Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 13 octobre 2021 à 15h05

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission a examiné pour avis, sur les rapports de Mme Barbara Bessot Ballot (Économie sociale et solidaire), M. Antoine Herth (Commerce extérieur) et M. Éric Bothorel (Communications électroniques et économie numérique), les crédits de la mission « Économie » ; elle a également examiné, sur le rapport de Mme Marie-Noëlle Battistel (Énergie) les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

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Mes chers collègues, nous poursuivons l'examen des crédits des missions de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2022.

Quatre avis sont inscrits à l'ordre du jour. Trois d'entre eux relèvent de la mission Économie et portent, respectivement, sur les crédits Économie sociale, solidaire et responsable, dont la rapporteure est Mme Barbara Bessot-Ballot, sur les crédits Commerce extérieur, dont le rapporteur est M. Antoine Herth, et sur les crédits Communications électroniques et économie numérique, dont le rapporteur est M. Éric Bothorel. Le quatrième avis a trait à la mission Écologie, développement et mobilité durables et porte sur les crédits Énergie, dont la rapporteure est Mme Marie-Noëlle Battistel.

L'examen de chaque rapport donnera lieu à une discussion dans laquelle les orateurs des groupes disposeront chacun de quatre minutes, les membres de la commission qui souhaitent poser ensuite une question disposant quant à eux de deux minutes chacun.

Le vote sur les crédits d'une mission n'intervient qu'à l'issue de l'examen de l'ensemble des avis portant sur ladite mission. Aussi le vote sur les crédits de la mission Économie n'aura-t-il lieu que mardi prochain, à l'issue de la discussion des deux derniers avis, portant sur les crédits Entreprises et Industrie, que notre commission consacre à cette mission.

Mission Économie : Économie sociale, solidaire et responsable (Mme Barbara Bessot-Ballot, rapporteure pour avis).

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Depuis le transfert réalisé en loi de finances initiale pour 2021, c'est à l'action n° 4 du programme 305, Stratégies économiques, que sont inscrits les crédits expressément consacrés au financement de la politique publique menée en matière d'économie sociale et solidaire (ESS), laquelle relève ainsi désormais de Bercy, conformément aux vœux de nombreux acteurs du secteur. Au risque de me répéter, je voudrais à nouveau souligner combien l'été 2020 a marqué un tournant pour l'économie sociale et solidaire, avec la création d'un secrétariat d'État, incarné avec énergie et vision par Mme Olivia Grégoire. Toutefois, l'action n° 4 ne reflète pas l'ensemble de l'effort budgétaire consenti en faveur de ce secteur et je me félicite de ce que d'autres missions et d'autres programmes puissent soutenir ses acteurs, même de manière indirecte.

Je tiens à réaffirmer cet après-midi une conviction : dans l'édification d'une société plus juste et équilibrée, l'économie sociale et solidaire a un rôle à jouer en ce qu'elle propose des modèles qui, loin d'opposer des considérations économiques à la poursuite de buts d'utilité sociale, les réconcilient, en accordant toute leur place au respect des enjeux éthiques et à la valorisation des territoires. Représentant 10 % du produit intérieur brut national et 14 % de l'emploi privé – avec 12 millions de bénévoles et 2,4 millions de salariés –, l'économie sociale et solidaire constitue un secteur économique à part entière, présent dans tous les domaines d'activité.

Il importe donc de lui donner les moyens de se structurer et de s'affirmer afin qu'elle prenne toute sa part dans la construction d'une croissance inclusive et s'oriente davantage vers l'économie réelle. Assurément, le projet de loi de finances pour 2022 contribue pleinement à la réalisation de cet objectif, puisqu'il tient le cap d'une politique qui, tout au long du quinquennat, s'est employée à donner à l'ESS les moyens d'exprimer et de préserver tout son potentiel, dans les temps ordinaires comme dans des circonstances exceptionnelles. Je pense en particulier au dispositif UrgencESS qui, au plus fort de la crise sanitaire, a permis la mobilisation de 30 millions d'euros au bénéfice de près de 4 800 structures comptant moins de dix équivalents temps plein (ETP).

Comme le montre la première partie de mon rapport, le projet de budget pour 2022 inscrit l'engagement de l'État dans la durée. D'une part, le montant des crédits de paiement inscrits à l'action n° 4 passe de 17,54 millions d'euros à 19,25 millions d'euros, soit une progression de 9,72 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2021, et dépasse les sommes inscrites en 2020. D'autre part, la programmation budgétaire assure la continuité de financements qui répondent à des enjeux essentiels pour la structuration et la croissance de l'ESS.

En premier lieu, des crédits sont alloués au développement des contrats à impact social. Je sais que ce dispositif innovant suscite des réserves, voire des craintes. Mais objectivement, il présente l'intérêt de renouveler et de diversifier les instruments de financement de l'économie sociale, solidaire et responsable. En pratique, ces contrats favorisent une association plus étroite des investisseurs autres que les personnes publiques à la réussite d'actions d'utilité sociale. De mon point de vue, un recours proportionné à ce dispositif peut constituer une démarche vertueuse.

En second lieu, le budget pour 2022 consacre des ressources utiles à la structuration d'un écosystème que d'aucuns peuvent juger complexe. Au-delà de la reconduite des crédits alloués au soutien des têtes de réseau, il met l'accent sur un financement accru des pôles territoriaux de coopération économique (PTCE), avec deux objectifs : la labellisation de quinze nouveaux PTCE et la création d'un bouquet de services. Je considère que cette orientation est décisive, car ces dispositifs présentent deux vertus : d'une part, ils peuvent offrir un cadre à la mise en commun de ressources et à des coopérations entre associations, coopératives, tiers lieux, entreprises et collectivités publiques ; d'autre part, ils sont de nature à favoriser un changement d'échelle dans la réalisation de projets mobilisant d'autres ressources que les microfinancements ou les subventions.

Dans cette même optique, il convient par ailleurs de souligner le caractère stratégique des ressources dégagées pour l'affermissement des dispositifs locaux d'accompagnement (DLA). En effet, ceux-ci visent à favoriser la consolidation et le développement des emplois et des projets des structures d'utilité sociale grâce à un accompagnement sur-mesure et gratuit. Ils bénéficient aujourd'hui à près de 6 000 structures et se déploient sur l'ensemble du territoire. Les 11,3 millions d'euros dégagés par la programmation budgétaire devraient contribuer à consolider ce réseau, qui peut et doit répondre à un besoin de conseils et d'expertises. C'est un point que j'avais souligné l'an dernier dans mon rapport pour avis et, lors de la discussion des amendements, la secrétaire d'État Olivia Grégoire s'était engagée à augmenter les ressources des DLA.

Compte tenu de ces choix et des moyens de l'action n° 4 du programme 305, je donnerai un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à l'économie sociale et solidaire.

Mais si le soutien des collectivités publiques revêt une importance cardinale, il ne saurait conduire à négliger les moyens de diversifier les ressources de l'économie sociale et solidaire, dans le double objectif d'accroître le potentiel de financement mobilisable au service du modèle et de renforcer durablement l'autonomie financière des entreprises du secteur vis-à-vis du soutien de la sphère publique.

En effet, l'ESS renvoie parfois l'image d'une économie sous perfusion. Ce lieu commun peut nuire à sa crédibilité et renforcer la perception d'un modèle non viable économiquement. Or, l'ESS regroupe une très grande diversité de structures et d'activités : des associations en très grande majorité, des fondations, mais aussi des coopératives, des mutuelles et des sociétés commerciales à finalité sociale. On le voit : le secteur compose avec des considérations économiques qui font tout autant partie de son ADN que l'utilité sociale.

À cet égard, tout en affirmant sans ambiguïté le bien-fondé d'un financement public consolidé de l'ESS dans la durée, il est souhaitable d'enclencher une dynamique vertueuse qui permettrait à chaque entreprise du secteur de bénéficier d'un financement équilibré. Cette démarche apparaît particulièrement pertinente dans le contexte d'une montée en puissance de la notion d'impact dans l'économie dite « conventionnelle ». On assiste ainsi à la popularisation d'enjeux pour lesquels l'ESS a été et demeure pionnière. Il est par conséquent opportun de tirer parti d'un phénomène qui peut assurément susciter l'intérêt des financeurs privés pour l'ESS, voire devenir, à terme, l'un des vecteurs de l'« ESSisation » de l'économie classique.

C'est dans cette optique que j'ai choisi de consacrer la seconde partie de mon rapport aux conditions d'une participation du secteur privé au financement de l'ESS.

Premier enseignement : il est nécessaire de disposer d'un suivi statistique actualisé de l'activité économique et des modalités de financement de l'économie sociale. De fait, l'absence de données et d'éléments d'analyse des flux financiers et des investissements au bénéfice de l'ESS hypothèque toute évaluation approfondie. Aux termes de la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, le suivi statistique annuel de l'activité économique et des modalités de financement du secteur incombe à l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), aux services statistiques ministériels, à la Banque de France ainsi qu'à la Banque publique d'investissement (« BPI France »). Pour l'efficacité de l'action publique, il importe donc que cette mission légale soit pleinement accomplie.

Il apparaît ensuite nécessaire de conforter l'accès de l'ESS aux instruments communs d'investissement. Dans les faits, la possibilité de recourir aux dispositifs de financement ouverts à d'autres acteurs privés demeure en effet théorique, notamment en ce qui concerne les prêts bancaires. D'après plusieurs travaux, dont ceux de la commission présidée par M. Frédéric Tiberghien en 2017, cette difficulté pourrait résulter d'une appréciation défavorable des exigences que comportent, pour des investisseurs éventuels, les caractéristiques du modèle de l'ESS. Ainsi, le principe de lucrativité limitée interdit ou encadre très strictement le partage et l'usage des bénéfices éventuels. En outre, l'impossibilité de placer des parts du capital social sur les marchés boursiers exclut toute plus-value sur les titres cédés, comme dans le modèle du capital risque traditionnel. D'autres analyses démontrent que les structures et entreprises de l'ESS se heurtent à une surestimation du risque financier qu'elles représentent en cas d'emprunt ; elles soulignent en outre leurs difficultés à répondre à des exigences de rentabilité, difficultés qui conduisent certains investisseurs à renoncer à participer à leur développement.

Face à ce qui pourrait relever d'une faille de marché, il faut d'abord veiller à l'efficacité des régimes de garantie. Cette activité incombe aujourd'hui à BPI France qui, outre ses propres dispositifs de financement, assure la gestion du Fonds de cohésion sociale (FCS) pour le compte de l'État. Il convient ensuite d'accompagner les structures de l'ESS et d'améliorer la connaissance qu'ont les investisseurs privés de la spécificité de son modèle.

Il existe aujourd'hui des freins à l'investissement privé qui tiennent notamment à la méconnaissance des outils existants chez les entrepreneurs sociaux, à une faible connaissance des initiatives locales ainsi qu'à la difficulté d'appréhender les implications des activités de l'ESS. C'est pourquoi mon rapport préconise de consolider la place et le rôle des DLA.

En plus de l'organisation d'un véritable parcours d'accompagnement par les chambres régionales de l'économie sociale (CRESS), il est nécessaire d'associer plus étroitement aux actions de promotion de l'ESS les chambres de commerce et d'industrie (CCI), voire les chambres de métiers et de l'artisanat (CMA).

En dernier lieu, j'appelle l'attention de la commission sur les enjeux décisifs liés au développement de certaines modalités d'investissement innovantes. Il existe en effet des instruments et des circuits de financement conçus pour répondre aux spécificités et aux finalités d'utilité sociale des modèles de l'ESS. Il faut y voir le résultat des initiatives prises non seulement par l'État et les collectivités territoriales, mais également par des réseaux spécialisés, ainsi que par certaines institutions financières. Il reste toutefois à établir dans quelle mesure ils répondent aux besoins de l'écosystème, compte tenu de leur caractère relativement embryonnaire.

Dans cette optique, un premier axe de travail pourrait consister à engager la rénovation des outils créés ou formalisés par la loi du 31 juillet 2014. Je pense en particulier aux obligations et aux titres associatifs qui, dans leur principe, doivent procurer des ressources en fonds propres et quasi-fonds propres. Toutefois, il n'est pas certain qu'ils puissent rendre attractif l'investissement dans les structures de l'ESS car le code monétaire et financier plafonne la rémunération de tels placements. Il pourrait donc être utile – ainsi que l'envisage le Gouvernement – d'augmenter la rémunération servie aux souscripteurs des titres. Une réflexion pourrait également être menée sur les exigences afférentes à la qualité des investisseurs et aux structures susceptibles d'émettre des obligations et des titres.

Un second axe de travail pourrait porter sur le développement de l'épargne ou de la finance solidaires. D'après les statistiques fournies par l'association FAIRE, l'encours total placé dans l'épargne ou la finance solidaires atteignait 20,35 milliards d'euros en 2020. En hausse de 33 % sur un an, il connaît un accroissement continu depuis le début des années 2010.

De mon point de vue, les pouvoirs publics doivent poursuivre leurs efforts pour soutenir cet essor, en se donnant deux objectifs. Le premier est de parfaire l'organisation d'une véritable épargne solidaire réglementée, sans toutefois entamer la capacité d'innovation des acteurs financiers. Dans le cadre de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE, le législateur s'est efforcé de conforter l'attractivité de la finance solidaire, notamment en prévoyant l'obligation de proposer aux souscripteurs d'une assurance-vie, à compter de 2022, des produits comportant au moins une unité de compte labellisée « investissement socialement responsable ». Afin de maximiser les ressources tirées de produits existants, nous pourrions également envisager d'affecter une partie de l'encours de chacun des livrets d'épargne réglementés à des placements ou à des dons en faveur de l'ESS. Dans une logique analogue, je préconise d'examiner la possibilité de relever la part des actifs solidaires souscrits dans le cadre des fonds dits « 90/10 ».

Le second objectif consiste à mieux orienter les ressources de l'épargne ou de la finance solidaires, ce qui soulève la question de l'identification des acteurs de l'ESS susceptibles d'en bénéficier. C'est la raison pour laquelle je préconise de poursuivre la simplification de l'agrément entreprise solidaire d'utilité sociale (ESUS) et de renforcer son attractivité au plan fiscal. Je vous remercie de votre attention.

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L'économie sociale et solidaire et ses quelque deux millions de salariés ont démontré leur rôle primordial lors de la crise sanitaire, sociale et économique provoquée par la covid-19.

Si, face à la crise sanitaire, l'ESS s'est trouvée en première ligne pour répondre aux besoins de nos concitoyens, ses structures ont subi de plein fouet les conséquences d'une économie et d'une vie au ralenti. Je pense plus particulièrement au monde associatif et aux clubs sportifs. Nous pouvons donc être fiers du soutien que nous avons apporté à ce secteur : un demi-milliard d'euros a été mobilisé en faveur des associations ; les entreprises de l'ESS ont eu accès aux mêmes mesures de soutien que celles des autres secteurs et un dispositif spécifique et UrgencESS, a pu soutenir les associations employant de un à dix salariés. Mme Olivia Grégoire, la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable, a immédiatement pris la mesure des enjeux et les a portés haut.

