Séance en hémicycle du jeudi 2 décembre 2021 à 9h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • désertification
  • martinique
  • médecin
  • numerus
  • numerus clausus

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi pour une santé accessible à tous et contre la désertification médicale (4589, 4711).

La parole est à M. Sébastien Jumel, rapporteur de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous parlons ce matin d'au moins 11 millions de Françaises et de Français. Ils vivent dans tous nos territoires : en Seine-Maritime, dans toute la Normandie, en Auvergne, en Seine-Saint-Denis, dans les outre-mer, en ville ou à la campagne. Partout, le constat est le même, documenté, chiffré, analysé depuis des années : chez eux, l'offre de soins est déficiente ; ils vivent dans ce qu'on appelle des déserts médicaux.

Cette expression est malheureusement entrée dans le langage courant. Nous avons tous entendu, dans nos circonscriptions, les mêmes récits et les mêmes questions. Comment faire renouveler son ordonnance quand il n'y a plus de généraliste ? Comment accéder à un spécialiste quand ce dernier n'a pas de remplaçant ? Comment se faire soigner s'il n'y a pas de médecin près de chez nous ? C'est à ces drames du quotidien que le groupe de la Gauche démocrate et républicaine veut répondre aujourd'hui.

Cette proposition de loi n'a pas vocation à susciter la polémique, mais plutôt à nous rassembler. Le mouvement des gilets jaunes et le grand débat national ont fait émerger cette question comme l'une des principales sources d'inquiétude des Français. La résolution du problème central des déserts médicaux n'est ni de gauche, ni de droite, comme dirait l'autre. Elle est d'intérêt national.

Quelques chiffres pour nous rendre compte du problème et partager ensemble un diagnostic : la densité médicale n'a cessé de baisser ces dernières années, passant entre 2012 et aujourd'hui de 325 à 318 médecins pour 100 000 habitants ; les inégalités sur notre territoire sont criantes et s'aggravent, les régions du sud de la France bénéficiant d'une densité médicale globalement plus favorable que celles situées au Nord. Les anciennes régions Picardie, Centre et Pays de la Loire ont des densités particulièrement faibles, entre 127 et 130 médecins généralistes pour 100 000 habitants.

De nombreux indicateurs ont été créés pour mesurer ce phénomène complexe. Tous font apparaître une situation très inquiétante. Ainsi, l'indicateur « accessibilité potentielle localisée », créé par le ministère de la santé en 2012, montre que le taux de personnes habitant dans un désert médical est passé de 8,6 % en 2015 à 11,6 % aujourd'hui.

Même les zones dites surdenses sont concernées, puisqu'elles connaissent une désertification médicale par la carte bancaire. Le constat est frappant ! On observe une corrélation claire, déjà dénoncée par la Cour des comptes : là où il y a davantage de médecins, il y a beaucoup de dépassements d'honoraires. À Paris, qui en compte 765 pour 100 000 habitants, 62 % de médecins sont en dépassement d'honoraires ; dans les Alpes-Maritimes, ce sont 42 % des médecins qui sont en dépassement d'honoraires. Nos concitoyens les plus modestes vivant en zone surdense n'ont donc pas toujours les moyens de payer une consultation chez un spécialiste. Certains territoires pourtant bien dotés doivent donc être considérés comme des déserts médicaux financiers.

Le manque structurel de médecins a des répercussions en cascade, en particulier sur l'hôpital. Presque tous les départements ont connu, au cours des dernières années, une hausse des passages aux urgences. Il existe ainsi un risque plus important de saturation des services d'urgences dans les zones sous-denses.

En outre, nous devons tous être frappés par le taux de vacance des postes de praticiens hospitaliers : il est supérieur à 30 % ! Cela dit quelque chose de la situation très difficile dans laquelle nos hôpitaux se trouvent aujourd'hui après les ravages du covid, le risque de black-out de la loi Rist, et les milliers de lits supprimés.

Le travail que j'ai conduit porte plus particulièrement le regard sur certains territoires encore plus frappés. Dans les outre-mer, la situation est encore plus préoccupante. Dans les zones rurales aussi fortement concernées, les habitants vivent en moyenne deux ans de moins que les urbains.

J'insiste aussi sur le fait que ces difficultés d'accès aux soins touchent en priorité les Français économiquement les plus fragiles : les personnes pauvres ont trois fois plus de risques de renoncer à des soins que les autres. Si elles se situent en zones sous-dotées, ce risque est plus de huit fois supérieur à celui encouru par le reste de la population !

Enfin, je voudrais rappeler que 11 % de nos concitoyens n'ont pas de médecin traitant : cela représente 6 millions de personnes. L'UFC-Que choisir a interrogé des médecins : dans ces zones, 44 % d'entre eux refusaient les nouveaux patients, et on peut les comprendre ! C'est là une véritable bombe sanitaire à retardement.

La situation est donc très grave. Bien sûr, des actions ont été entreprises depuis plusieurs années pour tenter d'endiguer ce phénomène, je ne le nie pas ! La loi de 2019 a notamment transformé le numerus clausus. Ce dispositif malthusien en vigueur depuis 1971 a contribué, au fil des ans, à tarir l'offre de soins : sa réforme est une bonne nouvelle.

Mais je voudrais vous alerter ici sur le fait qu'elle mettra au moins dix ans pour produire ses premiers effets.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce n'est qu'en 2030 que nous commencerons à stopper l'hémorragie médicale. Et ce n'est pas parce que le nombre de médecins va augmenter qu'ils vont s'installer automatiquement dans les zones où on a cruellement besoin d'eux ! Sans régulation territoriale, la transformation du numerus clausus risque de ne rien changer à la situation actuelle.

D'autres actions ont été menées, j'en dresse la liste dans le rapport. Elles relèvent pour la plupart de mécanismes d'incitations, et les agences régionales de la santé (ARS) auditionnées et le ministère n'ont pas pu en démontrer clairement l'efficacité.

En parallèle, le plan Ma santé 2022 devait permettre le déploiement de 4 000 assistants médicaux d'ici à l'an prochain. À ce jour, il reste plus de 2 760 équivalents temps plein à créer pour atteindre l'objectif affiché par le Gouvernement ! Vous conviendrez donc que le compte n'y est pas. Et nous n'avons même pas de véritable visibilité sur la répartition territoriale de leur déploiement.

Les collectivités territoriales sont aussi fortement mobilisées, parfois en parallèle de l'État. Cela donne lieu à une concurrence potentiellement délétère. Nous avons vu il y a quelques semaines une commune de la Manche, Barneville-Carteret pour ne pas la citer, confrontée à des exigences totalement irréalistes de la part d'un médecin qui, pour venir s'y installer, voulait le beurre, l'argent du beurre, le sourire de la crémière et tutti quanti.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous devons donc remédier rapidement à cette situation ! Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre dix ans de plus.

Notre proposition de loi formule des pistes que je crois réalistes et à même de répondre rapidement à ce problème majeur. Plusieurs leviers s'offrent en effet à nous, et d'abord celui de la formation. Dans le nouveau système de numerus apertus, l'État établit des objectifs pluriannuels d'admission qui tiennent compte des capacités de formation et des besoins de santé des territoires. Il apparaît toutefois que ces besoins restent très supérieurs au nombre d'étudiants formés. C'est pourquoi l'article 1er de ma proposition de loi demande que le nombre d'étudiants formés dépende uniquement du besoin de santé des territoires. Cela doit permettre aux universités de s'adapter pour répondre à ces besoins, et d'inciter l'État à renforcer les moyens qui leur sont alloués.

Toujours en matière de formation, je propose, à l'article 2, de généraliser le contrat d'engagement de service public (CESP). Ce dispositif permet aux étudiants de médecine et d'odontologie de recevoir une somme de 1 200 euros brut mensuels pendant la durée de leurs études. Ils s'engagent en contrepartie à exercer dans une zone sous-dense. Ce dispositif mériterait d'être généralisé : aujourd'hui, seulement 7 % des diplômés peuvent en bénéficier et les différentes analyses pointent son modeste succès.

Ensuite, l'article 3 de la proposition de loi traite d'une question récurrente lorsqu'on parle de désert médical : le conventionnement sélectif des médecins. Aujourd'hui, les infirmiers, les sages-femmes et les masseurs-kinésithérapeutes sont sous ce régime : il leur est interdit de s'installer en zones surdenses sauf en cas de cessation d'activité. Cette option a pour l'instant été exclue pour les médecins. Des rapports de nombreuses institutions s'accordent pourtant sur l'idée qu'il s'agit d'une voie d'équilibre qui ne remettrait pas en cause les fondements de la liberté d'installation, tout en permettant d'agir sur la répartition géographique des médecins.

Au groupe Les Républicains, je voudrais rappeler que M. Sautarel, sénateur LR du Cantal, et de nombreux autres sénateurs LR ont déposé en juin dernier une proposition de loi similaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je veux rappeler aussi au groupe La République en marche que quarante-trois de ses membres ont écrit au ministre de la santé au mois d'octobre pour demander la mise en place d'un dispositif similaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le Président de la République lui-même a dit, il y a une dizaine de jours, que l'accès aux soins était un sujet central et qu'il fallait que les choses bougent. Allez-vous effectivement les faire bouger ?

Mme Caroline Fiat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les discussions en commission ont montré que beaucoup de collègues ne débattaient pas du dispositif que je propose !

Approbation sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il ne s'agit pas de déconventionner des médecins, ni d'empêcher des citoyens d'avoir accès à un médecin conventionné, mais simplement de conditionner l'installation d'un médecin dans les zones surdenses à la cessation d'activité d'un autre médecin.

Je propose aussi de réorienter les financements prévus pour les mécanismes d'incitation à l'installation, qui sont peu efficaces, vers les collectivités territoriales, afin qu'elles puissent créer des centres de santé.

Ma proposition de loi a également pour ambition, dans son article 5, de mieux définir le principe d'égal accès aux soins, en fixant un maximum de trente minutes du domicile pour accéder aux soins ; rappelez-vous que 6 millions de nos concitoyens sont au-delà de cette limite.

Enfin, l'article 6 propose d'élargir le périmètre d'activité des hôpitaux de proximité, en donnant du contenu à leur définition. Il s'agirait notamment de développer les consultations avancées, ainsi que la chirurgie et l'obstétrique : étant donné le constat que je viens de faire, il me semble que nous ne pouvons pas éviter le débat sur ce sujet, que nous ne pouvons pas nous permettre de priver nos concitoyens qui vivent loin d'un centre hospitalier de ces deux activités médicales.

Les travaux en commission des affaires sociales ont montré une chose : le groupe La République en marche rejette en bloc toutes mes propositions, sans formuler aucune alternative !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il faudrait se contenter d'attendre que l'augmentation du nombre d'étudiants formés produise ses effets. C'est irréaliste et dangereux. Le groupe La République en marche a même rejeté l'un de mes amendements qui reprenait une formulation déjà proposée par ce même groupe en 2019 !

Mes chers collègues, sur ce sujet, nous devons travailler sérieusement et nous rassembler. Cette proposition de loi formule des ambitions réalistes, en se fondant sur un état des lieux bien établi et qui doit nous conduire à l'action. Nous ne pouvons pas rester dix ans de plus dans cette situation.

Nous devons prendre des mesures plus efficaces, afin de garantir à tous nos concitoyens ce droit à valeur constitutionnelle qu'est le droit à la santé. Sans cela, les dix prochaines années seront celles d'une désertification médicale encore plus forte et dans un plus grand nombre de nos territoires. Ce débat est tout sauf un débat technique. Pouvons-nous réaffirmer la présence de la République partout et pour tous ? Voilà la question qui est posée.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et FI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Nous voilà réunis pour l'examen de la proposition de loi pour une santé accessible à tous et contre la désertification médicale, qui vient d'être présentée par son rapporteur, M. Sébastien Jumel.

Ce texte porte sur une question essentielle, celle de l'accès aux soins dans tous les territoires. Ces tensions en matière de démographie médicale, car il s'agit bien de cela, ne sont pas nouvelles, même si la crise sanitaire les a mises en lumière. Pour ma part, je suis issue d'un territoire rural, c'est donc un sujet que je connais très bien. Et je me bats.

En vérité, cette situation plonge ses racines dans des décisions – des erreurs, devrais-je dire – de politiques publiques qui se sont sédimentées depuis plusieurs dizaines d'années ; elle ne pourra être résolue que dans la durée.

Vous avez raison, monsieur le rapporteur : ce n'est pas une question de gauche ou de droite, mais une question sociétale que nous avons à résoudre collectivement.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

C'est pour cette raison que le Gouvernement et la majorité se sont emparés de ce sujet dès le début du quinquennat pour y apporter des réponses structurantes, en posant plusieurs jalons importants. Je pense au plan pour renforcer l'accès territorial aux soins présenté dès 2017, à la stratégie Ma santé 2022 adoptée en 2018, et enfin au Ségur de la santé, décliné depuis 2020.

Parmi les actions majeures du Gouvernement, je mentionnerai en premier lieu la suppression du numerus clausus et de la première année commune aux études de santé (PACES). Ces réformes essentielles permettent de former davantage de professionnels de santé et apportent ainsi une réponse structurelle à la pénurie de médecins que nous subissons après des décennies d'immobilisme. Les perspectives sont là : le nombre de professionnels de santé formés augmentera de 15 % sur la période 2021-2025, mais, comme vous le savez, dix ans sont nécessaires pour former un médecin qui puisse apporter des soins à la population. De manière très concrète, en 2020-2021, uniquement pour la filière médecine, le nombre d'étudiants admis en deuxième année a progressé de 30 %.

Pour répondre dès à présent aux aspirations des jeunes médecins et faciliter leur installation, en particulier dans les territoires sous-denses, nous avons soutenu significativement le développement des modes d'exercice coordonné et des structures collectives. Ainsi, il existe aujourd'hui près de 1 900 maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) en fonctionnement et plus de 300 projets en cours, plus de 2 200 centres de santé, dont 450 pluriprofessionnels, et environ 700 projets de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).

Les hôpitaux de proximité sont un autre élément important de notre stratégie, pour assurer une offre de soins primaires dans tous les territoires. Nous avons ainsi redéfini leurs missions et stabilisé leur financement pour renforcer ces structures, conforter l'engagement des professionnels de santé à y participer et en faire un véritable trait d'union dans les territoires avec les médecins libéraux et les autres structures hospitalières et médico-sociales.

En outre, en vue de libérer du temps médical, nous avons prévu la création de 4 000 postes d'assistants médicaux. Plus de 2 000 contrats ont déjà été signés, ce qui permet la prise en charge de plus de 350 000 patients supplémentaires par les médecins traitants, dont plus de la moitié dans des territoires en tension.

Dans le cadre de la stratégie Ma santé 2022, nous avons prévu le recrutement de 400 médecins généralistes dans les zones les moins bien dotées ; parmi ces postes, 241 sont déjà pourvus ou le seront prochainement.

Nous avons également soutenu le développement de la télémédecine tout au long de la crise sanitaire et nous avons pris plusieurs mesures pour pérenniser cette dynamique dans le droit commun.

Presque du jour au lendemain, nous sommes passés de quelques centaines de téléconsultations par semaine à 1 million durant la crise. Nous souhaitons que cette pratique perdure car elle contribue à l'amélioration de l'accès aux soins dans tous les territoires.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Je mentionnerai également les engagements que nous avons pris dans le cadre du Ségur de la santé pour revaloriser les carrières des soignants dans les secteurs sanitaire et médico-social et pour soutenir l'investissement. Cet effort sans précédent dans l'histoire récente de la politique de santé contribuera massivement à conforter l'attractivité des métiers du soin, ainsi qu'à pérenniser et à moderniser les établissements et les équipements. Au total, plus de 3 000 établissements seront soutenus, dont plus de 50 % sont de petite taille.

Cet engagement en faveur de la santé et de l'accès aux soins est considérable et continue de se déployer dans tous les territoires.

L'accès aux soins est l'un des axes forts de la loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2022 que vous avez adoptée définitivement lundi 29 novembre, et qui prévoit en particulier de fluidifier la filière visuelle, de progresser en ce qui concerne l'accès direct à de nouvelles professions, et de généraliser la prise en charge de la télésurveillance par l'assurance maladie. En outre, cette loi instaure la prise en charge de séances chez le psychologue par l'assurance maladie, qui permettra d'améliorer l'accès au traitement des troubles psychologiques légers ou modérés dans tous les territoires. Ce sont de belles avancées que vous avez votées pour améliorer l'accès aux soins.

Ainsi, je vous remercie de nous offrir la possibilité de débattre de ce sujet majeur et de faire le point sur les actions menées par le Gouvernement. Néanmoins, nous considérons que ce texte ne propose pas les bonnes solutions pour y répondre dans les circonstances que nous connaissons actuellement.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

En effet, dans le cadre de cette proposition de loi, vous proposez de remettre en cause la liberté d'installation des médecins…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

C'est là votre réponse aux déserts médicaux. Vous proposez d'imposer la conclusion d'un contrat d'engagement de service public pour tous les jeunes médecins – je connais bien ce dispositif pour en avoir discuté avec eux – et d'instaurer un conventionnement sélectif en zone surdense, qui serait conditionné au départ d'un autre médecin.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

En réalité, il s'agit d'une fausse bonne idée, car les enjeux de démographie médicale s'apprécient sans frontière géographique. Et il n'est pas opportun de gérer une situation de tension généralisée par de nouvelles contraintes soudainement imposées, qui ne feraient qu'accroître les inégalités d'accès aux soins.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

S'agissant de l'approche territoriale des besoins de formation pour les étudiants dans le secteur de la santé, cette préoccupation est pleinement satisfaite par la réforme des études de santé et par la suppression du numerus clausus, qui permet de partir des besoins des territoires pour définir les capacités d'accueil des universités.

Nous regrettons aussi qu'il soit proposé de revenir sur le contrat de début d'exercice créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 pour proposer un dispositif unifié d'aide à l'installation, qui sécurise les premières années des jeunes médecins afin de leur permettre de se constituer une patientèle.

Quant aux missions des hôpitaux de proximité, il ne nous paraît ni opportun ni même possible d'y intégrer des activités de chirurgie et d'obstétrique, dont les exigences en termes d'organisation ne sont pas compatibles avec ces structures de proximité dédiées aux soins primaires.

Vous l'aurez compris, si nous partageons avec les auteurs de cette proposition de loi le souci de garantir un accès aux soins dans tous les territoires, nous divergeons quant aux solutions proposées.

La problématique de l'accès aux soins ne se réglera pas en un jour, en décrétant simplement un changement des règles applicables aux professions médicales. Au contraire, nous sommes convaincus que c'est en optant pour des mesures ambitieuses mais pragmatiques, accompagnées de moyens à la hauteur des enjeux, que nous pourrons faire œuvre utile sur ce sujet. Guidé par ces principes, le Gouvernement poursuivra son action résolue pour transformer notre système de santé et répondre aux attentes fortes de nos concitoyens, afin de garantir à chacun une prise en charge de qualité et accessible quel que soit son lieu de vie.

Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans la discussion générale, la parole est à M. Alain Bruneel.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Durant cette législature, nous avons avancé cinq propositions de loi concernant la mise en œuvre d'une politique de santé permettant de répondre à l'état d'urgence. Elles ont toutes été rejetées par votre majorité sans aucune discussion. Nous ne pouvons que le regretter.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sébastien Jumel, au nom de notre groupe, présente une sixième proposition de loi, pour une santé accessible à tous et contre la désertification médicale.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Celle-ci n'est pas à prendre ou à laisser, mais à discuter – tel est l'état d'esprit qui anime notre groupe.

Le rapport présenté par Sébastien Jumel témoigne d'une situation sous tension : les difficultés s'aggravent jour après jour ; le personnel soignant est épuisé, essoré, en burn-out ; le personnel et les moyens manquent cruellement ; l'égalité de soins dans les territoires est rompue.

Des perspectives sont tracées : nous vous invitons à emprunter le chemin de la discussion constructive. Il faut prendre le temps d'échanger, de poser des jalons pour éviter le départ de soignants épuisés et répondre à leurs attentes ainsi qu'à celles des patients.

Voici quelques témoignages recueillis lors de notre tour de France des hôpitaux commencé en 2018 : « La santé n'est pas une marchandise. Ce n'est pas le métier que j'ai appris. On doit toujours courir. On n'a plus le temps. On manque de personnel. On désorganise l'organisation. » Notre volonté était d'écouter les personnels, les directions, les syndicats, les collectifs et les patients. Nous avons pris en compte leur mal-être, mais aussi leurs propositions. C'est dans ce cadre que nous avons coécrit une proposition de loi.

Nous avions alors dressé un constat alarmant. En effet, cette tournée était annonciatrice de la catastrophe à venir. La crise sanitaire a mis en lumière les faiblesses de notre système de santé, mais le malaise ne date pas d'hier. L'alarme a sonné depuis bien longtemps ; cependant, malgré les alertes des soignants, les grèves et les SOS, ces dernières années, nous avons assisté à une destruction méthodique de notre système de soins.

Mme Caroline Fiat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les politiques consécutives de réduction des dépenses ont mis à genoux la santé, ce bien commun pourtant primordial. Alors que le droit à la santé est l'un des droits fondamentaux de tout être humain, le déclin constant de la démographie médicale rend l'accès aux soins de plus en plus difficile pour un grand nombre de nos concitoyens.

Décrocher un rendez-vous médical relève parfois du parcours du combattant, et ceci dans de nombreuses régions de notre pays. L'enquête récente publiée dans Marianne dresse un panorama effrayant des inégalités d'accès aux soins dans 314 villes. Cette situation plus que dégradée est insupportable.

Le temps d'attente moyen au niveau national pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologue est de cent cinquante-huit jours ; pour un rendez-vous chez un médecin généraliste, il est de vingt et un jours ; pour un rendez-vous chez un gynécologue, il est de cent un jours. Je terminerai avec un exemple qui souligne combien cette situation est aberrante : le temps d'attente moyen au niveau national pour obtenir un rendez-vous chez le pédiatre est de soixante-quatorze jours !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avec de tels délais, à coup sûr, des milliers de citoyens renonceront à se soigner. Une fracture sociale se creuse dans tout le territoire.

En 2017, 3,1 % des personnes de 16 ans ou plus vivant en France métropolitaine, soit 1,6 million de personnes, ont renoncé à des soins médicaux, d'après l'enquête « Statistiques sur les ressources et les conditions de vie » de l'INSEE.

Quand on prend en compte les caractéristiques des personnes interrogées, telles que l'âge, le sexe, le diplôme ou la situation sur le marché du travail, les personnes touchées par la précarité ont trois fois plus de risques de renoncer à des soins que les autres. En outre, dans une zone très sous-dotée en médecins généralistes, le risque de renoncement à ces mêmes soins est huit fois supérieur à celui du restant de la population.

Ces graves difficultés risquent malheureusement de ne pas s'arranger de sitôt : en mars 2021, la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) a publié un dossier sur la démographie récente et à venir pour les professions médicales et pharmaceutiques. Selon cette étude, le nombre de médecins généralistes stagnera jusqu'en 2030 tandis que les besoins de soins d'une France vieillissante croîtront.

Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour vous alerter sur la situation des étudiants en médecine. Leur parcours demande beaucoup d'investissement et de sacrifices. Force est de constater qu'aujourd'hui ces jeunes se retrouvent face à une réforme injuste. Les capacités d'accueil devaient augmenter, mais les promesses ne sont pas au rendez-vous.

Le Gouvernement a décidé de mettre en place une réforme visant à modifier le profil des étudiants en transformant la PACES en licence de santé. Or, si le but de la réforme est louable, sa mise en place est catastrophique. C'est la douche froide !

J'ai reçu de nombreux témoignages de détresse. Marie, étudiante en première année de médecine, me disait : « Aujourd'hui, j'ai 19 ans. Je me retrouve face à un mur : si j'échoue, je ne sais pas ce que je vais faire car il n'y a que la santé qui m'intéresse. Je suis désemparée. C'est psychologiquement très difficile de se dire que, peut-être, on fait tout ça pour rien ! En cas d'échec, certains étudiants partiront se former à l'étranger ; moi, je n'en ai pas les moyens ; il faudra donc que je me résigne à abandonner ma vocation et mes rêves. »

Comme vous le constatez, les futurs médecins sont abattus avant même d'être diplômés. Anxiété, dépression, épuisement : leur santé est en danger.

