Intervention de Frédéric Lefebvre

Réunion du 26 juillet 2016 à 14h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédéric Lefebvre, député :

J'ai apprécié, Monsieur le ministre, que dans notre lutte contre le mouvement que vous avez désigné comme notre ennemi, Daech, vous ayez lié lutte à l'intérieur et à l'extérieur de nos frontières. À l'extérieur, votre mission est, vous l'avez dit, de combattre l'ennemi en son coeur. À l'intérieur, nous devrions, ensemble, définir d'autres types de déploiement et d'autres réponses que la seule opération Sentinelle.

Je vous ferai part d'une inquiétude, suivie d'une proposition.

Je suis inquiet de voir l'unité nationale vaciller, et cette évolution ne devrait pas s'arranger au cours des mois qui viennent : les échéances électorales approchant, le réflexe d'unité nationale est mis à mal dans le débat public. On sait pourtant combien cela peut affaiblir nos armées, nos militaires, nos forces de sécurité et même nos institutions, alors que Daech, symbole du terrorisme dans le monde, ne cherche en nous frappant qu'à provoquer la division dans les démocraties. Comme je le fais de manière répétitive depuis des mois, je redis qu'en ces circonstances une réponse unitaire et le sang-froid sont indispensables.

Dans cet état d'esprit, je ferai une proposition qui n'est nullement une critique de l'action du Gouvernement en cette matière mais une forme d'autocritique de la réponse qu'apporte notre démocratie depuis des années. Ainsi, l'opération Sentinelle donne parfois le sentiment d'être en extrême décalage avec l'enjeu ; cette force éprouve des difficultés grandissantes à remplir sa mission première, qui est de rassurer la population. Pour vous en être entretenu avec certains de ceux qui sont mobilisés dans ce cadre, vous savez qu'ils ont l'impression d'être requis à des fins de communication en direction de la population et, malheureusement, insuffisamment à des fins opérationnelles.

La France, comme les autres démocraties, s'est pourtant dotée de règles spécifiques qui peuvent s'appliquer en l'espèce, qu'il s'agisse des dispositions des livres IV et IV bis du code pénal ou de celles du code de la défense, mais nous n'osons pas les utiliser. Le président de la République avait engagé une révision constitutionnelle dont j'avais, à l'époque, salué l'objet. Elle s'inspirait du reste des recommandations faites par M. Édouard Balladur après qu'il avait été consulté par le précédent chef de l'État. Il me paraissait opportun de revoir les procédures constitutionnelles relatives à l'état d'urgence et à l'état de siège. Malheureusement, et nous devons collectivement en assumer la responsabilité, le piteux débat sur la déchéance de nationalité a empêché que ce travail aille à son terme, et l'on rend compte aujourd'hui à quel point il est difficile. Je souhaite que nous réfléchissions ensemble à renforcer significativement votre rôle, Monsieur le ministre, et celui des autorités militaires dans certains cas bien identifiés afin de mieux répondre à la menace.

J'emploie ce mot à dessein, puisque les livres IV et IV bis du code pénal concernent respectivement « les crimes et délits contre la nation, l'État et la paix publique » et « les crimes et des délits de guerre ». On a basculé du risque à la menace ; quand on emploie le terme de « guerre », il devient indispensable de déployer, dans l'unité, de nouvelles stratégies adaptées à la menace qui pèse sur notre population et notre territoire.

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