Conscients de la place réelle de l'ESS dans notre société, nous lui avons accordé une attention particulière dès le début du quinquennat.

Après la crise vient la relance : eu égard au budget qui nous est présenté, l'ESS en bénéficie pleinement. Ainsi, le PLF pour 2022 maintient le cap de la montée en puissance des politiques publiques, avec une hausse de près de 10 % des crédits inscrits à l'action n° 4 Économie sociale, solidaire et responsable du programme 305 Stratégies économiques.

Je tiens à souligner que si nous avions salué, l'année dernière, l'avancée technique que représente la modification de la maquette budgétaire, force est de constater que la multitude des secteurs dans lesquels l'ESS intervient contribue encore et toujours à la dispersion des crédits budgétaires qui lui sont affectés – ce qui pourrait nuire à sa lisibilité globale. Ainsi, sur les 3,2 milliards d'euros de crédits de paiement alloués au programme 102 « Accès et retour à l'emploi » de la mission Travail et emploi, certains sont relatifs au financement des structures d'insertion par l'activité économique, qui relèvent du champ de l'ESS. Cette situation s'explique néanmoins – je l'ai dit – par le caractère transversal de l'économie sociale et solidaire, qui explore et investit désormais tous les champs de l'économie et ne se réduit plus aux secteurs social et médico-social.

Par ailleurs, les crédits consacrés aux structures institutionnelles de l'ESS bénéficient d'une hausse de 14 %, tandis que les pôles territoriaux de coopération économique – dont la secrétaire d'État veut assurer le développement – se voient doter de 2,5 millions d'euros. Quant aux crédits alloués aux dispositifs locaux d'accompagnement, le projet de loi de finances pour 2022 renoue avec la hausse, avec une augmentation de 14,4 % des autorisations d'engagement et de 8,65 % des crédits de paiement. Je m'en félicite, eu égard au rôle prépondérant que les DLA ont joué durant la crise, non seulement dans le déploiement opérationnel des mesures de soutien, mais aussi dans l'émergence des initiatives solidaires dans les territoires.

J'insiste sur le caractère opérationnel des politiques publiques concernées, gage d'efficacité et garantie d'une bonne gestion des deniers publics. L'ESS s'inscrit dans une dynamique territoriale, au plus près de nos concitoyens. En cela, les choix que nous faisons doivent donc toujours refléter les besoins du terrain. Depuis le début du quinquennat, le groupe La République en Marche a constamment veillé au caractère opérationnel des mesures votées. Concernant l'ESS, il apparaît que nous avons réussi à tenir ce cap.

L'année dernière, nous saluions le partenariat entre la société civile et l'État que représentait le budget attribué à l'ESS pour 2021. Le PLF pour 2022 le prolonge.

Enfin, je souhaite mettre en exergue la nécessité d'œuvrer à la publication d'appels à projets et à manifestation d'intérêts plus adaptés aux structures du « dernier kilomètre », celles-là mêmes qui rencontrent le plus de difficultés à accéder à l'information et qui ne disposent pas de l'ingénierie nécessaire pour répondre à ces appels. Un des moyens d'y parvenir réside dans une meilleure coopération entre acteurs de l'ESS dans les territoires. Je sais Mme Olivia Grégoire, tout autant que la majorité, engagée sur ces sujets.

Le groupe La République en Marche votera les crédits consacrés à l'économie sociale et solidaire.

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La crise sanitaire a affecté les structures économiques sociales et solidaires. Dans ce contexte, le Gouvernement a confirmé, dès l'annonce du plan France Relance, sa volonté de faire de l'économie sociale et solidaire un secteur majeur pour l'avenir économique de notre pays. De fait, celle-ci s'impose aujourd'hui comme un secteur d'activité à part entière : elle représente 10 % du PIB national et 14 % de l'emploi privé, avec 12 millions de bénévoles et 2,4 millions de salariés. En consacrant de nouveau une partie importante du budget au secteur de l'ESS, le Gouvernement fait le choix d'affermir et de renforcer les fondations d'une économie durable et inclusive pour la France de demain.

Les entreprises ne sont pas les seules personnes morales à avoir été aidées par l'État depuis le mois de mars 2020. C'est également le cas des 23 000 associations qui, fin août, avaient reçu 500 millions d'euros du Fonds de solidarité et des 5 000 associations ayant bénéficié du fonds dédié à l'ESS, qui a décaissé 30 millions d'euros en six mois. Ainsi, il a permis la préservation de 16 000 emplois dans les secteurs de la culture et du sport. Tout dispositif confondu, 15 % des associations ont bénéficié d'une aide.

Cependant, les défis que doit relever l'ESS demeurent nombreux. Je pense avant tout à l'emploi et à l'insertion professionnelle, en particulier des jeunes, qui peuvent être soutenus dans le cadre des « parcours emploi compétences » – même si le travail des missions locales est primordial. Aussi le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés se réjouit-il de constater que les crédits affectés au programme 163 Jeunesse et vie associative augmentent de plus de 3 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. Ce budget consacré à l'accompagnement des jeunes permet de renforcer le volume des dispositifs existants.

Par ailleurs, le Président de la République a annoncé, au mois de juillet dernier, la création d'un revenu d'engagement pour les jeunes, qui permettra d'amplifier le plan « 1 jeune, 1 solution » et prolongera la mobilisation inédite en faveur des jeunes impulsée dès le début du quinquennat. Il n'est pas question de dépenser, mais bien d'investir dans l'avenir de la Nation. Madame la rapporteure, cette aide peut-elle être incluse dans le programme que vous présentez ? Si tel est le cas, quels en seraient les contours ?

L'augmentation récente du coût de la vie, des prix de l'essence et du gaz ou le coût du logement, en particulier pour les jeunes – dont il est le premier poste de dépenses – ne favorise pas leur sérénité au moment où ils doivent construire leur projet professionnel.

Parmi les autres défis que doit relever l'ESS figurent l'inclusion des personnes en situation de handicap, la lutte contre la pauvreté – je pense notamment aux associations qui, dans ce domaine, œuvrent en première ligne et dont l'action est rendue toujours plus urgente par la crise économique et sociale – et l'inclusion numérique, enjeu majeur pour les territoires les plus isolés et leurs habitants.

L'ensemble des initiatives prises dans ces différents domaines méritent d'être encouragées à la hauteur de leurs retombées positives dans les territoires. Aussi le groupe MODEM votera-t-il en faveur des orientations définies dans ce projet de budget.

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Vous avez salué le travail accompli au cours des quatre années écoulées ; il a permis d'améliorer l'efficience et l'efficacité des dispositifs, mais il y a encore beaucoup à faire. Il nous faut donc poursuivre dans cette voie avec la secrétaire d'État Olivia Grégoire, en faisant preuve de pragmatisme et de lucidité, afin d'encourager l'évolution de l'ESS vers l'économie réelle et de favoriser la solidarité dans le monde de l'entreprise – notamment par le biais des entreprises à mission. Madame Anne-Laurence Petel, vous savez, en tant que présidente du groupe d'études consacré à l'économie sociale et solidaire, combien il nous faut défendre ces valeurs qui doivent s'appliquer largement dans l'économie.

En conclusion, je le redis, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Économie.

Mission Économie : Commerce extérieur (M. Antoine Herth, rapporteur pour avis).

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Dans le cadre de mes travaux sur les crédits du commerce extérieur de ce projet de loi de finances pour 2022, j'ai pu mener un certain nombre d'auditions en commun avec le rapporteur spécial de la commission des finances, M. Fabrice Brun ; je me réjouis que nous ayons pu ainsi enrichir nos travaux respectifs.

La crise de la covid-19 a sérieusement entravé les performances du commerce extérieur français et enrayé sa très bonne dynamique. Les exportations de biens et de services, qui avaient baissé respectivement de 16 % et de 13 % en 2020 par rapport à 2019, ont cependant progressé respectivement de 19 % et 5 % au premier semestre 2021, par rapport à la même période en 2020. Les perspectives s'améliorent donc. Par ailleurs, les performances de l'attractivité française ont connu une meilleure résilience et l'édition du salon Choose France 2021 a été une réussite : vingt-deux nouveaux projets d'investissement y ont été annoncés, représentant 3,5 milliards d'euros et 7 000 emplois.

L'État s'est largement mobilisé pour soutenir le commerce extérieur. Lors du remaniement de l'été 2020, un ministère chargé du commerce extérieur et de l'attractivité a été créé. Des moyens ont été prévus dans le cadre du plan France Relance, avec le financement de chèques relance export et de chèques relance volontariat international en entreprise (VIE), qui ont soutenu les projections d'entreprises à l'international. La Team France Export et la Team France Invest pilotent le plus efficacement possible les politiques de soutien à l'export et à l'attractivité.

Après une brève analyse des crédits consacrés au commerce extérieur, je vous présenterai les deux thèmes particuliers sur lesquels j'ai choisi de me pencher. Le premier a trait à un bilan de l'attractivité de la France et de la Team France Invest, récemment créée. Le second concerne les récents travaux sur la vulnérabilité de la France aux intrants étrangers et les solutions qui pourraient y être apportées.

Au sein des crédits du programme 134 Développement des entreprises et régulation de la mission Économie, le plus gros poste de dépenses en faveur du commerce extérieur est la subvention pour charges de service public (SCSP) versée à Business France, opérateur de l'État en matière de promotion de l'export et de l'attractivité du pays. Elle s'élève, pour 2022, à 85 millions d'euros, soit une baisse de 2,8 % par rapport à la loi de finances initiale de l'année passée, ce qui est conforme à la trajectoire prévue par le contrat d'objectif et de moyens (COM) 2018-2022 conclu entre l'État et Business France. Les emplois suivent également la trajectoire prévue dans le COM, avec 1 483 équivalents temps plein (ETP), soit vingt de moins que l'année dernière. La contractualisation entre l'État et Business France s'avère être un bon outil de gestion des deniers publics, de l'avis même de l'opérateur ; le renouvellement du COM en 2023 permettra de poursuivre dans cette voie.

Le programme 134 comporte également des crédits pour la rémunération de BPIFrance Assurance Export, qui gère, au nom et pour le compte de l'État, les garanties publiques à l'export, qui subissent une légère baisse de 3 % pour 2022 et s'établissent à 50 millions d'euros. Enfin, le soutien à des événements contribuant au développement de l'économie française à l'international et à l'attractivité de la France bénéficie de crédits à hauteur de 0,44 million d'euros pour 2022.

Certains crédits sont également consacrés au commerce extérieur dans la mission Plan de relance. Les crédits ouverts en loi de finances initiales pour 2021 et en loi de finances rectificative pour les chèques relance Export et les chèques relance VIE ne sont pas renouvelés, pour une raison simple : ils avaient vocation à couvrir l'ensemble des besoins, y compris au-delà de 2021. Les dispositifs d'accompagnement seront donc prolongés en 2022, grâce au report des crédits non consommés en 2021, qui pourront être utilisés jusqu'à épuisement.

Les crédits du commerce extérieur dans le PLF 2022 traduisent donc à la fois le soutien du Gouvernement et les efforts de gestion réalisés par Business France grâce au COM. J'émets donc un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

Venons-en à présent aux performances de l'attractivité française. Malgré la crise, la France s'est maintenue en 2020, pour la deuxième année consécutive, en tête des pays européens les plus attractifs pour les investisseurs étrangers. Globalement, ce sont les régions Île-de-France, Auvergne Rhône-Alpes et Hauts-de-France qui tiennent le haut du classement. Cependant, les investissements étrangers ne concernent pas que les grandes métropoles : selon Business France, sur la période 2014-2020, 41 % des investissements ont été réalisés dans des villes de moins de 20 000 habitants.

Le Brexit peut avoir des conséquences positives pour notre attractivité, mais il faut se garder de tirer des conclusions hâtives : d'une part, il est encore difficile de distinguer les effets résultant du Brexit de ceux résultant de la crise sanitaire, d'autre part, de nouvelles réglementations, notamment sanitaires, entreront en vigueur au 1er janvier et au 1er juillet 2022 et pourraient rebattre les cartes. En tout état de cause, il faudra veiller à ce que les retombées positives du Brexit ne soient pas contrariées par des difficultés à l'export.

Si les bons résultats de l'attractivité française s'expliquent par les réformes engagées en matière fiscale et sociale ces dernières années, il reste toutefois des marges de progression, notamment en matière de simplification administrative, même si la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, dite loi « ASAP », ou les sites industriels clés en main marquent de premières avancées.

La création de la Team France Invest (TFI) devrait également contribuer à la simplification des démarches pour les investisseurs étrangers. Comme cela avait été recommandé par Mme Laure de La Raudière dans son avis budgétaire l'année dernière, j'ai dressé un premier bilan de la mise en place de cette équipe de France de l'attractivité, officiellement lancée en février 2021. Pilotée par Business France, elle fédère les différents acteurs de l'attractivité autour d'une feuille de route commune et de moyens opérationnels. Deux outils ont été créés : un espace collaboratif d'information en ligne, qui contient de nombreuses ressources documentaires, et un guichet virtuel unique, le « Desk Invest in France ». Il s'agit d'une plate-forme unique qui permet d'assurer le suivi des projets d'investissements étrangers : l'investisseur dépose son projet, les régions candidatent et les administrations assurent le suivi des autorisations.

Bien que la TFI n'ait que quelques mois d'existence, à ce stade les retours sont plutôt positifs. Il faudra veiller à entretenir cette bonne dynamique et à bien associer l'ensemble des acteurs de l'attractivité. Un bilan du dispositif doit d'ailleurs être discuté aujourd'hui même par les acteurs. Il est également primordial de veiller à la qualité de l'accueil des personnels étrangers en France, qui est un déterminant important du maintien des entreprises étrangères sur notre territoire.

J'en viens à la vulnérabilité de la France aux intrants étrangers. Nous avons tous à l'esprit les pénuries de matériel médical durant la crise sanitaire ou, plus récemment, de semi‑conducteurs. Notre économie est fragilisée par ces difficultés d'approvisionnement.

On peut définir les intrants vulnérables comme des produits en provenance de pays situés hors de l'Union européenne, pour lesquels les possibilités de diversification d'approvisionnement sont limitées et qui se concentrent sur un faible nombre d'entreprises importatrices. Cette première définition économique doit nécessairement être étoffée par une analyse des risques géopolitiques ou climatiques.

Deux études françaises ont récemment traité de ce sujet : l'une réalisée par la direction générale du Trésor, l'autre, dans le cadre du Conseil d'analyse économique (CAE), par les économistes Isabelle Méjean et Xavier Jaravel, que nous avons auditionnés en commission. Quelques constats communs en ressortent : la vulnérabilité française aux intrants étrangers est modérée, mais elle existe ; parmi les principaux intrants concernés figurent les produits chimiques et les terres rares, et les pays auxquels notre dépendance est la plus grande sont la Chine et les États-Unis.