Une nouvelle fois et par le biais de la journée parlementaire qui lui est réservée, mon groupe propose une loi pour une santé accessible à tous et contre la désertification médicale. Ce texte vise à instituer un ensemble de mesures indispensables pour lutter contre la pénurie, mais aussi pour améliorer l'accès aux soins de toute la population française, sans exception, et parvenir ainsi à une plus grande justice sociale en matière de santé.

L'heure est grave. Saisissez-vous de cette proposition. L'accès aux soins est une priorité nationale. Il faut agir contre la désertification médicale.

L'urgence, c'est maintenant. La réponse est ici, alors ne ratez pas le coche. Redessinons ensemble le paysage sanitaire.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – Mme Caroline Fiat applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes réunis aujourd'hui afin d'examiner la proposition de loi pour une santé accessible à tous et contre la désertification médicale.

C'est avec beaucoup d'humilité que notre groupe aborde l'examen de ce texte, tant les difficultés d'accès aux soins sont réelles dans nos territoires. Nous sommes nombreux à nous être mobilisés pour l'amélioration de l'accès aux soins mais, si nous partageons votre constat au sujet des difficultés rencontrées sur nos territoires, nous n'adhérons pas aux solutions que vous proposez dans ce texte : exerçant, en tant que parlementaires, notre mandat dans un même objectif, celui d'améliorer la vie des gens, nous le faisons cependant parfois – souvent – avec des visions différentes.

Nous avons hérité d'un système de santé à bout de souffle, après plus de vingt ans de contraintes financières et l'application d'un numerus clausus qui ont considérablement pesé sur notre démographie médicale.

Dès l'arrivée au pouvoir de notre majorité, de nombreuses mesures, que je ne pourrai pas toutes présenter ici, ont été prises pour améliorer l'accès aux soins : plus de professionnels formés, plus de coopération entre professionnels, plus de temps médical redonné aux médecins.

Avec la fin du numerus clausus, le nombre d'étudiants en médecine a augmenté de 19,4 % en 2021 – cela ne s'était pas vu depuis cinquante ans !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'objectif du doublement du nombre de maisons de santé pluriprofessionelles et de centres de santé est atteint. Il faut poursuivre le mouvement.

Nous avons, depuis le début de la législature, et encore cette semaine, proposé de nombreuses avancées en matière de délégation de tâches et de pratiques avancées – je pense notamment à la possibilité donnée aux orthoptistes de réaliser des bilans visuels, à l'accès direct aux kinésithérapeutes ou aux orthophonistes, que nous sommes en train d'expérimenter, ou encore à l'autorisation de primo-prescription pour les infirmières en pratique avancée. Toutes ces mesures libèrent du temps pour les médecins et améliorent l'accès aux soins ; là encore, il faut poursuivre.

Vous proposez la territorialisation de la formation médicale, dans le but d'augmenter le nombre de médecins formés en fonction des besoins locaux. Or la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, défendue par notre majorité, a déjà supprimé le numerus clausus ; elle a surtout posé pour principe que le nombre d'étudiants serait fixé sur proposition des universités, après accord des agences régionales de santé pour s'adapter aux territoires et aux capacités de formation.

Les articles 2 et 3 soumettent l'installation des médecins à des mesures coercitives – je ne doute pas que nous aurons un débat intéressant sur le sujet. L'article 2 propose, dans une démarche politique, d'établir un service national de santé obligatoire et rémunéré pour les étudiants : nous n'y sommes pas favorables.

Si, au premier abord, l'idée du conventionnement sélectif inscrite à l'article 3 peut paraître séduisante, nous pensons qu'en réalité elle aggraverait la situation, et ce pour trois raisons principales.

En premier lieu, compte tenu du trop faible nombre de médecins, elle obligerait les patients à consulter un médecin non conventionné et donc à supporter la contrainte financière du non-remboursement.

Ensuite, elle risque d'inciter les étudiants en médecine à choisir d'autres spécialités ou d'autres modes d'exercice : vous aurez alors mis fin à la médecine générale libérale.

Enfin, les pays qui se sont engagés dans cette voie ont fini par y renoncer, devant l'inefficacité de la mesure et l'aggravation de la situation – ce sont les faits.

Quant à l'article 6, il prétend élargir l'activité des hôpitaux de proximité à la chirurgie ou à l'obstétrique. C'est une injonction irréaliste ! Nous défendons, nous, un système qui offre à chaque Français une prise en charge de proximité, ce qui passe, entre autres, par la valorisation et le renforcement de l'offre de soins primaires.

C'est dans cette optique que nous avons transformé l'organisation de la médecine de ville, avec la mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé et la labellisation des hôpitaux de proximité. Nous pensons en effet que, pour préserver la qualité de la prise en charge, il faut offrir une réponse hospitalière graduée, en libérant des moyens, en changeant le mode de financement de ces établissements, en modifiant le mode de gouvernance et en impliquant les professionnels de ville, qui peuvent dorénavant soigner leurs patients au sein de l'hôpital de proximité. Donc, oui, nous avons une ambition pour ces hôpitaux !

Nous pensons que nous devons continuer à faire preuve de volontarisme, continuer à simplifier la vie des soignants, continuer à développer la délégation de tâches, la pratique avancée et les coopérations, continuer à renforcer les incitations à l'installation dans les zones sous-dotées. Mais nous pensons que la question de l'accès aux soins ne se limite pas à l'accès aux médecins, sur lequel se concentre votre proposition de loi ; il y a bien d'autres mesures innovantes à prendre !

Vous poursuivez avec ce texte un objectif primordial : améliorer l'accès aux soins, mais les réponses que vous apportez sont soit démagogiques, soit inefficaces, et elles aggraveraient la situation. En conséquence, comme en commission, nous proposerons la suppression des articles.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La santé est un sujet majeur, et l'accès aux soins un droit pour tous. Et pourtant ! Il y a une quarantaine d'années, apparaissait en France un phénomène de désertification médicale, qui n'a cessé, depuis lors, de s'intensifier et de toucher de plus en plus de territoires. La situation actuelle est le résultat d'une tendance de fond. Les médecins de campagne ne trouvent plus de remplaçants, ce qui est particulièrement grave, puisque le besoin augmente, en raison du vieillissement de la population.

Plusieurs raisons expliquent cette désertification, parmi lesquelles la féminisation de la profession, qui a induit une augmentation de la pratique à mi-temps, ce que n'a pas anticipé le numerus clausus. La médecine généraliste a parallèlement perdu de son attrait pour les étudiants, qui s'orientent de plus en plus vers des spécialisations : aujourd'hui, la médecine générale fait partie des dernières spécialités choisies.

Une étude d'octobre 2020 de l'observatoire Place de la santé de la Mutualité française dresse un constat alarmant, révélant que les déserts médicaux se sont multipliés ces dernières années et qu'ils ne cessent de croître.

La désertification médicale est l'un des soucis majeurs de nos élus locaux. Tous se battent pour trouver des solutions, bien souvent accompagnés par les départements et les régions : maisons de santé, médecins salariés, bus itinérants : à chacun sa méthode. Aujourd'hui, plus que jamais, nous faisons face à une urgence sanitaire de grande ampleur, et nous en sommes tous conscients, d'autant plus que le covid-19 a mis en exergue, une fois de plus, toutes les difficultés auxquelles est confronté notre système de santé.

C'est un sujet dont la commission des affaires sociales s'est emparée depuis 2017. Tous groupes politiques confondus, nous nous accordons sur le même constat. Certes, la présente proposition de loi, présentée par nos collègues du groupe GDR, a le mérite de soulever à nouveau l'ensemble des problématiques liées à cette question de santé publique.

Elle nous donne l'occasion de nous exprimer et de rappeler la détresse de nombreux Français, dans l'impossibilité d'accéder aux soins élémentaires et renonçant de ce fait à un suivi médical régulier, sans parler des nombreuses femmes ayant difficilement accès à une sage-femme ou à une maternité, ou des services d'urgence de nuit qui ferment.

Je partage donc, sur le fond, le diagnostic de nos collègues. Cependant, la méthode choisie, si elle peut paraître séduisante, me semble inappropriée, même si vouloir mettre à disposition des territoires de nouveaux outils leur permettant de lutter contre la désertification médicale est une ambition louable.

Ainsi la territorialisation des capacités d'accueil des formations en médecine, l'obligation du contrat d'engagement de service public, l'instauration d'un conventionnement sélectif à l'installation risquent-elles de créer un catalogue de contraintes administratives difficilement opérationnelles et qui, à l'usage, pourraient, malheureusement, se révéler contre-productives.

Premièrement, en ce qui concerne la territorialisation des capacités d'accueil des formations en médecine, la réalité matérielle et humaine nous rappellera vite à l'ordre, qu'il s'agisse du manque de professeurs, de locaux, voire de tuteurs.

Que penser ensuite de l'obligation de contrat d'engagement de service public ? En effet, après de longues années d'études et beaucoup de sacrifices, les jeunes médecins souhaitent désormais avoir le choix du lieu de leur installation, ils souhaitent pouvoir concilier vie privée et vie professionnelle, comme tous les citoyens, et leur imposer cette obligation aurait l'effet inverse à celui que vous escomptez en diminuant encore le nombre d'entre eux qui s'orientent vers la médecine libérale.

On ne peut pas non plus arguer du fait que les étudiants devraient à l'État quelques années de leur carrière, au motif que ce dernier leur a permis d'effectuer leurs études : c'est le cas pour la plupart des cursus universitaires. Rappelons également que les étudiants en médecine sont certes payés à partir d'un certain niveau, mais à moindre coût. Pourtant, sans nos internes, les hôpitaux ne fonctionneraient pas.

Enfin, l'élargissement de l'activité des hôpitaux de proximité ne doit pouvoir se faire qu'à titre dérogatoire, sur autorisation délivrée par le directeur de l'ARS, et dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ; en aucun cas, elle ne doit devenir systématique.

Toutes ces nouvelles contraintes pourraient effrayer les médecins généralistes et constituer un frein à leur installation en cabinet. Nous considérons que faciliter les conditions d'accès aux études de médecine et améliorer l'attractivité de la profession, en se recentrant sur la médecine de ville, c'est-à-dire de proximité immédiate, constituerait un ensemble de mesures plus efficaces.

Si le groupe Les Républicains est donc d'accord sur le fond de la proposition de loi, il n'en accepte pas la forme et votera donc contre son adoption.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui a pour ambition d'endiguer le phénomène de désertification médicale et de réduire les difficultés d'accès aux soins, à travers des mesures radicales et coercitives. Celles-ci consistent, par exemple, à rendre le contrat d'engagement de service public obligatoire pour tous et à imposer un conventionnement sélectif dans les zones sous-dotées.

Nous partageons tous le même constat : il existe de véritables disparités territoriales d'accès aux soins et aux professionnels de santé. Nous comprenons donc le désarroi de beaucoup de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais remercier Sébastien Jumel et le groupe communiste d'avoir mis en lumière le rôle essentiel de la médecine libérale de ville, pilier de notre système de santé de proximité.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Médecins généralistes ou spécialistes, infirmières, kinésithérapeutes libéraux, tous se dévouent quotidiennement au service de nos concitoyens, dans les villes, bourgs et villages. Ils travaillent souvent deux fois 35 heures par semaine, encombrés de tâches paperassières et administratives – souvent de notre fait –, sans plus avoir les moyens de salarier une assistante ou une secrétaire. Ils sont pourtant le premier recours aux soins pour nos concitoyens.

Je voudrais vous faire réfléchir sur un chiffre qui, à lui seul, résume la problématique dont nous débattons ce matin : seuls 8 % des jeunes médecins s'installent en libéral !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Il a raison, monsieur le rapporteur !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous l'avez d'ailleurs, monsieur le rapporteur, souligné vous-même dans votre rapport : « L'exercice en libéral tend à être de moins en moins privilégié par les jeunes médecins. »

Or les obliger à s'installer où ils ne veulent pas risque de réduire drastiquement le taux déjà très faible que j'ai cité, et les orientera vers des emplois salariés qui, pour le coup, ne manquent pas – plus de 3 000 postes vacants dans les hôpitaux.

Les exemples étrangers confirment d'ailleurs le contournement des mesures comme celles que vous proposez : en Allemagne ou au Canada par exemple, les médecins se sont installés à la limite des zones désertiques. De plus le véritable risque est d'aboutir à un déconventionnement massif, qui accroîtra les inégalités financières d'accès aux soins !

L'article 3 propose des mesures coercitives s'appliquant non seulement dans les zones sous-dotées – qui sont pourtant le cœur de la problématique –, mais aussi dans les zones correctement pourvues !

Dans l'offre de soins d'un territoire coexistent deux systèmes : une médecine administrée, hospitalière, et une médecine de ville, libérale. Or c'est bien cette dernière qui doit être au cœur de nos préoccupations.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si le Ségur a permis une respiration salutaire pour l'hôpital public, la médecine libérale n'a pas eu droit à la même considération. C'est pourtant dès à présent qu'il nous faut en redynamiser l'attractivité, qui s'effrite d'année en année.

L'objectif est donc de mieux considérer la médecine libérale.

M. Bruno Joncour et M. Michel Fanget applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est ce que font nos collègues communistes, qui la placent au cœur de ce texte. Gageons que cela est un bon signal !

Dès lors, les réponses sont variées, diverses, et devront être adaptées. Il convient d'accompagner pleinement l'installation des futurs médecins actuellement étudiants, de nous adapter à leurs souhaits personnels et familiaux, et de leur faire découvrir les territoires sous-dotés.

Ce n'est pas une vue de l'esprit : des exemples concrets existent. J'en ai déjà parlé, d'ici l'an prochain, quinze jeunes médecins généralistes formés à Lyon s'installeront en Ardèche après avoir découvert ce département lors de gardes au sein de casernes de pompiers. Cela peut fonctionner !

En outre, il faut favoriser, comme nous l'avons fait depuis trois ans, les protocoles de coopération, la pratique de groupe, ainsi que l'exercice coordonné et pluridisciplinaire, sous la forme de centres de santé, de maisons de santé, d'équipes de soins primaires ou encore de CPTS. La création d'assistants médicaux est également un succès, que nous devons amplifier.

Cette dynamique se poursuivra à condition de mettre des outils numériques simples à disposition des professionnels : je pense à la télémédecine, au télésuivi. En effet, le temps médical des médecins est le même qu'il y a quarante ans. Il faut donc nous réinventer pour les dix prochaines années, le temps que la fin du numerus clausus produise ses effets. Cela passe par la montée en compétences de toutes les professions paramédicales, au travers de ce que l'on appelle la théorie de l'escalier.

La situation dans laquelle nous sommes est la conséquence des choix faits depuis trente ans par des gouvernements de droite et de gauche, qui ont opéré une gestion comptable de la sécurité sociale.

En tout état de cause, si le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés reconnaît le travail fourni par M. le rapporteur, nous ne soutiendrons pas cette proposition de loi.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La santé fait partie des principales préoccupations de nos concitoyens et la question de l'accès aux soins en est l'un des éléments essentiels. La proposition de loi apparaît donc d'une grande actualité.

De nombreux rapports, études et propositions ont été faits depuis plus de dix ans dans ce domaine. Des mesures ont été prises, souvent incitatives, parfois contraignantes. Toutefois, jusqu'ici, peu de choses ont eu un effet concret pour toutes celles et tous ceux qui n'ont pas accès à un médecin généraliste, qui ne disposent pas d'un médecin traitant, ou pour qui la question se posera dans le futur.

La proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui vise, au travers de quelques articles, à bâtir un cadre cohérent pour l'installation des médecins en fonction des besoins de santé.

L'article 1er tend à ce que les capacités d'accueil des formations en deuxième et troisième années du premier cycle garantissent une « répartition optimale des futurs professionnels de santé sur le territoire au regard des besoins de santé ». L'abolition du numerus clausus au profit du numerus apertus ne signifiant pas que le nombre d'étudiants formés sera illimité, ceux-ci devraient être répartis en fonction des besoins.

Si cet article ne porte que sur les capacités de formation, il n'en demeure pas moins que la formation au lit du patient suppose des moyens hospitaliers, des médecins déjà formés, des soignants travaillant de manière collective, ainsi que des médecins généralistes et des spécialistes de ville prêts à accueillir leurs jeunes confrères et consœurs et à les motiver. Cela doit faire l'objet de réflexions et d'une mobilisation de tous les acteurs pour que l'article soit opérant et qu'il parvienne à mettre en adéquation, comme il entend le faire, les contraintes du cadre de formation avec les besoins d'une population dont les conditions d'accès à un médecin sont de moins en moins égales suivant le lieu de vie.

L'article 2 tend à rendre obligatoire la signature d'un contrat d'engagement de service public par les étudiants en médecine et, s'il maintient le versement d'une allocation, il pose le principe d'une obligation de service dans les zones où l'offre de soins n'est pas considérée comme raisonnable et normale.

À cet égard, le texte prend insuffisamment en compte la situation actuelle des internes, ce qui constitue un angle mort. Est-il besoin de rappeler que les jeunes médecins, après six ou sept années d'études, doivent accomplir leur internat dans un centre hospitalier, et ce, pendant trois à cinq ans en fonction des spécialités choisies ? Leur présence hebdomadaire varie de soixante à cent heures, pour un salaire de 1 500 euros mensuels. Nous devons donc avoir conscience qu'une part substantielle de l'activité de soins des établissements de santé est effectuée avec et par les internes. Nos centres hospitaliers fonctionnent – tournent – grâce à des médecins payés comme des stagiaires et ne pas y faire référence, ne pas traiter de cette question ici, revient à faire comme si les actuels étudiants, pour leur grande majorité, choisissaient la facilité en s'installant, alors même qu'ils ont déjà largement contribué à l'accueil médical et dispensé des soins techniques au bénéfice de nos concitoyens – cet élément est important.

S'agissant de l'article 3, il vise à instaurer un conventionnement sélectif pour les médecins généralistes et spécialistes, aux termes duquel, en zone surdense, un médecin libéral ne sera conventionné que s'il en remplace un autre. Cela créerait une rupture avec le système existant, appelée de leurs vœux par certaines institutions de contrôle et de conseil. Un tel mécanisme reviendrait ainsi à flécher l'installation des médecins vers les zones sous-dotées.

Si ces dispositions sont pertinentes dans leur principe, nous ne pouvons néanmoins, une fois encore, faire l'économie d'une réflexion sur l'installation et la pratique des professionnels médicaux. Nous ne pouvons en effet occulter le risque réel d'installations non conventionnées, sachant que le nombre de médecins ne fait pas tout : pour certaines spécialités, la prescription et la réalisation d'actes non pris en charge, ou peu pris en charge, par la sécurité sociale constitue une part importante de l'activité.

L'article 4, quant à lui, créerait un cadre contractuel commun de financement des centres de santé par les ARS.

Enfin, les articles 5 et 6 posent des jalons dans la définition de l'offre hospitalière, en fixant une durée de transport maximale pour l'accès aux soins, et dans la constitution d'objectifs s'agissant de l'offre de soins spécialisés.

Ce texte a le mérite, qu'il convient de souligner, de proposer plusieurs mesures visant à créer un cadre de référence : il constitue une invitation à avancer. Je l'ai dit, il conviendrait de l'accompagner de dispositions destinées à assurer la qualité de la formation et une diversification de l'accueil en leur sein et grâce à elle, d'une meilleure reconnaissance du travail des internes et de leur investissement, d'une réflexion sur les soins et actes à réaliser en priorité afin d'améliorer la santé de nos concitoyens, et de propositions alternatives sur l'installation des médecins et leurs conditions d'exercice.

Eu égard à la convergence des dispositions qu'elle contient avec certaines des mesures que nous préconisons, le groupe Socialistes et apparentés apportera son soutien à cette proposition de loi, même si, je le répète, il conviendrait d'aller plus loin.

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La désertification médicale concernerait aujourd'hui entre 6 et 8 millions de personnes. Les Français sont inquiets pour leur santé et celle de leurs proches : préoccupés par le creusement des inégalités territoriales et sociales dans l'accès aux soins, ils nous rapportent leur désarroi face à une pénurie de médecins en constante aggravation. De fait, les délais pour obtenir un rendez-vous s'allongent. Alors que près de 9 % des assurés de plus de 16 ans n'ont pas de médecin traitant, l'accès aux spécialistes est encore plus disparate, avec un rapport de un à huit, voire de un à vingt-quatre pour les pédiatres.

Face à cette détérioration de l'offre et compte tenu du vieillissement de la population, les demandes en soins apparaissent colossales et ne le seront que davantage demain : nous nous devons d'anticiper ces besoins.

C'est après la visite de plus de 150 hôpitaux et EHPAD que M. Jumel, rapporteur de la proposition de loi au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, a tenté d'apporter des solutions aux préoccupations des Français, sur lesquelles nous sommes tous les jours interpellés. Son très riche rapport ajoute des éléments précis et sourcés sur la désertification médicale, éléments tout à fait essentiels à la réflexion sociétale que nous devons entamer sur cette question.

Phénomène très occidental, la désertification médicale questionne notre rapport aux autres et à la vieillesse, ainsi que nos modes de vie. Le système de santé doit être réfléchi en cohérence avec l'évolution de notre société.

Avec le plan de 2017 pour l'égal accès aux soins dans les territoires, et surtout avec la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, des pistes ont été explorées, telles que la suppression du numerus clausus au profit d'un numerus apertus, l'exercice coordonné, ou encore le stage obligatoire en ambulatoire pour les étudiants en médecine – autant de solutions dont nous ne pouvons encore analyser les effets.

Par ailleurs, le déploiement des infirmiers en pratique avancée renforce la médecine généraliste, grâce à une collaboration étroite avec les médecins. De la même manière, la création et l'aide à l'installation de 4 000 assistants médicaux contribuent au soutien de l'exercice libéral, dégageant les médecins de tâches administratives et de gestes non médicaux chronophages.

Nous savons néanmoins que de nombreux défis se dressent encore devant nous pour permettre aux Français de bénéficier d'un meilleur suivi médical. Cela étant, si le groupe Agir ensemble partage l'ambition de cette proposition de loi, nous n'adhérons pas à l'ensemble des solutions qu'elle contient.

Nous ne sommes pas favorables à la suppression, prévue à l'article 1er , de la prise en compte des capacités de formation dans les objectifs pluriannuels d'admission : il y va de la qualité de la formation et de l'accueil des étudiants en santé. Alors que les effectifs de médecins sont insuffisants pour couvrir les besoins de l'ensemble du territoire, votre solution, en plus d'être très coercitive, ne nous semble pas la mieux adaptée à la démographie médicale actuelle. Nous ne voterons donc l'article 1er que sous réserve de l'adoption de l'amendement que nous avons déposé.

Avec mes collègues du groupe Agir ensemble, je défendrai également deux amendements visant à ajouter deux articles à la proposition de loi, car une politique d'attractivité réelle doit être menée dans les territoires. Le premier vise à renforcer l'information du Parlement sur le développement des stages en ambulatoire et le second à encourager la signature de contrats d'engagement de service public.

À titre personnel, je voterai l'article 2, surtout pour son application dans les zones sous-denses, car nous savons que la majorité des étudiants choisissent d'exercer là où ils ont étudié, ayant souvent parallèlement commencé à construire leur vie familiale. Cet article aurait pour effet d'ouvrir davantage de recrutements, en particulier dans le cadre de passerelles, pour des étudiants déjà en activité professionnelle, mais dont la situation financière est précaire.

En revanche, le groupe Agir ensemble se montre réservé quant aux articles 3 à 6.

Si nous comprenons l'objectif de l'article 3, qui vise à réguler l'installation en médecine de ville pour rééquilibrer les effectifs de médecins libéraux en fonction des besoins de santé sur le territoire, nous y sommes opposés.

Premièrement, le dispositif ne pourrait fonctionner que pour les professions dites dynamiques, dont les effectifs sont suffisamment importants pour couvrir l'ensemble du territoire. Or il n'existe plus d'endroit en France où les médecins sont trop nombreux.

Deuxièmement, une telle mesure pourrait conduire les médecins à opter pour un exercice non conventionné et donc non remboursé par la sécurité sociale, ce qui créerait une médecine à deux vitesses.

