ont dit qu'ils avaient été conduits, pour des raisons très sérieuses, d'ordre médical, humanitaire, professionnel ou même pour des deuils, à accorder plus de titres d'urgence dans le cadre de la crise sanitaire. S'il ne faut pas trop étendre ce dispositif, il y a un contre-exemple intéressant : la Belgique fournit, à côté des passeports ordinaires, des passeports urgents sous vingt-quatre heures et des passeports très urgents sous quatre heures. Ces derniers sont conçus par le consulat le jour même de la demande. Il faudrait approfondir ce que font nos amis belges.

Je porte à votre attention le fait qu'une des réflexions en cours porte sur l'opportunité de supprimer l'adresse sur le passeport. La mention de l'adresse incite les personnes à vouloir changer de passeport lors un déménagement, ce qui semble assez inutile. En pratique, la raison pour laquelle l'adresse est mentionnée semble difficile à justifier. Nous n'avons pas retenu cette suggestion car, en cas de vol du passeport, cela pose un risque pour l'usager. Il est à noter aussi que cette proposition pourrait compliquer l'envoi direct des passeports depuis les locaux de l'Imprimerie nationale. C'est une piste que nous n'avons pas retenue.

Une autre idée est de renforcer la coopération entre consuls honoraires des pays européens afin que ceux-ci puissent remettre un passeport en cas d'absence du consul honoraire français dans sa circonscription. Faut-il pousser la solidarité et, si j'ose dire, l'interopérabilité entre les postes consulaires jusqu'à ce point ? La question peut se poser. Madame la Présidente, lorsque nous sommes arrivés dans la capitale de l'Érythrée lors d'un récent déplacement, nous avons constaté que les services de l'ambassade de France se trouvaient au même étage que les services de l'ambassade d'Allemagne. Il peut sans doute y avoir des cas où la coopération entre consuls honoraires peut se faire en toute confiance. C'est une piste qui mériterait d'être approfondie.

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. Je suis d'accord : il faut faire la distinction entre le passeport, qui est un acte au cœur de la souveraineté étatique, et les visas, qui autorisent l'accès sur le territoire national ou européen. Ce sont deux choses différentes et il faut bien les distinguer.

Je vois néanmoins un point commun entre la délivrance des passeports et des visas. Sur les visas, j'ai découvert que nous étions encore au Moyen-Âge dans les consulats avec des agents qui se déplacent avec des bassines remplies de papier. Même si le dépôt de la demande de visa est externalisé, se pose la question du traitement qui est fait ensuite par les consulats. C'est un travail de fourmi. Il oblige parfois les agents consulaires à porter des bassines de quinze kilos d'un étage à l'autre. Je ne connais pas précisément la machinerie pour les passeports mais je comprends que cela n'est pas plus aisé.

Je crois qu'il y a des efforts à faire en matière de numérisation et dans la mise en place d'une identité numérique nationale pour inventer un système qui puisse permettre de faciliter la procédure pour nos compatriotes à l'étranger qui en ont bien besoin. J'ai par exemple été saisi cette semaine par un homme qui doit faire cinq heures de route pour aller déposer sa demande de renouvellement de passeport. C'est complètement ubuesque à l'heure du numérique. Ne pourrait-on pas faciliter les choses grâce au numérique ?

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. Nous nous sommes concentrés exclusivement sur les passeports. Nous avons essayé de comprendre comment la chaîne fonctionne, à partir du moment où le demandeur vérifie son vieux passeport et remarque qu'il va se périmer jusqu'au moment où il reçoit son nouveau passeport. Faire ce même exercice pour d'autres démarches me paraît très intéressant. Au fond, il y a quand même un avantage à faire un rapport sur un périmètre aussi restreint. Nous pouvons vraiment nous plonger dans chaque étape du processus. Il y a certes des étapes où des améliorations notables peuvent être faites, mais je pense que l'on peut aussi se féliciter de l'efficacité de certaines parties de la chaîne. La partie qui va du traitement du dossier après le dépôt jusqu'à la production du document est extrêmement efficace. Les questions qui se posent concernent donc la partie en amont, pour obtenir un rendez-vous et pour faire le dépôt de la demande, d'où les recommandations sur la prise de rendez-vous et sur la pré-demande en ligne, et la partie en aval, c'est-à-dire à partir du moment où le passeport neuf sort de l'Imprimerie nationale jusqu'au moment où l'utilisateur va l'avoir entre les mains. C'est là où les vraies questions d'efficacité se posent. Je pense qu'un exercice similaire sur les visas aurait de l'intérêt.