Que faire face à ces vulnérabilités ? Premièrement, cibler précisément les intrants véritablement stratégiques. M. Xavier Jaravel et Mme Isabelle Méjean plaident, comme moi, pour la création d'un comité d'experts qui établirait une liste. Deuxièmement, il faut agir au niveau européen. Si la Commission européenne a établi une première cartographie des vulnérabilités stratégiques, il faut réfléchir aux possibilités de diversifier les approvisionnements au sein même de l'Union européenne et multiplier les projets communs, comme les alliances industrielles initiées sur les batteries ou l'hydrogène. Les principales solutions proposées pour réduire concrètement la vulnérabilité aux intrants étrangers sont la diversification des approvisionnements, la constitution de stocks et l'augmentation des capacités de production : à chaque intrant correspond une solution différente.

Pour des questions de compétitivité, il est souvent recommandé d'augmenter les capacités de production nationales de produits à forte intensité technologique. Or il ne faut pas oublier les produits plus simples, notamment électroniques, indispensables à l'automatisation de l'industrie. Il ne faut pas non plus céder à la tentation du protectionnisme mais tirer le meilleur parti des possibilités offertes par le commerce international. Les projets d'établissement de nouvelles clauses miroirs dans le secteur agricole visant à conditionner l'accès à nos marchés au respect de nos normes sanitaires et phytosanitaires ou la réciprocité dans l'accès aux marchés publics, en sont deux bons exemples.

Pour conclure, je souhaite que les sujets liés au commerce extérieur puissent être une priorité de la présidence française de l'Union européenne. Le renforcement de la résilience française est indissociable d'une stratégie européenne en la matière.

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Merci, Monsieur Herth, pour ce beau rapport, que j'ai lu avec attention.

Quel constat pouvons-nous dresser concernant le commerce extérieur ? Depuis 2002, la France vit avec un déficit commercial qui s'est progressivement creusé jusqu'à atteindre 60 milliards d'euros en 2007-2008, avant de se stabiliser. Concrètement, cela signifie que, chaque année, nous, Français, faisons un chèque de ce montant à l'étranger et que nous nous appauvrissons d'autant. Il est notable que le développement du déficit commercial est allé de pair avec la désindustrialisation de notre pays, qui a entraîné la perte de plus de 3 millions d'emplois en vingt ans, ainsi qu'avec l'évolution du déficit public.

Qu'avons-nous fait depuis 2017 pour enrayer cette dynamique négative ? Nous avons d'abord – vous l'avez rappelé, Monsieur le rapporteur pour avis – engagé de nombreuses réformes économiques, notamment au moyen de la fiscalité, avec la réduction de 10 milliards d'euros des impôts de production et la baisse progressive, jusqu'à 25 %, du taux d'imposition sur les sociétés. Nous avons pris les ordonnances « travail ». La loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi « PACTE », a permis de renforcer les entreprises de taille intermédiaire (ETI), qui sont principalement celles qui exportent. Nous avons pris des mesures de simplification, avec la loi ASAP. Nous avons créé la Team France Export et, plus récemment, la Team France Invest. Nous nous sommes efforcés de lutter contre les effets de la covid, par exemple à travers le chèque VIE, qui vise à aider nos entreprises à exporter en faisant appel à la jeunesse, et le chèque relance export. Nous avons engagé la réindustrialisation de notre pays, notamment par le plan France relance, qui prévoit de consacrer un tiers des subventions à la relocalisation industrielle en soutenant l'industrie du futur et la numérisation. Le programme de relocalisation industrielle a permis de relocaliser en France 309 projets représentant un peu plus de 500 millions d'euros d'investissements et 39 000 emplois créés ou conservés. La réindustrialisation, c'est aussi France 2030, plan qui a été annoncé lundi par le Président de la République et qui comporte de nombreux axes de travail, concernant la filière automobile, l'aéronautique, le spatial, ainsi que les matières premières et les intrants – sujet sur lequel vous vous êtes plus particulièrement penché dans le cadre de ce rapport, Monsieur Herth, et qui est très important dans la perspective d'une réduction de notre dépendance envers les pays étrangers.

Quels résultats avons-nous obtenus ? Depuis 2018, on crée de l'emploi industriel dans notre pays. On enregistre un nombre record de créations nettes d'usines. Nous sommes, selon le cabinet d'audit financier et de conseil EY, la première destination des investissements étrangers en Europe, et cela pour la deuxième année consécutive. Dans ce contexte de sortie de la crise, nous devons faire repartir les exportations françaises afin de renforcer notre souveraineté économique sur le plan européen.

Je ne reviendrai pas sur les crédits : M. Herth en a indiqué les ordres de grandeur. Je dirai en revanche quelques mots pour conclure de la Team France Invest, dans la mesure où la précédente rapporteure pour avis, Mme de La Raudière, avait souhaité qu'on fasse un point sur la question un an après. C'est ce qui est fait dans le rapport, et de fort belle manière. Les résultats sont plutôt positifs.

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Le commerce extérieur, c'est aussi la balance entre les importations et les exportations. Vous l'avez évoqué, Monsieur le rapporteur pour avis, quand vous avez souligné notre vulnérabilité par rapport aux intrants. Pourriez-vous nous dresser un état des lieux des clauses miroirs et de leur évolution prévisible dans les négociations à venir ? Je crois qu'elles apporteront beaucoup à nos importations.

D'autre part, ne serait-il pas possible de tenir compte systématiquement, dans les achats des entreprises publiques, du coût carbone des importations, de manière à favoriser les achats européens, voire français ?

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Au nom du groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés, je tiens à vous féliciter, Monsieur le rapporteur pour avis, pour la qualité et l'intérêt de votre travail, qui montre bien votre sensibilité européenne.

Comme vous le soulignez, le commerce extérieur de notre pays a subi depuis mars 2020 les effets économiques très lourds de la crise sanitaire. L'an dernier, les exportations de biens ont ainsi chuté de près de 16 %. Dans le même temps, les flux d'investissements directs étrangers reculaient massivement – tout comme les flux de consommation touristique des visiteurs étrangers, qui correspondent en réalité à des exportations à l'intérieur du pays –, dans une proportion de 83 %. En outre, certaines filières industrielles, comme l'aéronautique, n'ont pas retrouvé leur niveau d'avant-crise. Cela souligne la nécessité de poursuivre nos efforts en matière d'attractivité, de compétitivité et de soutien à l'export en vue de relancer la production et l'emploi en France.

Néanmoins, les moyens inédits que nous avons déployés dans le cadre du plan de relance national et de Next Generation EU, le plan de relance européen, ainsi que l'effort vaccinal ont permis à l'économie française de rebondir rapidement. En juin dernier, les exportations de biens atteignaient déjà 98 % de leur niveau pré-covid et la France reste, selon le baromètre établi par EY, le pays européen le plus attractif en matière d'investissements, devant le Royaume-Uni et l'Allemagne.

En tant que députée du Pas-de-Calais, je me félicite tout particulièrement du fait que les Hauts-de-France figurent, dans le classement établi par Business France, parmi les trois régions les plus attractives pour les nouveaux investissements étrangers en 2020. Ces résultats sont évidemment le fruit des efforts réalisés dans le cadre du plan de relance – j'invite à veiller tout particulièrement sur le secteur des foires et salons, lieux d'échanges par excellence, mis à mal pendant la pandémie et qui sont un maillon non négligeable de l'accroissement de nos exportations. Ils s'inscrivent aussi dans une trajectoire de développement de l'attractivité à plus long terme. La baisse progressive de l'impôt sur les sociétés, engagée en 2019, nous permettra ainsi de nous rapprocher de la moyenne européenne, avec un taux de 25 % dès l'année prochaine. Mentionnons aussi la baisse des impôts de production incluse dans le plan de relance, ainsi que la mise en place de la Team France Invest, qui contribue à renforcer l'attractivité et la compétitivité de nos entreprises en Europe et à l'international. N'oublions cependant pas la maîtrise des langues, traditionnellement bien trop faible dans notre pays, et qui doit impérativement être améliorée, car c'est essentiel pour la fluidité des échanges.

Les orientations budgétaires prévues pour le commerce extérieur dans le cadre du PLF pour 2022 s'inscrivent dans la trajectoire ouverte par les lois de finances des précédentes années. En conséquence, le groupe MODEM est favorable à l'adoption des crédits de la mission Économie, pour ce qui concerne le commerce extérieur.

Toutefois, et pour aller plus loin, il convient de noter que l'on ne peut se contenter en la matière d'une politique d'attractivité et de compétitivité. Comme vous le soulignez dans votre rapport, il s'agit aussi d'un enjeu de souveraineté. Les récentes hausses des prix de l'énergie et des matières premières, ainsi que les difficultés d'approvisionnement durant la crise sanitaire, nous ont fait prendre conscience de nos vulnérabilités. Il est nécessaire de réduire celles-ci, et cela en étroite coopération avec l'Union européenne et ses États membres, puisque la politique commerciale est une compétence exclusive de Bruxelles. Il serait souhaitable de concevoir à moyen terme une politique commerciale et industrielle européenne afin de réduire les vulnérabilités et dépendances que vous analysez dans votre rapport. Cela aurait en outre pour conséquence de favoriser l'emploi et l'innovation en France et en Europe tout en garantissant le respect de normes sociales et environnementales ambitieuses dans le cadre d'un partage de la valeur équilibré entre les États. La France, où l'emploi industriel est devenu beaucoup moins important qu'en Allemagne ou en Italie, pourrait bénéficier d'une telle dynamique. C'est la raison pour laquelle je vous remercie d'avoir abordé cet aspect dans votre rapport. Cela devrait inciter le Gouvernement à promouvoir un agenda ambitieux en matière de politique commerciale et industrielle durant la présidence française du Conseil de l'Union européenne.

Cet enjeu souligne l'importance d'avoir, en matière de commerce extérieur, une vision stratégique combinant deux efforts : premièrement, renforcer la compétitivité de nos entreprises, sur le plan des investissements comme sur celui des exportations ; deuxièmement, veiller à la maîtrise des chaînes d'approvisionnement, de manière à renforcer notre autonomie et notre résilience. À cet égard, l'appel à projets de relocalisation et de sécurisation de nos approvisionnements stratégiques, doté de 850 millions d'euros dans le cadre du plan France relance et qui a déjà débouché sur 380 dossiers de relocalisation, est une première étape très encourageante, susceptible d'inspirer des dispositifs similaires à l'échelle européenne.

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Je veux tout d'abord féliciter le rapporteur pour avis pour la qualité de son travail.

Malgré une année 2020 particulièrement difficile pour nos entreprises, les chiffres du premier semestre 2021 sont encourageants. Les exportations de biens ont progressé d'environ 18 % par rapport au premier semestre 2020 ; en juin dernier, elles atteignaient presque leur niveau d'avant-crise. L'horizon semble s'éclaircir pour l'industrie française, avec notamment l'annonce du plan France 2030. Quoique nous manquions d'éléments sur le financement de ce dernier, nous ne pouvons que nous réjouir de la volonté du Gouvernement d'encourager l'innovation, notamment dans l'hydrogène vert et les technologies de rupture. Je partage entièrement l'objectif de soutien à la transition écologique des industries de pointe que sont l'aéronautique et l'automobile. Une vigilance particulière est toutefois requise pour la filière aéronautique : comme le souligne à juste titre M. le rapporteur pour avis, en juillet 2021 les exportations dans le secteur aéronautique n'atteignaient que 53 % de leur niveau d'avant‑crise. La reprise plus tardive qu'escompté du trafic aérien pèse sur la capacité d'investissement de la filière, notamment pour les chaînes d'assemblage des longs courriers.

Aussi, bien que la conjoncture économique soit favorable, convient-il de procéder à la sortie progressive des dispositifs d'aides liées à la crise avec prudence et en concertation avec les acteurs, de manière à accompagner au mieux les PME sous-traitantes. Dans le cadre de notre mission d'information sur l'avenir du secteur aéronautique en France, nous aurons l'occasion de formuler un certain nombre de propositions en vue de booster nos exportations, en soutenant la décarbonation de l'industrie aéronautique.

Nous connaissons tous les difficultés que rencontrent nos PME et nos ETI pour faire valoir leurs atouts à l'international. Je tiens à saluer l'action déployée par Business France pour les aider à être des acteurs compétitifs sur le marché européen et mondial. Afin d'assurer à cette démarche un succès durable, il paraît nécessaire d'œuvrer rapidement à la conclusion d'un nouveau contrat d'objectifs et de moyens avec Business France, l'actuel arrivant à échéance en 2022.

Le rapport pour avis revient longuement sur la stratégie à déployer pour réduire la vulnérabilité de la France aux intrants étrangers. Depuis le début de la crise, nous percevons avec une plus grande acuité notre dépendance à certains produits étrangers, notamment pour ce qui concerne l'industrie du médicament. Il est intéressant d'observer que 75 % des vulnérabilités d'approvisionnement sont concentrées dans les secteurs de la chimie et de l'agroalimentaire. La pénurie actuelle de matières premières illustre à nouveau la porosité de notre marché intérieur aux fluctuations des prix et des quantités. Il est essentiel de combattre cette tendance par une définition précise des intrants et par la coordination des politiques de résilience à l'échelon européen. Il me paraîtrait à cet égard judicieux de profiter de la présidence française de l'Union européenne pour inciter les États à intégrer des clauses miroirs dans leurs accords commerciaux, afin de ne pas créer de dépendance à l'égard de pays disposant de normes de production moins strictes.

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Monsieur Adam, la Team France Invest est en phase de rodage mais, bien que nouveau, cet organisme a d'ores et déjà montré toute sa pertinence. Il existe toutefois un angle mort dans mon rapport : c'est le point de vue des régions. L'organisation de notre soutien à l'export fait en effet des régions les pivots de notre stratégie de commerce extérieur, puisque c'est à elles de définir les priorités en matière d'exportation ainsi que d'investissements ; la Team France Invest collecte les projets et les soumet, dans le cadre d'appels d'offres, aux régions. Or je n'ai pas pu rencontrer les représentants de celles-ci – ce qu'on peut comprendre : du fait du récent renouvellement des conseils régionaux, Régions de France a probablement d'autres préoccupations en ce moment. C'est néanmoins dommage parce que cela fait maintenant quelques années que les régions n'explicitent guère les choix politiques qu'elles font en la matière.

D'autre part, malgré tous les efforts fournis pour accélérer les procédures administratives, je crains que les investisseurs ne soient déroutés par la complexité de la tuyauterie administrative en France. Certains représentants des chambres de commerce et d'industrie ou de Business France ont reconnu que, malheureusement, on a l'habitude de travailler en silo, chacun dans son domaine de compétences, et qu'en réalité le suivi des dossiers n'est pas aussi fluide qu'il pourrait l'être. Ainsi, le délai minimum en France pour monter une usine dans le cadre des sites industriels clés en main est de six mois, contre trois aux Pays-Bas. Nous avons des marges de progrès ! On pourrait par exemple nommer des sous-préfets en mission pour faire avancer les dossiers ; on peut aussi imaginer que l'on fasse confiance au marché, et que ce soient des cabinets d'avocats ou des conseillers qui s'en chargent.