Enfin, il nous paraît inopportun d'introduire quelque mesure que ce soit qui n'aurait pas été élaborée en concertation avec les professionnels. On ne peut espérer assurer un exercice de qualité quand on contraint : la désaffection pour la médecine de ville n'en serait que plus grande.

Ainsi voterons-nous en faveur de l'article 1er sous réserve de l'adoption de notre amendement, mais contre le reste du texte. Cela étant, je ne doute pas que nos débats permettront d'identifier des outils plus pertinents pour lutter contre la désertification médicale, enjeu auquel nous devons collectivement tenter d'apporter une réponse.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mes collègues du groupe UDI et indépendants et moi-même soutenons l'initiative du groupe communiste et de Sébastien Jumel consistant à proposer des outils de régulation de l'installation des médecins à travers le territoire national.

Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-I et GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avec, entre autres, Yannick Favennec-Bécot, Christophe Naegelen et Pierre Morel-À-L'Huissier, nous soutenons ce qu'on appelle le principe de la convention sélective.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Siégeant à l'Assemblée nationale depuis trois législatures, j'ai toujours soutenu, comme vous, madame la ministre déléguée, les mesures incitatives, qu'il s'agisse de la prime à l'installation, de la défiscalisation pendant huit ans dans les zones de revitalisation rurale, des contrats locaux de santé, des maisons de santé pluridisciplinaires, des centres de santé, de la télémédecine, ou encore des réseaux de soins. Or nous voyons bien que les mesures de ce type ne suffisent plus…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et qu'il est nécessaire de leur adjoindre des mesures de régulation.

« Très bien » sur les bancs du groupe UDI-I.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je sais gré au Gouvernement, madame la ministre déléguée, d'avoir supprimé le numerus clausus, qui limitait le nombre d'étudiants en médecine, au profit du numerus apertus qui, au contraire, l'ouvre et doit, en théorie, coller à la réalité des besoins des régions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est néanmoins regrettable et même invraisemblable qu'un pays comme la France, qui dispose d'outils statistiques et de planification à tous les étages – nous avons la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), les agences régionales de santé, l'ordre des médecins – ait organisé la pénurie de médecins dans les territoires – disons les choses comme elles sont, car c'est vraiment notre sentiment.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je comprends la colère des jeunes étudiants en médecine lorsqu'ils voient des députés faire des propositions de régulation ou de conventionnement sélectif. Mais il faut se mettre à la place des députés qui vivent dans des territoires où les habitants n'ont plus de médecin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'entends dire, çà et là, qu'il n'y aurait pas de zones surdotées. Mais, dans la région où je vis, la Bretagne, il y a des territoires où, dans la même journée, vous pouvez obtenir trois rendez-vous avec un médecin généraliste et, dans le même temps, d'autres dans lesquels les habitants doivent attendre trois semaines.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les détracteurs des mesures de régulation nous disent qu'elles poseront un problème aux patients, lesquels continueront de se rendre chez les médecins déconventionnés. À cela, je répondrai simplement que, dans les zones sous-dotées, les patients n'auront pas les moyens de consulter des médecins non conventionnés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On nous objecte également que nous allons détourner les médecins de la médecine générale. Je reconnais qu'après avoir créé le numerus apertus, nous devons désormais nous poser la question du parcours des étudiants.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pourquoi les dix années d'études de médecine sont-elles un parcours du combattant pour ces jeunes ? Pourquoi leur inflige-t-on une telle pression, au point que l'on croirait que nous voulons les écœurer avant qu'ils ne soient arrivés au bout de leurs dix années de médecine ? Je pense au contraire que nous devons choyer nos étudiants. C'est un trésor d'avoir, en France, des jeunes qui veulent embrasser une carrière de médecin. Il faut les accompagner et les encourager.

J'ajoute qu'il ne doit pas y avoir de tabou concernant les mesures de régulation et de conventionnement sélectif, y compris s'agissant de la rémunération des médecins. À titre personnel, je serais favorable à ce que les médecins dont l'installation est conventionnée soient mieux rémunérés.

Le département d'Ille-et-Vilaine, où je vis, offre un très bel exemple de la problématique de l'installation des médecins : comme une bonne partie du territoire métropolitain et ultramarin, il dispose d'une offre socio-éducative de qualité ; mais, dès que l'on s'éloigne à plus de trente minutes de Rennes, il n'y a plus de médecins,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…alors que l'on y trouve tous les services publics et une offre de formation performante. Les conjoints de médecins qui souhaiteraient s'y installer trouveraient tout ce qui est nécessaire à une bonne qualité de vie.

Oui à la régulation, oui au conventionnement sélectif : dans ce domaine, il faut autant de liberté que possible et autant de régulation que nécessaire.

Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-I, Dem et GDR. – Mme Catherine Daufès-Roux applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je remercie M. le rapporteur et le groupe GDR d'avoir inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée une proposition de loi pour une santé accessible à tous et contre la désertification médicale. En effet, le malaise au sein de nos hôpitaux est la partie visible d'un malaise plus grand encore qui traverse et menace la stabilité de notre système de santé dans son intégralité. Je veux parler du déséquilibre persistant de l'offre de soins et de la répartition très inégale des médecins sur le territoire.

J'insiste là-dessus : la lutte contre la désertification médicale qui s'aggrave est un enjeu de santé publique, mais aussi de cohésion sociale.

C'est un enjeu de santé publique pour une population qui augmente, qui vieillit et souffre de plus en plus souvent de maladies chroniques. Dans certains territoires, il faut parfois attendre vingt jours pour obtenir un rendez-vous chez un généraliste. Pour les consultations chez un spécialiste, les délais augmentent : jusqu'à cinq mois d'attente pour un ophtalmologue. C'est un vrai problème en termes de soins, de dépistage et de pertes de chances pour ces patients. C'est aussi un problème pour tous les professionnels de santé confrontés à une charge de travail très importante, laquelle explique en partie le désintérêt des étudiants et des étudiantes pour l'exercice de la médecine générale en libéral.

C'est aussi un enjeu de cohésion sociale, car l'accès aux soins est remis en question par des inégalités territoriales croissantes qui dépassent cette seule problématique. Bien souvent, un désert médical est un territoire dans lequel l'accès aux transports, à la culture, à l'éducation ou encore au numérique est également très difficile, voire inexistant.

Outre ces inégalités territoriales, l'accès aux soins est aussi miné par des inégalités sociales qui, souvent, se recoupent. Le renoncement aux soins frappe en effet davantage les personnes pauvres et aux conditions de vie précaires. Ce renoncement est insupportable dans un pays qui consacre la protection de la santé dans sa Constitution. Ne sous-estimons pas le rôle de la désertification médicale dans le sentiment de plus en plus grand de fracture sociale et de défiance envers les institutions publiques.

Ces constats – que je sais partagés par tous ici – étant posés, ils nous imposent désormais d'agir. Dire que les majorités successives et que nos politiques publiques ne se sont pas emparées de la question serait faux, mais affirmer que ces dernières ont été un succès n'est pas vrai non plus. Tous les dispositifs incitatifs à l'installation proposés ces dernières années ont échoué à inverser la tendance. L'urgence de la situation et le constat de cet échec nous obligent à faire davantage et à envisager la mise en place de mesures de régulation comme il en existe actuellement pour d'autres professions. Il nous faut trouver un équilibre entre la liberté d'installation des médecins, d'une part, et la protection de la santé garantie à chacun, d'autre part.

Le débat s'est trop longtemps cristallisé sur l'impression que ces deux enjeux étaient irréconciliables, mais je suis persuadée qu'une troisième voie est possible. Vous l'avez trouvée, monsieur le rapporteur : le conventionnement sélectif est une réponse. Le relèvement du numerus clausus, désormais appelé numerus apertus, était indispensable, mais il ne suffira pas ; j'en veux pour preuve le fait que le nombre de médecins inscrits au Conseil national de l'Ordre ne fait qu'augmenter, et que la désertification médicale s'aggrave malgré tout.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Agir sur la seule augmentation ne suffira pas si nous ne traitons pas également de la répartition.

Il nous faut aussi soutenir les collectivités territoriales qui s'impliquent dans la déclinaison des politiques de santé. Depuis des années, elles ont joué bien plus que leur rôle pour apporter des réponses adaptées à chaque territoire. Leur action en faveur de la création de centres de santé a porté ses fruits, notamment dans certains territoires ruraux. Leur action correspond à l'évolution de la profession, qui se tourne de plus en plus vers le salariat. Notre groupe soutiendra donc la proposition d'une contractualisation entre l'ARS et les collectivités. De la même manière, nous soutiendrons la proposition de déterminer l'offre de formation à partir des seuls besoins en santé des territoires. En effet, ce sont ces derniers qui doivent définir en priorité notre politique de santé.

Enfin, au-delà des mesures d'urgence, il est nécessaire d'investir massivement dans les études de santé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le groupe Libertés et territoires se réjouit d'avoir à nouveau ce débat si essentiel qu'est celui de l'égal accès aux soins. Certains membres ont exprimé des réticences sur plusieurs dispositions de la proposition de loi, mais la grande majorité y est très favorable. L'urgence de la situation nous impose d'agir. Les solutions de régulation sont les seules qui n'ont pas encore été essayées : ne les balayons pas, une nouvelle fois, d'un revers de la main.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est avec une très grande joie et une grande fierté que je prends la parole pour soutenir la proposition de loi du groupe communiste. Les inégalités d'accès aux soins n'ont fait que s'accroître ces dernières années – je vous épargnerai la liste des chiffres qui attestent les écarts considérables d'un territoire à l'autre –, mais il n'est jamais trop tard pour agir.

Voici une proposition de loi courageuse et indispensable. Courageuse, car je sais que de nombreux médecins sont très attachés à la liberté d'installation – j'en ai moi-même fait les frais. Indispensable, pourtant, car la liberté des uns trouve ses limites lorsqu'elle compromet la liberté de tous, à savoir celle d'accéder aux soins le plus rapidement possible sur l'ensemble du territoire. Peut-on vraiment tolérer que l'on compte, dans certains territoires, 377 médecins pour 100 000 habitants quand, dans d'autres, on n'en recense que 243, comme en Picardie ?

Malgré la pénurie de médecins, ne perdons pas de vue l'idéal d'égalité et de partage qui devrait être le socle de notre République. Le conventionnement sélectif a déjà fait ses preuves à de nombreuses reprises pour réduire les écarts de densité. Les pharmaciens, les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes, les sages-femmes, les chirurgiens-dentistes et les orthophonistes le font ; je suis sûre que les médecins en seront tout aussi capables.

Sourires sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je rassure les praticiens qu'il resterait à convaincre : le conventionnement, s'il est mis en œuvre, s'appliquera aux nouveaux médecins, et seulement dans les zones suffisamment dotées. Il ne s'agit pas de déplacer, tels des pions, les médecins enracinés dans un territoire depuis des années.

La proposition de loi va plus loin pour améliorer l'accès aux soins. Elle propose de partir des besoins réels en médecins, et non des contraintes financières, pour former de nouveaux médecins chaque année. Elle permet surtout de faire de la fin du numerus clausus autre chose qu'une simple incantation. Pour moi, qui viens d'une région où les effectifs de la faculté de médecine n'ont augmenté que de 1 % l'an passé, faute de mesure contraignante de hausse du numerus clausus,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…je me félicite qu'un article en ce sens puisse être débattu dans l'hémicycle. Cette mesure sera bénéfique à tous les Français, ainsi qu'aux médecins, qui pourront davantage respirer.

Puisque nous en sommes à parler des conditions de travail des médecins, beaucoup d'entre eux se plaignent, à juste titre, de consacrer une grande partie de leur temps à la gestion administrative du cabinet et de prendre des risques financiers importants, notamment en début de carrière. De plus en plus de jeunes médecins se tournent ainsi vers le statut de médecin salarié, mais les financements en faveur des centres de santé laissent encore à désirer. L'article 4 de la proposition de loi vise justement à y remédier. Il permettra aux médecins qui le souhaitent de bénéficier d'un statut plus protecteur, de stabiliser leurs revenus et de travailler aux côtés d'autres praticiens de santé. Pour la puissance publique, c'est aussi moins coûteux et plus efficace. Nous soutiendrons cette mesure, bien entendu.

Notre groupe parlementaire, la France insoumise, ne peut que se réjouir de l'article 5, qui reprend une mesure proposée dans notre programme « L'Avenir en commun », à savoir viser l'accès à un hôpital public à moins de trente minutes de chez soi pour tous les Français.

La loi de 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, dite stratégie Ma santé 2022, avait interdit aux hôpitaux de proximité la pratique des actes de chirurgie et d'obstétrique, ce que nous avions dénoncé à l'époque. De nombreux hôpitaux de proximité sont capables de réaliser ces actes, encore faut-il leur en donner les moyens. L'article 6 propose de revenir sur cette disposition afin que les Français aient accès à de véritables hôpitaux de proximité où ils pourront être soignés et accoucher. Les hôpitaux-usines ne font rêver personne ; revenons à des unités hospitalières à taille humaine maillant finement l'ensemble du territoire.

Pour finir, je dirai à ceux qui s'opposeraient à la proposition de loi qu'à force de laisser les inégalités déchirer la société sans rien faire, il ne faut pas s'étonner de recevoir en retour colère et désapprobation. Comme l'a fait observer le démographe Hervé Le Bras, la carte des déserts médicaux se rapproche fortement de celle des gilets jaunes. J'invite nos collègues de la majorité à méditer sur ce point.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

C'est très raccourci, comme raisonnement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Baisse du nombre de maternités, fermeture des services de nombreux centres hospitaliers, non-remplacement des professionnels de santé partant à la retraite… La désertification médicale n'est pas un phénomène nouveau, mais il tend à s'accroître dangereusement. Ce sont désormais 7,4 millions de Français qui vivent dans un désert médical. Au sein de l'hôpital public, le taux de vacance de postes avoisine les 30 %, ce qui aboutit à de graves dysfonctionnements et pénalise, in fine, les patients et la qualité des soins.

Les causes du développement de ces zones de désertification médicale sont multiples. Je partage votre constat : l'offre de médecins ne s'accroît pas, ou peu, malgré la suppression en trompe-l'œil du numerus clausus en première année de médecine, et de nombreux départs en retraite ne sont pas remplacés. J'y ajouterai la perte d'attractivité progressive des territoires ruraux, dans lesquels sont successivement fermés le bureau de poste, les classes de l'école primaire, la gendarmerie, les transports, etc. Elle est le résultat de politiques publiques tendant vers toujours plus de métropolisation.

Fils de médecin généraliste libéral récemment parti en retraite, je sais ô combien il est difficile pour les professionnels de nos villages du département du Gard de trouver des successeurs. Et plus les inégalités territoriales se creusent, plus la situation s'aggrave, inéluctablement.

Le drame, c'est que les départements dont l'offre médicale est la plus faible – l'Ain, le Cher, l'Eure, l'Indre, la Mayenne, la Meuse, l'Yonne – sont ceux où la population est la plus âgée, donc a le plus besoin de soins. Les délais pour obtenir un rendez-vous sont de plus en plus longs. Certains patients renoncent aux soins. On fait appel aux médecins étrangers,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…mais cela ne suffit pas. C'est une véritable faillite !

Cela étant, votre texte ne prend pas en considération la situation des territoires qui, loin d'être ruraux, sont aussi touchés par le phénomène de désertification médicale. Je pense à la Seine-Saint-Denis, frappée par ce phénomène, bien que limitrophe de la capitale. En dix ans, ce département a perdu un quart de ses médecins généralistes, 40 % de ses gynécologues, près de la moitié de ses dermatologues. Pourtant, tout sur le papier devrait le rendre attractif, eu égard à sa position géographique avantageuse et des milliards d'euros qui y sont déversés.

Pourquoi ce territoire n'attire-t-il plus les médecins ? La réponse tient en un mot : l'insécurité !

M. Jean-Paul Dufrègne s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On ne peut occulter, comme le fait votre proposition de loi, que l'insécurité dans certains territoires accélère la désertification médicale. J'en veux pour preuve les nombreuses agressions de personnels médicaux, qu'il s'agisse des médecins dans leur cabinet ou des infirmiers et infirmières libéraux, qui n'osent plus intervenir dans certains quartiers,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…non plus que les pompiers, la police, les ambulanciers. Voilà le constat accablant que dresse l'Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) !

En milieu hospitalier comme en cabinet, les violences envers les soignants ne cessent d'augmenter en France : en 2017, près de 24 000 atteintes aux personnels soignants ont été enregistrées ; 25 600 en 2018. En 2019, le dernier chiffre rendu public a explosé, avec plus de 27 000 atteintes recensées.

La sécurité offre donc, bien sûr, un levier. Tout doit être fait pour que nos soignants exercent leur métier en sécurité.

D'autres sujets mériteraient notre attention, mais, en cinq minutes, je n'aurai pas le temps de les développer.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ah, c'est sûr que la santé mentale, on pourrait en parler !

Sourires sur les bancs des groupes GDR et SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…des étudiants en médecine se dégrade, en raison notamment de l'épuisement professionnel qu'ils subissent.

Concernant les solutions que vous proposez, nous serons en désaccord, car vous voulez résoudre le problème par la contrainte. À l'heure où l'on manque de soignants, où les professions médicales subissent un réel désintérêt, où 40 % des infirmiers ne se sentent pas reconnus à leur juste valeur et souhaitent changer de métier, à l'heure où les libertés individuelles sont sans cesse remises en question, vous voulez rendre obligatoire le CESP. Je vous le dis : cela paraît contre-productif !

Face à cette situation, il faut faire preuve d'initiatives nouvelles : conduire des actions de sensibilisation auprès des étudiants et internes ; déployer les maisons de santé dans l'ensemble du territoire ; adopter de nouvelles mesures pour inciter les soignants à s'installer dans les espaces ruraux ; provoquer un bouleversement radical du modèle d'aménagement du territoire, en tendant vers la démétropolisation ; développer la télémédecine et les téléconsultations lorsque c'est possible ; donner plus de place à la prévention, dès le plus jeune âge.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est sûr que la télémédecine dans les zones blanches, ça va bien marcher !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voilà, chers collègues, toute une série de mesures de bon sens visant à lutter contre la multiplication des déserts médicaux – combat qu'il est urgent d'admettre au rang des priorités nationales.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La discussion générale est close.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je donnerai quelques éléments de réponse mais serai bref, car notre groupe a mis beaucoup de sujets sur la table. Je remercie les groupes qui soutiennent la proposition de loi : UDI et indépendants, Libertés et territoires, Socialistes et apparentés, le groupe communiste, La France insoumise. Le groupe Les Républicains semble attendre la fumée blanche pour savoir quel cap adopter.

Un député du groupe LR proteste.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne remercie évidemment pas les Marcheurs, mobilisés pour que rien ne change. Tout le monde semble d'accord pour diagnostiquer un grand corps malade, mais la majorité refuse le traitement. Madame la ministre, en vous écoutant, je me demande : « Quoi de neuf, docteur ? » – mais rien de nouveau sous le soleil. Vous essayez de nous convaincre qu'il faudra dix ou douze ans pour que s'opère le moindre changement dans les zones qui souffrent de sous-densité médicale, qu'on trouve – je l'ai dit – dans les territoires ruraux, mais aussi dans les territoires populaires qui connaissent une densité de population excessive.

Vous ne répondez pas à la question que je vous ai posée, à l'instar de la Cour des comptes, sur le caractère coûteux mais inefficace de l'ensemble des dispositifs d'incitation, et sur l'aspect également coûteux du nombre élevé – 62 % – de médecins qui exercent en secteur 2 en région parisienne.

Les Marcheurs annoncent qu'ils abordent le texte avec beaucoup d'humilité,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…mais assez rapidement nous traitent de démagos et discréditent les propositions que nous défendons. Ainsi, l'article 1er vise à donner les moyens aux universités de former un nombre de médecins défini selon les besoins. La Normandie, par exemple, a la plus faible densité de chirurgiens-dentistes de France, pourtant il n'existe aucune faculté dentaire dans la région. Cela démontre que si l'État ne se donne pas les moyens de créer des places de formation dans les universités, nous ne résoudrons pas les problèmes liés à la démographie médicale.

Mme Caroline Fiat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous dites que vous avez desserré le numerus clausus et tout essayé pour lutter contre la désertification médicale, mais que cela ne fonctionne pas. Vos propos signent votre renoncement. Vous considérez les CPTS comme une recette miracle, or 40 % du territoire national n'est pas couvert par le dispositif. C'est dire s'il a du mal à prospérer.

M. Isaac-Sibille affirme que seuls 8 % des médecins veulent exercer en secteur libéral. Je ne sais pas d'où il sort ses chiffres. La CNAM (Caisse nationale de l'assurance maladie) en compte 12 %, auxquels s'ajoutent 25 % qui effectuent des remplacements ; après cinq ans, on dépasse 40 %. Vos chiffres visent à relayer une préoccupation corporatiste et non à servir l'intérêt général.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'en veux pour preuve la situation de la permanence des soins ambulatoires. Peut-être faut-il le dire dans notre hémicycle : 39 % des médecins participent à cette obligation légale. Dans un grand nombre de cas, aucune permanence n'est assurée, ce qui provoque des renoncements aux soins.

La discussion des articles nous donnera l'occasion de convaincre que notre texte n'est pas radical. Je pense notamment à la généralisation du contrat d'engagement de service public. La photographie des étudiants en médecine ressemble à celle des classes préparatoires : ce sont des enfants issus des classes supérieures, de médecins notamment, qui font médecine. Nous proposons de démocratiser l'accès à la formation en finançant les études : nous faisons le pari que des mômes qui viennent de chez nous – qu'il s'agisse de leur classe sociale ou de leur territoire – éprouveront moins de difficultés à exercer chez nous que des enfants nés avec une cuillère en argent dans la bouche – je le dis sans provocation et avec beaucoup de respect –, qui s'installent dans des endroits où la vie semble plus facile.

Vous sous-entendez que les membres du « groupe coco » de l'Assemblée nationale ont inventé des solutions dans leur tête et qu'ils sont seuls à défendre ces propositions. L'Association des maires ruraux de France (AMRF) les défend à nos côtés, comme l'Association des petites villes de France (APVF), comme l'Assemblée des départements de France (ADF), comme les associations d'usagers, en particulier l'UFC-Que choisir, et comme la Fédération nationale des centres de santé. Tous nous soutiennent pour dire qu'on ne peut pas attendre !

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et UDI-I.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le slogan des Marcheurs était « Révolution » – le candidat président s'en réclamait. Aujourd'hui, vous ne proposez rien d'autre que l'immobilisme en matière de déserts médicaux et, pour nous, c'est évidemment inacceptable.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Très bien, monsieur Jumel ! Ils cherchent leur chemin dans l'obscurité, les Marcheurs !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

J'interviens rapidement ; nous aurons le temps d'apporter plus de précisions au fil de l'examen des amendements. M. Isaac-Sibille, qui connaît le sujet aussi bien que vous, monsieur le rapporteur, affirme que 8 % seulement des étudiants en médecine désirent s'installer en libéral. Le chiffre de la sécurité sociale que vous citez est supérieur, puisqu'il atteint 12 %.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Vingt-cinq pour cent effectuent des remplacements, parce qu'ils ne veulent pas s'installer : vos chiffres confirment que nous avons raison.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Je rencontre très souvent les étudiants en médecine et j'ai beaucoup discuté avec eux. Je vais vous raconter une anecdote à propos du contrat d'engagement de mission de service public. Je suis élue d'un territoire rural ; je travaille aussi énormément sur ce sujet. Accordez-nous parfois que nous aussi faisons preuve d'observation et de réflexion.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe LR

Observation, d'accord, mais réflexion…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Comme vous, j'étais au départ tout à fait favorable à l'instauration d'une contrainte ; pendant la précédente législature, j'ai cosigné avec le groupe socialiste une proposition de loi en ce sens, qui a d'ailleurs été rejetée. Cependant, avec l'expérience acquise grâce à des rencontres régulières, car ce sujet relève beaucoup de la concertation, j'ai pris conscience qu'il existe malheureusement – que vous le vouliez ou non – une culture nouvelle de l'exercice de la médecine générale.

