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Jean-Michel Jacques
Question N° 4375 au Secrétariat d'état à l’écologie


Question soumise le 27 décembre 2022

M. Jean-Michel Jacques interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la lutte contre la prolifération et l'expansion des frelons asiatiques. Originaire d'Asie, le frelon vespa velutina aurait été introduit en France par voie accidentelle en 2004 dans le sud-ouest de la France, avant de s'étendre à quasiment tous les départements de la France métropolitaine. Par un arrêté ministériel du 26 décembre 2012, cette espèce exotique exponentiellement envahissante a été qualifiée de nuisible de catégorie 2. D'une part, le « frelon asiatique » représente une menace pour les abeilles domestiques et, par voie de conséquence, fait l'objet de préoccupations pour les apiculteurs. Dans le cas de ces derniers, le frelon asiatique engendre, au-delà de la destruction directe des abeilles, un stress dans les ruches tel que cela nuit à la pondaison des abeilles reines, réduisant ainsi le nombre d'abeilles d'hiver, ces dernières assurant la production de l'année suivante. D'autre part, le développement de cette espèce a un impact conséquent sur les cultures fruitières et s'apparente également à un enjeu de santé publique, du fait de la potentielle létalité de leurs piqûres pour l'être humain. En théorie, il incombe, conformément à l'article L. 201-4 du Code rural et de la pêche maritime, aux services de l'État de prendre en charge les mesures relatives aux dangers sanitaires, ainsi que, conformément à l'article L. 411-8 du code de l'environnement, les mesures relatives à la lutte contre les espèces exotiques envahissantes. Nonobstant, dans les faits, la lutte contre la prolifération de ces espèces dont le frelon asiatique et les dangers y afférents repose bien souvent sur les collectivités territoriales et les particuliers. Toutefois, cette lutte représentant un coût non négligeable pour ces derniers, cela engendre une dissuasion à la mettre en œuvre, en l'absence de financement systématique de la part de l'État ou des collectivités territoriales. Ainsi, il souhaiterait savoir quelles dispositions le Gouvernement entend mettre en œuvre pour un piégeage massif, régulier et coordonné sur le territoire afin de lutter contre la prolifération de cette espèce exotique invasive.

Réponse émise le 17 janvier 2023

La lutte contre le frelon asiatique (Vespa velutina nigrithorax), espèce ayant connu une expansion rapide dès son introduction accidentelle en Aquitaine en 2004, est encadrée par un corpus législatif et réglementaire complet et détaillé ci-après. Le plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation qui a été lancé conjointement par les ministères de la transition écologique et de l'agriculture en novembre 2021 est de nature à soutenir une bonne application des moyens de lutte (action 4.4.4 du plan, disponible ici : https://agriculture.gouv.fr/plan-national-en-faveur-des-insectes-pollinisateurs-et-de-la-pollinisation-2021-2026-DP). Depuis fin avril 2021, une seule réglementation concourt à la lutte contre cette espèce : celle portant sur les espèces exotiques envahissantes (EEE) pilotée par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (MTECT). Celle portant sur les organismes de quarantaine, pilotée par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA), a exclu le frelon asiatique au regard de la nouvelle législation européenne dite "loi de santé animale » (Cf ci-après). Concernant la réglementation spécifique sur les EEE, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a complété le code de l'environnement pour intégrer des dispositions législatives permettant d'agir contre les EEE (articles L. 411-5 et suivants). Au regard de l'intérêt de préservation du patrimoine biologique, des milieux naturels et des usages associés, l'article L.411-6 de du code de l'environnement interdit sur le territoire national, l'introduction, la détention, le transport, le colportage, l'utilisation, l'échange, la vente ou l'achat de tout spécimen vivant d'EEE, dont la liste est fixée par l'arrêté interministériel du 14 février 2018. Le frelon asiatique est inscrit sur cette liste. Les opérations de lutte sont définies à l'article L.411-8 du code de l'environnement. Ainsi, dès constat de la présence dans le milieu d'une EEE, le préfet de département peut « procéder ou faire procéder (…) à la capture, au prélèvement, à la garde ou à la destruction de spécimens » d'EEE. Un arrêté préfectoral précise alors les conditions de réalisation de ces opérations. Les préfets peuvent notamment ordonner la destruction de nids sur des propriétés privées. Le financement des opérations de lutte contre le frelon n'est pas pris en charge par l'État, au regard du degré très large d'envahissement du territoire métropolitain par l'espèce. La destruction des nids reste à la charge des particuliers et ses coûts peuvent être, le cas échéant, pris en charge en tout ou partie par des financements locaux émanant de collectivités territoriales Parallèlement, la direction générale de l'alimentation du MASA accompagne financièrement l'Institut technique et scientifique de l'apiculture et de la pollinisation (ITSAP – Institut de l'Abeille) et le MNHN (Muséum national d'Histoire naturelle) pour leurs actions techniques et scientifiques relatives à l'identification et à la validation des outils de lutte contre le frelon asiatique. Les actions financées comportent deux volets : une méthode concernant le piégeage des fondatrices au printemps et le développement d'un protocole pour la destruction de nids par appâts empoisonnés. Le premier volet des travaux concernant le piégeage est arrivé à son terme et a montré que le nombre de nids du frelon asiatique décroît significativement lorsque la méthode est conduite durant plusieurs printemps successifs, avec un maillage spatial fin et régulier (plus de 200 pièges répartis de façon homogène sur environ 10 km2 autour d'un rucher à protéger). Un complément d'étude est envisagé sur 2023, afin d'approfondir les résultats. Le second volet vise à vérifier l'efficacité d'appâts empoisonnés et leurs impacts sur l'environnement. Dans le cas où la méthode se montrerait efficace, il reviendra à la filière et/ou à un industriel de réaliser les démarches d'obtention des autorisations « substances biocides », puis « produits ». Ce projet devrait également permettre de proposer une méthode alternative au fipronil (hautement toxique) utilisé sans autorisation pour lutter contre les frelons. Enfin, il est à noter que le frelon asiatique n'est pas réglementé par le ministère de la santé et des solidarités au titre des espèces nuisibles pour la santé humaine car il s'avère, au regard des données des centres anti-poisons, que l'espèce ne présente pas de danger supérieur par rapport d'autres hyménoptères (frelon européen, guêpes, etc). Si cette situation venait à changer du fait de l'extension de l'espèce, la question de sa réglementation serait à réexaminer.

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