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Jean-Louis Thiériot
Question N° 4708 au Ministère auprès du ministre du travail


Question soumise le 17 janvier 2023

M. Jean-Louis Thiériot alerte M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur le sort des apprentis liés par un contrat d'apprentissage à une entreprise faisant défaut dont les mandataires sociaux ont disparu. Loin d'être anecdotiques, ces situations se retrouvent fréquemment et présentent des analogies : les apprentis ont signé un contrat d'apprentissage avec des entreprises de restauration rapide ou de réparation automobile qui s'avèrent être en réalité probablement les devantures de trafics et se volatilisent du jour au lendemain sans, évidemment, avoir respecté les formalités de rupture du contrat ni engagé la moindre procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Les apprentis qui sont officiellement toujours liés par contrat à l'entreprise se trouvent alors dans une impasse au regard de la poursuite de leur formation, une telle situation n'ayant pas été envisagée par les actuelles dispositions du code du travail relatives l'apprentissage. En effet, si l'article L. 6222-18 du code du travail prévoit que lorsqu'une entreprise a été liquidée, il appartient au liquidateur de notifier à l'apprenti la rupture du contrat de travail et de lui remettre les documents de fin de contrat, ce qui permet en ce cas à l'apprenti de bénéficier des disposition de l'article L. 6222-18-2, lesquelles disposent que « le centre de formation dans lequel est inscrit l'apprenti prend les dispositions nécessaires pour lui permettre de suivre sa formation théorique pendant six mois et contribue à lui trouver un nouvel employeur susceptible de lui permettre d'achever son cycle de formation » et que « l'apprenti bénéficie pendant cette période du statut de stagiaire de la formation professionnelle », ce dispositif ne peut s'appliquer lorsque les mandataires sociaux se sont évanouis dans la nature avant toute liquidation de l'entreprise. En outre, même lorsqu'il existe une procédure de liquidation, les dispositions précitées ne sont pas adaptées à l'urgence de la situation. En effet, la nomination d'un liquidateur ne garantit pas que des mesures soient prises rapidement au regard de la situation contractuelle de l'apprenti. Dans la pratique, on constate que les procédures de liquidation durent plusieurs mois, voire plusieurs années. Un tel délai est évidemment incompatible avec le besoin de l'apprenti de poursuivre sa formation sans attendre. Par ailleurs, les articles L. 6225-1 et suivants du code du travail permettent au préfet de s'opposer à l'engagement d'apprentis par une entreprise « lorsqu'il est établi par les autorités chargées du contrôle de l'exécution du contrat d'apprentissage que l'employeur méconnaît les obligations mises à sa charge » et dans ce cas, de décider que les contrats en cours ne peuvent continuer à être exécutés. Ainsi, la décision de rupture du contrat est nécessairement corellée à une longue « procédure d'opposition à de nouveaux engagements » tout à fait inappropriée puisqu'elle ne permet pas de répondre à l'urgence d'une poursuite immédiate de l'apprentissage chez un autre formateur, faisant perdre une année scolaire à l'apprenti. En l'absence de recours à cette procédure, l'apprenti ne peut bénéficier des dispositions subséquentes de l'article L. 6225-3-1 du code du travail qui prévoient l'assistance de son centre de formation suite à la rupture de son contrat d'apprentissage par le préfet. Aucune disposition du code du travail ne permet donc actuellement à l'apprenti dont l'entreprise fait défaut d'obtenir une rupture immédiate de son contrat d'apprentissage et l'assistance de son centre de formation afin de poursuivre sans délai sa formation dans les meilleures conditions. M. le député attire l'attention de M. le ministre sur le 5° de l'article L. 6231-2 du code du travail qui donne pourtant mission aux centres de formation des apprentis « de permettre aux apprentis en rupture de contrat la poursuite de leur formation pendant six mois tout en les accompagnant dans la recherche d'un nouvel employeur, en lien avec le service public de l'emploi » et dispose que « les apprentis en rupture de contrat sont affiliés à un régime de sécurité sociale et peuvent bénéficier d'une rémunération, en application des dispositions prévues respectivement aux articles L. 6342-1 et L. 6341-1 ». Il attire enfin son attention sur le problème de la validation des heures d'apprentissage effectuées au sein de l'entreprise qui se pose dès lors que le maître d'apprentissage a disparu. La disparition physique du maître d'apprentissage prive en effet l'apprenti de la remise d'une attestation des heures validées au sein de l'entreprise au titre de la formation pratique. Chaque situation étant différente, il semble judicieux de prévoir un dispositif individualisé d'évaluation des heures d'apprentissage validées. En effet, bien que l'apprenti soit victime de la situation, il est dans son intérêt que l'ensemble des heures ne soient pas automatiquement validées mais que les acquis de l'apprentissage fassent l'objet d'une évaluation concrète afin qu'à l'obtention de son diplôme, l'apprenti soit réellement formé et en mesure de trouver et garder un travail. Au regard des difficultés évoquées, M. le député interroge donc M. le ministre sur les solutions qu'il envisage de mettre en œuvre à court et moyen terme pour permettre aux apprentis liés par un contrat à une entreprise faisant défaut d'obtenir une rupture de leur contrat, une attestation des heures d'apprentissage validées, le statut de stagiaire de la formation professionnelle rémunéré pendant six mois et l'assistance de son centre de formation pour retrouver un autre employeur. Il lui signale à cet égard la nécessité d'une procédure rapide qui garantisse aux apprentis la poursuite de leur formation et la validation de leur diplôme nécessaire à leur bonne insertion professionnelle et souhaite connaître les perspectives à ce sujet.

Réponse émise le 9 mai 2023

Le Gouvernement est particulièrement attentif à ce que les apprentis puissent valablement suivre tant leur formation pratique en entreprise que théorique en organisme de formation. Le Gouvernement est sensible aux difficultés auxquelles sont confrontés les apprentis dont le contrat est rompu de manière anticipée. C'est d'ailleurs en ce sens que l'article L. 6222-18-2 du code du travail avait été élaboré lors des travaux de la loi du 5 septembre 2018, afin de leur permettre de poursuivre leur cycle de formation théorique pendant six mois sous statut de stagiaire de la formation professionnelle, et de bénéficier de l'accompagnement de leur organisme de formation pour retrouver un employeur afin de signer un nouveau contrat d'apprentissage. Dans cette logique et afin de répondre à toutes les situations, le Gouvernement sera amené à évoquer avec les partenaires sociaux des pistes d'évolution législatives permettant de protéger les apprentis et de leur permettre de poursuivre leur formation dans l'attente de la conclusion d'un nouveau contrat d'apprentissage.

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