Avant 2015, le cursus d'études en médecine ne comportait plus de stage de médecine générale. Pour moi, c'est le cœur du métier, or les étudiants de l'époque n'avaient aucune notion de ce qu'est la médecine générale, encore moins la médecine de proximité. Vous imaginez d'où on part !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Et leurs déplacements ne sont pas pris en charge !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Nous sommes en 2021 et 100 % des étudiants accomplissent un stage de médecine générale. J'ai rencontré les doyens des facultés. Quand ils harmonisaient les emplois du temps, ils ne faisaient pas en sorte que les étudiants qui voulaient accomplir leur stage de médecine générale dans des zones éloignées de la faculté puissent y revenir pour suivre les cours. Là encore, on partait de très loin.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe GDR

Exact, on ne prenait pas en charge les frais de déplacement !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Faire évoluer les choses a pris encore deux ou trois ans ! À chaque fois, nous avons essayé de convaincre, pour confirmer pas à pas cette tendance. Selon moi, on ne crée pas le désir de s'installer en contraignant l'installation. Monsieur Jumel, accepteriez-vous de partir en vacances avec moi…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

…si on me contraignait à partir avec vous ?

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Quel dommage ! Vous ne savez pas ce que vous perdez !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Toutefois, cela montre bien qu'on ne crée pas le désir par la contrainte.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mais là, ce n'est pas une simple question de plaisir : on parle de santé publique !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Je préférerais qu'on fidélise les médecins qui s'installent chez nous et qu'ils y restent. Si on leur impose de rester trois ans dans une zone, mais qu'ils ne désirent que d'en partir, en quoi aurons-nous résolu le problème ? L'intérim prévaudra toujours et les médecins ne feront que passer. Dans la vie, je ne suis pas béate : j'ai moi aussi eu besoin de preuves pour faire évoluer ma position. Nous avançons pas à pas. Nous devrions éviter les polémiques stériles, parce qu'il y a urgence et que nous progressons ; nous trouvons des solutions dans l'urgence.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S'il y a urgence, il faut agir maintenant ! Ce n'est pas négociable !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Monsieur Lecoq, s'il vous plaît ! Les solutions d'urgence, nous sommes en train de les élaborer, pas à pas également ! En outre, nous agissons, ensemble, de manière structurelle, ce qui n'avait pas été le cas depuis des années. Pour répondre à l'urgence, nous développons la pratique avancée. Nous nous accordons tous à dire que c'est trop long, cependant, nous n'avons pas assez de médecins tout court !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Il faut arrêter de poser de faux problèmes…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

…alors que nous essayons de résoudre ensemble les vrais.

Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. Je travaille depuis des années pour améliorer l'accès aux soins. Chez moi, c'est crucial. Quand on crée des outils, on attire les jeunes médecins. Cela fait huit ans que je me bats en ce sens…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

…et depuis deux ou trois ans, je perçois un frémissement. Je vous assure que de jeunes médecins arrivent, avec un projet d'installation, et que certains créent leur propre maison de santé. Constatons-le et parlons-en. Je connais de jeunes médecins qui sont déjà maîtres de stage parce qu'ils ont anticipé la nécessité de former des personnes qui les relaieront.

M. Cyril Isaac-Sibille applaudit.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Voilà la réalité du territoire que je connais bien, pour lequel je travaille depuis longtemps.

Personne ne s'oppose à rien : nous ne sommes pas en contradiction – cessons les polémiques stériles. Nous disons seulement que la contrainte n'a jamais rien résolu. Il faudra peut-être en arriver là un jour, mais aujourd'hui, cela ne servirait à rien. Laissons les choses se faire, avec toutes les mesures que nous avons votées

Protestations sur les bancs du groupe GDR

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

dans le cadre de l'examen du PLFSS afin d'améliorer la situation dans l'urgence.

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte dont l'Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n'a pas adopté de texte.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'article 1er est consacré à la formation. Je veux revenir sur ce que notre majorité a accompli depuis trois ans qu'a été prise la décision de supprimer le numerus clausus. Tout le monde parle de désertification médicale, alors que pendant cinquante ans, aucun gouvernement n'a rien fait pour s'y opposer. C'est en effet cette année le cinquantième anniversaire de la création du numerus clausus.

Reprenons les chiffres ; ils sont intéressants, que les majorités soient de droite ou de gauche. Il y a cinquante ans donc, en 1971, les places en médecine étaient au nombre de 8 500 ; ce nombre a progressivement baissé, passant à 6 400 en 1981, à 4 400 en 1988 et à 3 500 en 1997. Cette année, nous sommes passés de 15 000 à 17 000 places en deuxième année pour les médecins, les pharmaciens, les dentistes et les sages-femmes. C'est la première fois qu'il y a une telle augmentation.

Messieurs les parlementaires de droite ou de gauche, pendant cinquante ans, vous n'avez rien fait. C'est la majorité qui depuis trois ans a mis fin…

Protestations sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ils montrent que nous avons fait un bond en avant en matière de formation.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Depuis cinquante ans, la gestion de la sécurité sociale était uniquement comptable. Grosso modo, vous pensiez que moins on formait de médecins et d'infirmières, moins le trou de la sécu se creusait. Nous avons fait l'inverse et nous sommes très fiers d'avoir mis fin au numerus clausus.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ces Playmobil qui donnent des leçons, c'est insupportable !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mes chers collègues, ce texte proposé par le groupe GDR est tout simplement le reflet de ce que nous entendons et constatons quotidiennement dans la plupart de nos circonscriptions : des Français en situation de détresse parce qu'ils ne trouvent pas de médecin pour se soigner, parce qu'ils doivent faire des centaines de kilomètres pour en trouver un, ou encore parce qu'ils doivent patienter des mois pour obtenir un rendez-vous.

Aujourd'hui, dans la France du XXIe siècle, 6 à 8 millions de nos concitoyens n'ont aucun médecin. Cette situation, nous ne la découvrons pas en cette fin de législature ; ça fait des années que les uns et les autres, tous groupes parlementaires et toutes tendances confondus…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…ont proposé aux gouvernements qui se sont succédé depuis quinze ans de doubler le terrain de l'incitation financière – dont a très bien parlé Thierry Benoit – pour attirer les médecins en zones sous-dotées, par un système de régulation de l'installation.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce dispositif est efficace pour d'autres professions telles que les pharmaciens, les infirmiers et les kinés ; alors pourquoi ne pas l'expérimenter, au moins, pour les médecins ?

La santé est l'une des responsabilités régaliennes de l'État ; le droit universel à la santé est inscrit dans le préambule de la Constitution de 1946. Nous aurons l'occasion de l'exprimer après-demain devant le ministère de la santé, avec les 300 Mayennais qui viendront manifester pour dire au ministre leur attachement à l'hôpital du Nord-Mayenne situé dans ma circonscription, ainsi que la nécessité de mesures volontaristes pour lutter contre les déserts médicaux.

M. Thierry Benoit applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais, très rapidement, apporter deux ou trois réponses. On pourrait presque penser, à vous écouter, que le numerus clausus ne figurait que dans le seul projet du candidat Macron. D'autres programmes en parlaient pourtant, notamment celui qui me tient à cœur, « L'Avenir en commun ». Si vous le reprenez, vous verrez qu'il précisait que le numerus clausus serait supprimé, mais pas seulement ! Il prévoyait aussi la création d'amphithéâtres ; la création de sièges, pour que les étudiants puissent s'asseoir ; la création de postes d'enseignement pour que les étudiants puissent avoir des enseignants ; la création de postes d'internat et d'externat.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Il faudrait dix ans !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous ne l'avez pas fait ! C'est facile de dire que vous avez supprimé le numerus clausus ! Pas un seul amphithéâtre n'a été créé depuis pour accueillir les nouveaux étudiants ; bravo ! Après quoi, vous dites qu'il n'y a pas assez de places ! Comment les étudiants pourraient-ils ne pas être dégoûtés ?

Vous avez aussi promis 4 000 postes d'assistants médicaux pour soulager les médecins ; ils devaient être réservés – promesse d'Agnès Buzyn – aux aides-soignants en fin de carrière, fatigués. Où sont ces 4 000 postes proposés par Emmanuel Macron et Agnès Buzyn ? Nous sommes en fin de mandat, faisons le bilan !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Nous le ferons !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Des médecins salariés veulent s'installer en centre de santé, mais c'est la croix et la bannière pour créer ces centres. Je peux vous parler du dossier de Jarny, que je maîtrise très bien. Vous dites que seuls 8 % des médecins veulent s'installer ; c'est parce que lorsqu'ils veulent devenir médecins salariés, on les en empêche pratiquement, parce qu'on n'arrive pas à créer des centres de santé. C'est votre bilan aussi ! Quitte à vouloir faire des bilans, faisons-les complètement !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'interviens à titre personnel et non au nom du groupe Agir ensemble, au sein duquel les positions sont très différenciées. Je voudrais souligner l'intérêt de l'article 1er . M. Jumel apporte une idée qui n'a pas encore été mise sur la table : proposer des offres proportionnées, en étudiant les zones dans lesquelles on en a le plus besoin. À mes yeux, cela peut fonctionner ; on le comprend lorsqu'on parle avec les étudiants. En effet, on finit par s'installer là où l'on a fait ses études, tout simplement parce qu'on y a construit sa vie ; les études de médecine sont très longues, à la différence d'autres professions médicales – sages-femmes, dentistes – et non médicales, qui le sont moins et permettent davantage de mobilités, plus facilement supportées par les étudiants.

Cependant, plusieurs points dans la rédaction de l'article ne me paraissent pas réalistes – c'est pour cela que nous avons déposé un amendement. Ainsi, il n'est pas réaliste de supprimer les capacités de formation, parce que l'on ne peut pas y répondre très rapidement ; les conséquences en sont presque aussi lointaines que celles du numerus apertus.

Il y a un moment important dans la vie d'un étudiant en médecine : ce que l'on appelait autrefois le concours de l'internat. Il a souvent pour conséquence l'affectation dans une autre région que celle souhaitée initialement. Une réforme a été conduite : le classement national n'existera plus et une procédure nationale d'appariement dématérialisé sera appliquée. Il n'empêche que les étudiants ne poursuivront pas forcément leurs études là où ils les auront commencées. On se retrouve donc à nouveau face à un brassage dans la répartition des étudiants. Je trouve l'idée intéressante, mais il faudrait l'affiner et l'appliquer plutôt au moment du concours de l'internat, pour les trois années de médecine générale.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Depuis des décennies, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, ici comme au Sénat, demande la suppression du numerus clausus. Cette décision a fini par être prise et nous l'avons alors soutenue.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe LaREM

Qui l'a fait ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'enjeu consiste à voir de quoi elle est accompagnée. Est-elle accompagnée de moyens et d'objectifs publics suffisants pour former le nombre de médecins dont nous avons besoin ? La question consiste aussi à savoir si Parcoursup ne réinstaure pas une sorte de numerus clausus qui, au bout du compte, reviendrait par ce biais-là.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous n'aurions plus un numerus apertus, mais un numerus hocus pocus, ce qui poserait évidemment de graves problèmes.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Chaque fois que nous proposons des mesures, vous répondez qu'elles sont contraignantes et coercitives. La contrainte et la coercition peuvent exister, mais pas dans ce texte ! Vous refusez de vous doter – de nous doter – d'outils de régulation et de connexion, qui sont l'objet de l'article 1er . Il s'agit de connecter les choix et les moyens aux besoins réels des territoires. C'est une question de responsabilité et de santé publiques. Nous avons le devoir de nous doter des moyens d'action nécessaires et suffisants.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Monique Limon, pour soutenir l'amendement n° 11 , visant à supprimer l'article 1er .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé a supprimé le numerus clausus – je ne vous apprends rien. Depuis la rentrée 2020, pour mieux répondre aux besoins de santé et garantir des formations de qualité dans tous les territoires, les universités et les ARS définissent désormais ensemble le nombre d'étudiants admis dans les différentes filières chaque année, sur la base d'orientations nationales visant à répondre aux besoins du système de santé, à réduire les inégalités territoriales d'accès aux soins et à permettre l'insertion professionnelle des étudiants.

En 2021, nous avons évalué à 19,4 % l'augmentation du nombre d'étudiants en médecine, ce qui ne s'était pas vu depuis plus de cinquante ans. Le code de l'éducation mentionne expressément, pour les universités, la nécessité de favoriser la répartition équilibrée des futurs professionnels sur le territoire au regard des besoins de santé. Les objectifs fixés doivent tenir compte des capacités de formation et des besoins de santé du territoire. L'objectif de territorialisation des capacités d'accueil visé par l'article 1er apparaissant déjà satisfait, l'amendement a pour objet la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur l'amendement n° 11 , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine et par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Ça, ce n'est pas bien…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…le 8 juillet 2021, au sujet des places ouvertes en PACES, le Conseil d'État a observé que quinze universités n'avaient pas suffisamment augmenté leurs capacités d'accueil en deuxième année pour garantir l'application de la réforme, afin que celle-ci ne se fasse pas au désavantage des étudiants inscrits en LAS (licence accès santé) et en PASS (parcours accès santé spécifique). C'est la démonstration que l'article 1er est fondé.

Par ailleurs, qui peut croire qu'un patron d'ARS aura la moindre autorité sur le président de l'université pour influer sur ses moyens ? Qui peut croire qu'un patron d'ARS, qui dépend de deux ministères de tutelle différents, aura la moindre autorité sur un recteur d'université, afin d'obtenir la prise en compte des besoins de santé dans l'élaboration des moyens ? C'est la raison pour laquelle nous considérons que la transformation du numerus clausus ne suffira pas à rééquilibrer l'aménagement du territoire sanitaire.

Enfin, Mme la ministre dit que les toubibs formés sont en augmentation de 30 %, alors que vous parlez d'une augmentation de 19 % ; il faudrait vous entendre ! Je ne nie pas qu'on en forme plus ; mais même en en formant plus, si nous ne bougeons pas les critères de formation, rien ne prouve que nous rééquilibrerons la répartition des médecins en faveur des territoires sous-denses et que nous résoudrons le problème des déserts médicaux. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Avis favorable. Des échanges ont déjà lieu dans chaque territoire, sous l'égide des observatoires régionaux de la démographie des professions de santé et des ARS…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

…pour faire des propositions territorialisées de capacitaires à former. Ces capacités d'accueil sont décidées annuellement par les universités, sur avis conforme des ARS ; elles sont généralement le fruit d'une concertation locale avec l'ensemble des acteurs et correspondent aux capacités réelles des institutions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Alors, tout est résolu ! Tout va très bien, madame la marquise !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Personne ne dit cela !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le rapporteur, je suis effectivement docteur le lundi matin, mais le reste du temps, je suis députée comme vous. Il me paraît important de rappeler que la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, dite Ma santé 2022, prévoit que les ARS acceptent le nombre d'étudiants à former, communiqué par les universités, après consultation de la CRSA (conférence régionale de la santé et de l'autonomie).

Dans ma région, on forme deux fois moins d'étudiants en médecine que dans les autres régions ; je suis donc bien consciente qu'il faut en augmenter le nombre. Mais dans l'article 1er , vous retirez des capacités de formation ; or former des médecins sans formation ne me paraît pas envisageable. C'est pourquoi l'amendement vise à le supprimer.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre déléguée, j'essaye de suivre votre raisonnement, puisque nous traitons d'un problème grave de santé publique : sur certains territoires, il n'y a aucun médecin capable de recevoir des patients ayant besoin d'être soignés. C'est un problème suffisamment grave pour que nous ne fassions pas de polémique, mais que nous essayions d'y répondre collectivement.

La suppression du numerus clausus est plutôt une bonne mesure…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

C'est celle qu'il fallait prendre !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…qui, si elle s'accompagnait des moyens suffisants à la formation de davantage de professionnels de santé, pourrait résoudre ce problème. Prenons l'exemple très concret de l'université parisienne Paris-Descartes. Je vous invite, madame la ministre déléguée, à venir voir avec moi comment se déroule physiquement l'accueil des étudiants de première et de deuxième année.

Quand bien même on supprimerait le numerus clausus, les amphithéâtres ne disposent pas d'une capacité suffisante pour accueillir davantage d'étudiants.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Votre amendement ne permet pas de résoudre le problème.

Ensuite, je souhaiterais vous poser une question peut-être très simpliste concernant la désertification médicale. Un certain nombre de nos concitoyens n'ont pas accès à un médecin traitant, non pas parce qu'ils ne veulent pas, mais parce que c'est impossible. Dans ces conditions, comment organise-t-on leur parcours de soins ? Vous ne répondez pas à cette question.

Il ne s'agit pas de polémiquer sur ce que les gouvernements précédents ont fait ou n'ont pas fait.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Non !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous constatons que vous êtes aux responsabilités depuis cinq ans et que vous vous targuez d'avoir permis de très grandes avancées en matière de santé publique. En réalité, ce n'est absolument pas le cas puisque nous sommes confrontés à des problèmes majeurs.

Enfin, le système des officines fonctionne très bien…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

C'est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…car les conditions d'implantation sont prévues : aucune contrainte n'est imposée aux pharmaciens pour s'installer à certains endroits, ils doivent respecter la carte d'installation des officines.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si l'article 1er est intéressant, il n'en reste pas moins incantatoire. Pour former des médecins, il est nécessaire de disposer d'amphithéâtres…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Il faut régler l'urgence !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et de personnels encadrants, nous sommes d'accord. Mais la situation évolue petit à petit. On ne peut pas dire du jour au lendemain que dans telle région, on formera tant de médecins, alors qu'il n'y a ni amphithéâtres, ni encadrants, ni médecins séniors pour les former.

Bien entendu, il faudra améliorer le système en permettant aux médecins libéraux d'être maîtres de stage, alors qu'aujourd'hui seuls les médecins hospitaliers le sont. Depuis trois ans, petit à petit, nous faisons évoluer la situation.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous dites, madame Fiat, que rien n'a été fait pour lutter contre les déserts médicaux : renseignez-vous ! 2 500 CESP ont déjà été signés, trois ans après le vote de la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et c'est un vrai succès, les médecins généralistes de ville plébiscitent ce dispositif.

Mme Sandrine Mörch applaudit.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 75

Nombre de suffrages exprimés 75

Majorité absolue 38

Pour l'adoption 49

Contre 26

L'amendement n° 11 est adopté ; en conséquence, l'article 1er est supprimé et l'amendement n° 8 tombe.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l'amendement n° 5 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les stages dans les zones sous-dotées doivent être rendus obligatoires, au lieu d'être simplement prioritaires, comme ils le sont à l'heure actuelle.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'émets un avis favorable à l'amendement. Lorsque, avec le président Chassaigne, nous avons rencontré le ministre des solidarités et de la santé, il nous a dit qu'il avait eu l'idée de prévoir cette mesure il y a longtemps,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mais ça, c'est quand il avait encore des convictions !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…mais elle n'a pas été traduite dans le droit.

Pour répondre à la ministre, les observatoires régionaux de la démographie des professions de santé n'existent pas dans toutes les régions ; certaines se sont désengagées. Ainsi, les diagnostics qui permettraient de résoudre le problème ne sont pas établis.

S'agissant de la répartition des moyens de santé, je prendrai l'exemple des assistants spécialistes régionaux – ASR – qui sont déployés en fonction du bon vouloir des patrons de centres hospitaliers universitaires (CHU). Force est de constater qu'on les affecte plus volontiers dans les gros hôpitaux des métropoles que dans les petits. Votre admirable sens de l'égalité consiste, dans ce domaine comme dans d'autres, à donner tout à ceux qui ont déjà beaucoup ; nous proposons de donner beaucoup à ceux qui ont moins.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Le Gouvernement émet un avis défavorable à cet amendement. Je partage la volonté de déployer les stages dans des zones sous-dotées. Je viens d'expliquer les conditions matérielles dans lesquelles les étudiants en médecine effectuaient parfois leur stage dans des zones reculées alors que leurs cours étaient dispensés à une heure et demie de là ; c'est pourquoi ils choisissent de réaliser leur stage dans une commune plus proche, ce qui est préjudiciable. Je déplore également cette organisation, mais nous ne pouvons les contraindre.

Vous le savez, il faut disposer de maîtres de stage ; ils sont déterminants.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Or, dans des zones sous-dotées, il n'y a pas suffisamment de médecins maîtres de stage, ce qui empêche d'affecter autant de stagiaires que nous le souhaiterions. C'est une donnée tout à fait objective, qui n'est pas polémique et que je déplore autant que vous.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je disais tout à l'heure que le département d'Ille-et-Vilaine était un bon laboratoire pour expérimenter une proposition de ce type. En effet, si un étudiant de la faculté de médecine de Rennes doit faire un stage au centre hospitalier des Marches de Bretagne à Fougères, à Vitré, à Maen Roch, soit à trente ou trente-cinq minutes de Rennes,…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Et vous allez l'obliger ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…il n'est pas perdu dans la pampa ; il travaille au sein d'un territoire qui propose une offre socio-éducative de qualité. Il rencontrera des professionnels – entre eux, ils parlent le même langage – qui lui parleront de l'exercice de la médecine dans les villes moyennes, les territoires périphériques et ruraux. Voilà le sens de cet amendement ; ce n'est pas très compliqué, c'est une mesure dite de régulation.

Notre collègue Olivier Damaisin, député du Lot-et-Garonne, a organisé une table ronde, accessible en visioconférence, à laquelle j'ai participé. Nous avons discuté avec les élus du département et les professionnels de santé qui, majoritairement, aspirent à ce que des mesures de conventionnement sélectif et de régulation soient prises, afin que les étudiants en médecine soient formés au plus près des territoires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre déléguée, vous avancez l'argument – qu'on peut comprendre – selon lequel le nombre de maîtres de stages serait insuffisant. Avec Sébastien Jumel, nous avons eu un échange avec le ministre des solidarités et de la santé, M. Véran, qui nous a dit qu'un décret allégeant les conditions requises pour devenir maître de stage serait publié très prochainement. Ainsi, si l'amendement est voté, les lignes changeront. À la suite de la prise de conscience du ministère des solidarités et de la santé, nous aurons demain davantage de maîtres de stages et donc la possibilité de mettre en œuvre la mesure proposée par M. Benoit.

L'amendement n° 5 n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisi de deux amendements identiques, n° 12 et 24 , tendant à supprimer l'article 2.

La parole est à Mme Mireille Robert, pour soutenir l'amendement n° 12 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le CESP est un dispositif incitatif qui a été considérablement renforcé par la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé. Il a été modernisé et son champ a été étendu aux praticiens à diplôme hors Union européenne – PADHUE – autorisés à poursuivre un parcours de consolidation des connaissances. Afin de rendre ce dispositif plus attractif pour les étudiants, une sécurisation des projets professionnels formulés dans les territoires qui ne seraient plus éligibles au CESP au sortir de leurs études a été réalisée.

La généralisation des CESP prévue à l'article 2 est une mesure coercitive entrant en contradiction avec le dispositif proposé, qui vise à impulser l'élaboration, par les étudiants eux-mêmes, de leurs projets professionnels dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou des difficultés dans l'accès aux soins, afin que ceux-ci s'inscrivent dans la durée. L'amendement propose la suppression de l'article 2.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur les amendements identiques n° 12 et 24 , je suis saisi par les groupes Gauche démocrate et républicaine et Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Nicolas Meizonnet, pour soutenir l'amendement n° 24 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je le disais lors de la discussion générale, il est contre-productif de rendre obligatoire le CESP. Nous sommes convaincus que la refonte du système de santé, le développement économique et social des zones périurbaines et rurales et des incitations positives garantiront une égalité d'accès aux soins sur l'ensemble des territoires de notre nation.

Afin de renforcer considérablement l'attractivité du CESP, il convient de développer la communication, d'instaurer des actions de sensibilisation et de recrutement des étudiants et des internes. L'amendement vise donc à supprimer l'article 2.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On en a déjà discuté en commission. Seuls 7 % des étudiants ont conclu un CESP : il est peu connu et de moins en moins sollicité. La répartition des CESP est très inégale : 21 % des contrats sont signés en Île-de-France, ce qui signifie que peu le sont dans les territoires sous-denses. Le CESP est le contrat d'incitation à exercer dans les zones sous-denses le mieux connu des étudiants en médecine, mais nous devons le généraliser, j'insiste sur ce point.