Il faut savoir, qu'en plus de la distinction fondamentale de la nature juridique des deux documents, se poseront également toutes sortes de questions pratiques. En effet, concernant les passeports et les cartes d'identité, on se concentre, dans le réseau consulaire, sur une quinzaine de postes qui regroupent l'immense majorité des demandes. Je ne connais pas du tout le fonctionnement des demandes de visas mais j'ai le sentiment que, si l'on fait une étude sur cette question, elle ne concernera pas les mêmes postes et pas les mêmes conditions de terrain. Il faut faire attention à ne pas amalgamer les deux questions et voir les distinctions entre les deux. Il faudrait conduire une étude détaillée sur la question des visas pour pouvoir formuler des recommandations précises sur cette gestion.

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. Je voudrais soulever deux ou trois idées en plus sur les améliorations éventuelles du dépôt des demandes de passeports à l'étranger. Nous ne les avons pas expressément retenues dans nos recommandations mais je les signale tout de même parce qu'ils permettent de prolonger la réflexion.

Premièrement, il faut inciter le ministère à augmenter le parc de dispositifs mobiles pour le recueil des demandes afin que l'ensemble des postes en soient pourvus. Je rappelle que seulement soixante-seize postes sont équipés de ces dispositifs mobiles, dont les dispositifs Consuleo de dernière génération. Étendre ces dispositifs à davantage de postes permettrait de fluidifier les demandes et de réduire les contraintes liées aux déplacements qui peuvent exister, notamment dans les pays les plus vastes comme l'Inde, l'Australie ou la Chine.

La deuxième suggestion est d'augmenter le nombre et la durée des tournées consulaires afin de mieux répondre à l'afflux des demandes. Ces tournées consulaires sont difficiles à programmer et à planifier en temps normal par manque d'effectifs. Là aussi, il pourrait y avoir une augmentation, avec la constitution d'équipes spécifiques.

Enfin, la troisième piste de réflexion consiste à donner aux Français établis à l'étranger la possibilité de déposer une demande de passeport auprès des consuls honoraires. Si ces derniers ont la possibilité de remettre des passeports aux Français de l'étranger, ils pourraient aussi recevoir les demandes. Cela peut apparaître comme une anomalie ou un non-parallélisme des formes. Or, cela pourrait être utile pour les pays les plus vastes.

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. Dans votre rapport, vous mettez en avant des pratiques de modernisation, à la fois des pratiques d'intégration des outils informatiques et des pratiques à dimension humaine. Ce qui m'a paru assez embêtant, c'est le fait que les directions numériques des deux ministères ne se parlent pas. C'est quand même fâcheux car, quel que soit le niveau d'intégration des outils numériques, si on ne se parle pas, on n'y arrivera jamais.

Je voudrais souligner quelque chose que nous avons tous pu constater dans nos circonscriptions pendant la crise sanitaire. Nous avons observé l'incapacité des institutions à se mettre au niveau de ce que nous imposait la crise en termes d'efforts et d'adaptation. C'est terrible. Nous devons véritablement progresser sinon nous serons, à chaque début de crise, en situation d'arrêt complet et en incapacité d'assurer ce que l'on appelle le service public.

En tous les cas, s'agissant des passeports à l'étranger, je crois que vous avez posé les bases d'un travail qui, à mon sens, mériterait un prolongement avec la mise en place d'une veille pérenne pour assurer le suivi de la mise en œuvre de vos recommandations sur le terrain.

