Intervention de Marc Le Fur

Séance en hémicycle du 12 janvier 2017 à 15h00
Éthique du sport régulation et transparence du sport professionnel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Le Fur :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, ce texte est positif, consensuel. Il constitue un progrès ; il a le mérite de traiter de front des problèmes qui se posaient depuis longtemps au sport professionnel, notamment au football, et cela n’a rien d’illégitime puisque ce sport comporte des enjeux considérables, y compris économiques. Notre groupe votera donc cette proposition de loi sans hésitation, comme l’ont dit Sophie Dion et Guénhaël Huet.

Au coeur de ce texte, il y a la question de l’éthique sportive, et c’est bien normal. Il s’agit de la lutte contre la triche sous toutes ses formes. Dans le domaine du cyclisme, notre pays a su lutter contre bien des formes de triche, en particulier celles liées au dopage : depuis les années 60-65, puis durant les années 80 et plus récemment encore, on a su prendre un certain nombre de dispositions qui font désormais de la France une référence, un exemple dans ce domaine, qui a inspiré d’autres législations.

Aujourd’hui, une nouvelle forme de tricherie nous menace : l’utilisation, avec les progrès de la miniaturisation, par certains cyclistes, professionnels ou non, de dispositifs d’aide mécanique dissimulés dans le cadre de leur vélo. Autant d’éléments qui rendent assez difficile leur détection. Un premier cas de triche a été détecté en janvier 2016, lors d’une course de cyclo-cross en Belgique, grâce au nouveau test par résonance magnétique déployé par l’Union cycliste internationale. La Fédération française de cyclisme a également utilisé une caméra thermique et fait démonter des vélos à l’arrivée des championnats de France 2016, à l’issue des épreuves féminines, amateurs ou Élite. Plus récemment, le 8 juillet dernier à Lisle-Jourdain – vous y étiez, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure –, nous avons pu voir la mise en oeuvre de ce type de contrôle à l’occasion du départ d’une étape du Tour de France. Cette mesure existe donc et a le mérite d’appréhender un sujet réel.

Comme pour la lutte contre le dopage, notre pays peut être à l’avant-garde en créant un délit pénal de manière à ce que, comme dans d’autres matières, les services de la gendarmerie et de la police puissent être saisis pour mener à bien des investigations et éventuellement déférer des affaires de ce type. Aujourd’hui, ce n’est pas de l’ordre du possible. Dans votre rapport, madame Dubié, vous écrivez : « La fraude technologique constitue également l’un des nombreux défis auxquels la présente proposition de loi entend répondre. » Et je vous remercie de mentionner cet élément qui nous engage en termes d’ambition. Vous indiquez également que l’article 2 confie aux fédérations délégataires « le soin de fixer les règles permettant de contrôler l’application des règles techniques de leur discipline et d’en sanctionner le non-respect ». J’en conviens : les fédérations ont un rôle à jouer en ce domaine. Mais cela ne suffira pas. Permettez-moi de considérer que ce texte ne va pas assez loin et qu’il conviendrait d’édicter contre la fraude technologique un dispositif complet, coercitif, inspiré de celui existant pour le dopage.

C’est pourquoi, avec un certain nombre de spécialistes et avec la Fédération de cyclisme, dont son président, David Lappartient, je me suis efforcé de rédiger un texte qui a donné lieu à une proposition de loi, déposée le 20 juillet dernier et cosignée par bon nombre de nos collègues. Celle-ci entend nous donner les moyens de lutter contre ce dispositif non seulement par l’action des fédérations – elles agiront d’elles-mêmes, il n’y a pas d’inquiétude à avoir sur ce point –, mais aussi d’une manière plus large en créant une incrimination et en mettant en place des sanctions.

Il me semble indispensable que nous profitions de l’examen du texte qui nous est soumis aujourd’hui pour définir une incrimination de fraude mécanique et technologique. Si nous restions inertes, la crédibilité de nombreuses compétitions serait en effet susceptible d’être menacée ; je pense en particulier à nos compétitions cyclistes car elles ne sont pas comme les autres, elles font partie de notre patrimoine, à commencer par le Tour de France. Je rappelle à ceux qui l’auraient oublié qu’il s’agit aujourd’hui de l’épreuve sportive la plus regardée et la plus médiatisée, tout au moins s’agissant d’une épreuve annuelle – la comparer avec la Coupe du monde de football ou avec les Jeux Olympiques n’aurait guère de sens puisque ces manifestations n’ont lieu que tous les quatre ans. C’est un patrimoine qu’il nous faut préserver. Pour toutes ces raisons, en accord avec la Fédération et après avoir échangé avec vous, monsieur le secrétaire d’État, je propose d’introduire dans notre débat cette question de façon à ne pas être demain en réaction, mais à être dès aujourd’hui proactifs pour que l’éthique sportive soit au coeur de votre dispositif. Je suis convaincu qu’il l’est déjà, mais je vous propose de faire preuve ici, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, d’une petite ambition supplémentaire.

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