Nous avons auditionné les syndicats de jeunes médecins et d'étudiants en médecine qui y sont opposés – je le dis franchement. Cependant, lorsque vous regardez la photographie des étudiants en médecine, la question de la démocratisation de l'accès aux études de médecine reste posée ; c'est un enjeu d'aménagement du territoire. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable aux amendements de suppression, car la généralisation des CESP est un levier qui, additionné à d'autres, est de nature à réduire les inégalités territoriales et sociales dans l'accès aux soins.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Je suis favorable aux amendements de suppression de l'article 2. Je connais bien le CESP, c'est une bonne mesure visant à démocratiser l'accès à ces études. Je vous fais part de mon expérience : chaque année, lors de la rentrée scolaire, je me rendais à la fac de médecine, qui se trouve à une heure et demie de ma circonscription, pour parler à tous les étudiants du CESP qui vise à les inciter à s'installer dans les zones sous-denses. Ensuite, lors d'entretiens privés, j'ai rencontré plusieurs élèves auxquels j'ai expliqué que ce contrat ne les engageait qu'à s'installer, à compter de la fin de la formation et pour une durée égale à celle correspondant au versement de l'allocation et supérieure à deux ans, dans une zone sous-dotée. Ces étudiants, pourtant en situation très précaire, ont refusé de conclure ce CESP au motif qu'il serait coercitif.

Il n'y a pas de montée en charge en raison, d'une part, de l'absence de connaissance du dispositif, d'autre part, du refus d'être contraint. Je n'ai pu m'empêcher de montrer mon étonnement à une étudiante en situation précaire qui m'expliquait avoir refusé de conclure un CESP au motif qu'il l'empêchait de s'installer où elle le souhaitait, obligeant de ce fait ses parents à l'aider. On en est là, il faut l'entendre. C'est pourquoi je vous disais en aparté, monsieur Jumel, que nous gagnerions à organiser une concertation élargie, au-delà d'un seul syndicat, à tous les étudiants en médecine.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre déléguée vient de rappeler que l'obligation est malheureusement contre-productive. Le fonctionnement actuel est opérationnel.

Il a été indiqué au cours de la présentation de l'amendement n° 12 que les PADHUE pouvaient conclure des CESP. N'oubliez pas que sous cette législature, nous avons résolu le problème ancien des PADHUE que vous n'aviez jamais soulevé : ils étaient souvent faiblement payés, travaillant en tant qu'internes dans les hôpitaux. Ils pourront enfin régulariser leur situation.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ainsi, dans les deux ans à venir maximum, 4 000 à 5 000 médecins s'installeront dans tous les territoires. Nous avons pris à bras-le-corps ce sujet, qui soulevait un vrai problème humain et de démographie médicale. Grâce à cette mesure concrète que nous avons prise, les médecins sont autorisés à conclure des CESP et arriveront dans les mois qui viennent – je tenais à le rappeler.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre déléguée, à un moment donné, il faudrait savoir ce qu'on veut.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Des médecins !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans nos contrées, on trouve un peu partout des maisons médicales à 1 ou 2 millions d'euros restées vides, aucun médecin ne voulant y exercer. Ils sont tous concentrés au même endroit. À un moment donné, si on n'explique pas aux étudiants en médecine qu'ils devront se répartir sur le territoire, comment fait-on ?

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Moi je le fais !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il faut se poser les bonnes questions, prendre les bonnes décisions ; je crois que nous sommes ici dans ce but.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je soutiens bien entendu l'article 2. Mon expérience est celle d'un département très dense, situé au cœur d'une métropole, qui est un désert médical. Les territoires concernés par la proposition de loi de Sébastien Jumel sont les oubliés de la République.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il s'agit de territoires ruraux, périurbains, de villes moyennes en perte d'attractivité, mais aussi de banlieues populaires des grandes villes : tous souffrent et constituent des déserts médicaux.

Paradoxalement, je connais dans mon département de nombreux jeunes issus de familles populaires qui ont les compétences ou du moins le niveau scolaire qui leur permettrait de faire des études de médecine,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…l'envie et la vocation, mais qui ne les font pas, en raison de leur durée et des contraintes financières que cela représente. Je fêterai dans quelques semaines l'installation d'une jeune médecin dont les cinq frères et sœurs et toute la famille se sont sacrifiés pour qu'elle puisse faire de longues études pendant que les autres travaillaient et faisaient vivre la solidarité familiale. Aidons davantage les enfants et les élèves qui ont la vocation, la volonté et les capacités de devenir médecin !

Cependant, l'essentiel des revenus d'un médecin provient de l'argent public. Il n'est donc pas incongru de demander des contreparties. C'est vrai pour les policiers, pour les gendarmes, pour les enseignants. Finançons mieux les études, afin de faire accéder les enfants des couches populaires au métier de médecin, mais exigeons en contrepartie de cet argent public une obligation d'aller dans les territoires où existent des besoins !

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – M. Thierry Benoit, Mme Jeanine Dubié et Mme Valérie Bazin-Malgras applaudissent également.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 74

Nombre de suffrages exprimés 73

Majorité absolue 37

Pour l'adoption 48

Contre 25

Les amendements identiques n° 12 et 24 sont adoptés ; en conséquence, l'article 2 est supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Annie Chapelier, pour soutenir l'amendement n° 10 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il vise à obliger les unités de formation et de recherche (UFR) à communiquer à leurs étudiants les modalités de signature des contrats d'engagement de service public. Actuellement, seuls 7 % des étudiants choisissent ce contrat d'engagement. Mme la ministre déléguée l'a dit, l'information ne suffira pas à convaincre tout le monde. Cependant, une partie des étudiants ignorent tout simplement l'existence de ce dispositif. C'est pourquoi cet amendement propose que les UFR concernées informent obligatoirement chacun de leurs étudiants.

Par ailleurs, les étudiants empruntant des passerelles que nous appelons tous de nos vœux – les professionnels de santé ou d'autres professionnels qui choisissent de s'engager dans les études de médecine après avoir exercé un autre métier – connaissent de grandes difficultés matérielles : l'existence des CESP doit leur être particulièrement signalée.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Défavorable.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Mais nous l'avons fait !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Certes, mais il est souhaitable de communiquer davantage auprès des étudiants, car un certain nombre d'entre eux ne sont pas suffisamment informés et doivent être accompagnés. Là, on tourne autour du pot de la réalité de la réorganisation du service médical en France.

Madame Bazin-Malgras, vous dites que certaines maisons de santé sont vides, mais combien de territoires en lancent-ils la construction sans s'assurer au préalable que des médecins accepteront d'y venir ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il ne faut pas faire les choses à l'envers : trouvons les médecins pour exercer dans les maisons de santé, mais ne faisons pas l'inverse, car ce ne sont pas les maisons de santé qui feront venir les médecins, ce n'est pas vrai ! Le vrai problème est ailleurs : nous avons supprimé le numerus clausus, remettons-nous à l'ouvrage pour travailler avec toutes les personnes concernées, de façon à les persuader d'aller dans les territoires désertifiés.

Monsieur Jumel, votre proposition de loi est quelque peu paradoxale : vous qui êtes contre toutes les contraintes, vous en imposez une dont les étudiants ne veulent pas du tout, mais lorsque nous le faisons, vous nous accusez d'être liberticides ! C'est bizarre : il serait préférable de faire de nouveaux états généraux et de tout mettre sur la table, avec tous les acteurs concernés. Il faut convaincre les étudiants d'aller dans les territoires désertifiés en matière de santé ; beaucoup de ceux qui en ont fait l'expérience en signant un contrat s'y sont d'ailleurs installés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est en effet nécessaire d'informer les étudiants de l'existence de ces contrats. Je suis pleinement favorable à ce dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Bizarre que Mme la ministre y soit défavorable !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'avoue avoir du mal à vous suivre, madame la ministre déléguée.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Cela ne m'étonne pas !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si j'entends le témoignage dont vous vous faites l'écho, je ne suis pas sûre que l'on puisse établir une règle générale à partir d'un cas particulier.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Ce n'est pas un cas particulier !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Prenons un exemple sensiblement différent, mais qui relève du service public rendu à la population, au même titre que l'offre de santé à l'échelle du territoire. Rappelons que la solvabilité des professionnels de santé est assurée grâce à la solidarité nationale, ce qui va de pair avec un certain nombre de responsabilités. Les enseignants sont contraints, à leurs débuts, d'exercer sur un certain nombre de territoires. De même, les pharmaciens ne peuvent pas s'installer n'importe où, mais seulement là où des officines sont ouvertes.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous êtes paradoxaux, c'est bien ce que je dis !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis donc favorable à ce que le CESP soit rendu obligatoire.

Ce n'est pas votre choix, mais il nous faut au moins apporter une réponse sur la question de l'information. Prenons là aussi un exemple. J'ai échangé récemment avec une principale de collège sur le sujet des bourses, qui visent à permettre à un certain nombre d'enfants issus de familles ayant des moyens limités de suivre une scolarité la plus normale possible : avec le passage au tout numérique des dossiers de demande de bourse, certaines familles ne déposent plus leur dossier bien qu'elles soient éligibles.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pourquoi ? En raison d'un défaut d'information et du problème posé par le tout numérique. Rendre l'information obligatoire, vulgariser la parole et faire de la pédagogie, voilà ce que nous appelons toutes et tous de nos vœux !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Même sur un amendement qui ne mange pas de pain, qui vise à mieux communiquer, vous faites preuve d'une fermeture totale qui est difficile à comprendre. Notre collègue Millienne a qualifié notre proposition de loi de « bizarre », mais personne dans cet hémicycle n'a de difficultés pour accéder à un médecin. Ils sont d'ailleurs tellement nombreux dans l'hémicycle…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Aucun d'entre nous n'a de problème d'argent, ni de carnet d'adresses, pour trouver un médecin ; mais c'est le cas de 11 % de nos concitoyens. Entre 1997 et aujourd'hui, le nombre de femmes en âge d'avoir des enfants habitant à plus de quarante-cinq minutes d'une maternité est passé de 200 000 à 700 000 ! La médecine scolaire est tellement abîmée que le nombre de gamins qui, en classe de sixième, n'ont jamais vu un médecin scolaire est en train d'exploser ! Il n'y a pas non plus assez de médecins exerçant en protection maternelle et infantile (PMI) ! Et vous vous étonnez qu'un groupe s'interroge sur la manière d'apporter des solutions à un problème qui ne vous concerne pas !

Nous considérons que notre responsabilité est de tenter d'apporter des réponses, car on n'a pas tout essayé ! Tel est l'objet de l'article 2. Libre à vous de trouver cela bizarre, mais pour nous, c'est légitime ! Il faut impérativement faire preuve de volontarisme sur cette question. Même si vous refusez de voter ce texte, le sujet s'imposera et vous obligera à évoluer…

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est bizarre qu'elle soit défavorable à cet amendement !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Nous pouvons refaire la discussion générale autant de fois que vous le souhaitez, mais il me semblait que nous débattions ici de l'amendement n° 10  !

Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe GDR.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

J'invite Mme Chapelier à retirer cet amendement, qui entend améliorer l'information des étudiants sur le CESP, car il n'est pas utile de passer par la loi pour cela. En effet, cela se fait déjà. Je me rends moi-même régulièrement dans les facultés de médecine pour les informer…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

…et je vous invite à faire de même. En tout état de cause, les universités le font, puisqu'elles en ont l'obligation.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

L'amendement n° 10 n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'article 3 n'évoque plus les zones sous-denses, mais les zones à forte densité médicale. Monsieur le rapporteur, que mettez-vous sous ce vocable ? Pouvez-vous nous donner des exemples de zones à forte densité médicale ? Vous indiquez que 11 % de nos concitoyens n'ont pas de médecin traitant, mais pensez-vous qu'ils se répartissent de manière uniforme sur tout le territoire ?

De plus, si l'installation d'un médecin devait être conditionnée par le départ d'un autre, on aboutirait à la création de rentes. Que ferez-vous dans ce cas ? Le médecin qui part vendra une charge, sa clientèle, et se constituera ainsi une rente ; c'est donc un système de rentes qui sera instauré, sur le modèle du réseau des pharmaciens, qui est lié aux charges qui sont celles des jeunes pharmaciens, qui doivent s'endetter pour s'installer. Je comprends mal cette position – qui oblige un jeune médecin à payer pour s'installer – chez un communiste…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur l'amendement n° 13 , qui vise à supprimer l'article 3, je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés et par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Marc Delatte, pour soutenir l'amendement n° 13 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le conventionnement sélectif, tel qu'il est proposé dans cet article, ne permet pas de répondre aux problèmes liés au manque de médecins dans certains territoires. Mauvais diagnostic, mauvais traitement : c'est une fausse bonne idée, typique d'une politique du « il n'y a qu'à, il faut qu'on » qui revient comme un marronnier dans le milieu journalistique, et d'une vision très binaire des problématiques. C'est méconnaître le monde médical, qui s'est investi comme jamais face à la pandémie. S'il s'agissait de la bonne recette, nous l'aurions appliquée et nos voisins européens l'auraient fait aussi.

D'une part, cet article 3 va à l'encontre du principe de réalité et de l'approche populationnelle du plan « Ma santé 2022 » et de la loi de juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation de notre système de santé. D'autre part, ce n'est pas la bonne méthode pour bâtir une société de la confiance avec les usagers et les médecins. C'est également contraire au principe d'équité, car cela tarira la filière de médecine de premier recours – la médecine de famille – et contribuera à l'inégalité d'accès aux soins. Si vous déconventionnez certains médecins, les patients modestes devront encore mettre la main au porte-monnaie – s'ils le peuvent. Nous demandons donc la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S'agissant des inégalités territoriales, je vous renvoie au tableau de la page 50 de notre rapport, qui présente la densité des médecins spécialistes pour les douze départements les moins denses et les douze départements les plus denses. Faisons quelques comparaisons : le taux du département le mieux doté, les Alpes-Maritimes, 275 pour 100 000 habitants, est quatre fois supérieur à celui du deuxième département le moins bien doté, l'Eure ; Paris compte 610 spécialistes pour 100 000 habitants, quand il n'y en a que 32 pour 100 000 à Mayotte. Si cela ne vous suffit pas pour voir qu'il y a des départements mieux dotés que d'autres !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Oui, en spécialistes, mais pas en généralistes !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour les généralistes, les analyses doivent aller à un niveau plus fin, mais les études menées par la DREES, la Caisse nationale d'assurance maladie et le géographe Emmanuel Vigneron révèlent aussi de fortes inégalités entre les territoires.

J'ajoute – puisqu'il semble que ce soit pour vous parole d'évangile – que le Président de la République lui-même a reconnu dans les Hauts-de-France, il y a dix jours, que les difficultés d'accès aux soins étaient devenues un enjeu majeur et qu'il fallait être innovant et faire bouger les choses.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Merci pour la solution !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Alors, y a-t-il seulement Jumel, Benoit et quelques autres pour dire qu'il y a un problème ? Non !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les cocos, j'en fais partie, et je ne vais pas nous citer sans arrêt !

La Cour des comptes, le Conseil économique, social et environnemental (CESE),…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…la direction du Trésor, un rapport sénatorial de janvier 2020 et de nombreuses propositions de loi, notamment déposées par des Marcheurs…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…qui semblent avoir depuis fait vœu de silence, affirment qu'il y a obligation à répondre à cette impérieuse nécessité non pas d'obliger, non pas d'exercer une coercition, mais de veiller à un meilleur aménagement du territoire en matière sanitaire.

C'est bien le but du conventionnement sélectif que nous proposons. Il est faux de dire que l'on oblige.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il s'agit d'un dispositif de régulation qui prévoit la possibilité de remplacer un médecin partant à la retraite dans les zones bien dotées et qui incite à mettre en place le conventionnement sélectif dans les zones sous-dotées.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement de suppression ?

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'aimerais appeler l'attention sur les pharmacies, dont l'implantation, vous le savez, est soumise à un contingentement.

Ce que proposent nos collègues du groupe GDR dans cet article 3 est de rendre l'accès aux soins équitable sur tout le territoire, ce qui est primordial. Dans nos campagnes, les gens ne parlent que de ça : il n'y a plus de médecins. Il faut trouver des moyens pour en ramener, et l'article 3 offre une vraie solution pour les zones rurales.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR. – M. Thierry Benoit applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Que constate-t-on ? Vous vous tirez des flûtes, autrement dit vous n'en avez rien à faire du financement de la santé au niveau national, du financement de ce qui est un véritable service public.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Non, ça, je ne peux pas l'entendre !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ai deux exemples qui renvoient au projet de loi 3DS – projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale. En prétextant que cela améliorera les choses, vous refilez aux départements la médecine scolaire que vous, et d'autres avant vous, ont été dans l'incapacité de placer à un niveau de qualité à la hauteur des besoins des enfants, comme nous l'avons vu hier lors du débat sur le harcèlement scolaire.

Deuxième exemple, toujours issu du projet de loi 3DS : vous donnez aux communes, alors que cela ne fait pas partie de leurs compétences, la possibilité de financer des équipements médicaux dans les établissements de santé publics et privés. Cela introduira une concurrence territoriale : ce sera à qui pourra ou non financer les demandes des établissements.

L'État se désinvestit clairement de cette mission de service public majeure qu'est l'accès aux soins pour tous les citoyens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous nous dites que nous méconnaissons le monde médical. Peut-être, mais ce qui nous importe avant tout, ce sont les usagers, les patients, à savoir nos concitoyens dans nos circonscriptions !

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ai bien noté qu'il y avait plusieurs demandes de parole. Cependant, je ne vous apprends pas la règle : lors de la discussion des amendements, les prises de parole sont limitées à deux, contrairement à d'autres moments du débat où chacun peut s'exprimer plus largement. Il nous faut avancer si nous voulons examiner l'ensemble des propositions de loi du groupe GDR.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Les constats, nous les partageons.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il ne suffit pas de partager des constats ! On partage tout, mais on n'agit pas de la même façon !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Je rappelle qu'il y a des gens qui ont été au pouvoir pendant des années sans jamais accepter le conventionnement sélectif. J'en veux pour preuve l'une des dernières propositions de loi examinées sous la précédente législature : elle a été rejetée purement et simplement et elle émanait aussi d'un groupe de gauche.

Ce n'est pas une question polémique, encore une fois. Je ne peux pas entendre dire…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce n'est pas une question polémique, mais politique !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Permettez-moi de parler quand même : un débat doit permettre d'écouter les autres, parfois ! Je ne peux pas entendre dire, je le répète, que l'accès aux soins des Français n'est pas une priorité pour le Gouvernement en ce moment.

Excusez-moi de vous rappeler le contexte dans lequel nous nous trouvons : nous sommes confrontés à une pandémie !

Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Nous sommes en train de déployer de multiples actions pour protéger nos concitoyens !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Je ne peux pas non plus vous entendre dire cela alors que nous avons investi plus de 29 milliards d'euros dans la santé à travers le Ségur.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Vous pouvez toujours prétendre que ce n'est rien, mais ce sont 19 milliards que nous avons consacrés aux investissements dans des établissements rendus vétustes et obsolètes par des années d'inaction !

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous vous êtes fait remuer la couenne par le mouvement social dans les hôpitaux !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Et 10 milliards que nous avons dédiés aux revalorisations salariales pour des professionnels qui n'avaient bénéficié d'aucune augmentation depuis des années !

L'accès des Français à la santé est bien une priorité pour nous.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Le constat, nous le partageons ! Il y a urgence ! Vous ne pouvez pas nous dire le contraire après ce que nous avons fait au cours de ces dernières années, surtout en ce moment !

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 68

Nombre de suffrages exprimés 68

Majorité absolue 35

Pour l'adoption 45

Contre 23

L'amendement n° 13 est adopté ; en conséquence, l'article 3 est supprimé et l'amendement n° 23 tombe.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir les amendements n° 4 , 3 , 2 , 1 et 7 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette présentation groupée permettra de fluidifier les débats, monsieur le président. Ces amendements sont tous issus de la proposition de loi que j'ai déposée avec mes collègues du groupe UDI-I, mais aussi des membres de divers autres groupes, notamment LaREM et LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'amendement n° 4 porte sur la transparence. Comme je le disais dans la discussion générale, la pénurie actuelle de médecins est une évolution qui aurait pu être anticipée par les décideurs, qu'il s'agisse des pouvoirs publics ou de l'ordre national des médecins. Les données statistiques permettaient en effet de prévoir ce phénomène.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette impréparation me semble grave. Les jeunes étudiants en médecine sont en droit de porter un regard critique sur les pouvoirs publics et l'ordre des médecins, dont on peut se demander quel message il a fait passer depuis cinquante ans.

Nous proposons d'instaurer une transparence pour certaines informations : le nombre d'étudiants en médecine, le nombre de médecins formés par région, le nombre de médecins exerçant effectivement la médecine et leur spécialité. Ce sont des éléments qui ne sont actuellement portés à la connaissance ni des députés, ni du grand public.

L'amendement n° 3 prévoit une actualisation annuelle des zonages établis par les ARS, tels les zonages d'intervention prioritaire (ZIP) ou les zonages d'action complémentaire (ZAC). Au moment de leur publication, ils accusent fréquemment un décalage avec la situation réelle qui, bien souvent, s'est aggravée depuis que les cartes ont été conçues, qu'il s'agisse des territoires urbains ou ruraux.

L'amendement n° 2 tend à rendre obligatoire un préavis d'un an pour les médecins installés dans les territoires sous-dotés souhaitant cesser leur activité.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il m'a été inspiré par le cas d'une maison pluridisciplinaire d'Ille-et-Vilaine, département où je vis. Inaugurée en 2015, elle a accueilli deux médecins : un médecin titulaire et un médecin remplaçant qui a toujours indiqué qu'il n'exercerait pas éternellement en son sein. Au bout de quatre ans, ce dernier a voulu changer de voie professionnelle, ce qui est son droit le plus strict. Mais qu'a fait le médecin titulaire ? Il a annoncé du jour au lendemain qu'il mettrait fin à ses activités sous quatre semaines. En l'espace d'un mois, 1 500 patients se sont ainsi retrouvés sans solution.

L'amendement n° 1 prévoit dans les territoires sous-dotés un conventionnement sélectif de trois ans ; l'amendement n° 7 restreint cette régulation à deux ans, solution de repli que pourront adopter ceux qui estiment que la durée de trois ans est trop longue. Le débat nous permettra de trancher.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LT.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur les amendements n° 2 et 1 , je suis saisi par le groupe UDI et indépendants d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Thierry Benoit est un député qui a les pieds sur terre. Il défend donc des amendements de bon sens.

L'amendement n° 1 vise à instaurer une obligation de transparence pour les ARS, ce qui me paraît juste. Pendant les auditions, nous avons en effet constaté qu'il y avait autant de politiques publiques que de patrons d'ARS et qu'elles n'étaient pas toujours en adéquation avec les besoins des territoires concernés.

L'amendement n° 3 sur les zonages est lui aussi pertinent. Les situations évoluent, la présence des médecins est fragile, du fait notamment des départs en retraite. Selon les ARS, l'actualisation des zonages se fait tous les trois ans, tous les ans ou tous les six mois. Faire en sorte qu'elle soit systématiquement effectuée tous les ans est une proposition de bon sens, qui ne génère aucun coût et qui s'appuie sur les ARS, dont on aurait beaucoup à dire par ailleurs.

L'amendement n° 2 correspond aux réalités que nous connaissons dans nos territoires respectifs. Vous savez, le maire qui découvre en lisant le journal ou en parlant avec un habitant que tel médecin est parti à la retraite. Ce préavis obligatoire d'un an permettra aux pouvoirs publics, aux élus, en lien avec les représentants de l'État, d'être plus réactifs et d'anticiper la formation de poches de déserts médicaux.

Quant aux deux derniers amendements, ils vont dans le sens de notre proposition de loi, en proposant des moyens de régulation.

Voici les raisons pour lesquelles j'émets un avis favorable sur ces cinq amendements.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Avis défavorable sur ces amendements.

Rappelons que l'INSEE établit un état des lieux de l'offre de soins disponible en publiant régulièrement des statistiques, tout comme la DREES et l'ordre des médecins. Certes, ces données méritent d'être peaufinées ; mais cela ne nécessite pas de passer par la loi, puisqu'elles existent déjà.

S'agissant du zonage, l'actualisation se fait tous les trois ans. Ce n'est pas en six mois que l'on peut observer les effets des politiques publiques dont nous décidons.