Les clauses miroirs et l'accès aux marchés publics sont les deux principaux objectifs de la feuille de route du ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l'attractivité, Franck Riester, à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne. L'importance des clauses miroirs n'est plus à démontrer, notamment dans le domaine agroalimentaire ; on l'a vu avec l'Accord économique et commercial global, le CETA, on le verra probablement demain avec d'autres accords commerciaux. Quant aux marchés publics, l'Europe fait peut‑être preuve de naïveté en les ouvrant largement alors qu'il n'y a pas de réciprocité et que ses entreprises perdent de ce fait des opportunités.

Il faut en outre que la France appuie la Commission européenne dans sa volonté de créer un système de régulation du carbone aux frontières. Ce serait un outil majeur pour éviter à la fois les fuites de carbone et l'importation de la déforestation et cela jouerait le rôle d'une justice de paix pour les échanges commerciaux. Si un tel système existait, certaines entreprises feraient probablement des choix de localisation différents.

Un enjeu qui revient souvent dans les discours concernant l'attractivité de notre territoire, notamment dans la présentation par le Président de la République du plan France 2030, c'est la réussite de notre transition énergétique. Au-delà des efforts qui ont déjà été faits, la décarbonation sera un argument important pour que les entreprises implantées en France y restent et que d'autres les rejoignent. D'où l'importance de faire les bons choix. Je vous signale, à titre d'information, que le Réseau de transport d'électricité (RTE) a été chargé de réaliser une étude à l'horizon 2035 sur les besoins énergétiques en France selon seize scénarios différents. Des propositions ont été faites en matière de développement des énergies renouvelables, qu'il s'agisse de l'éolien ou du photovoltaïque, et la question du nucléaire ressurgit. J'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt de la proposition d'engager une réflexion sur la construction de microcentrales nucléaires afin de permettre à la France de renforcer son atout en matière d'empreinte carbone et d'être moins dépendante de l'importation d'énergies fossiles. Je rappelle que toutes les études montrent que le déficit énergétique joue un rôle considérable dans la balance commerciale – 25 milliards d'euros, ce n'est pas rien. Nous en avons eu la démonstration par l'absurde pendant la crise de la covid : le fait que l'économie ait été presque à l'arrêt a permis d'alléger considérablement le déficit énergétique.

La question de l'aéronautique est extrêmement importante : il s'agit de l'un des grands secteurs d'activité en France, et plus particulièrement dans votre région, MadamePinel, notamment à Toulouse. Il a été particulièrement touché par la crise sanitaire, avec 510 milliards d'euros de pertes de chiffre d'affaires en 2020 ; contrairement à d'autres secteurs, le retour à la normale n'est pas attendu avant 2024. La bonne nouvelle, c'est que, malgré tout, Airbus a enregistré 566 livraisons en 2020, contre 184 pour Boeing. Nous conservons donc un stock important de commandes et avons été capables, malgré la crise, de continuer à servir nos clients. Cependant, la France est plus durement touchée que ses voisins européens, puisque le site de Toulouse étant spécialisé dans les longs courriers, il a subi une baisse d'activité de 50 % contre 30 % en moyenne pour le groupe Airbus. Il nous faut, d'une part, retrouver très rapidement les conditions pour rester leaders sur le marché de la fourniture d'avions, d'autre part, ne pas manquer le virage des énergies plus propres et de la décarbonation du trafic aérien.

Notre vulnérabilité envers les intrants, tout le monde en a conscience. La chimie, et particulièrement la pharmacie, s'est retrouvée de ce point de vue sous les feux de l'actualité. Mais vous avez cité aussi, à juste titre, l'agroalimentaire. Comment la France, pays qui produit plus de 300 fromages à l'aide de capacités très diversifiées, pourrait-elle être vulnérable sur ce plan ? Eh bien, lorsque la production laitière et les élevages de cochons et de volailles dépendent du tourteau de soja brésilien, on devient vulnérable ; de même lorsque l'agriculture céréalière, si performante, dépend de phosphates produits au Maroc ou à l'aide de capitaux russes. Idem dans le domaine phytosanitaire : pour ce qui concerne le biocontrôle, le Japon dispose d'un monopole en matière de production des substances chimiques imitant les phéromones ; l'Europe se contente de conditionner le principe actif venu du Japon. Idem encore pour ce qui concerne les terres rares et d'autres produits dont nous aurons besoin pour développer les nouvelles technologies.

Restons toutefois positifs : les entreprises françaises sont présentes dans beaucoup de pays au monde – c'est d'ailleurs l'une de nos particularités. La France est le pays d'Europe qui détient le plus grand nombre de filiales à l'étranger. Nous y réalisons 1 666 milliards d'euros de valeur ajoutée. Les grandes entreprises françaises emploient 6,5 millions de salariés à travers le monde. D'où mon choix de consacrer une partie de mon rapport à l'attractivité. Au cours des vingt dernières années, les entreprises françaises se sont dit qu'il leur serait compliqué de rester en France tout étant compétitives à l'international ; elles ont donc déplacé les usines chez leurs clients, afin d'échapper aux règles de l'OMC, à la fiscalité française et à la lourdeur du marché du travail français. Évidemment, cela nous a appauvris en emplois et en valeur ajoutée. D'où l'importance d'attirer, en contrepartie, les investissements étrangers. Le renforcement de son attractivité permettrait à notre pays de remédier au déficit chronique de la balance commerciale, mal français qui résulte aussi d'un choix opéré par les entreprises françaises.

Mission Écologie, développement et mobilité durables : Énergie, climat et après-mines (Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour avis)

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Je ne ferai pas durer le suspense : je m'en remettrai à la sagesse de la commission concernant l'avis à émettre sur les crédits du programme 174 Énergie, climat et après-mines de la mission Écologie, développement et mobilité durables.

Je salue le renforcement des dotations consacrées à la politique énergétique – tout au moins s'agissant de l'accompagnement de la transition énergétique, l'action n° 2 du programme. Les dotations correspondantes vont en effet augmenter de près de 1,1 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 733 millions d'euros en crédits de paiement (CP), soit une progression de, respectivement, 67 % et 49 %. Je salue plus particulièrement l'effort budgétaire que représente la reconduction de l'enveloppe de 1,7 milliard d'euros en AE pour le dispositif MaPrimeRénov'. Partagée en 2021 entre le programme 174 et la mission Plan de relance, cette enveloppe sera entièrement affectée au premier en 2022. En parallèle, l'addition des CP ouverts dans le cadre du programme 174 et de la mission permettra au dispositif de retrouver le niveau atteint par le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) avant sa mise en extinction, soit 2 milliards d'euros. De fait, MaPrimeRénov' rencontre, comme l'a souligné la Cour des comptes, un grand succès, quoique l'on puisse s'interroger sur la manière de mieux accompagner les bénéficiaires afin que la performance thermique soit la plus large possible – débat que nous avons eu ce matin.

Parmi les autres aspects positifs du projet de budget, j'évoquerai la stabilisation du soutien budgétaire à l'acquisition de véhicules propres, à hauteur de 506 millions d'euros – complétés par l'ouverture de 487 millions d'euros en CP dans la mission Plan de relance –, ainsi que l'affichage d'une progression des capacités de production d'électricité renouvelable. Le projet annuel de performances table ainsi sur une production de 70,5 térawattheures en 2022, contre 64,5 térawattheures aujourd'hui. Je parle néanmoins d'affichage parce que les dotations envisagées pour l'action n° 9 Soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole continentale du programme 345 Service public de l'énergie reculeraient quant à elles de 946 millions d'euros en 2022. C'est là toute l'ambiguïté de la prévision de ces charges de service public, que je tiens à souligner : elles ne montrent pas la mobilisation réelle de l'État en faveur des nouvelles capacités d'énergie renouvelable. Les futures dépenses sont noyées dans la masse des compensations dues pour les installations déjà aidées. Or les surcoûts d'achat des productions aidées vont vraisemblablement se réduire du fait de la hausse des prix de l'énergie, ce qui entraînera une diminution des compensations par l'État. Au reste, les prévisions budgétaires pour 2022 ne tiennent que partiellement compte de l'envolée des prix de l'électricité. On peut donc s'attendre à des économies de charges pour service public plus importantes en métropole – on observerait plutôt la tendance inverse dans les zones non interconnectées. Je souhaiterais pour ma part que ces « économies » soient réinvesties dans des appels à projets, guichets et compléments de rémunération assez motivants pour accélérer le développement des énergies renouvelables, plutôt que l'on se contente de prendre acte de la charge budgétaire moindre.

Si j'en appelle à votre sagesse, c'est que j'émettrai plusieurs réserves sur le projet de budget.

Je m'étonne d'abord du rythme d'engagement des investissements dans l'hydrogène vert prévus par le plan de relance : à peine 410 millions d'euros de CP devraient être décaissés en 2022, pour une enveloppe initiale de 2 milliards d'euros. Pourquoi une telle lenteur ? Le volet hydrogène du plan France 2030, présenté hier par le Président de la République, permettra-t-il d'accélérer les choses ? Il est urgent que la recherche progresse et que la production d'hydrogène bas carbone se développe, car elle est indispensable à la décarbonation des transports lourds et de certaines de nos industries. Je regrette d'ailleurs que l'hydroélectricité n'ait pas été incluse dans le plan de relance.

La reconduction des soutiens budgétaires à l'acquisition de véhicules propres est certes rassurante, et la revalorisation des aides pour les véhicules utilitaires bienvenue, mais celle-ci se fait au détriment des aides aux particuliers : le bonus écologique qui leur est destiné a été diminué de 1 000 euros en juillet et il devrait l'être d'autant en 2022. Il est à craindre que l'augmentation du reste à charge, déjà dissuasif pour beaucoup, ne casse la petite dynamique de verdissement du parc engagée depuis 2020. Je vous proposerai donc, à travers un amendement, d'augmenter les crédits concernés afin de rétablir à son niveau antérieur le bonus écologique destiné aux particuliers. Il conviendrait en outre que l'on tienne mieux compte du rétrofit électrique afin de réduire, autant que faire se peut, les émissions de gaz à effet de serre.

Plus problématique encore : si l'enveloppe attribuée au chèque énergie est augmentée de près de 100 millions d'euros en AE et de 80 millions d'euros en CP par rapport à 2021, c'est sur la seule base d'une progression de l'effectif prévisionnel des bénéficiaires. Il n'est pas envisagé de revaloriser le montant du chèque énergie en 2022 : l'octroi de 100 euros supplémentaires par chèque, annoncé fin septembre par le Premier ministre, ne s'appliquera qu'en 2021. Pourtant, l'alourdissement des factures d'énergie qui motive ce geste sera – tout le monde en parle – sans doute durable, du fait de l'envolée des prix sur les marchés et de l'augmentation des tarifs réglementés de vente (TRV). Aussi vous soumettrai-je un second amendement visant à reconduire le supplément de 100 euros en 2022.

L'accompagnement de nos concitoyens face à la flambée des prix de l'énergie est crucial pour leur pouvoir d'achat. La mise en place pour un temps limité d'un bouclier tarifaire afin de contrer ces augmentations ne suffira pas – même si je salue la réduction concomitante de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) –, et cela d'autant moins que la hausse des prix ne manquera pas d'être entretenue par le renchérissement des quotas carbone. Il devient urgent d'engager une réflexion sur l'ensemble des leviers susceptibles d'agir sur le coût de l'énergie, notamment la réforme de l'ARENH, l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, et de mettre en place un accompagnement renforcé pour les consommateurs les plus fragiles ainsi que pour les entreprises électro-intensives, qui voient leurs coûts exploser et dont la compétitivité risque de se trouver affaiblie.

Enfin, le plan France 2030 ne semble pas apporter de réponse à l'une des questions posées par la Cour des comptes : le dispositif MaPrimeRénov' pourra-t-il continuer à fonctionner au même rythme après 2022 ? Ce serait pourtant indispensable pour que nous puissions espérer atteindre nos objectifs de rénovation énergétique – et encore : il n'est pas certain que les nouvelles modalités du dispositif garantissent une véritable prise en charge des 4,8 millions de passoires thermiques, dont la moitié d'entre elles sont occupées par des ménages en situation de précarité énergétique, c'est-à-dire qui consacrent plus de 8 % de leurs revenus aux dépenses d'énergie. À cela s'ajoute le fait que les territoires sont inégalement touchés par ce fléau. Il y a urgence à renforcer la lutte que nous menons contre celui-ci.

En conclusion, si je salue l'ampleur de l'effort budgétaire consenti par le Gouvernement pour soutenir la politique énergétique, je suis déçue qu'il n'aille pas plus loin pour agir plus fort et plus vite. Cela ne me permet pas d'émettre un avis favorable sur l'adoption des crédits du programme Énergie, climat et après-mines – quoique je ne m'y oppose pas. J'émets donc un avis de sagesse.

J'ai choisi de consacrer la partie thématique de mon avis au soutien national apporté aux zones non interconnectées au réseau métropolitain continental (ZNI), afin qu'elles puissent répondre à leurs besoins en électricité tout en réalisant leur transition énergétique.

Le caractère insulaire de la plupart d'entre elles et leurs spécificités géographiques et climatiques y entraînent des coûts de production de l'électricité très supérieurs à ceux enregistrés en métropole continentale – jusqu'à cinq fois, selon certaines ZNI. Pour une population souvent plus fragile que la moyenne nationale, l'application du principe de péréquation tarifaire, qui permet de payer la facture d'électricité au même niveau qu'en France continentale, est donc extrêmement précieuse. En outre, les tarifs réglementés de vente sont encore appliqués à tous les consommateurs finals, particuliers et entreprises, petits et gros utilisateurs. Consolidant l'unité de notre pays et concrétisant la solidarité nationale, le principe de péréquation permet ainsi aux consommateurs des ZNI de bénéficier de conditions financières d'accès à l'électricité similaires, quel que soit le coût de production et d'acheminement local, très hétérogène d'un territoire à l'autre.

En contrepartie, l'État compense le manque à gagner pour les fournisseurs, à savoir la différence entre des coûts de production ou d'achat plus élevés qu'ailleurs et des recettes plus contraintes, au titre des charges de service public de l'énergie financées par le programme 345. Cette compensation connaît une dynamique forte : les dépenses s'élevaient à 1,87 milliard d'euros en 2015 ; elles sont évaluées à 2,16 milliards en 2022, soit le quart du programme 345. Or la Commission de régulation de l'énergie (CRE) n'a tenu compte, dans ses prévisions, que d'une partie de la hausse des prix de l'énergie, laquelle renchérit le coût des énergies fossiles importées, qui sont encore très largement utilisées pour produire l'électricité locale. La facture finale sera donc probablement plus élevée. En outre, la CRE estime que le montant des charges relatives aux ZNI devrait continuer d'augmenter d'environ 7 % par an durant les cinq prochaines années, du fait du développement de la motorisation électrique et de la mise en service de nouvelles capacités de production.