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. Nous sommes d'accord. Comme Didier Quentin l'a dit, il y a certaines idées qui ont été formulées, sur lesquelles des études plus détaillées pourraient être menées en termes d'efficacité et de coût. Par exemple, les agents consulaires itinérants sont vraiment essentiels mais il faut se pencher sur la manière dont ils sont utilisés et sur le coût de ces tournées. Il est évident que l'on ne peut pas commencer à envoyer des agents pour ne saisir qu'une, deux, ou trois demandes. Il y a donc quelques suggestions supplémentaires qui méritent d'être étudiées. Nous avons aussi longuement évoqué la première comparution personnelle. Sur certaines recommandations, nous étions arrivés à la conclusion que ce n'était pas encore mûr ou qu'il nous manquait des éléments de réponse pour que l'on puisse les formuler avec confiance à la commission.

Nous avons choisi des fils directeurs dans nos recommandations, notamment en ce qui concerne l'envoi par pli sécurisé. Dans un processus industriel, moins il y a d'intervenants, moins il y a de transport, moins il y a d'erreurs. La remise par les consuls honoraires rajoute du transport et des intermédiaires. Didier Quentin et moi-même soutenons donc cette proposition d'envoi par pli sécurisé. En effet, lorsque l'on envoie le passeport de la ligne de production à l'utilisateur, cela réduit à quasiment zéro les chances d'erreurs après la production. Cela réduit les chances d'interception du courrier au minimum possible avec un courrier suivi du point A au point Z.

Je pense qu'il faut que l'on se concentre sur cet axe car, dès que l'on ajoute des intermédiaires, on ajoute des complexités. Par exemple, faire en sorte que les consuls honoraires puissent intervenir en première comparution est une idée très intéressante. Cependant, il faudrait ensuite développer des programmes de formation ; il faudrait savoir comment on délocalise ces services. Tout cela pose plusieurs questions. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas les envisager mais cela complexifie d'emblée le raisonnement. Je pense que, puisque l'on va vers une simplification, on devrait essayer de se concentrer le plus exclusivement possible sur chaque procédure pour savoir comment la rendre courte, efficace, avec le moins d'intermédiaires et le plus de sécurité.

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. Les expérimentations seront menées dans les pays où le système postal fonctionne bien, mais qu'en est-il des autres pays ? Avez-vous des idées pour ces pays ? Comment faire pour ceux qui habitent très loin des consulats dans ces pays ? Ne pourrait-on pas aussi envisager les renouvellements de passeports à distance ? Si, pendant la crise de la covid-19, nous avons pu faire des actes notariés à distance, ne pourrait-on pas faire le renouvellement des passeports à distance avec les outils numériques ?

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. Concernant l'envoi par pli sécurisé, il faut être conscient, qu'aujourd'hui, seul un nombre restreint de pays y sont éligibles. Nous nous sommes penchés sur ce problème par le prisme de la crise. Il est très clair que la nature industrielle de ce processus est particulièrement avérée dans les très gros postes. Elle l'est beaucoup moins pour les postes de petite taille. Nous pensons d'ailleurs que les postes de petite taille se remettront de la crise de façon beaucoup plus rapide. Si un poste a accumulé dix dossiers de retard, il pourra rattraper ce retard assez facilement. Le problème que l'on rencontre concerne des postes qui ont des demandes et des retraits avec des créneaux de dix minutes, de façon totalement industrialisée. Si on prend les cinq plus gros postes du réseau, on parle de 40 à 50 % des remises de documents d'identité. Je crois qu'il faut se concentrer sur l'amélioration considérable du processus sur les grands postes pour dégager des ressources afin d'être en mesure de traiter les cas plus difficiles, pour lesquels il faut plus de présence humaine. Il y a, dans un cas, une capacité d'amélioration considérable et, dans un autre cas, une situation structurelle plus difficile au sein de laquelle on ne peut pas apporter simplement des petits ajustements de procédure.

Notre recommandation sur l'organisation des rendez-vous fait beaucoup plus sens pour un poste qui prend des milliers de rendez-vous par mois que pour un poste qui prend deux rendez-vous par jour. C'est pour cela que l'outil du Quai d'Orsay est parfaitement approprié pour un poste de petite taille qui reçoit quelques demandes par jour mais il ne l'est pas pour un poste où il y a des dizaines de changements en permanence. Une question différente se pose donc pour les pays qui ne seront pas susceptibles d'accéder à ce service et où il faudra, au contraire, renforcer les moyens. C'est là où l'idée de personnels capables de se déplacer dans la circonscription prend tout son sens.