Quant aux préavis, ils sont déjà prévus pour l'exercice groupé et l'assurance maladie verse une aide conventionnelle pour préparer les cessations d'activité des médecins libéraux.

Enfin, pour ce qui est du conventionnement sélectif, nous avons déjà débattu de sa pertinence. Je suis persuadée que dans le contexte actuel de pénurie médicale, c'est une fausse bonne idée. Il faut d'abord retrouver cette matière première que sont les médecins avant de leur imposer des mesures qui compliqueraient encore l'accès aux soins pour les patients des territoires sous-dotés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le groupe Libertés et territoires votera en faveur de ces amendements.

Je m'attacherai à celui qui instaure un préavis d'un an pour les médecins mais aussi, soulignons-le, pour d'autres professions médicales. Si une telle disposition existe déjà pour l'exercice groupé, madame la ministre déléguée, pourquoi ne pas l'appliquer à tout le monde ? N'oublions pas qu'il s'agit de professions intégralement financées par la sécurité sociale. Compte tenu du fait que ces professionnels tirent leurs revenus de fonds publics, il me paraîtrait normal qu'en contrepartie, on leur demande un préavis d'un an s'ils veulent cesser leur activité, en changer ou partir ailleurs, de façon que les autorités sanitaires et les élus puissent disposer d'un délai suffisant pour anticiper et s'organiser.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Étant élue de la Mayenne, je ne peux rester silencieuse sur la question des déserts médicaux. On peut s'exprimer même en appartenant à la majorité, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne suis pas favorable à la régulation par le conventionnement sélectif, mais je suis tout de même sensible à l'amendement n° 7 de M. Benoit. Sans doute faut-il en effet réfléchir à l'instauration d'une année d'installation obligatoire dans un territoire sous-doté pour les jeunes médecins,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Certains territoires vont peiner à rester attractifs. Cependant, j'écoute le Gouvernement : nous avons instauré le numerus apertus et pris d'autres mesures. Évaluons leurs effets dans les années qui viennent. Peut-être faudra-t-il tout de même associer les médecins à une réflexion sur leur installation. Chacun a rencontré des difficultés d'accès aux généralistes ; nous avons des proches qui ont du mal à se faire soigner. C'est la réalité d'un territoire comme le mien, et il faut l'entendre.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis ravie de reconnaître une lueur de bon sens dans les propos de la majorité. On va y arriver !

S'agissant du préavis, permettez-moi un témoignage : dans ma circonscription, certaines communautés de communes font appel à des cabinets de recrutement pour faire venir un médecin, en dépensant jusqu'à 10 000 euros, et un jour, elles apprennent dans la presse que le médecin est parti ! C'est dire combien le préavis est important.

Les amendements n° 4 et 3 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 65

Nombre de suffrages exprimés 62

Majorité absolue 32

Pour l'adoption 22

Contre 40

L'amendement n° 2 n'est pas adopté.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 65

Nombre de suffrages exprimés 61

Majorité absolue 31

Pour l'adoption 22

Contre 39

L'amendement n° 1 n'est pas adopté.

L'amendement n° 7 n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur l'amendement n° 21 , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici sans doute la seule occasion que vous aurez sinon de vous racheter, en tout cas de montrer que vous êtes prêts à faire avancer les choses. Je propose de créer un mécanisme de conciliation auprès de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) en cas de difficulté à trouver un médecin traitant.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette disposition a été adoptée en janvier 2019 à l'initiative de la majorité : lors de l'examen de la proposition de loi de Guillaume Garot pour des mesures d'urgence contre la désertification médicale, Audrey Dufeu avait déposé un amendement en ce sens, qui avait recueilli l'avis favorable du Gouvernement avant d'être adopté. Or, la semaine dernière, l'amendement que je vous présente a été rejeté en commission, ce qui illustre l'incohérence de la majorité, ou peut-être sa volonté, qui se trouvera confirmée aujourd'hui, de tout rejeter –même l'évidence.

Le mécanisme de conciliation proposé doit permettre aux assurés sociaux ne trouvant pas de médecin traitant de saisir la CPAM afin qu'elle les oriente vers un médecin disponible.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Il existe déjà.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

De surcroît, en l'absence de médecin traitant, les remboursements de l'assuré sont moins élevés : c'est la double peine ! Non seulement les assurés n'ont pas de médecin mais, lorsqu'ils finissent par en trouver un au terme d'un parcours du combattant, ils se trouvent pénalisés par un moindre niveau de remboursement.

Je souhaitais déposer un amendement prévoyant que la diminution des remboursements de l'assurance maladie ne s'appliquerait pas au cas où la CNAM ne trouve pas de médecin remplaçant, mais il s'est naturellement heurté à l'article 40 de la Constitution.

La ministre déléguée me répondra que ce mécanisme de conciliation existe déjà. En effet, à l'échelle nationale, la CNAM a créé un numéro d'appel qui permet à ceux qui en connaissent l'existence d'être orientés au téléphone. Toutefois, il n'est pas généralisé dans toutes les caisses primaires ; d'autre part, en inscrivant ce mécanisme dans la loi, on crée en quelque sorte un droit à conciliation opposable pour les gens qui ne trouvent pas de médecin.

M. Hubert Wulfranc et Mme Caroline Fiat applaudissent.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Le rapporteur l'a dit lui-même : sa proposition est satisfaite – je n'en demande donc pas le rejet. Toutes les CPAM peuvent communiquer le numéro d'appel, puisqu'il a été créé par la CNAM ; elles n'obéissent évidemment pas à des régimes différents selon les cas. En cas de recherche infructueuse de médecin, les assurés – qui doivent pouvoir être orientés au plus vite vers un médecin, c'est un objectif que nous partageons tous – peuvent solliciter l'aide du médiateur de leur caisse d'affiliation. Encore une fois, nous n'avons aucune opposition de principe à l'amendement ; simplement, il est satisfait.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'apporte tout mon soutien à cet amendement. Un système de double peine est infligé aux personnes qui vivent dans des zones sous-dotées. Un citoyen lambda vivant dans une région où la densité médicale ne permet pas de trouver un interlocuteur de santé compétent et disponible se voit imposer non seulement l'impossibilité de consulter en cas de besoin mais aussi, s'il parvient enfin à obtenir un rendez-vous, un système de sanction par le remboursement. Ce n'est pas acceptable.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Mais non ! Il n'y a pas de sanction dans ce cas !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Certes, un numéro d'appel existe déjà, mais je ne suis pas certaine qu'un numéro soit la solution de tous les problèmes, surtout compte tenu des difficultés d'accès à l'information.

À défaut de soutenir l'amendement, madame la ministre déléguée, peut-être pourriez-vous accorder aux personnes privées de médecin traitant du fait de la démographie médicale de ne pas être sanctionnées par le remboursement, car c'est totalement injuste. Comme d'habitude avec votre majorité, on sanctionne les personnes les plus précaires et les plus exposées aux difficultés.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Oui, c'est voté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite donc qu'elle s'engage dans l'hémicycle à ce que les gens qui n'ont pas de médecin traitant ne soient pas pénalisés. Lorsqu'on interroge la CNAM, elle est incapable de nous dire quel est le niveau de saisine des caisses primaires d'assurance maladie par des personnes confrontées à l'absence de médecin.

Mme Caroline Fiat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Inscrire cette disposition dans la loi, c'est aussi fixer un objectif politique et réaffirmer que les personnes concernées ne subiront pas une double peine.

Engagez-vous donc ici, non seulement à faire la promotion de l'appel au conciliateur, mais aussi à ce que les patients ne subissent pas la double peine !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Votre amendement est satisfait par la loi de financement de la sécurité sociale que vous venez d'adopter.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

En outre, des dérogations à la tarification supplémentaire…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

…sont accordées aux personnes qui ne sont pas parvenues à trouver un médecin. En clair, l'amendement est satisfait. Je ne le dis pas pour me faire plaisir, mais parce que la disposition figure déjà dans la loi de financement de la sécurité sociale, que je vous invite à lire.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 65

Nombre de suffrages exprimés 62

Majorité absolue 32

Pour l'adoption 18

Contre 44

L'amendement n° 21 n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur les amendements n° 14 , 15 et 16 , qui visent respectivement à supprimer les articles 4, 5 et 6, je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Sur l'article 4, la parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je remercie le rapporteur de poser une question essentielle dans cet article, celle du type de médecine que nous souhaitons – nous venons justement de parler du médecin traitant. Au fond, il existe deux types de médecine de proximité : ce qu'on appelait autrefois le médecin de famille, devenu le médecin traitant, qui est disponible, que les familles peuvent appeler, qui se déplace parfois jusqu'à sept ou huit heures du soir et qui exerce en tant que médecin libéral, parce qu'il n'a pas d'horaires de travail fixes. L'autre type, c'est la médecine salariée sur laquelle, il est vrai, les jeunes médecins s'interrogent : les centres de santé sont ouverts de neuf heures à midi puis de quatorze à dix-huit heures. Les médecins n'y établissent pas de relations personnelles avec leurs patients, qui ont indifféremment affaire à tel ou tel professionnel. C'est un autre type de médecine, par opposition à la médecine de famille que tout le monde apprécie – tout le monde souhaite préserver cet exercice libéral de la profession.

Or cet article vise précisément à supprimer l'exercice de la médecine de famille en ne favorisant pas l'accès à la médecine libérale. Vous préconisez au contraire une médecine salariée reposant sur les actes ; le patient deviendrait client. C'est, pour moi, un problème fondamental. Je plaide pour une médecine de famille, pour des médecins traitants disponibles, et non pour des médecins qui n'auraient de relations qu'avec des clients.

M. Jean-Paul Mattei applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous prie, cher collègue, de faire preuve d'un peu de respect pour les professionnels de santé…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…qui aspirent à exercer leur métier d'une façon différente de celle que vous défendez. Je ne comprends guère votre raisonnement : s'installer en libéral signifierait forcément exercer une médecine « de famille » ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le médecin de famille, vous ne l'avez pas connu !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Et comment, sinon, trouver une consultation à huit heures du soir ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ne stigmatisez pas les aspirations des jeunes professionnels de santé, que je vous invite à rencontrer. Les jeunes médecins préfèrent désormais s'installer dans un cadre collectif et être salariés…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il faut les respecter sans les stigmatiser. De grâce, ne soyez pas rétrograde et n'insultez pas les professionnels dont les aspirations diffèrent de celles que vous défendez !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Faites attention, c'est un combat d'arrière-garde !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La réflexion sur les médecins salariés provient aussi de nos rencontres dans les facultés de médecine, où les étudiants eux-mêmes nous expliquent qu'il y a une déperdition entre le nombre d'étudiants formés et le nombre de ceux qui deviennent médecins. Nous cherchons donc à savoir pourquoi.

Lorsqu'on commence à creuser le sujet, on découvre que nombre d'entre eux ne souhaitent pas devenir esclaves de leur métier.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est ce qui ressort de leurs réflexions sur l'activité de médecin de ville. Ils aspirent à avoir une vie normale, disent-ils, d'autant plus que nombre d'entre eux sont des femmes – en tout cas, ce sont elles qui se sont manifestées, en répondant qu'elles voulaient du temps pour pouvoir accompagner leurs enfants dans leurs diverses activités ou discuter avec les enseignants lorsque c'est nécessaire. Les médecins hommes disent eux aussi qu'ils souhaitent avoir du temps pour s'occuper de leurs enfants et vivre une vie de famille digne. Il n'y a donc pas d'opposition à constater. Ceux qui ont la vocation et souhaitent, un peu comme les députés __ en tout cas ceux qui sont sur le terrain au quotidien __, travailler jour et nuit et être corvéables à merci sept jours sur sept, l'assument, quand d'autres font différemment. Acceptez donc l'idée, chers collègues, que la médecine de demain peut rester une médecine de proximité, mais avec un statut différent !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous parlez enfin du lien ; sachez que dans une ville de 5 000 ou 10 000 habitants, deux médecins salariés finiront bien, au bout d'un moment, par connaître la population et par avoir avec elle la même relation que celle qu'aurait eue un médecin de famille.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR. – Mme Caroline Fiat applaudit aussi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisi d'un amendement, n° 14 , tendant à supprimer l'article 4. La parole est à M. Julien Borowczyk, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais en préambule m'excuser auprès de vous, monsieur le rapporteur : je suis médecin !

M. Alain Bruneel applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour ma part, je trouve qu'il peut être intéressant que les députés disposent d'une expertise. Pourtant, on a l'impression que cela empêcherait de siéger dans l'hémicycle… Peut-être pourriez-vous siéger tout le temps, de ce fait !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais revenir brièvement sur l'article précédent avant de défendre l'amendement de suppression. Je rappelle que l'accès aux soins d'un médecin traitant est inscrit dans la loi. À défaut, la consultation est considérée comme une urgence et le patient est remboursé. Garantir l'accès à un médecin traitant est d'ailleurs la première des missions, et une obligation, pour les CPTS que nous développons.

J'en viens à l'article 4, dont nous proposons la suppression. Vous parliez tout à l'heure avec fierté du groupe communiste, chers collègues. Cet article s'inscrit effectivement, comme toute cette loi, dans une logique communiste qui me rappelle les grands débats entre Jean-Pierre Elkabbach et Georges Marchais : quand on est trop riche, « 100 %, je prends tout ! »

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous avez de la mémoire, c'est bien. C'était au-dessus de 40 000 francs !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En l'occurrence, c'est ce que vous proposez avec l'article 4. Or, comme le soulignait notre collègue Isaac-Sibille, sommes-nous vraiment trop riches en médecins quelque part ? Dites-nous à quel endroit car, pour ma part, je ne sais toujours pas ! Mais ce n'est pas grave, c'est quand même « 100 %, je prends tout ». Il en va de même pour le contrat de début d'exercice : vous prenez tout et vous ventilez façon puzzle, comme dans une planification soviétique, en disant que vous allez mettre des centres de santé partout.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Or ce n'est pas du tout le but : nous mettons en place un guichet unique permettant de justifier et de promouvoir les installations, qu'elles soient libérales ou en centre de santé. C'est précisément le vivre-ensemble dont nous parlions à l'instant : vivre ensemble que l'on exerce en libéral, en centre de santé ou en collaboration pluriprofessionnelle au sein d'une CPTS. Il faut continuer de promouvoir ce système. Le projet de loi 3DS prévoit justement que les collectivités territoriales pourront aider les centres de santé : dont acte. Mais ne mettons pas des centres de santé partout !

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Docteur Isaac-Sibille, vous êtes réac – enfin, conservateur. Je m'excuse de le dire ainsi, mais…

Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'orateur précédent a été insultant, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur Corbière, les choses se passaient bien jusqu'à ce que votre arrivée, il y a quelque temps, ne soit remarquée. Tout se passe bien, et je vous prie de bien vouloir garder votre calme.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'orateur précédent s'est conduit comme un grossier personnage, et vous n'avez pas réagi !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous allez immédiatement baisser d'un ton, monsieur Corbière.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je fais ce que je veux ! Je ne baisserai pas d'un ton !

Vives protestations sur les bancs du groupe LaREM.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe FI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Non, non, vous ne vous adresserez pas ainsi, ni au président de séance ni à quelque député que ce soit. Il y a du respect au sein de l'Assemblée et de l'hémicycle !

Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Peut-être en êtes-vous trop souvent éloigné ! Quoi qu'il en soit, il y aura du respect tant que je serai à cette place, et vous respecterez le règlement. Par ailleurs, monsieur Jumel, il n'y a pas de honte à ce qu'un collègue soit médecin ou exerce une tout autre profession : c'est l'honneur de notre hémicycle que de représenter la diversité de la société civile. Il y a ici, quels que soient les bancs qu'ils occupent, des députés de la Nation. Il n'y a pas une profession qui serait davantage représentée qu'une autre.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous demande simplement de faire en sorte que chacun puisse être considéré comme un député de la Nation, comme vous l'êtes vous-même, monsieur Jumel.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est justement parce qu'il n'y a pas de honte à être docteur que je me permets d'appeler nos collègues qui le sont par leur titre, d'autant plus qu'ils le revendiquent souvent. Du reste, le règlement de notre assemblée pourrait prévoir le déport sur certains sujets : cela aurait peut-être permis de desserrer le numerus clausus plus tôt.

MM. Ugo Bernalicis, Alexis Corbière et Paul Molac applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je disais, collègue Isaac-Sibille, que vous étiez conservateur et réac parce que, d'abord, vous niez une réalité : 54 % des jeunes médecins aspirent à exercer leur activité avec le statut de salarié. Par ailleurs, comme cela a été dit par nos collègues, ce sont de plus en plus souvent des femmes. La profession se féminise et c'est me semble-t-il une bonne chose. Il y a aussi une aspiration, une quête de sens : les jeunes médecins souhaitent retrouver un rythme de vie normal et concilier l'exercice d'un beau métier, que je respecte profondément,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…avec une vie de famille. À nombre de médecins égal, cela implique une réduction du temps de couverture médicale. C'est la raison pour laquelle nous pensons que la disposition prise par la majorité n'améliorera pas la situation. Les auditions de directeurs d'ARS que nous avons menées me conduisent par ailleurs à considérer que l'on n'accompagne pas partout de la même façon la création de centres de santé avec des médecins salariés. Les syndicats corporatistes, comme les unions régionales des médecins libéraux (URML), s'opposent en effet dans certaines régions – notamment la mienne – à la création de tels centres pour des raisons idéologiques, conservatrices et réactionnaires. Nous pensons pour notre part, et nous en avons l'expérience, qu'il faut additionner les réponses. Il y a dans mon territoire des maisons libérales pluridisciplinaires qui fonctionnent bien et que nous avons accompagnées. Il y a aussi des centres de santé, que nous soutenons également mais que nous aimerions que l'État soutienne davantage : c'est l'objet de l'article 4.

J'en viens aux propos de notre collègue Borowczyk qui revendique, lui aussi, sa qualité de médecin – un terme qui n'est évidemment pas une insulte dans ma bouche, même si j'ai pu m'inquiéter de l'attention que nombre de médecins ont portée aux auditions que j'ai menées avant de présenter cette proposition de loi. Il m'avait échappé que les kinésithérapeutes, les infirmiers libéraux, les pharmaciens ou encore les chauffeurs de taxi avaient le sentiment d'exercer leur profession dans des kolkhozes ou d'avoir fait l'objet d'une nationalisation. Nous disons depuis tout à l'heure que le financement public des études et de l'exercice de ces professions rend légitime le fait que la puissance publique veille à un aménagement équilibré, afin de garantir l'égalité dans le droit à l'accès aux soins. Cela n'a pas l'air de vous soucier, mais c'est une garantie à valeur constitutionnelle, qui est supérieure – je m'excuse de le dire – à la liberté d'installation, qui n'a qu'une valeur législative. Nous réaffirmons notre attachement à un égal accès aux soins, quel que soit l'endroit où on habite et le pognon qu'on a !

Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'entends des « Oh » ! Quand on parle de pognon et de gens pauvres, cela provoque des réactions de classe.

Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM. – MM. Hubert Wulfranc et Ugo Bernalicis applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mais notre responsabilité, c'est aussi de permettre aux gens, quels que soient leur pognon et leur condition, d'avoir un égal accès aux soins, ce qui est une garantie constitutionnelle. Avis défavorable.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Il est favorable. L'article 4 vise à réorienter les financements publics vers des centres de santé. Nous avons entendu les nombreux témoignages de ceux qui disent avoir construit une belle maison de santé dans laquelle il n'y a personne. Dans ces conditions, mieux vaut aider au fonctionnement. Mieux vaut aider, comme nous le faisons, à l'installation en début d'exercice professionnel dans des territoires en tension, ou encore à l'exercice salarié en centre de santé avec, par exemple, le dispositif « 400 médecins généralistes » que vous oubliez toujours de mentionner : la moitié des postes sont proposés dans le cadre d'un salariat en centre de santé et un soutien est apporté à l'employeur, donc à la collectivité. Enfin, vous l'avez précisé, le projet de loi 3DS sécurisera le recrutement, par les collectivités, du personnel nécessaire à l'exercice des missions dans les centres de santé. Il permettra en effet aux collectivités de s'appuyer sur le cadre réglementaire applicable à la fonction publique territoriale en matière de régime indemnitaire. Mon département commence ainsi à salarier des médecins ; d'autres, beaucoup plus avancés, en ont jusqu'à quatre-vingt-six. Je vous invite à les rencontrer, comme je l'ai fait,…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

…pour comprendre comment cela fonctionne. S'agissant des maisons de santé pluridisciplinaires existantes, qui sont attractives, je pense qu'il faut les aider dans leur fonctionnement en les accompagnant dans le recrutement de médecins, mais pas seulement : il faut aussi les aider à se développer sur le territoire. Elles feront des émules, croyez-moi ; je vois des projets fleurir un peu partout. Aidons-les donc dans leur fonctionnement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Plusieurs interventions, notamment celle de mon voisin du département de la Loire, ne tiennent pas compte de la rédaction de l'article 4. Celui-ci porte effectivement sur le financement des centres de santé mais, soyons honnêtes, il ne remet pas en cause la possibilité d'apporter des aides à des médecins libéraux pour s'installer dans des zones sous-dotées, notamment dans des maisons de santé financées par les collectivités locales. Chers collègues de la métropole lyonnaise et des territoires ruraux de la Loire, vous avez près de chez vous un département, celui de la Saône-et-Loire, dont le président, membre du parti Les Républicains, a mis en place un centre de santé départemental. Je l'ai invité dans ma circonscription afin qu'il puisse témoigner au cours d'un colloque que j'ai organisé. Et ce centre fonctionne ! Mais contrairement à ce que vous souhaitez nous faire dire, chers collègues, il ne fonctionne pas en opposition, mais en complémentarité avec les médecins libéraux ! Nous souhaitons bien évidemment conserver des médecins libéraux en activité. Ceux du territoire rural où j'habite, qui est comparable à celui de votre département, cher collègue de la Loire, ne voient pas d'un mauvais œil l'installation de médecins salariés. À Saint-Germain-l'Herm, une commune proche de la mienne, le département du Puy-de-Dôme a ainsi installé son premier médecin salarié dans le cadre d'un centre de santé. Ne caricaturez pas notre proposition comme si elle était digne de la Corée du Nord ! Elle tient compte du terrain, des besoins de nos territoires et du fait qu'il y a aujourd'hui des personnes âgées qui ne trouvent pas de médecin – c'est une réalité ! – et ne se soignent donc pas. C'est une question de sécurité sanitaire des populations, en zone rurale comme dans les quartiers urbains.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs des groupes Agir ens, UDI-I et LT.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pendant la discussion générale, nous avons entendu que le groupe La République en marche ferait preuve d'humilité. Or l'insulte n'a jamais été une preuve d'humilité ; c'est un premier point.

Murmures sur les bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ensuite, à chaque fois qu'une proposition est faite pour améliorer les conditions d'accès aux soins des Françaises et des Français, vous soupirez : « Ah mais non, et d'abord nous avons fait plein de choses… »

Protestations sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je préférerais que vous preniez le micro pour que tout le monde puisse en profiter, chers collègues ! À vous écouter, vous avez tout fait, la copie est parfaite. Mais quand même ! Regardez l'actualité ! Vous êtes le gouvernement qui a enregistré le taux de démission le plus élevé depuis plusieurs décennies, et j'en suis désolée pour vous !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pourtant, ce sont bien les bancs communistes et les bancs des insoumis qui vous alertent sur ce point depuis 2017 ! Les médecins démissionnent !

M. Ugo Bernalicis applaudit.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe LaREM

C'est pire dans les pays communistes !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Arrêtez de nous dire que vous savez tout, que vous maîtrisez tout et que vous n'avez rien à vous reprocher ! Vous avez fait des choses, certes, mais nous vous avons alertés…

Murmures sur plusieurs bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Prenez le micro, collègues : je vous assure, ce n'est pas interdit, vous êtes autorisés à parler dans un micro !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Ça suffit !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Se faire insulter dans son dos, c'est toujours embêtant…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Écoutez-moi, madame Fiat. Nous allons nous parler avec beaucoup de respect et de calme. Chacun défendra son point de vue sans invectiver l'autre, ni à raison de son appartenance politique ni à raison de son parcours personnel. Les choses vont très bien se passer ! Je vous invite à poursuivre ; vos arguments sont tout autant recevables que ceux des autres et il n'est pas utile de s'invectiver d'un banc à l'autre. Il vous reste trente secondes pour terminer votre argumentation.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Reconnaissez donc, collègues, que des choses ont été faites mais que vous n'avez pas voulu entendre les nombreuses alertes venant des bancs communistes ou insoumis depuis 2017. Maintenant, les démissions arrivent. Ayez donc un peu d'humilité !