L'idée de mieux maîtriser la demande d'électricité pour mieux contenir les coûts publics s'est clairement imposée ces dernières années. Plusieurs dispositifs viennent ainsi encourager et soutenir les efforts de performance énergétique ; ils sont promus à l'échelon national, mais aussi à l'échelon territorial, avec des soutiens financiers de l'État et de l'Union européenne. La CRE a approuvé, début 2019, des cadres territoriaux de compensation représentant un programme d'interventions locales de 530 millions d'euros sur cinq ans ; elle escompte à terme une réduction de 1,7 milliard d'euros des charges de service public et des économies d'énergie qui pourraient atteindre 10 % de la consommation d'électricité des territoires concernés.

Toutefois, si la maîtrise des volumes de consommation est une nécessité, la bonne répartition de celle-ci au cours de la journée est aussi un enjeu pour la soutenabilité du système électrique local, de surcroît lorsqu'elle a tendance à se concentrer sur les périodes de production les plus coûteuses. C'est pourquoi la CRE, comme EDF Systèmes électriques insulaires (EDF SEI), le principal opérateur dans les ZNI, préconisent une forme de pilotage de la consommation. Il s'agit notamment d'anticiper les futurs besoins de recharge des véhicules électriques – plutôt adaptés à ces territoires souvent de faibles dimensions. Pour la CRE, cela passe non par une remise en cause des tarifs de vente péréqués, mais par une modulation de leurs structures horaires afin d'inciter les consommateurs à privilégier les moments les moins problématiques.

L'accompagnement de la transition énergétique est un autre enjeu fondamental pour les ZNI, dont les mix énergétiques sont très carbonés et très dépendants des importations. La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, modifiée, a fixé les objectifs d'un mix composé à 50 % d'énergies renouvelables en 2023 et de l'autonomie énergétique en 2030. Pour ce faire, les collectivités territoriales et le représentant de l'État dans leur territoire élaborent une programmation pluriannuelle de l'énergie qui leur est propre. Alors que certaines ZNI en sont déjà à la première révision de celle-ci, force est de constater que les charges de service public liées au développement des énergies renouvelables progressent – elles seraient de 670 millions d'euros en 2022 contre 383,4 millions d'euros en 2018. Toutefois la part des énergies renouvelables dans le mix des ZNI reste nettement en deçà de leur cible.

Mes travaux ont montré la persistance d'un certain nombre de freins ou de contraintes. Il est ainsi nécessaire de déployer en parallèle des solutions de stockage centralisées qui gèrent l'intermittence des énergies renouvelables et assurent la sécurité de l'alimentation en électricité. Les territoires ont des craintes relatives à l'utilisation des terres, à la préservation des emplois liés aux énergies fossiles et à leurs recettes fiscales. Le choix est délicat entre prise de risque technologique et solutions éprouvées, et il est difficile de résister à des réponses rapides, comme la conversion des centrales thermiques au prix d'importations de biomasse au bilan carbone excessif. Enfin, il y a l'impératif de concilier verdissement du mix énergétique et rationalisation des dépenses publiques. Sur toutes ces questions, responsables nationaux et locaux n'apportent pas toujours les mêmes réponses.

Ces différentes pistes de travail sont essentielles, car la question de la transition énergétique est prégnante. Celle-ci ne pourra se faire sans un soutien aux plus fragiles, surtout dans le contexte d'une augmentation des prix de l'énergie qui érode le pouvoir d'achat de nos concitoyens. Le projet de loi de finances doit apporter des réponses à la hauteur des enjeux, y compris conjoncturels.

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Madame la rapporteure pour avis, votre expertise sur les sujets énergétiques est reconnue de tous ; vous la montrez une nouvelle fois avec ce rapport très complet, même si je ne peux que regretter votre avis de sagesse.

Les objectifs de la politique énergétique française sont multiples : favoriser l'émergence d'une économie compétitive, assurer la sécurité de l'approvisionnement, réduire la dépendance aux importations, maintenir un prix de l'énergie compétitif et attractif, assurer le droit d'accès de tous à l'énergie sans coût excessif au regard des ressources des ménages, lutter contre la précarité énergétique.

Depuis le début de la législature, la majorité s'est engagée dans une politique énergétique ambitieuse et tournée vers la transition écologique. La loi du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat fixe ainsi un objectif de neutralité carbone d'ici à 2050, atteignable en réduisant de 40 % nos consommations d'énergies fossiles d'ici à 2030 et en arrêtant la production d'électricité à partir de charbon. Cet objectif s'accompagne d'un investissement massif en faveur de la rénovation énergétique, notamment avec la mise en œuvre du dispositif MaPrimeRénov'.

Nos ambitions pour la politique énergétique française se reflètent dans ce dernier budget du quinquennat. Les deux programmes relatifs à la politique de l'énergie représentent ainsi plus de 12 milliards d'euros d'autorisations d'engagement, soit une augmentation de plus de 300 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2021.

Le programme Énergie, climat et après-mines est doté de 3,2 milliards d'euros, ce qui représente une hausse de 30 % par rapport à 2021. Ces crédits permettent de financer les mesures relatives à la réduction de la précarité énergétique – dont le dispositif du chèque énergie, doté de 958 millions – et à la rénovation énergétique – dont MaPrimeRénov', à laquelle sont consacrés 1,7 milliard d'euros. À cela s'ajoutent les crédits de la mission Plan de relance, comme vous l'avez indiqué.

Le programme Service public de l'énergie est doté de 8,45 milliards d'euros, en raison du transfert des crédits relatifs à certains dispositifs comme le Médiateur national de l'énergie ou le chèque énergie vers d'autres programmes de la mission. Ces mouvements budgétaires permettent au programme Service public de l'énergie de se recentrer sur les deux priorités suivantes : le soutien à l'injection de biométhane, pour lequel les crédits augmentent de 31 % par rapport à 2021, atteignant 713 millions en 2022 ; le soutien aux effacements de consommation, qui bénéficie d'une hausse de crédits de 566 % par rapport à 2021, atteignant 40 millions en 2022.

Par ailleurs, dans le contexte actuel de crise énergétique, une attention particulière est portée aux ménages les plus vulnérables face à la hausse des factures énergétiques. Ainsi, en complément du chèque énergie, qui permet aujourd'hui d'apporter une aide annuelle moyenne de 150 euros à 5,8 millions de ménages modestes, une aide sociale exceptionnelle de 100 euros a été annoncée par le Premier ministre et sera versée aux bénéficiaires d'ici à la fin de l'année. Le Premier ministre s'est également engagé à bloquer le prix du gaz au moins jusqu'en avril et à limiter la hausse du prix de l'énergie à 4 % pour permettre à tous les citoyens de résister aux augmentations de ces dépenses durant l'hiver 2021-2022 et de préserver au maximum leur pouvoir d'achat.

Pour toutes ces raisons, le groupe La République en Marche donnera un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

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Je vous remercie, Madame la rapporteure pour avis, pour votre rapport et les précisions que vous nous avez apportées. Je modérerai cependant votre analyse des chiffres des programmes 174 et 345.

La hausse de 30 % des crédits du programme 174 est flagrante, et nous devons nous en réjouir. Si l'on regarde les chiffres dans le détail, les augmentations dont bénéficient les différentes lignes sont évidemment variables. Elles sont très fortes s'agissant des mesures d'accompagnement de la transition énergétique, peut-être parce que le programme 174 héberge désormais la totalité de MaPrimeRénov', ce qui n'était pas le cas en 2020.

Nous nous réjouissons de l'augmentation de 25 % des crédits relatifs à la politique de l'énergie, en toute cohérence avec les objectifs que nous poursuivons en matière de financement des études techniques, juridiques ou financières réalisées en vue du développement des énergies renouvelables.

L'augmentation de 49 % des crédits relatifs à l'accompagnement de la transition énergétique concerne le dispositif du chèque énergie et MaPrimeRénov'.

Le groupe MODEM salue l'importante revalorisation des montants du chèque énergie ainsi que la simplification, depuis le PLF pour 2021, des modalités d'obtention de ce dispositif, auquel les EHPAD sont désormais éligibles. Cependant, des progrès restent à faire, car le bénéficiaire du chèque ayant besoin d'informations complémentaires se heurte souvent à une plateforme incapable de répondre à ses questions.

S'agissant de MaPrimeRénov', mon groupe se réjouit de l'élargissement du dispositif aux revenus les plus faibles. Toutefois, j'ai identifié deux freins au développement de la prime auprès de ce public : la difficulté à aller chercher les bénéficiaires, d'une part, et la nécessité de bien expliquer les travaux à réaliser, d'autre part. Nous devons en effet veiller à l'efficience des travaux financés : ce n'est pas forcément le remplacement d'une chaudière qui permettra d'obtenir les résultats que nous escomptons. Vous avez d'ailleurs souligné, Madame la rapporteure pour avis, ce besoin d'accompagnement des occupants de passoires thermiques pour que le dispositif gagne en efficience.

À ce propos, j'en appelle à une application stricte de la loi du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux. Nous pouvons tous constater la persistance des appels téléphoniques, à notre domicile, destinés à nous vendre des travaux de rénovation énergétique alors que nous avons interdit cette pratique en 2020. Ces travaux, souvent réalisés en dépit du bon sens et en arnaquant les personnes les plus vulnérables, n'ont parfois aucune efficacité et peuvent contribuer à la perte de confiance de nos concitoyens dans les travaux de rénovation énergétique.

La baisse tendancielle du budget de l'après-mines est logique, considérant que la population concernée par ces dépenses se réduit. Il convient cependant de veiller à ne pas trop réduire ces crédits, car il ne faudrait pas réaliser des économies sur le dos des mineurs qui ont contribué à l'industrialisation de la France.

À la différence du programme 174, le programme 345 se contracte. Je veux tout de même souligner, à l'instar de M. Adam, les augmentations de 30 % des crédits relatifs au soutien à l'injection de biométhane et de 566 % des crédits relatifs à l'effacement des consommations.

Finalement, l'augmentation globale des programmes 174 et 345 nous paraît parfaitement cohérente avec les fondements de la politique énergétique française, qui vise à réussir la transition énergétique tout en protégeant le pouvoir d'achat des Français et en garantissant la souveraineté énergétique de notre pays.

Je terminerai mon propos en soulignant l'importance du compte d'affectation spéciale Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (CAS FACE), que nous devons tous défendre pour ne pas mettre en difficulté les territoires ruraux. La transition énergétique est parfois difficile dans ces zones, qui consomment beaucoup d'énergie fossile. Nous devons donc leur permettre d'accéder à l'électricité de manière massive en renforçant les réseaux.

Pour toutes ces raisons, le groupe MODEM donnera un avis favorable à l'adoption de ces crédits. Je souhaite toutefois vous poser une question, Madame la rapporteure. L'ARENH, qui constitue un levier important d'amortissement de l'augmentation des prix de l'énergie, devait être revu dans le cadre du projet Hercule, finalement abandonné. Que préconisez-vous pour que cette révision ait lieu malgré tout ?

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Je salue à mon tour ce budget, en particulier la reconduction, à hauteur de 1,7 milliard d'euros, du dispositif MaPrimeRénov', qui a permis d'engager cette année la rénovation de 500 000 logements.

J'espère que les difficultés conjoncturelles que nous rencontrons, notamment la hausse du coût de l'énergie, à laquelle le Gouvernement a répondu en augmentant les aides bénéficiant aux foyers les plus démunis, appartiendront bientôt au passé. En réalité, les études montrent que la France est l'un des pays européens les plus thermosensibles : quand le thermomètre baisse, nos besoins en chauffage explosent. Cela signifie que nos logements sont moins bien isolés que ceux de nos voisins allemands, que ceux des pays du nord de l'Europe et, plus surprenant, que ceux de nos voisins ibériques. La politique que nous menons, qui s'inscrit dans le cadre de la loi « climat et résilience » et des obligations qui s'y rattachent, me semble donc la véritable solution à terme. Cependant, à l'instar de mes collègues, je salue bien évidemment la réactivité du Gouvernement, qui a permis d'éviter que la hausse du prix de l'énergie ne se traduise immédiatement par une baisse du pouvoir d'achat de nos concitoyens.

Vous avez abordé à plusieurs reprises la question de l'hydrogène. L'Agence de la transition écologique (ADEME) a lancé un appel à projets visant à déployer des « écosystèmes territoriaux hydrogène », ainsi qu'un appel à projets intitulé « Briques technologiques et démonstrateurs hydrogène » dans le cadre du programme d'investissements d'avenir (PIA). Il s'agit d'étudier comment nous pouvons, avec les ressources électriques, notamment nucléaires, dont nous disposons, produire de l'hydrogène vert tout en regardant vers les nouvelles technologies. Nous devons assumer ces choix, qui me semblent propres à la France car j'ai constaté à plusieurs reprises, notamment lors des discussions organisées dans le cadre de l'Assemblée parlementaire franco-allemande, de grandes divergences avec nos voisins allemands. Si nous souhaitons, en règle générale, davantage d'intégration européenne, nous devrons, dans ce domaine particulier, affirmer notre point de vue et trouver un accord avec les Allemands – nous avons un peu de temps devant nous avant que la nouvelle coalition se mette en place à Berlin.

Je vous remercie d'avoir évoqué les zones non interconnectées, dont je me soucie beaucoup. Ma circonscription n'est évidemment pas concernée, mais je parle souvent de ce sujet avec mes collègues, notamment des départements d'outre-mer. Lorsque je visite ces départements, je suis toujours étonné de constater à quel point ils sont encore dépendants des énergies fossiles, puisque les centrales électriques fonctionnent au fioul lourd, ce dernier étant importé par bateau. C'est justement ce que nous ne voulons plus connaître en matière d'équilibre énergétique ! Je me réjouis donc que vous ayez étudié cette question, qui constitue souvent un angle mort de notre politique énergétique – nous en avons très peu parlé lors de l'examen du projet de loi « climat et résilience ». La France pourrait renverser la vapeur, si j'ose dire, et faire de ces collectivités d'outre-mer des exemples de ce qu'il est possible de mettre en place, malgré certaines contraintes particulières, dans le domaine des énergies décarbonées. C'est d'abord une question de volonté politique : j'espère donc que votre rapport incitera tous ceux qui s'intéressent à ces sujets à aller dans ce sens.

Enfin, je rejoins les propos de M. Bolo s'agissant des appels téléphoniques. Il y en a marre ! Je suis, moi aussi, dérangé trois fois par jour à mon domicile ou à mon bureau par des appels qui n'ont plus lieu d'être. Veillons à la bonne application de nos lois et faisons en sorte que les messages adressés à nos concitoyens soient les bons afin qu'ils prennent les bonnes décisions !

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Madame la rapporteure pour avis, je salue la qualité de votre travail ainsi que votre engagement, bien au-delà de la question de l'hydroélectricité.

Nos concitoyens doivent faire face à une flambée des prix de l'énergie. Pour le gaz, en particulier, les hausses successives intervenues depuis le début de l'été se sont traduites par une augmentation des factures de 25 %, soit plus de 200 euros en moyenne. Les prix de l'électricité et du pétrole suivent, eux aussi, une trajectoire ascendante. On comprend aisément les inquiétudes de nos concitoyens : les hausses de prix ne manqueront pas d'affecter leur pouvoir d'achat, ce qui aura des répercussions sur d'autres filières économiques. Le Gouvernement a annoncé un certain nombre de mesures pour les accompagner dans cette période difficile. Ainsi, un chèque énergie de 100 euros sera versé en décembre aux 6 millions de foyers les plus modestes, mais ce montant est inférieur à la hausse prévisionnelle des factures. De même, un bouclier tarifaire sera mis en place, permettant d'étaler les factures énergétiques sur un an.