Nous nous sommes longuement posé la question de la possibilité d'éviter toute comparution pour les demandes de renouvellement de passeport. C'est une suggestion qui est intellectuellement satisfaisante mais qui pose des problèmes de sécurité très embêtants. Je donne un exemple très simple : les empreintes digitales évoluent avec le temps. Elles peuvent évoluer en dix ans, même sans accident. Si on n'impose pas la comparution personnelle tous les dix ans, ne va-t-on pas se retrouver avec des documents d'identité dont les données biométriques ne correspondent plus à celles de l'individu ? Vous pourriez me dire : « Je peux débloquer mon iPhone avec une empreinte, pourquoi ne pourrais-je pas l'envoyer en format numérique ? ». Les capacités analytiques que l'on utilise pour recueillir les données biométriques dans le cadre de la production de passeport sont plus sophistiquées que celles que l'on utilise de façon commerciale.

Je ne pense pas que cette possibilité ne verra jamais le jour. Peut-être que, dans cinq ans ou dans dix ans, un député viendra dire à la commission qu'aucune des deux comparutions n'est plus nécessaire. Aujourd'hui, et au regard à nos discussions avec le ministère de l'intérieur et le Quai d'Orsay, nous n'en sommes pas encore là. Nous devrions donc nous concentrer sur la possibilité de nous débarrasser de la double comparution via l'envoi sécurisé. Par la suite, peut-être qu'avec le développement très rapide des outils numériques, nous arriverons un jour à remettre en question le principe de la première comparution.

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. Au moment du confinement, les notaires ont utilisé un système de reconnaissance faciale pour envoyer des papiers avec accusé de réception sécurisé. Je crois donc que cela peut aller très vite.

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. À cet égard, on nous a signalé des cas tout à fait exceptionnels et uniques de ressemblance physique, ce qu'on appelle en mauvais français les « look like ». Malicieusement, on a évoqué Dupont et Dupond. Il y a eu quelques fraudes qui venaient de ressemblances physiques.

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. Oui, bien sûr, mais je pense que tout cela va évoluer très vite. Certains aspects techniques vont évoluer rapidement.

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. D'abord, je suis d'accord avec Alexandre Holroyd. Il va falloir traiter l'urgence actuelle avec les moyens dont nous disposons.

Nous pouvons aussi essayer de faire un peu de prospective pour voir ce que nous pourrions faire plus tard. J'ai le sentiment que ces services ne parlent pas du tout avec le secrétariat d'État au numérique. Or, à partir de 2021, sera mise en place une identité numérique sécurisée qui bouleversera complètement les conditions de délivrance des titres d'identité.

S'agissant des empreintes biométriques, je voudrais apporter deux précisions. D'abord, par définition, les empreintes biométriques se conservent toute la vie : elles ne comprennent pas que les empreintes digitales, il y a plein d'autres choses. Ensuite, si la reconnaissance faciale est pour le moment encore figée, ce n'est pas du tout ce qu'en font les Chinois. En Chine, la reconnaissance faciale tient compte, non seulement du visage et de la morphologie, mais également des mimiques et des mouvements qui sont propres à chacun. Cela évite les problèmes de jumelage : la mimique ne sera pas identique, même entre jumeaux et c'est comme cela que l'on pourra reconnaître la personne.

Par ailleurs, il existe un vrai souci relatif aux certificats d'existence pour les retraités à l'étranger. L'une des options à l'étude actuellement est de pouvoir procéder à l'identification à partir de la puce contenue dans le passeport, qui serait mise en contact avec notre téléphone mobile, qui reconnaîtrait notre passeport automatiquement. La reconnaissance faciale serait effectuée par le téléphone mobile qui nous prendrait en photo de face et de profil et nous identifierait grâce à notre mimique. Cela serait un moyen de s'assurer que nous sommes toujours vivants, sans solliciter de comparution.

Les recherches sont en cours et la situation va changer extrêmement rapidement. Nous sommes aujourd'hui obligés de nous adapter à la situation actuelle et de faire comme on peut avec les outils dont nous disposons. Mais des progrès vont être réalisés à des vitesses fulgurantes et nous disposerons forcément de systèmes beaucoup plus simples qui, à mon avis, permettront de supprimer la double comparution.

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. Comme nous l'a confirmé l'Imprimerie nationale, l'identité numérique arrive et c'est un progrès. Dans un futur proche, nous pourrons associer des facteurs d'identité en ligne à des documents physiques de type biométrique.

En ce qui concerne la biométrie, le système « TES » veut que, pour chaque renouvellement de passeport, les nouvelles empreintes remplacent les premières, permettant ainsi d'assurer une continuité. Reste à savoir si cela est essentiel. Je suis d'accord avec ce que Mme la présidente Marielle de Sarnez et Mme Anne Genetet ont dit, mais j'ajouterais une petite méfiance personnelle, en reprenant la vieille histoire du bouclier et de l'épée, ainsi que mon oncle l'appelait. Il est vrai que nos outils progressent très rapidement, mais les outils de fraude également. La reconnaissance faciale progresse de façon rapide, mais la capacité à reproduire les mimiques de quelqu'un en ligne, ce qu'on appelle les « deep fake », progresse aussi. Il faut être conscient que les capacités de fraude augmentent, peut-être pas en même temps, mais en parallèle de nos capacités de protection.

Nous devons ainsi être très vigilants avec le fait de voir le progrès technique comme quelque chose de bien pour l'humanité sans tenir compte du progrès technique utilisé à des fins moins louables. C'est pour cela que la première comparution ou, en tout cas, une comparution au moins, paraît essentielle.

C'est un peu la même histoire que le vote. La chose la plus sécurisée est finalement d'avoir une personne devant vous ainsi que les empreintes qu'elle vient déposer devant vous avec son document d'identité devant vous, afin de pouvoir s'assurer que tout cela correspond. Nous en sommes, aujourd'hui, à ce stade-là C'est pareil pour la fraude lors d'un vote. Il est très difficile de frauder lorsque vous mettez des enveloppes dans une urne, mais beaucoup plus facile quand vous faites un calcul savant avec un algorithme cassé. Il faut prendre en compte aussi le fait que les progrès techniques servent aussi les gens qui ont des intérêts frauduleux.

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. Nous voyons l'utilité de cette mission « flash » qui concerne des dizaines de milliers de nos compatriotes impactés par la crise. Ce travail doit être utile pour nos compatriotes qui attendent leur passeport. Si la commission autorise sa publication, je souhaite que ce rapport soit envoyé aux deux ministres concernés, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères et le ministre de l'intérieur. Les deux ministres doivent avoir ce rapport ce soir ou demain. Il faut qu'ils le lisent et qu'ils mettent en application les recommandations qui en sont issues. En outre, je suggère que l'on communique à la presse les conclusions de cette mission « flash », afin de pousser l'exécutif à agir vite.

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. Je suggère aussi l'envoi au Premier ministre, car il peut y avoir un arbitrage à faire entre les deux ministres compétents.

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. La lettre adressée par Mme la présidente au Premier ministre et aux deux ministres, en accompagnement du rapport, doit faire référence au précepte anglais : « comply or explain ». Il s'agit de demander aux autorités, en retour, soit un calendrier pour la mise en œuvre des recommandations, soit une lettre qui explique pourquoi telle ou telle recommandation a été exclue.

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. Je vais faire un courrier en ce sens au Premier ministre et aux deux ministres concernés.

La commission autorise le dépôt du rapport de la mission « flash » sur les conditions de délivrance des passeports à l'étranger en vue de sa publication.

La séance est levée à 16 heures 30.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Jean-Claude Bouchet, Mme Mireille Clapot, M. Alain David, M. Bernard Deflesselles, M. M'jid El Guerrab, Mme Anne Genetet, M. Éric Girardin, M. Alexandre Holroyd, Mme Sonia Krimi, Mme Amélia Lakrafi, M. Frédéric Petit, M. Didier Quentin, Mme Marielle de Sarnez, Mme Liliana Tanguy

Excusés. - Mme Frédérique Dumas, M. Pierre-Henri Dumont, M. Bruno Joncour, M. Jean-Luc Reitzer