M. Ugo Bernalicis et Mme Marie-George Buffet applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Tout d'abord, je ne suis pas d'accord avec M. Chassaigne lorsqu'il dit que le choix est permis : l'article 4 prévoit de réorienter le financement des incitations à l'installation vers les centres de santé. Ensuite, la proportion croissante de femmes médecins a été invoquée à plusieurs reprises pour expliquer une diminution du temps de travail ; or des études de la DREES montrent qu'il s'agit là d'un effet générationnel et non d'une conséquence de la présence accrue des femmes au sein de la profession.

M. Julien Borowczyk applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Enfin, nous entendons évoquer doucement l'idée selon laquelle se manifesterait dans l'hémicycle un certain corporatisme médical. Je suis fière d'appartenir à la première majorité qui a précisément combattu ce corporatisme en élargissant les compétences des autres professionnels de santé, les possibilités de leur déléguer des tâches.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quant au reste, je vous renvoie à un ouvrage fort intéressant de Frédéric Pierru, Hippocrate malade de ses réformes, paru en 2007 : vous constaterez à sa lecture que le corporatisme médical n'est pas le plus important de l'Assemblée.

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Bien sûr, les jeunes médecins sont attirés par le salariat : ils veulent un certain mode de vie. Homme ou femme, on apprécie de finir sa journée de travail à dix-sept heures…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…pour aller chercher ses enfants à la sortie de l'école. C'est bien normal ! Mais dans ces conditions, que faire lorsqu'à dix-huit heures l'un de vos propres enfants se sent mal ? Le centre de santé est fermé : il faut se rendre aux urgences.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Connaissez-vous beaucoup de centres de santé qui ferment à dix-sept heures ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

D'ailleurs, je suis d'accord avec M. Chassaigne concernant la nécessité d'un équilibre entre les deux structures.

Monsieur le rapporteur, les jeunes médecins souhaitent s'installer en tant que salariés, c'est pourquoi ils ne s'installent pas en libéral. Si nous ne faisons rien, il n'y aura bientôt plus dans les territoires, en renfort des urgences, que des centres de santé. Ne vaut-il pas mieux, encore une fois, que la loi définisse un équilibre et qu'à côté des médecins salariés subsistent des médecins libéraux, plus disponibles ? Je ne vois pas en quoi cette position serait conservatrice ! Comme l'a fait observer Mme Rist, l'article 4 vise à réorienter toutes les aides financières vers la médecine salariée ; or c'est le généraliste libéral, le médecin de famille, qui se trouve en péril.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre déléguée, c'est avec satisfaction que vous avez énuméré vos propositions…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Je n'ai pas dit que j'étais satisfaite !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…visant à ce que des médecins exercent dans les campagnes. Je ne suis pas d'accord avec vous : ça ne marche pas ! Les belles maisons médicales toutes neuves restent vides !

Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

C'est ce que je vous répète !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous ai bien entendue, madame la ministre déléguée. Vous mentionnez un tas de choses, mais vous êtes au pouvoir depuis quatre ans et demi et il ne se passe rien ! Tout ce que nous voyons, c'est qu'il n'y a pas de médecins dans les campagnes. Voilà la vérité !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pardonnez-moi, mais je ne peux donner la parole aux autres collègues qui la demandent : vous connaissez la règle. Nous n'allons pas refaire la discussion générale sur chaque amendement !

Je mets aux voix l'amendement n° 14 .

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 66

Nombre de suffrages exprimés 64

Majorité absolue 33

Pour l'adoption 41

Contre 23

L'amendement n° 14 est adopté ; en conséquence, l'article 4 est supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Stéphanie Rist, pour soutenir l'amendement n° 15 , qui tend à supprimer l'article 5.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet article vise à garantir à tout citoyen qu'un hôpital où s'exercent des activités de chirurgie et d'obstétrique se trouve à moins de trente minutes en transport motorisé de chez lui. Au vu de la démographie médicale, cette disposition est irréaliste : nous manquons de chirurgiens, d'anesthésistes, de gynécologues. Surtout, notre vision diffère de la vôtre. Vous souhaitez une homogénéité territoriale ; or ce qui importe aux gens est que leur demande de soins de proximité reçoive une réponse graduée, ce que nous faisons d'une part avec les CPTS, d'autre part en labellisant les hôpitaux de proximité.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est compliqué de garder son calme alors que votre posture consiste à nous caricaturer. Nous sommes favorables aux maisons médicales pluridisciplinaires libérales : le texte contient deux articles visant à assurer l'installation de médecins dans les zones où ils font défaut. Nous sommes favorables aux CPTS : je regrette qu'elles ne couvrent que 60 % du territoire. Nous sommes favorables aux centres de santé employant des médecins salariés, au point de proposer qu'ils figurent dans la loi afin que tout le monde soit logé à la même enseigne. Par ailleurs, ne pas être toubib ne rend pas incapable de concevoir des solutions ! La plupart des membres de notre groupe sont engagés au sein de leur circonscription, siègent dans des conseils de surveillance hospitaliers, ont soutenu les mouvements des personnels de santé : ils sont en mesure de formuler des propositions intelligentes.

En 1997, 290 000 femmes en âge d'avoir des enfants habitaient à plus de quarante-cinq minutes d'une maternité ; elles sont aujourd'hui 716 000. Vous me direz que c'est super, que c'est moderne, que c'est extraordinaire ! Le nombre des Français qui se trouvent à plus de trente minutes d'une réponse de santé a augmenté de 26 %, soit 2 millions de personnes supplémentaires. Selon l'Association des maires ruraux de France, 75 % des 6 millions de nos concitoyens vivant en milieu rural sont éloignés des services d'urgence. C'est pourquoi nous proposons d'inscrire dans la loi ce principe des trente minutes de temps de trajet.

Nous devons nous fixer pour objectif politique de donner un contenu à la notion d'hôpital de proximité. Vous prévoyez d'en labelliser 500 : compte tenu des bassins de vie, le géographe spécialiste de ces questions considère qu'il en faudrait 2 000. En tous les cas, si vos hôpitaux de proximité sont autant de coquilles vides, ils tourneront à l'EHPAD ! Nous souhaitons pour eux des consultations avancées et, à terme, des activités de gynécologie-obstétrique : vous trouvez cela stupide, mais il n'en reste pas moins qu'un hôpital de proximité sans médecine avancée ni maternité ne servira qu'à prendre en charge les personnes dépendantes. Nombre d'entre eux sont déjà dans ce cas. Il leur faut des structures mobiles d'urgence et de réanimation (SMUR), une permanence des soins – à ce propos, vous n'avez pas répondu concernant le fait que seuls 39 % des généralistes libéraux participent aux permanences en ambulatoire, ce qui constitue tout de même un souci pour les 11 % de Français privés d'accès aux soins. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne me suis pas exprimé jusque-là, mais si je souscris à vos propos au sujet du manque de professionnels de santé, il y a tout de même des acteurs que vous oubliez : les élus locaux. Seul M. Chassaigne les a cités tout à l'heure. Je prendrai l'exemple de ma commune. En 2012, pour un millier d'habitants, il s'y trouvait un seul médecin, à deux ans de sa retraite ; au lieu de créer une maison médicale et de compter sur le nid pour faire venir les oiseaux, nous avons cherché les moyens d'attirer un jeune médecin, de favoriser son projet. Résultat : treize professionnels de santé,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…trois généralistes et demi – ma circonscription doit bien en compter quatre-vingts, dont je connais personnellement les deux tiers. Nous construisons avec eux, nous allons les voir, nous facilitons leurs relations avec l'hôpital. L'État fournit les moyens d'appliquer ses politiques, mais ne peut imposer aux médecins…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Un État qui n'impose pas, ce n'est pas un État !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…de s'établir ici ou là : il faut qu'il laisse la main aux territoires et que ceux-ci la prennent.

Pour en revenir à l'amendement, il y avait dans mon territoire une petite maternité. Tout le monde y tenait beaucoup ; reste que pratiquement tout le monde, lorsqu'un accouchement s'annonçait, lui préférait le plateau technique de qualité dont disposait le CHU. La réalité, c'est cela ! Il faut des hôpitaux de proximité pour les soins de suite, pour les consultations avancées : sur ce point, je suis d'accord avec le rapporteur. Mais pour un certain nombre d'autres actes, les gens choisiront d'eux-mêmes un établissement un peu plus éloigné, mais où ils ont l'assurance que l'intervention se passera bien. C'est pourquoi je suis favorable à la suppression de l'article.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La question des hôpitaux de proximité doit être considérée posément et en écoutant toutes les propositions, d'où qu'elles viennent. Nous apportons nos expériences, nos idées ; c'est ainsi que le débat s'enrichit et progresse.

Pour autant, ces hôpitaux n'ont rien de coquilles vides : leurs compétences, définies par la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, incluent des consultations et des services de médecine, d'hospitalisation, de soins de suite. En revanche, il avait été pris acte du fait que nos moyens ne nous permettaient plus de doter tout hôpital, même local, d'un bloc opératoire et d'une maternité – nous avons déjà toutes les peines du monde à éviter la fermeture de nombre d'entre elles. Je prendrai l'exemple que je connais le mieux, celui de la Charente. Les chirurgiens, urologues, orthopédistes de l'hôpital d'Angoulême vont une fois par semaine donner des consultations dans ceux de Barbezieux-Saint-Hilaire, de Ruffec ou de Confolens, au plus près des patients ; puis, au besoin, c'est à Angoulême qu'ils opèrent.

Il existe ainsi des solutions adoptées en bonne intelligence, à l'échelle du groupement hospitalier de territoire (GHT), afin d'apporter une offre de soins à tous – avec les moyens du bord, issus du numerus clausus, de choix passés devant lesquels nous devons rester humbles, car ils ont été le fait de toutes les majorités, de tous les groupes politiques. Enfin, c'est en raison des difficultés d'accès aux maternités que, dans le cadre de l'examen de la future loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, nous avions adopté le dispositif « engagement maternité », permettant aux femmes qui habitent trop loin d'un tel établissement de bénéficier de services de transport et d'hébergement. La pandémie a retardé sa concrétisation, comme la majorité et l'opposition l'ont reconnu lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 ; le Gouvernement s'est engagé à ce qu'elle ait désormais lieu dans les meilleurs délais. L'accès à une maternité sera ainsi simplifié pour nos femmes.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 62

Nombre de suffrages exprimés 60

Majorité absolue 31

Pour l'adoption 41

Contre 19

L'amendement n° 15 est adopté ; en conséquence, l'article 5 est supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Christine Cloarec-Le Nabour, pour soutenir l'amendement n° 16 , tendant à supprimer l'article 6.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les hôpitaux de proximité prévus par la loi du 24 juillet 2019 ont vocation à assurer des soins primaires, en lien avec les professionnels de santé du territoire. Dès lors qu'elle apparaît compatible avec leur fonctionnement, la structuration de filières de consultations avancées, déjà possible, devient souhaitable afin de coordonner et d'optimiser la prise en charge.

En revanche, il demeure primordial que les actes d'obstétrique et de chirurgie conventionnelle ou ambulatoire continuent d'être réalisés au sein d'établissements disposant de plateaux techniques, ce qui assure la qualité des soins et la sécurité des personnes. Il convient donc de maintenir l'interdiction faite aux hôpitaux de proximité d'exercer ces activités : tel est l'objet de cet amendement.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avis défavorable. Rappelons que la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi Bachelot, a contribué à déménager le territoire : elle a créé des territoires de santé mastodontes, a concentré les réponses en matière de santé dans les métropoles et, ce faisant, éloigné de ces réponses les territoires les plus oubliés de la République.

Rappelons également que 30 % des postes de praticien hospitalier sont vacants, notamment dans les territoires à dimension humaine, qui sont les plus fragilisés, et beaucoup moins dans les centres hospitaliers universitaires ou les grosses métropoles. Ce facteur d'inégalités territoriales est ainsi aggravé.

Que proposons-nous dans cet article 6 ? Il s'agit d'inscrire dans la loi le principe selon lequel l'égal accès aux soins est une préoccupation du Parlement. Nous voulons que les CHU et les GHT support aient comme souci « d'aller vers », comme nous le proposons dans le cadre de la vaccination, et de développer des consultations avancées au plus près des habitants les plus fragiles.

Nous ne l'avons pas assez dit au cours de ce débat : les territoires dépourvus de médecins dans lesquels vous – je veux dire les libéraux – avez fermé des lits et des établissements et détérioré la réponse de soins sont précisément ceux où l'état de santé de la population est le plus dégradé, que ce soit sur le plan de la mortalité, des conduites addictives, des maladies professionnelles ou du vieillissement. On donne finalement moins à ceux qui ont déjà peu.

Votre incapacité à répondre à cette réalité nous met en colère. Je le dis en regardant notre collègue Karine Lebon, nous avons consacré un passage de notre rapport aux territoires d'outre-mer, qui sont au cœur de l'actualité. La manière dont ils sont traités sur le plan de la réponse de soins est une humiliation permanente, un abandon sans nom, inacceptable, que nous proposons aussi de régler à la faveur de cette proposition de loi.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR et FI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vois que vous faites de grands gestes : vous êtes des libéraux, vous êtes favorables au laisser-faire et au laisser-passer ; vous voulez mettre un frein à l'immobilisme, mais en réalité, vous vous contentez de prendre soin de ceux qui n'ont besoin de rien !

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Favorable à cet amendement de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vos réponses concernant la désertification médicale et l'accès à un hôpital situé à proximité du domicile manquent tout de même de profondeur. J'ai entendu tout à l'heure que pour trouver une maternité, les femmes pourraient se rendre à 90 kilomètres de chez elles une semaine avant d'accoucher, et rester loin de leur famille, loin de tout.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Personne n'a dit cela !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne suis pas du tout d'accord avec ce type de médecine. Je vois bien que c'est le mouvement qui se dessine. Les petites maternités ferment les unes après les autres. Nous aboutirons bien à cela, de toute façon.

Vous ne tenez pas compte non plus du facteur de rapidité. Que fait-on en cas d'urgence ? Des gens ont été sauvés parce que les services d'urgence se trouvaient à un quart d'heure de chez eux ; au bout d'une demi-heure, ils seraient morts. Vous répondez que ce n'est pas grave…

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Personne n'a dit que ce n'était pas grave !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et qu'il y aura des transports efficaces. Je ne suis pas sûr qu'ils soient suffisamment efficaces.

Ensuite, M. Turquois a parlé des élus locaux, qui devraient « chouchouter » les médecins pour qu'ils viennent s'installer dans leur commune. La médecine relève-t-elle de la compétence des élus locaux ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je veux bien que la médecine soit décentralisée, mais en réalité, ce n'est pas le cas. Vous vous déchargez sur les élus locaux,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…qui créent des maisons de santé, les financent avec de l'argent public, et essaient ensuite de démarcher des médecins, sachant que s'ils ne le font pas, ceux-ci ne viendront pas d'eux-mêmes. Oui, vous vous déchargez sur les élus locaux.

Enfin, j'entends dire que les citoyens ne seraient pas assez vertueux, parce qu'ils refusent de se rendre dans tel ou tel hôpital. Il me semble que nous sommes à leur service – en tout cas, c'est mon objectif. C'est pourquoi je défends pour eux l'accès à des établissements de proximité, tout simplement.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les discours que nous entendons entretiennent la désertification des campagnes et favorisent le regroupement des services dans les métropoles. Car des médecins, il y en a ! Croyez-moi, si la désertification médicale touchait le centre de Paris, cela fait longtemps que le problème serait réglé !

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LT, GDR et FI. – Mme Valérie Bazin-Malgras applaudit également.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

C'est démago !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne me permettrais pas de réagir… La parole est à Mme Annie Chapelier.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Autant M. le rapporteur sait combien je soutiens, à titre personnel, la majorité de ses propositions, autant je suis opposée à ces dispositions. Pour l'avoir vécu au sein de plusieurs petits hôpitaux de proximité et compte tenu de la démographie médicale, je sais que nous mettrions la population en danger en maintenant des structures qui ne disposent pas du personnel suffisant pour assurer la permanence des soins dans la continuité.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je pense en particulier aux maternités. J'ai travaillé dans plusieurs maternités où les gynécologues obstétriciens n'étaient pas présents vingt-quatre heures sur vingt-quatre et pouvaient avoir des délais d'acheminement très longs, ce qui mettait potentiellement en danger les patientes.

Je suis étonnée que vous ne parliez à aucun moment – ce n'est pas un reproche, puisque tel n'est pas l'objet de la proposition de loi – des solutions vers lesquelles nous nous tournons, qui permettront de répondre au problème de la désertification médicale. Je veux parler des professions intermédiaires : pour la permanence des soins et les consultations avancées, l'évolution des professions de santé non médicales allant vers de la pratique avancée est l'une des réponses majeures que nous pouvons apporter au déséquilibre existant dans les territoires, et il ne s'agit aucunement d'une médecine au rabais.

Une sage-femme qui dispose de compétences élargies, grâce à une formation approfondie, peut effectuer cette consultation avancée, même dans des territoires éloignés des centres techniques ; il en est de même d'une infirmière en pratique avancée. L'adoption du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 ouvre également aux masseurs-kinésithérapeutes la possibilité de réaliser ces consultations de premier recours.

Nous devons poursuivre en ce sens si nous voulons répondre aux besoins. Je vous rejoins sur la nécessité d'une meilleure répartition des médecins, mais il est illusoire de penser qu'il sera possible d'en augmenter le nombre et le temps de travail, étant donné l'évolution des pratiques et l'avancée sociétale des professionnels de santé, que nous n'avons ni à critiquer ni à juger.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite réagir à l'interpellation de notre collègue Paul Molac. Quel élu local envisagerait de construire une maison médicale sans mener une réflexion globale ? Qu'est-ce qui l'empêche de solliciter le député de la circonscription pour rencontrer les étudiants en médecine originaires de son territoire et voir s'il peut accompagner certains d'entre eux lors de leur installation ? Un élu local a la possibilité d'agir, même si cela ne relève pas de sa compétence première !

M. Erwan Balanant applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il ne faut pas rester dans l'impuissance totale ! On demande plus de décentralisation, mais de l'autre côté, on ne veut pas être autonome !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour un Breton, ne pas faire preuve d'autonomie, c'est surprenant !

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je l'ai déjà indiqué, mais je vais le répéter : le règlement permet que chaque groupe s'exprime sur un article. Vous ne saisissez pas l'occasion de le faire, grand bien vous fasse ! En revanche, nous devons respecter les règles qui s'appliquent à la discussion des amendements si nous voulons que les débats avancent et que l'ensemble des textes présentés dans le cadre de la niche du groupe de la Gauche démocrate et républicaine puissent être examinés dans les mêmes conditions.

Je mets aux voix l'amendement n° 16 .

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 69

Nombre de suffrages exprimés 67

Majorité absolue 34

Pour l'adoption 46

Contre 21

L'amendement n° 16 est adopté ; en conséquence, l'article 6 est supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l'amendement n° 6 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je n'énumérerai pas toutes les mesures incitatives à l'installation des médecins libéraux qui existent. Néanmoins, il serait bon de les recenser et d'en évaluer l'impact. Les dispositifs les plus récents sont la prime à l'installation proposée par le président Emmanuel Macron, dotée de 50 000 euros, et la défiscalisation en zone de revitalisation rurale : un jeune médecin qui s'installe dans une zone de revitalisation rurale est assuré de ne pas payer d'impôt pendant quasiment huit ans. Je souhaiterais, ne serait-ce que pour ces deux dispositifs, connaître le nombre de médecins bénéficiaires.

Le présent amendement sollicite donc un rapport afin de connaître le résultat des mesures incitatives existantes.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'émets un avis favorable, d'autant que la Cour des comptes, la direction du Trésor, le ministère lui-même lors des auditions, ont souligné qu'il était difficile d'évaluer l'efficacité de ces dispositifs incitatifs et que celle-ci était toute relative – sinon, nous ne débattrions pas depuis ce matin des inégalités territoriales d'accès aux soins auxquelles nous sommes confrontés. Contrôler le montant, l'étendue et l'efficacité de ces aides pour les flécher vers les mesures que nous proposons va bien sûr dans le bon sens.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Les dispositifs d'aide à l'installation sont divers et variés, vous le savez : les aides conventionnelles, le soutien au stage, à l'exercice coordonné ou à la télésanté. Vous souhaitez évaluer l'ensemble de ceux-ci dans un délai d'un an, mais le périmètre et le calendrier de votre demande de rapport ne paraissent pas pertinents au vu de l'évolution de ces mesures.

Je réponds au rapporteur qui demandait des chiffres : 4 751 contrats incitatifs démographiques ont été signés par des médecins au 1er janvier 2021 et sont toujours en cours.

L'amendement n° 6 n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Annie Chapelier, pour soutenir l'amendement n° 9 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il s'agit d'un amendement d'appel. Pour mener une véritable politique d'attractivité médicale, il est nécessaire d'inciter les internes à effectuer des stages en ambulatoire, en libéral, dans des zones sous-dotées ou non, peu importe, afin qu'ils découvrent des territoires auxquels ils n'auraient pas pensé par ailleurs.

L'internat est d'une durée de trois ans ; les stages sont souvent effectués autour du centre hospitalier universitaire et rarement dans des zones plus éloignées. La mesure que je propose vise à renforcer le nombre de maîtres de stage des universités et à encourager les médecins généralistes dans cette démarche.

Le président Chassaigne a déclaré tout à l'heure avoir eu une conversation avec le ministre Olivier Véran, en présence de M. le rapporteur, concernant cette question des maîtres de stage universitaires et la possibilité de réduire le nombre de paramètres qui s'imposent à eux, voire d'augmenter leur indemnité pédagogique. Je serais très intéressée de vous entendre sur ce sujet, madame la ministre déléguée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Favorable. J'ai oublié de dire précédemment que le Sénat avait fait adopter en 2019, dans la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, dite OTSS, un article imposant aux médecins d'effectuer des stages en zone sous-dense. Le Gouvernement est censé publier un décret d'application depuis deux ans, mais cela n'a toujours pas été fait. Même lorsque les mesures sont adoptées par le Parlement, vont dans le bon sens et sont conformes à ce que propose notre collègue dans un autre registre, vous refusez de les appliquer. J'émets donc un avis favorable à cet amendement, en vous invitant à publier le décret traduisant la volonté exprimée par le Sénat il y a déjà deux ans.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable. Vous avez d'ailleurs précisé qu'il s'agissait d'un amendement d'appel, madame Chapelier. Le Gouvernement s'est engagé à faciliter et à encourager cette maîtrise de stage, dont nous avons besoin. Je vous confirme que les arrêtés pris en application de l'article 4 de la loi OTSS seront publiés d'ici à la fin de l'année : une commission doit se réunir le 16 décembre et la publication interviendra immédiatement après. Une action proactive auprès des ARS et des UFR sera lancée en même temps.

L'amendement n° 9 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 22 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les assistants médicaux sont un bon dispositif. J'ai rappelé dans mon propos introductif qu'ils étaient déployés à un rythme insuffisant, puisque l'objectif d'en recruter 4 000 n'est pas atteint.