Cette hausse des prix de l'énergie risque de se poursuivre. Pourtant, l'augmentation de la ligne budgétaire relative au chèque énergie est limitée. Il aurait été intéressant de renforcer les moyens alloués au dispositif et de prévoir des mesures pour en augmenter le taux de recours – aujourd'hui, 25 % des personnes éligibles au chèque énergie ne l'utilisent pas, par manque d'information, de réception ou de compréhension du dispositif.

Par ailleurs, je m'inquiète de l'absence de mesures d'accompagnement pour nos industries, qui subissent de plein fouet, quel que soit leur domaine d'activité, la flambée des prix du gaz et de l'électricité. Alors que nombre d'entre elles ont été durement frappées pendant la crise, elles risquent de ne pas se remettre de ces nouveaux surcoûts, qui viennent s'ajouter à la forte poussée des cours des matières premières que nous évoquons régulièrement dans cette commission. Et je ne parle même pas des industries électro‑intensives…

Je reconnais un effort substantiel en matière de rénovation énergétique, avec une hausse des crédits alloués au dispositif MaPrimeRénov'. Toutefois, nous n'avons aucune visibilité quant à la poursuite de ce programme à compter de 2023. Or, si la France veut respecter ses engagements, à savoir la rénovation thermique de l'ensemble du parc privé d'ici à 2050, MaPrimeRénov' devra s'inscrire dans la durée et s'accompagner d'un financement stable et pérenne.

Par ailleurs, nous craignons qu'en misant sur une massification des aides, le Gouvernement perde de vue les objectifs qualitatifs qui devaient être les siens. En effet, il manque toujours des mesures pour encourager des rénovations performantes et mieux accompagner les ménages modestes.

J'aimerais aussi dire quelques mots concernant les incitations à l'achat de véhicules électriques. La prime à la conversion et le bonus écologique ont été limités en juillet, et une nouvelle baisse du bonus écologique est prévue pour janvier 2022. Je redoute que ces baisses successives finissent par freiner la dynamique d'achat de véhicules électriques.

Je vous remercie d'avoir consacré la deuxième partie de votre rapport aux ZNI. Mes collègues insulaires, ultramarins et corses, y seront attentifs, d'autant qu'ils nous ont régulièrement alertés sur cette question au cours des dernières années. Je suis convaincue que ces ZNI peuvent être des territoires d'innovation ou d'expérimentation, qui nous permettraient d'avancer sur ce sujet au niveau local comme au niveau national. Certaines expériences réussies pourraient sûrement être généralisées à l'échelle de l'ensemble du territoire.

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Nous cherchons tous des solutions pour produire de l'énergie propre. Or les communes littorales se heurtent à un problème : la complexité des lois les empêche presque toujours d'utiliser les friches et les terres non exploitables qu'elles abritent, comme les autres communes, pour produire des énergies renouvelables. Je ne propose évidemment pas d'y implanter des éoliennes – vous comprendrez que c'est impossible –, mais il est dommage de ne pas saisir la possibilité d'y installer des panneaux photovoltaïques. C'est ce que tout le monde aimerait faire, par exemple, dans ma commune, où il existe une friche de plusieurs hectares qui ne se situe malheureusement pas en continuité d'urbanisme, mais la loi ne le permet pas. Alors que la France compte de nombreuses communes littorales, je déplore que l'on se prive de la possibilité d'utiliser des centaines d'hectares pour y produire des énergies propres.

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Monsieur Adam, je ne répéterai pas les raisons qui m'ont poussée à donner un avis de sagesse – et non un avis défavorable – aux crédits de cette mission. J'ai longuement souligné l'augmentation de ces crédits et les avancées qu'elle permet ; néanmoins, l'absence de pérennisation de la revalorisation du chèque énergie, la baisse du bonus écologique pour l'achat d'un véhicule propre et l'incertitude liée à l'avenir du dispositif MaPrimeRénov' m'ont conduite à exprimer cet avis.

Monsieur Bolo, j'ai salué comme vous l'augmentation de 30 % des crédits du programme 174. Vous l'avez dit vous-même, cette hausse est en partie mécanique, du fait de l'intégration de l'ensemble du financement de MaPrimeRénov' dans ce programme. Elle est également liée à l'augmentation du nombre de bénéficiaires du chèque énergie, et non à une hausse du montant versé à chacun d'eux. Or aujourd'hui, au regard de l'augmentation des prix, il conviendrait plutôt de pérenniser cette hausse ou, en tout cas, de lui donner une visibilité à plus long terme.

Vous avez relevé que MaPrimeRénov' est désormais accessible à des foyers beaucoup plus modestes. Je me suis moi-même interrogée sur le profil de ses bénéficiaires car, en divisant la dépense totale par leur nombre, on obtient des montants individuels assez faibles, autour de 3 000 euros par opération de rénovation. Cela ne laisse pas présager une haute performance thermique des travaux réalisés, comme si ces derniers se limitaient à un changement de chaudière… Aussi MaPrimeRénov' nécessite-t-elle sans doute un accompagnement plus important – d'autres financements existent par ailleurs, mais ils ne sont peut-être pas suffisamment coordonnés.

Effectivement, nos concitoyens subissent encore le démarchage téléphonique. Il va donc falloir faire appliquer la loi, qui a interdit cette pratique en 2020.

S'agissant de la baisse des crédits relatifs à l'après-mines, nous devons en effet veiller à ce qu'elle soit purement mécanique, du fait de la diminution du nombre d'ayants droit. Tel est bien le cas cette année, nous l'avons vérifié.

Je n'ai pas évoqué le CAS FACE dans mon intervention car ce budget est stable par rapport aux années précédentes. Vous trouverez tous ces éléments dans mon rapport.

L'augmentation des crédits relatifs à l'effacement est due à une régulation demandée par Réseau de transport d'électricité (RTE), qui doit rattraper un retard en 2022.

S'agissant de l'ARENH, je ne développerai pas beaucoup ma réponse car je risquerais d'être très longue. Je vous informe simplement que M. Cellier et moi-même sommes convenus, avec M. le président de la commission des affaires économiques, d'organiser vers la fin du mois de novembre une table ronde sur la question des prix de l'énergie, qui nous permettra de faire le point sur la situation et d'étudier les moyens d'action permis par ce levier.

Monsieur Herth, si j'ai souhaité consacrer une partie de mon rapport à la question des ZNI, c'est parce que je pense, comme vous, que nous n'en parlons pas suffisamment. Il existe des territoires très dépendants des énergies fossiles, qui ont du mal à mettre en œuvre leurs programmations pluriannuelles de l'énergie (PPE), plutôt ambitieuses. À l'instar de Mme Pinel, je considère les ZNI comme de véritables territoires d'expérimentation et d'innovation, où nous pourrions beaucoup apprendre. Par ailleurs, toute progression dans la technologie ou dans le déploiement des énergies renouvelables ferait baisser sensiblement les coûts, puisque le prix moyen de l'électricité s'élève actuellement à 233 euros par mégawattheure dans les ZNI contre 70 à 80 euros en métropole. Pour toutes ces raisons, nous avons beaucoup à gagner à accompagner ces territoires afin que leur transition énergétique soit la plus rapide possible. Nous avons auditionné plusieurs responsables élus des collectivités concernées, et ils se sont montrés très volontaristes dans ce domaine. Nous devons nous atteler à lever les freins qui demeurent.

Madame Pinel, vos propos concernant MaPrimeRénov' rejoignent totalement les miens. Le maintien du dispositif est assuré jusqu'en 2022 ; au-delà, nous sommes dans l'incertitude. On entend qu'il sera peut-être prolongé jusqu'en 2023, mais rien n'est acté à ce stade. Espérons que l'examen du projet de loi de finances nous apporte de bonnes nouvelles !

Article 20 et état B

Amendement II-CE9 de la rapporteure pour avis.

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Cet amendement vise à reconduire en 2022 le complément de 100 euros annoncé par le Gouvernement pour pallier la hausse des prix de l'énergie en 2021. En effet, il est très improbable que la facture diminue l'an prochain, du fait de l'augmentation des tarifs réglementés de vente d'électricité (TRV) et de la croissance inéluctable des prix du carbone.

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Le chèque énergie exceptionnel de 100 euros vise à pallier l'augmentation des prix de l'énergie constatée à la fin de l'année 2021 – en juillet, nous avions simplement retrouvé le niveau des prix en vigueur avant la crise de la covid. Ce chèque, qui sera versé à la fin de l'année, se combinera à deux autres mesures prises par le Gouvernement : d'une part, la limitation à 4 % de la hausse des prix de l'électricité au tarif réglementé, au lieu des 12 % prévus ; d'autre part, le gel des tarifs du gaz après l'augmentation d'octobre, au moins jusqu'en avril 2022, pour que les Français ne soient pas affectés par la hausse des cours mondiaux.

Les députés du groupe La République en Marche sont défavorables à votre amendement car il faut faire preuve de pragmatisme : si la situation se dégradait à nouveau en 2022, nous pourrions, comme nous l'avons fait en cette fin d'année 2021, envisager ce type de dispositions. Le Gouvernement a d'ailleurs rappelé que des mesures pourraient également être prises si le prix des carburants continuait d'augmenter. Voyons comment les choses évoluent au fur et à mesure, et concentrons-nous à présent sur le chèque énergie exceptionnel de 100 euros versé à la fin de l'année 2021, qui aura un impact important sur le pouvoir d'achat de 6 millions de foyers dans notre pays.

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Je m'oppose également à cet amendement. Une telle mesure relève plutôt de la loi de finances rectificative : son opportunité doit être évaluée au vu de la situation en vigueur au moment où elle s'applique. Par ailleurs, les mesures de gel prises par le Gouvernement couvrent tout l'hiver puisqu'elles courent jusqu'en avril 2022. Or il est aussi important que nos concitoyens perçoivent, à un moment donné, un signal prix, même affaibli par l'intervention du Gouvernement ; dans le cas contraire, ils ne chercheront pas à améliorer leur bilan énergétique et ne prendront pas les bonnes décisions en matière de rénovation. Soyons attentifs à ne pas trop gommer une réalité qui s'impose à tout le monde, à savoir les tensions conjoncturelles sur les marchés et l'augmentation du coût de l'énergie.

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Aujourd'hui, les chèques énergie ne sont pas utilisés à 100 % ; seuls 80 % à 90 % des aides sont consommées. En d'autres termes, 10 % des personnes bénéficiaires d'un chèque énergie ne l'utilisent pas. Il y aurait donc beaucoup à faire pour améliorer l'accès à ce droit ! Par ailleurs, pour des raisons d'équilibre, ce genre d'amendement prélève des crédits sur une ligne pour les transférer sur une autre. Le prélèvement opéré ne risque-t-il pas de handicaper d'autres personnes ? Pour ces deux raisons, je voterai contre l'amendement.

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Monsieur Adam, vous n'êtes pas sans savoir que les TRV ont d'ores et déjà été revalorisés par la CRE et qu'ils s'inscrivent très probablement dans une hausse structurelle. Les simulations montrent également que le prix de l'électricité ne va pas baisser tout de suite. Vous nous appelez à nous concentrer sur 2021 et à renvoyer à plus tard le débat sur l'opportunité de cette mesure en 2022 ; or nous sommes justement en train d'examiner le projet de budget pour 2022 !

Effectivement, Monsieur Bolo, 10 % des personnes éligibles au chèque énergie ne le demandent pas. Cependant, nous parlons ici des personnes qui le demandent et qui en auront besoin.

Monsieur Herth, vous nous invitez à ne pas effacer le signal prix. Or les bénéficiaires du chèque énergie souffrent d'une précarité énergétique importante et vivent souvent dans les logements les moins performants en la matière. Même s'ils sont volontaires pour réaliser des travaux de rénovation énergétique, l'engagement d'une telle dépense n'en demeure pas moins difficile, en dépit du signal prix.

La commission rejette l'amendement.

Amendement II-CE10 de la rapporteure pour avis.

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Cet amendement vise à rétablir le bonus écologique distribué aux particuliers à son niveau de juillet 2021, qui a vraisemblablement permis d'accélérer les achats de véhicules électriques. La diminution prévue de 2 000 euros – 1 000 euros en juillet 2021 puis 1 000 euros en 2022 – entraînera pour les particuliers un reste à charge encore plus dissuasif. Je rappelle par ailleurs que le bonus écologique doit également s'appliquer aux véhicules thermiques ayant subi un rétrofit, c'est-à-dire une conversion à la motorisation électrique sans que soient changées l'ensemble de leurs pièces – cette opération est plutôt intéressante en termes de déchets.

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Tout à l'heure, Mme Pinel a expliqué qu'une poursuite de la baisse du montant du bonus écologique désinciterait les Français à acquérir des véhicules électriques. Ce n'est pas du tout ce que l'on observe aujourd'hui. Au contraire, si l'on en croit les chiffres de vente des véhicules électriques, à hydrogène et hybrides rechargeables publiés chaque mois par l'Avere-France, la courbe de croissance des véhicules électriques est exponentielle. En septembre 2021, les immatriculations ont augmenté de 69 % – un taux de croissance supérieur à la moyenne de l'année, qui s'établit à 50 %. Jamais autant de véhicules électriques n'ont été vendus.

L'État n'est pas là pour subventionner ad vitam aeternam un secteur d'activité ou, en l'occurrence, une gamme de produits particulière, mais pour insuffler une dynamique. Or cette dynamique est présente depuis plusieurs années, comme en témoigne le nombre important de nouveaux constructeurs de véhicules électriques. Effectivement, lorsque les premiers véhicules ont été mis sur le marché, les acheteurs étaient confrontés à un très fort problème de prix, mais plus le temps passe, plus ce problème tend à se réduire. Certes, il est encore important, ce qui justifie le maintien du bonus écologique, mais des études très sérieuses ont montré que d'ici à 2025, les prix des véhicules électriques seront équivalents à ceux des véhicules thermiques. Le contrat stratégique de la filière automobile fixe l'objectif d'un million de véhicules électriques et de véhicules hybrides rechargeables en circulation à la fin de l'année 2022 ; nous sommes en bonne voie pour y arriver, puisque ce chiffre était de 687 876 fin septembre. S'il est naturel que l'État accompagne le mouvement à ses débuts, il est tout aussi logique qu'il se désengage progressivement pour indiquer aux constructeurs automobiles qu'ils doivent aussi baisser leurs prix pour rester attractifs.

Du reste, de nouveaux types de véhicules électriques sont en train d'envahir le marché, qui permettent d'abaisser fortement les prix d'acquisition. Je pense par exemple à la Dacia Spring, ou encore aux véhicules très urbains comme la Citroën AMI qui, dans quelques années, poseront probablement de gros problèmes dans les villes de province.

Aussi, les députés du groupe La République en Marche voteront contre cet amendement, considérant qu'il faut maintenir une dynamique de baisse graduelle et progressive du bonus écologique pour envoyer un bon message aux constructeurs automobiles.

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Je suis un peu surpris par la logique de cet amendement.

Il faut d'abord rappeler qu'une part importante de la valeur intrinsèque d'un véhicule électrique est liée aux batteries, qui sont produites à l'étranger. Cela me permet de faire un lien avec mon rapport sur le commerce extérieur : il est un peu dommage de mobiliser des fonds publics pour soutenir l'économie de pays étrangers. Nous ne devons pas le faire dans la durée ; c'est pourquoi je souscris à la politique de sortie progressive, en sifflet, de la stratégie de subventionnement.

En outre, je m'étonne que vous financiez cet amendement en prélevant des crédits sur la ligne affectée aux infrastructures et services de transport. En réalité, pour permettre la conquête du monde rural par les véhicules électriques, il faut justement mettre le paquet sur les infrastructures, en particulier sur les infrastructures de recharge. Aussi cet amendement risque-t-il d'être contre-productif.

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Il faut distinguer l'immatriculation, c'est-à-dire la mise en service du véhicule, et le moment où le contrat de vente est conclu. Les véhicules électriques immatriculés en septembre ont été commandés il y a bien longtemps, compte tenu de l'allongement des délais de construction lié à la pénurie de certains composants électroniques. À mon sens, sur le long terme, la diminution du bonus écologique et des aides à l'achat de véhicules électriques peut être préjudiciable. Le prix de ces véhicules est important et les chiffres que vous citez, Monsieur Adam, concernent des achats réalisés avec un bonus écologique élevé ; si vous en réduisez le montant de manière significative, la courbe risque de s'inverser, comme le suggèrent d'ailleurs certaines études. Je soutiens donc l'amendement de notre rapporteure pour avis.

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Effectivement, monsieur Adam, il y a une dynamique, mais elle est globale car elle inclut les utilitaires. Nous ne connaissons pas en détail les types de véhicules électriques vendus. Vous avez parlé des engagements pris à l'horizon 2025, mais il y a lieu d'accompagner la filière entre 2022 et 2025 ; aussi le maintien des dispositifs de soutien me semble-t-il utile.

Monsieur Herth, on peut débattre de l'intérêt qui s'attache au développement du véhicule électrique. Sur ce point, nous ne serons pas tous d'accord. En tout état de cause, c'est la politique qui est actuellement menée. Il me paraît souhaitable d'entretenir la dynamique d'acquisition de véhicules électriques et hybrides, même si la production de batteries est quasiment inexistante en France.

Par ailleurs, personne ne souhaite déshabiller Pierre pour habiller Paul, mais vous savez comme moi que la mécanique budgétaire nous y contraint. On espère, à chaque fois que l'on dépose un amendement, que le Gouvernement lèvera le gage. Une part des crédits du plan de relance n'a pas été utilisée, qui pourrait financer cette mesure.

La commission rejette l'amendement.

Elle émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables non modifiés.

La réunion est suspendue de dix-sept heures à dix-sept heures vingt-cinq.

Présidence de Mme Annaïg Le Meur, vice-présidente de la commission.

Mission Économie : Communications électroniques et économie numérique (M. Éric Bothorel, rapporteur pour avis).

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Nous allons examiner à présent l'avis sur les crédits relatifs aux communications électroniques et à l'économie numérique, dont le rapporteur est M. Éric Bothorel. Je vous rappelle que le vote sur les crédits de la mission Économie n'interviendra que mardi prochain, après l'examen des avis sur les crédits Entreprises et Industrie.

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Je me réjouis de vous retrouver pour échanger sur les crédits relatifs aux communications électroniques et à l'économie numérique de la mission Économie du projet de loi de finances pour 2022. Comme vous le savez, la crise sanitaire a démontré l'importance des réseaux de communications électroniques dans notre société. Après un épisode de sollicitation inédite de nos infrastructures numériques, qui ont tenu le choc en 2020, le plan de relance a apporté un soutien massif au numérique, qu'il s'agisse du financement des start-up, du déploiement des réseaux d'initiative publique (RIP), ou encore de la transformation numérique des administrations.

Dans le cadre du présent avis, j'ai étudié les crédits des programmes 134 Développement des entreprises et régulations et 343 Plan France très haut débit de la mission Économie. J'en dirai un mot, avant de dresser un état des lieux des déploiements de l'internet fixe et mobile, et d'évoquer cinq sujets prioritaires pour l'avenir : la réforme de l'imposition forfaitaire des entreprises de réseaux (IFER) sur les stations radioélectriques – dite « IFER radio » –, la qualité des déploiements de l'internet fixe, la fiabilité des cartes de couverture mobile, la transparence des déploiements des sites mobiles et la régulation du marché des entreprises de l'internet fixe.

Au sein du programme 134 Développement des entreprises et régulations, deux actions rassemblent des crédits concernant les communications électroniques : l'action n° 4 Développement des postes, des télécommunications et du numérique, conduite par la direction générale des entreprises, et l'action n° 13 Régulation des communications électroniques et des postes, qui correspond au budget de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP).

L'action n° 4 comprend un ensemble de crédits attribués au numérique, dont ceux destinés à financer France Num et l'Agence nationale des fréquences (ANFR). Cette action se voit dotée, pour 2022, de 701,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 701,7 millions d'euros en crédits de paiement, ce qui correspond à une hausse de plus de 180 % de ses crédits par rapport à l'année dernière. Cette forte augmentation s'explique essentiellement par la création du service universel postal, doté de 520 millions d'euros, institué par l'État pour compenser le fort recul du volume de plis échangés pendant la crise sanitaire.

Le montant de la subvention pour charges de service public destinée à l'Agence nationale des fréquences est identique à celui de l'année dernière, à 40,05 millions d'euros en AE et en CP. La dotation financière supplémentaire destinée à la préparation technique des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 est en revanche en léger recul, avec 3,7 millions d'euros en AE et en CP.

Au total, le budget de l'ANFR sera donc quasi stable, avec 43,75 millions d'euros en AE et en CP pour 2022. Cette agence verra en revanche son schéma d'emplois à nouveau baisser de 2 équivalents temps plein (ETP) en 2022. Sur ce dernier point, votre rapporteur veillera à ce que l'ANFR dispose des effectifs nécessaires pour mener à bien ses missions. Il en va de même pour l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), dont les effectifs ne sauraient être redéployés vers d'autres missions pour éviter la création d'ETP supplémentaires lorsque celle-ci se révèle nécessaire.

L'action n° 13 du programme 134 correspond, quant à elle, au budget de l'ARCEP. On observe pour 2022 une hausse de ses crédits, aussi bien en autorisations d'engagement – 21,9 millions d'euros contre 21,5 millions d'euros l'année dernière – qu'en crédits de paiement : 23,9 millions d'euros contre 23,3 millions d'euros. Le plafond d'emplois de l'ARCEP augmente également, pour atteindre 185 ETP en 2022.

Dans l'ensemble, cette augmentation de crédits devrait permettre à l'ARCEP d'assurer ses différentes missions et de monter en charge pour les plus récentes d'entre elles, à savoir le contrôle de l'action de l'ANSSI en matière d'exploitation des sondes sur les réseaux des opérateurs de communications électroniques, d'une part, et la régulation de la distribution de la presse, d'autre part.

Enfin, le programme 343, qui rassemble les crédits du plan France très haut débit, est doté de 22 millions d'euros en AE et de 622 millions d'euros budgétés en CP contre 609 millions d'euros l'année dernière. Cela correspond à la phase d'exécution des réseaux d'initiative publique engagée depuis l'année dernière.

Je voudrais faire un point d'étape sur le déploiement des réseaux de l'internet fixe et mobile. Si la crise a eu un impact évident sur les déploiements, qui ont été ralentis, ces derniers ne se sont pas arrêtés, ce qui a permis le maintien d'un rythme élevé dans la durée. Pour les déploiements « fixe », au 30 juin 2021, 74 % des locaux étaient éligibles au très haut débit filaire. Dans le détail, 94 % des locaux en zone très dense, 87 % des locaux en zone moins dense d'initiative privée et 53 % des locaux en zones moins denses d'initiative publique étaient éligibles au très haut débit à cette date.

S'agissant de la fibre, qui doit être généralisée d'ici à 2025 sur l'ensemble du territoire, on observe une dynamique soutenue. Au 30 juin 2021, 27 millions de locaux étaient éligibles aux offres dites de la fibre jusqu'à l'abonné (FttH), soit une hausse de 30 % en un an. Cette dynamique est essentiellement portée par la progression des réseaux d'initiative publique. Le déploiement de la fibre est estimé à 6,2 millions de prises au total en 2021 – dont 3,6 millions dans les RIP – contre 5,8 millions de prises déployées l'année dernière – dont 1,9 million seulement dans les RIP.

Cette accélération ne doit néanmoins pas cacher l'existence de fortes différences entre les collectivités territoriales, selon le degré d'avancement de chaque projet. Le déploiement de certains projets s'achève – dans l'Oise, la Loire, le Val-d'Oise, par exemple –, quand d'autres ont une échéance plus lointaine. Il existe aussi des disparités dans les dynamiques propres aux différentes zones du plan France très haut débit.

Au sein de la zone publique, le rythme de déploiement dans les zones d'appels à manifestation d'engagements locaux (AMEL) s'est amélioré, avec, à la fin du deuxième trimestre 2021, 150 000 locaux éligibles, contre moins de 50 000 un an auparavant.

Dans les autres zones, en particulier au sein de la zone très dense et de la zone d'appel à manifestation d'intentions d'investissement (AMII), les déploiements ne doivent pas ralentir de manière excessive au motif que l'essentiel des prises auraient été déjà posées. S'il est en effet naturel que le rythme de déploiement diminue mécaniquement au sein des zones plus avancées, il convient néanmoins que les pouvoirs publics et le régulateur fassent preuve d'une grande vigilance : les citoyens jugeront du succès du plan au regard notamment du déploiement des dernières prises, qui sont indispensables pour matérialiser le respect de l'objectif d'une généralisation de la fibre à l'horizon 2025. À cette fin, le financement des raccordements complexes, qui coûtera plus de 150 millions d'euros, doit être anticipé.

J'en viens aux déploiements mobiles, donc au New Deal mobile, dont les deux éléments principaux sont la généralisation de la 4G, d'une part, et le dispositif de couverture ciblée, d'autre part.

Au 30 juin 2021, la généralisation de la 4G avait continué de progresser pour atteindre entre 97 % et plus de 99 % des sites, en fonction des opérateurs. Hors sites partagés, il ne restait que quelques dizaines de sites non équipés en 4G par les opérateurs au 30 juin 2021.

S'agissant du dispositif de couverture ciblée, 830 sites ont été mis en place au sein des zones blanches depuis le lancement du New Deal mobile, avec des échéances naturellement variables en fonction de la date de l'arrêté concerné. La dynamique est bonne : d'après les éléments transmis à votre rapporteur par la Fédération française des télécoms (FFT), 1 039 pylônes ont été construits et activés, au total, par les quatre opérateurs, ce qui représente un quasi-triplement en un an ; 363 sites issus du dispositif de couverture ciblée (DCC) étaient en service en juillet 2020. Il convient toutefois d'être vigilant quant à l'application de l'arrêté de mars 2019 et, surtout, de celui qui arrive à échéance le 30 octobre prochain.

Enfin, on nous a signalé des difficultés de déploiement de sites mobiles en zone littorale, en raison d'une jurisprudence de plus en plus restrictive concernant l'application de la loi « littoral ». Cette question, qui concerne quelques dizaines de sites, doit nous conduire à trouver les voies et moyens nécessaires pour lever l'obstacle.

Enfin, pour dire un mot de la 5G, des offres commerciales ont été lancées fin 2020 et les déploiements se sont accélérés en 2021. Au 30 juin 2021, les opérateurs avaient déployé 4 909 sites utilisant une bande de fréquences allant de 3,4 à 3,8 gigahertz. À la même date, entre 55 et 80 % des sites des opérateurs étaient équipés d'une capacité théorique à 240 mégabits par seconde.

Le lancement, en juillet dernier, d'une stratégie d'accélération de la 5G et des futures technologies de réseaux de télécommunication, abondée à hauteur de 480 millions d'euros de financements publics d'ici à 2022, et 735 millions d'euros d'ici à 2025, devrait permettre de soutenir l'innovation et l'apparition de nouveaux usages dans ce domaine.

Dans un second temps, je voudrais évoquer cinq priorités pour les prochains mois.

La première concerne la réforme de l'IFER sur les stations radioélectriques, que j'appelle de mes vœux depuis plusieurs années. Le Gouvernement a enfin remis au Parlement un rapport sur cette question, qui lance plusieurs pistes intéressantes et permet surtout de disposer d'un constat partagé. Je continue donc de plaider fortement en faveur de cette réforme, de façon constructive. Il faut donner toute sa chance à la consultation en cours mais refuser, en même temps, le statu quo, qui ne peut être une option.

La deuxième priorité concerne la qualité des déploiements de l'internet fixe. Les progrès réalisés sur le mode STOC (sous-traitance aux opérateurs commerciaux) doivent être concrétisés par les avancées des acteurs.

Les troisième et quatrième priorités concernent les déploiements mobiles. La mise en open data de la base de suivi de l'implantation des sites mobiles, c'est-à-dire des pylônes, serait utile pour garantir une transparence maximale aux élus et aux citoyens. Aucun obstacle ne semble s'y opposer, d'après une première analyse de l'Agence nationale de la cohésion des territoires. J'y suis donc très favorable.

Les travaux menés par l'ARCEP pour fiabiliser les cartes de couverture mobile doivent également se poursuivre, pour essayer d'y intégrer des indicateurs de qualité de service. C'est une demande que Mme Laure de La Raudière, présidente de l'ARCEP, et moi‑même formulons de longue date. Nous devons continuer à la promouvoir.

Enfin, il est important que le marché des entreprises demeure une priorité de la régulation de l'ARCEP. Des progrès ont eu lieu, grâce à l'action de cette dernière, ainsi qu'à l'engagement de plusieurs opérateurs. Ils doivent se poursuivre pour que les entreprises, en particulier les plus petites, se voient proposer des offres adaptées à leurs besoins.

Je me prononce en faveur de l'adoption des crédits relatifs aux communications électroniques de la mission Économie.

Je dirai un dernier mot au sujet du secteur des télécommunications, qui a souffert de dégradations volontaires. C'est une spécificité française. Je veux dire aux acteurs concernés, aux hommes et aux femmes qui, chaque jour, déploient les solutions de télécommunications mobiles ou terrestres que nous sommes à leurs côtés. Nous condamnons fermement les actions de sabotage et espérons que leurs auteurs seront poursuivis.

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L'année 2021, comme celle qui l'a précédée, a été décisive pour le secteur des télécommunications en France. En effet, la crise sanitaire a été un accélérateur de la transformation numérique des entreprises, des administrations et des foyers. Si les réseaux ont tenu et que le télétravail a pu être, globalement, assuré, la crise a mis en lumière les difficultés de plusieurs territoires, victimes de la fracture numérique. Si l'inclusion numérique est l'une de nos priorités depuis 2017, les deux dernières années ont été marquées par une fréquentation croissante des réseaux sociaux, un recours accru au télétravail et à la télémédecine et le développement des démarches administratives dématérialisées. La fracture numérique est de deux ordres. C'est d'abord une fracture territoriale : des territoires sont peu ou pas couverts par la fibre et la 4G. C'est ensuite une fracture sociale : certains publics ne disposent pas du pouvoir d'achat suffisant pour accéder à ces outils, tandis que la population âgée peine à maîtriser leur usage. Des TPE et des PME n'ont pas de connexion fluide à internet, ce qui freine leur croissance. Nombre d'entre elles ne parviennent même pas à accéder à l'internet fixe. Beaucoup de parlementaires ont reçu des appels de maires qui peinent à se connecter au réseau, car les antennes 4G n'ont toujours pas été installées. Le numérique est un bien essentiel, auquel chacun de nos concitoyens et chacune de nos entreprises doit avoir accès.

C'est pourquoi le groupe MODEM salue l'augmentation du budget prévu pour 2022. Les crédits de la mission Économie augmentent de plus de 56 % en AE et de plus de 43 % en CP. Les communications électroniques et l'économie numérique représentent 75 % des crédits de la mission, soit près de 1,64 milliard d'euros. Elles relèvent des programmes 134 Développement des entreprises et régulations et 343 Plan France très haut débit. En 2022, tous les Français devraient accéder au très haut débit ; la fibre devrait couvrir l'ensemble du territoire national en 2025. L'année 2022 sera également marquée par la poursuite du développement de la couverture mobile, dont le bilan est largement positif. La Cour des comptes a confirmé que le pari du New Deal mobile avait été globalement tenu et que l'accélération des déploiements depuis 2018 était indiscutable.

Deux actions rassemblent des crédits concernant les communications électroniques au sein du programme 134 : l'action n° 4 Développement des postes, des télécommunications et du numérique et l'action n° 13 Régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). La hausse de plus de 30 % des crédits de ce programme s'explique par l'augmentation significative de la dotation versée à La Poste, au titre des missions du service universel postal, laquelle s'élève à plus de 520 millions d'euros. Il s'agit notamment de compenser le fort recul du volume des plis échangés pendant la crise sanitaire.

Monsieur le rapporteur, au nom du groupe MODEM, je salue votre travail. Vous avez insisté sur les priorités à suivre pour l'avenir et, parmi d'autres propositions, avez appelé à une réforme ambitieuse de l'impôt forfaitaire des entreprises de réseaux sur les stations radioélectriques, afin de poursuivre la trajectoire de réduction des impôts de production, qui est un levier du déploiement des infrastructures de couverture mobile. Pour ce faire, vous présentez trois options pour réformer l'impôt : le faire évoluer vers une imposition au site et non plus à la technologie ; le plafonner par un mécanisme d'ajustement à la baisse du tarif ; ou le remplacer par une imposition assise sur le chiffre d'affaires. Quelle option privilégiez‑vous, et pour quelle raison ?

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Vous avez eu raison, Monsieur le rapporteur, de signaler que notre système a tenu pendant la crise de la covid, ce qui a démontré que les opérateurs – malgré les critiques que nous leur avons parfois adressées – disposent d'infrastructures résilientes. J'ai constaté, comme vous, l'amélioration de la couverture mobile, qui est nécessaire dans le monde rural et qui a été rendue possible par les négociations que vous avez menées dans le cadre du New Deal. Il faut naturellement la parachever. Cela étant, la loi « climat et résilience » et la proposition de loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France ont mis en lumière une demande de mutualisation des pylônes et des antennes, pour réduire les atteintes à l'environnement. Tout en privilégiant la couverture, il serait souhaitable que l'on incite les opérateurs à réaliser cette mutualisation.

Je voudrais avoir votre avis sur notre souveraineté en matière de cloud. Ce matin, par exemple, OVH a rencontré quelques problèmes. Parviendra-t-on à assurer notre souveraineté, sinon sur le plan national, du moins à l'échelle européenne ?

Le groupe Agir ensemble approuve les conclusions de votre rapport.

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Privés de connectivité et sans compétence numérique, nos concitoyens sont nombreux à se sentir marginalisés. Pour eux, la fracture numérique se traduit par des difficultés d'accès aux services publics, l'impossibilité de recourir au télétravail, ou encore l'incapacité de consulter certains contenus culturels. Ces difficultés ne sont pas nouvelles, mais elles ont été exacerbées par la crise sanitaire. Il est urgent que les ambitions du plan France très haut débit et du New Deal mobile se concrétisent dans les territoires.

Le plan France très haut débit, lancé en 2013, exprimait une ambition simple : couvrir l'ensemble du territoire national à l'horizon 2022. De nombreux territoires en ont bénéficié : c'est le cas, par exemple, de mon département. Je reconnais volontiers qu'un coup d'accélérateur a été donné par le Gouvernement, grâce à une forte hausse du déploiement de la fibre optique jusqu'à l'abonné à partir de 2018. Les deux-tiers des foyers hexagonaux sont éligibles à la fibre optique. Si l'on continue au rythme actuel, la barre des 80 % pourrait être franchie dès le premier semestre 2022.

Il faudra garantir, au cours du deuxième semestre, la connexion des 20 % de foyers subsistants, faute de quoi la fracture numérique demeurera une réalité pour un nombre élevé de Français, notamment dans les territoires les moins denses. C'est cette dernière ligne droite qui nous inquiète, tant les opérateurs semblent réticents à remplir leurs obligations, et l'ARCEP et le Gouvernement assez peu disposés à les y contraindre. Les villes moyennes, par exemple, étaient censées être intégralement couvertes par la fibre fin 2020, en vertu d'engagements opposables pris par Orange et SFR il y a deux ans. Six mois après l'échéance, seuls quatre foyers sur cinq étaient éligibles, sans qu'aucune sanction n'ait été prononcée à l'encontre des opérateurs.

S'agissant du New Deal mobile, un constat similaire peut être dressé. Des progrès ont été réalisés, même si la situation n'est pas complètement satisfaisante. Comme le relève la Cour des comptes, les opérateurs ont consenti des efforts : plus de 76 % du territoire est aujourd'hui couvert en 4G. Cela étant, sur le terrain, en particulier dans les zones de couverture ciblée, les élus locaux continuent à constater un déploiement trop lent des antennes. Le premier bilan de l'application de l'accord révèle des trajectoires de déploiement de nouveaux sites inférieures aux fourchettes basses initialement retenues par l'ARCEP.

Je fais mienne la recommandation de la Cour des comptes de travailler à une évaluation régulière de l'application du New Deal et à une vérification ex post de son équilibre. L'absence de mise aux enchères des fréquences hertziennes a représenté un effort de près de 3 milliards d'euros de la part de l'État. Il conviendra de vérifier que cela correspond à la somme totale des investissements effectués par les opérateurs.

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Monsieur Corceiro, vous avez raison : le pouvoir d'achat, l'acculturation au numérique et la disponibilité des infrastructures sont autant de facteurs qui jouent un rôle dans l'inclusion numérique et, partant, dans l'accès à de nombreux services publics. Beaucoup a été fait en la matière, mais beaucoup reste à accomplir, notamment pour accompagner ceux qui ont besoin d'une acculturation aux réseaux. La problématique est complexe, car c'est une population hétérogène du point de vue de l'âge, du milieu social et de la localisation. L'action des médiateurs du numérique, qui se rendent dans les territoires, au plus près des besoins, devrait contribuer à résorber les difficultés.

L'année 2021 restera dans l'histoire comme celle où les courbes de la fibre et du cuivre se sont croisées. On aura connu, cette année, une accélération du déploiement des prises et des antennes. La France est le pays où la fibre se déploie le plus rapidement au monde. Notre machine industrielle n'a pas été altérée par le confinement car chacun – opérateurs, autorités de régulation, Gouvernement – s'est mobilisé pour la préserver. Quant au réseau mobile, la 4G couvre près de 99 % du territoire ; il faut à présent franchir le dernier kilomètre.

Les TPE et les PME ont des besoins spécifiques – j'ai récemment évoqué la question de l'organisation de ce marché avec Mme Laure de La Raudière, qui en avait fait son cheval de bataille lorsqu'elle siégeait sur les bancs de l'Assemblée. Les TPE et les PME doivent pouvoir accéder à la fibre ou à des services particuliers et disposer au minimum d'une garantie de service ou de redémarrage, autrement dit à quelque chose de plus professionnel que la seule offre domestique, et cela, à des tarifs abordables. Ma détermination demeure intacte en la matière.

J'en viens à la mutualisation, qui a été évoquée par M. Lamirault. On compte aujourd'hui un peu moins de deux antennes par support, tous opérateurs confondus ; 70 % des antennes des membres de la Fédération française des télécoms – c'est-à-dire, des trois opérateurs – sont mutualisées ; enfin, on recense 2,8 antennes par support mutualisé pour les membres de la FFT. C'est dire que l'effort est déjà engagé.

On entend dire, parfois, qu'il faudrait réduire le nombre des antennes, par exemple pour la 5G. Or, un téléphone portable émet d'autant plus d'ondes que le signal de l'antenne est faible. On peut donc être fondé à penser que, plus il y a d'antennes, moins on expose les gens aux ondes. Mme Laure de La Raudière et moi-même avions recommandé, en amont du New Deal, d'explorer le champ du roaming, qui permet d'accéder aux infrastructures disponibles quel que soit l'opérateur. Cette option n'a pas été retenue pour ne pas altérer le marché. Il est essentiel que l'on pilote et que l'on contrôle les obligations, concernant en particulier les voies de circulation et les contreparties données : c'est le rôle de l'ARCEP. Cela étant, les opérateurs respectent en grande partie leurs engagements.

On pourrait aller plus loin. Je propose ainsi dans mon rapport la publication de données ouvertes concernant notamment le dispositif de couverture ciblée ou d'autres opérations, pour éclairer les citoyens. On comprendrait pourquoi des antennes ne sont finalement pas installées, que cela tienne à l'alimentation électrique ou à des oppositions locales. Cela instillerait de la confiance et dépassionnerait le débat.

Madame Pinel, s'agissant du réseau de la fibre, InfraNum estime que les raccordements complexes concernent environ 2,1 millions de prises. Plutôt que la localisation dans une zone plus ou moins dense, c'est surtout la disponibilité d'un réseau électrique à proximité qui entre en ligne de compte. En tout état de cause, on devra proposer des solutions à ceux de nos concitoyens qui ne pourront recevoir la fibre parce que leur raccordement exigerait des moyens financiers hors de la portée des opérateurs. Et il est difficilement envisageable que les départements ou l'État financent ces opérations. Les 150 millions d'euros fléchés pour les raccordements complexes sont très en deçà des efforts qu'il faudrait fournir pour faire passer le taux de raccordement de 99 % à 99,9 %, voire 100 % de la population.

Concernant l'IFER, je regrette que le Gouvernement n'ait pas présenté le rapport que nous lui avions demandé. L'Inspection générale des finances a produit un excellent travail, dont le contenu semble connu de la presse. Il faut rappeler que la France est le pays où les tarifs des forfaits de téléphonie mobile sont les plus faibles, à l'échelle de l'Europe, et peut-être même du monde, ce qui réduit d'autant les revenus des opérateurs. Loin de moi l'idée de leur demander d'augmenter le prix de leurs forfaits, mais l'IFER fait peser une pression croissante. Cet impôt repose sur une base inégalitaire au possible, puisque Paris en est le premier bénéficiaire, alors que c'est une recette totalement marginale dans son budget. Ne pas en débattre, au motif que c'est une recette dynamique, ce serait mettre en difficulté une partie de notre appareil de production, lequel garantit la couverture numérique du territoire. Dans cette hypothèse, le projet de loi de finances continuerait à être amendé chaque année, comme c'est le cas depuis quatre ou cinq ans ; mais il devient, de la sorte, de moins en moins lisible et fixe des échéances sans lien avec l'état du marché.

Monsieur Corceiro, je ne suis pas sûr que le PLF 2022 permette d'abriter un amendement faisant un choix entre les trois options que vous avez évoquées, voire en retienne une autre. À mon sens, il faut instituer un dispositif qui limite la croissance des recettes dans le temps et garantisse ainsi que les opérateurs puissent continuer à répondre aux besoins de tous les Français sur l'ensemble du territoire. Je ne déposerai pas un amendement sauvage, mais j'invite le Gouvernement à agir en ce sens, aux côtés de l'Association des maires de France et de l'Assemblée des départements de France, lesquelles m'ont semblé ouvertes à une évolution. Le temps est venu de coconstruire un dispositif plus pertinent qui préserve les intérêts des opérateurs et des collectivités.

Avant de dire un mot sur le cloud, je voudrais rappeler que l'état de la menace sur la sécurité des systèmes informatiques est élevé et concerne toutes les infrastructures, tous les usages. Aussi serait-il raisonnable de ne pas détourner les moyens substantiels que l'on accorde à l'ANSSI – qui est une institution d'excellence – en lui assignant des missions éloignées de son rôle originel. En matière de cloud, nous avons été victimes de doctrines qui n'ont jamais marché. En vertu du « cloud de confiance », label récemment créé, les opérateurs américains pourraient toujours nous fournir des services, à condition de respecter les règles que nous avons définies. C'est, en quelque sorte, une contre-offensive face à l'extraterritorialité américaine. On observe la conclusion, dans ce nouveau cadre, d'accords entre des groupes américains et français. Par ailleurs, l'initiative franco-allemande GAIA-X poursuit son développement. Il est illusoire de penser qu'on puisse être indépendant ou recouvrer une forme d'autonomie stratégique en fermant nos frontières, en recourant uniquement à des produits et des acteurs français. Le numérique est, par nature, ultra‑mondialisé, et on voit mal comment on tournerait le dos à des groupes qui investissent, pour certains, 10 milliards d'euros par an dans le cloud, et avec lesquels aucun gouvernement ne pourrait rivaliser. Concentrons nos investissements sur des innovations de rupture.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 13 octobre 2021 à 15 h 05

Présents. – Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, Mme Barbara Bessot Ballot, Mme Anne Blanc, M. Philippe Bolo, M. Jean-Luc Bourgeaux, Mme Pascale Boyer, Mme Anne-France Brunet, M. David Corceiro, M. Nicolas Démoulin, Mme Marguerite Deprez-Audebert, M. Antoine Herth, M. Sébastien Jumel, M. Luc Lamirault, Mme Annaïg Le Meur, M. Roland Lescure, Mme Graziella Melchior, Mme Anne‑Laurence Petel, Mme Sylvia Pinel, M. Robert Therry, Mme Corinne Vignon

Excusés. – Mme Anne-Laure Blin, M. Yves Hemedinger, M. Christian Jacob, M. Guillaume Kasbarian, M. Max Mathiasin