Cet amendement, qui sollicite un rapport, vise à évaluer leur déploiement, tant en nombre que sur le plan de la territorialisation, afin de s'assurer qu'ils sont bien installés là où les besoins se font sentir. Ce dispositif permet de gagner du temps médical – de l'ordre de 20 %, semble-t-il. Autant les déployer là où c'est nécessaire et non dans les zones surdenses.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Sur l'objectif que nous nous sommes fixé, à savoir le recrutement de 4 000 assistants médicaux, 2 178 contrats étaient signés au 30 juin 2021. Ils permettent aux médecins de prendre en charge 351 607 patients supplémentaires. Il est prématuré d'établir un rapport : nous le ferons lorsque nous aurons atteint l'objectif de 4 000 assistants médicaux recrutés. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je soutiens cette demande de rapport, d'autant qu'à l'époque, Mme la ministre Agnès Buzyn avait fait la promesse, dans l'hémicycle, que les postes d'assistants médicaux seraient réservés aux aides-soignants – en effet, ils répondent exactement aux mêmes critères de formation. En fin de carrière, certains aides-soignants souffrent de troubles musculo-squelettiques, ne peuvent plus pratiquer leur métier et se retrouvent au chômage. Il serait intéressant qu'un rapport nous dise si la promesse faite devant notre assemblée a été tenue, et qu'il précise combien d'aides-soignants en fin de carrière sont concernés par les 2 178 contrats signés. Je connais déjà la réponse : aucun.

Debut de section - Permalien
Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie

Bien sûr, un rapport, ça règle tout !

L'amendement n° 22 n'est pas adopté.

L'article 7 n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ensemble des articles ou des amendements portant article additionnel ayant été rejetés, la proposition de loi dans son ensemble est rejetée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle la discussion, en application de l'article 34-1 de la Constitution, de la proposition de résolution visant à la mise en place d'un plan exceptionnel d'accompagnement du phénomène de vieillissement accéléré de la Martinique (2757).

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Manuéla Kéclard-Mondésir.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La Martinique est au tournant d'une mutation démographique majeure : elle qui était le territoire le plus jeune de France au début des années 2000 est en passe de devenir le territoire le plus âgé à l'horizon de 2050. La part des plus de 65 ans y est passée de 15 % en 2010 à 22 % aujourd'hui ; elle devrait atteindre 50 % en 2050, contre 27,3 % pour la France hexagonale à la même échéance.

Au-delà des chiffres, le plus grave est que ce vieillissement aura des conséquences durables sur notre territoire. Le plus grave est aussi la situation sociale de cette population vieillissante : en Martinique, un tiers des plus de 60 ans vivent en dessous du seuil de pauvreté, contre 10 % dans l'Hexagone. Cette précarité s'exprime dans le recours aux allocations : 18,4 % des plus de 65 ans bénéficient de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) en Martinique, contre 4 % dans l'Hexagone ; 10 % de cette classe d'âge perçoit l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) en Martinique, contre 7,7 % dans l'Hexagone. Enfin, le taux de bénéficiaires de l'aide sociale à l'hébergement (ASH) de la Martinique est deux fois supérieur à celui de l'Hexagone. Cette situation de précarité financière et de dépendance relative aux allocations est aggravée par la vie chère, problématique centrale de nos territoires.

L'isolement entre également en ligne de compte, sachant que 55 % des personnes âgées vivent seules. À cela s'ajoute leur refus de quitter leur domicile, qu'il ne faut pas interpréter comme un simple aléa culturel : c'est aussi un problème d'ordre structurel. Alors que les EHPAD sont les principales solutions d'hébergement proposées, les 80 % de places habilitées à l'aide sociale sont occupées ; en conséquence, 68 % des bénéficiaires de l'APA vivent à domicile. La capacité d'hébergement est insuffisante : le territoire ne compte que vingt-cinq EHPAD, soit 1 787 places, et ne propose aucune offre d'hébergement intermédiaire. Aussi les personnes âgées restent-elles à domicile, parfois volontairement, mais surtout parce qu'elles n'ont pas d'autre choix.

Enfin, la Martinique souffre d'un manque général de médecins et de personnels soignants. Certaines zones sont des déserts médicaux et manquent de spécialistes – souvent, ce sont aussi les zones les plus touchées par le vieillissement.

Ces constats ont motivé la présente proposition de résolution. Bien que nous soyons en retard quant aux mesures à prendre, il est encore temps d'anticiper le vieillissement de la population martiniquaise.

Le projet d'agence de l'autonomie occupe un rôle central dans notre résolution : l'objectif est de créer un guichet unique, plus efficace pour les usagers, en fusionnant les services départementaux et municipaux chargés du grand âge et de la dépendance. Cette agence s'inspirerait des maisons départementales de l'autonomie, dont j'ai pu observer le fonctionnement dans d'autres départements et qui me semblent constituer une réponse non seulement satisfaisante, mais aussi nécessaire pour piloter les politiques de l'autonomie sur le terrain. L'impulsion peut venir de la collectivité territoriale de Martinique, avec laquelle je suis en discussion, mais nous pourrions aussi être accompagnés par l'État : j'attends une réponse sur ce point.

L'autonomie en Martinique, c'est aussi la création d'un fonds exceptionnel visant notamment la rénovation des EHPAD et le développement de solutions d'hébergement intermédiaire. Il pourrait favoriser le déploiement de maisons d'accueil et de résidence pour l'autonomie (MARPA), modèle qui correspond à la demande en Martinique – j'ai visité de telles maisons dans d'autres territoires. Ce fonds permettrait de réduire les coûts de construction pour les porteurs de projets, et donc de diminuer les loyers, sachant que la question du loyer est centrale dans l'offre que nous devons élaborer.

Le Ségur de la santé a apporté des moyens supplémentaires, soit 20 millions d'euros pour les outre-mer, avec un accent mis sur les EHPAD. C'est un début, mais 20 millions d'euros pèsent peu à l'échelle de l'ensemble des outre-mer. Les nouvelles missions des EHPAD, votées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2022, appellent à être plus ambitieux. L'EHPAD hors les murs doit devenir une réalité, surtout dans un territoire difficile à couvrir comme la Martinique, frappé par la désertification médicale : les établissements doivent pouvoir développer des solutions allant vers les usagers, et pas uniquement le contraire.

Concernant les solutions d'hébergement intermédiaire, le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS) clarifie certaines compétences et envisage des dispositifs de facilitation ; toutefois, les moyens qu'il prévoit sont insuffisants. Les porteurs de projets en Martinique font part de leur difficulté à proposer des projets viables : les coûts sont trop élevés, tandis que les aides et les subventions sont insuffisantes. Dans ces conditions, ils ne peuvent proposer aux usagers que des tarifs inaccessibles. Les solutions d'hébergement intermédiaire doivent viser l'accessibilité financière. Elles nécessitent davantage de moyens, d'où notre volonté de créer un fonds exceptionnel.

Toujours concernant les coûts, je propose d'exonérer de TVA les entreprises qui constituent des petites unités de vie, sur une période de dix ans et sous le contrôle des autorités publiques compétentes. L'outil de l'intéressement fiscal a fait ses preuves à de nombreuses reprises pour créer de l'activité et développer des projets dans des secteurs ciblés ; ce levier pourrait être activé à court et moyen termes en Martinique, afin de faciliter un maillage efficace de l'offre d'établissements.

L'autonomie en Martinique, c'est encore le soutien aux personnes âgées en situation de grande précarité. Pour y répondre, je propose de hausser progressivement le montant de l'APA, afin de réduire le reste à charge des personnes qui résident en établissement et de l'annuler pour celles qui ont un niveau de dépendance élevé. Je propose aussi que l'APA s'ouvre au financement des dispositifs d'aides techniques, numériques et multiservices à domicile.

Nous trouvons quelques motifs de satisfaction dans le PLFSS pour 2022 : je pense à la fixation du tarif minimum de 22 euros pour l'heure d'intervention à domicile, et à la création d'une dotation qualité pour les interventions à domicile en contexte difficile, qui porte le tarif à 25 euros. Je salue cette uniformisation et cette hausse tarifaires. Le PLFSS prévoit en outre de limiter le reste à charge, y compris pour les dispositifs d'aides techniques : j'ai défendu cette revendication, et je me réjouis de son inscription dans la loi. Toutefois, il reste encore à adapter les aides et les minima sociaux à la vie chère qui caractérise la Martinique, afin d'assurer à chacun des conditions de vie décentes.

L'autonomie en Martinique, c'est par ailleurs le retour des jeunes Martiniquais diplômés, particulièrement des spécialistes en médecine gériatrique, mais aussi du personnel soignant. Il est important d'inciter les jeunes à revenir exercer sur le territoire, en renforçant le critère du centre des intérêts matériels et moraux (CIMM) : cela contribuerait à endiguer le vieillissement de la population et participerait à l'effort général pour offrir des conditions de vie dignes à nos aînés. Contrairement à ce que prétend le Gouvernement, le service civique n'est pas une réponse satisfaisante aux problèmes immédiats d'effectifs. Il faut plutôt trouver des solutions concrètes et pérennes pour augmenter les effectifs.

L'autonomie en Martinique, c'est enfin une politique de la ville qui intègre le vieillissement afin d'agir au mieux, avec les moyens adéquats. Il existe déjà des coefficients supplémentaires pour les outre-mer, notamment pour la Martinique, mais là aussi, il faut plus de clarté et d'ambition.

La proposition de résolution que je vous soumets a une portée pratique et politique. Je prends acte des efforts qui ont été réalisés depuis la création de la cinquième branche, malgré l'absence de la loi tant attendue sur l'autonomie et le grand âge. Sur le plan politique, beaucoup reste à faire pour la Martinique, entre autres territoires. L'adoption de notre proposition de résolution serait un marqueur fort de la volonté de l'État de collaborer avec la Martinique dans le domaine du vieillissement.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La proposition de résolution que nous soumet notre collègue Manuéla Kéclard-Mondésir a été déposée à l'initiative du groupe de la Gauche démocrate et républicaine en mars 2020. Alors que le contexte social reste dégradé en Guadeloupe et en Martinique, ce débat nous offre l'occasion de rappeler ce que l'État a engagé en faveur des territoires ultramarins. L'apaisement nécessaire doit être apporté par des réponses globales, à l'heure où certains territoires d'outre-mer seront confrontés à un vieillissement accru.

Le contexte démographique de la Martinique devrait en faire le territoire le plus vieux de France à l'horizon de 2050. À ce sujet, j'aimerais évoquer le rapport que ma collègue Ericka Bareigts et moi-même avons remis en février 2020 sur le grand âge dans les outre-mer. Si les sept articles de la proposition de résolution ont le mérite de rappeler les réalités martiniquaises, il convient aussi de souligner que de nombreuses mesures, qu'elles soient d'ordre financier, humain ou sanitaire, ont été adoptées depuis 2017 en faveur des aînés.

L'article 1er propose la création d'une agence de l'autonomie en Martinique, sous la forme d'un groupement d'intérêt public (GIP). Ce souhait semble d'ores et déjà réalisable, en s'inspirant du fonctionnement alternatif au cadre national qui est actuellement exercé à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy.

L'article 2 suggère de créer un fonds exceptionnel d'expérimentation pour l'autonomie et la prise en charge du vieillissement, afin de réhabiliter six EHPAD identifiés comme prioritaires par l'agence régionale de santé (ARS) de Martinique, et de développer de nouvelles solutions d'hébergement des seniors mieux adaptées au contexte martiniquais.

Dans le cadre du Ségur de la santé, 1,5 milliard d'euros ont été consacrés, sur cinq ans, à la rénovation et à la création de places en EHPAD ; sur cette enveloppe, 20 millions d'euros seront exclusivement réservés aux territoires d'outre-mer et à la Corse. Ces investissements ont été engagés depuis mars 2020 ; ainsi, de nombreux projets sont en cours. Le développement de nouvelles formes d'habitat sera en outre facilité par la loi 3DS, que l'Assemblée examinera à partir du 6 décembre.

La création de la cinquième branche de la sécurité sociale, consacrée au soutien de l'autonomie et dotée d'un budget de plus de 32 milliards d'euros, aidera à structurer nos politiques de soutien à l'autonomie, y compris en Martinique. Ces avancées sont majeures.

L'article 4 vise quant à lui à planifier une hausse progressive du montant de l'APA afin de réduire le reste à charge en établissement pour les plus modestes, ainsi qu'à permettre le financement de nouveaux dispositifs d'aide par l'APA. Une telle disposition relève principalement de la contractualisation locale, avec le développement d'une offre adaptée.

Toutefois, il faut rappeler que la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) tient compte de l'insularité et de l'éloignement des territoires de la métropole. En 2020, 23 millions d'euros au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie, 4,5 millions d'euros au titre de la prestation de compensation du handicap et plus de 870 000 euros pour les actions de prévention ont été alloués à la Martinique. Je rappelle également que, dans le cadre des aides financières versées aux départements, le Gouvernement et notre majorité ont permis des revalorisations salariales sans précédent :183 euros nets par mois dans les EHPAD et autres établissements et services médico-sociaux visés par les accords issus de la mission Laforcade ; une augmentation de 15 % en moyenne pour les personnels des associations de la convention collective de la branche de l'aide à domicile. Cette année, nous avons relevé le tarif plancher à 22 euros de l'heure pour les services d'aides à domicile, plus 3 euros pour la dotation qualité, avec un accompagnement financier de l'État.

L'article 5 vise à favoriser le retour des jeunes docteurs en médecine en Martinique, notamment ceux spécialisés en médecine gériatrique. Si cette demande apparaît comme légitime, elle l'est pour l'ensemble des territoires de France. En effet, les sujets de l'installation et de l'accès au soin sont prégnants sur l'ensemble du territoire national. Structurels, ils ont été très tôt identifiés par le Gouvernement, qui a, lui, aux côtés de notre majorité, mis fin au numerus clausus. Par ailleurs, les ultramarins qui veulent retourner dans leur territoire d'origine peuvent bénéficier du contrat d'engagement de service public lorsqu'ils désirent s'installer dans les zones sous-denses.

L'article 6 vise à étendre, à titre expérimental, l'éligibilité de l'emploi franc à des publics issus d'un parcours d'insertion sur le territoire de la Martinique, ainsi qu'à renforcer le dispositif qui existe au sein du régiment du service militaire adapté (RSMA) de Martinique dans son rôle en matière d'apprentissage et de service aux seniors. Comme vous le savez, la Martinique fait partie des territoires dont le dispositif des emplois francs a été étendu à tous les quartiers prioritaires depuis le 1er avril 2019. S'agissant de l'accompagnement de la dépendance par le RSMA, il semble que l'ensemble des places ne soient pas pourvues, et nous développons en parallèle de nouveaux services civiques dont certains pourront utilement se déployer pour le soutien à l'autonomie.

Aussi, et afin de permettre la continuité des travaux amorcés et des engagements pris, le groupe La République en marche ne pourra soutenir cette proposition de résolution.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La proposition de résolution qui nous est soumise aujourd'hui aborde la question éminemment importante du vieillissement de la population. Nous le savons, et de nombreux rapports et analyses en attestent, les Français vivent de plus en plus vieux, et ce dans toutes nos régions de métropole et d'outre-mer. Cette résolution s'intéresse à ce phénomène dans le territoire de la Martinique, qui présente de véritables particularités.

En effet, comme l'explique la rapporteure, la Martinique était en 2000 le département le plus jeune de France et devrait, à l'horizon 2050, devenir le plus vieux de notre République du fait de l'effet dit de longévité. Le basculement démographique qui se profile nécessite une réelle anticipation et une prise de conscience des pouvoirs publics. En cela, nous rejoignons Mme la rapporteure. Les personnes âgées aux Antilles, et spécialement en Martinique, sont plus en proie à la précarité financière, mais également à l'isolement familial, mais aussi médical – autant de facteurs de vieillissement précipité.

C'est à la lumière de ces constats et à la suite de la remise du rapport Libault en 2019 que cette proposition de résolution a été rédigée et déposée sur le bureau de l'Assemblée en mars 2020. Ce texte et les suggestions qu'il formule s'inscrivent dans un contexte et une logique calendaire qui auraient dû nous amener à débattre et à légiférer sur une loi relative au grand âge et à l'autonomie. Malheureusement, nous n'aurons pas l'occasion de nous atteler à cette tâche au cours de cette législature, en raison des contraintes d'agenda et des arbitrages du Gouvernement.

Néanmoins, et malgré tous les obstacles rencontrés, de nombreux chantiers ont été ouverts et plusieurs mesures d'importance ont d'ores et déjà été prises. Elles répondent ainsi partiellement à plusieurs initiatives proposées par les articles de cette résolution. Nous profitons d'ailleurs de l'occasion pour saluer l'action déterminée de Mme la ministre Brigitte Bourguignon, qui œuvre depuis deux ans au sein de son ministère à faire avancer la politique publique de l'autonomie – certes à petits pas, mais avec des résultats notables.

Ainsi, à travers différents véhicules législatifs, les solutions ici proposées ont été soumises au débat parlementaire et votées. Je pense notamment au Ségur de la santé, qui a renforcé les moyens dévolus à l'investissement hospitalier dans les outre-mer à hauteur de 20 millions d'euros pour la seule année 2021. À cela s'ajoute le financement des frais d'ingénierie pour les EHPAD et les établissements médico-sociaux.

La création de la cinquième branche dès l'été 2020 et sa structuration financière autour de la CNSA, selon l'article 33 du PLFSS pour 2021, ont permis d'éclaircir l'horizon quant à la prise en charge de la perte d'autonomie. L'outre-mer ne sera pas délaissé, au contraire, puisque qu'il bénéficiera de dotations spécifiques liées justement au constat dressé dans l'exposé des motifs de cette proposition de résolution. La promesse de la protection sociale universelle portée par ce Ségur concerne aussi les outre-mer.

Le PLFSS pour 2022, qui a été voté en lecture définitive lundi dernier dans cet hémicycle, consacre de nouveaux financements à l'autonomie, particulièrement pour le maintien à domicile. La création du tarif plancher à 22 euros par heure d'intervention des services d'aides à domicile via l'allocation personnalisée d'autonomie sera pleinement effective en Martinique comme ailleurs, tout comme la dotation qualité supplémentaire, ajoutée par voie d'amendement en cours de discussion.

Par ailleurs, le projet de loi 3DS, dont l'examen débutera la semaine prochaine en séance publique, contient une mesure visant à favoriser le développement, en outre-mer, des solutions d'habitat intermédiaire adaptées à la situation des personnes en perte d'autonomie. Ces résidences d'autonomie à mi-chemin entre le logement individuel et l'EHPAD constituaient d'ailleurs une recommandation importante du rapport Libault. Notre approche domiciliaire ne sera pas une alternative low cost : elle sera pérenne et soutenable.

Enfin, sur la question des emplois francs évoquée dans le texte, il nous semble cohérent d'attendre le terme de l'expérimentation en cours, qui doit s'achever l'an prochain, avant d'envisager sa généralisation.

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, cette proposition de résolution a en quelque sorte subi un vieillissement prématuré du fait des nombreuses avancées évoquées précédemment. Le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés n'y apportera donc pas ses suffrages, considérant que les points qu'elle soulève sont d'ores et déjà déployés ou en cours de déploiement. Nous ne soutiendrons pas la caducité de cette proposition de loi et nous resterons attachés à faire vivre la sagesse stoïcienne de Cicéron : la vieillesse est noble, lorsqu'elle se défend elle-même, garde ses droits, ne se vend à personne, et jusqu'au dernier souffle domine sur les siens.

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous souhaitons avant tout exprimer tout notre soutien et toute notre fraternité à nos concitoyens de la Martinique et de la Guadeloupe, qui connaissent des difficultés depuis deux semaines. Nous espérons vivement que le calme reviendra avec de vraies solutions concertées entre les parties prenantes. J'associe naturellement à mon intervention Josette Manin et Hélène Vainqueur-Christophe, retenues en circonscription pour les raisons que nous connaissons.

Comme cela vient d'être rappelé à plusieurs reprises, la Martinique, qui était un des départements les plus jeunes de France il y a vingt ans, est aujourd'hui, avec la Guadeloupe, l'un des territoires français où la proportion de personnes âgées est la plus forte. Les démographes sont unanimes : dans trente ans, une personne sur deux y sera âgée de 60 ans et plus, faisant ainsi de la Martinique le territoire le plus âgé de l'archipel France. Ainsi, selon l'INSEE, au 1er janvier 2014, la Martinique comptait 12 500 habitants de moins qu'en 2009, avec 383 910 habitants, soit une baisse annuelle moyenne de 0,6 %.

Différentes raisons expliquent cette problématique, et d'abord la transition démographique que le territoire connaît depuis vingt ans. En effet, même s'il existe des difficultés au niveau du pouvoir d'achat et du système de soins, les populations vivent plus longtemps que leurs aînés : 80 ans en moyenne pour les hommes et 84 ans pour les femmes. S'ajoute à cela la chute du nombre de naissances, car les Martiniquaises ont moins d'enfants que leurs parents : on dénombre deux naissances par femme, contre six il y a cinquante ans.

Une autre explication, historiquement malheureuse, concerne l'envoi vers l'Hexagone de jeunes de moins de 35 ans par le bureau pour le développement des migrations dans les départements d'outre-mer pendant vingt ans, depuis les années 1960. C'est autant de jeunes qui ont refait leur vie dans l'Hexagone plutôt qu'en Martinique. Les jeunes fonctionnaires ultramarins mutés dans l'Hexagone peinent à revenir dans leur territoire d'origine, alors qu'ils doivent pouvoir le faire sans difficulté du fait de leur centre d'intérêts matériels et moraux. Notons à ce sujet la question de la prise en charge des aînés lorsque les familles demeurent dans l'Hexagone et celle des nombreux dossiers de mutation des administrés martiniquais qui ne trouvent pas d'issue favorable de la part des administrations.

Enfin, la Martinique fait face à une fuite de jeunes talents. Ils sont nombreux à s'installer durablement dans l'Hexagone pour exercer une activité après leurs études supérieures afin d'avoir de meilleures chances de promotion sociale, ce qui conduit à un déficit migratoire et à une modification de la structure de la population. Quid des difficultés des jeunes à revenir dans leur territoire, quand on voit leurs difficultés pour se faire recruter ou se faire correctement rémunérer à leur retour au pays ?

Par ailleurs, les difficultés économiques imposées par le vieillissement de la population sont exposées par les chiffres inscrits dans la proposition de résolution. Un retraité sur quatre perçoit le minimum vieillesse ; un retraité sur trois âgé de plus de 65 ans vit seul et potentiellement isolé ; plus de la moitié des retraités martiniquais vit en dessous du seuil de pauvreté, qui est de 615 euros en Martinique, contre 997 euros en France hexagonale. Cette situation risque de s'aggraver dans les prochaines années avec l'augmentation du nombre des personnes âgées, seules les entreprises de la Silver économie en tirant avantage.

Madame la ministre déléguée, voici quelques propositions qui permettent de lutter contre le déclin démographique et ses effets sur la Martinique : faciliter le retour des jeunes Antillais, avec une grande vigilance sur les problèmes de discrimination à l'embauche et une réelle prise en compte des CIMM des fonctionnaires ; accorder des prestations familiales dès le premier enfant, le temps de réguler les questions démographiques ; avoir un meilleur pilotage statistique des politiques publiques pour améliorer les leviers de lutte contre le déclin démographique, les chiffres les plus récents remontant souvent à six ans ; mieux accompagner nos aînés martiniquais après leur retraite ; élargir les compétences et les moyens de l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) pour appuyer les retours volontaires des jeunes ultramarins ; enfin, aller vers les chemins de la réparation sur des dossiers comme la pollution au chlordécone ou encore la lutte contre la vie chère et la redynamisation du territoire.

Vous l'avez compris, le groupe Socialistes et apparentés votera cette proposition de résolution de notre collègue Manuéla Kéclard-Mondésir, qui invite le Gouvernement à permettre à la Martinique de prendre en compte et de reconnaître la richesse de ses aînés, mais aussi de retrouver sa vitalité et sa jeunesse pour l'avenir.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la discussion de la proposition de résolution visant à la mise en place d'un plan exceptionnel d'accompagnement du phénomène de vieillissement accéléré de la Martinique ;

Discussion de la proposition de loi visant à atténuer les inégalités d'accès à l'enseignement supérieur générées par Parcoursup ;

Discussion de la proposition de résolution visant à lutter contre la banalisation des discours de haine dans le débat public ;

Discussion de la proposition de loi portant diverses mesures de justice sociale ;

Discussion de la proposition de résolution européenne relative au financement de la transition écologique ;

Discussion de la proposition de loi garantissant le libre-choix des communes en matière de gestion des compétences « eau » et « assainissement » ;

Discussion de la proposition de loi organique pour une protection des biens commun ;

Discussion de la proposition de loi créant un statut juridique des biens communs.

La séance est levée.

La séance est levée à treize heures.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra