Intervention de Benoît Hamon

Réunion du 30 septembre 2015 à 16h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBenoît Hamon :

Au cours des derniers mois, du point de vue de ceux qui sont attachés au projet européen et aux valeurs telles que la démocratie, la tolérance et l'hospitalité, l'Union européenne a donné une image assez désastreuse sur la crise des réfugiés, sans même parler de l'épisode grec. Où en serions-nous s'il n'y avait pas eu cette initiative franco-allemande qui a finalement repris une partie des propositions de Jean-Claude Juncker concernant la répartition des réfugiés sur deux ans ? Je veux pour preuve de cette image désastreuse les tristes encarts publicitaires que l'on trouve dans la presse arabophone, notamment au Liban et en Jordanie, et qui, invoquant l'exemple du Danemark ou de la Hongrie, invitent les réfugiés à rester dans les camps, contre leur gré, et à ne surtout pas se rendre en Europe.

Vous avez indiqué, monsieur le ministre, qu'il fallait conditionner l'instauration du mécanisme permanent de répartition des demandeurs d'asile, d'abord, à la mise en place des hot spots et, ensuite, à la conduite d'un travail plus approfondi avec les pays qui accueillent ces réfugiés en premier, notamment la Turquie, la Jordanie et le Liban. Je rentre d'une mission au Liban avec Axel Poniatowski et deux autres collègues. Nous avons visité plusieurs camps de réfugiés et constaté que le cri d'alarme de Ban Ki-moon était tout à fait fondé : les agences des Nations unies, notamment le Programme alimentaire mondial et le HCR, sont en faillite. Au Liban, le HCR ne couvre que 40 à 50 % des besoins en aide alimentaire !

En outre, le Liban ne souhaitant pas répéter l'expérience qu'il a connue avec les réfugiés palestiniens, les camps restent privés et illégaux : les réfugiés y paient, entre autres, un loyer et l'électricité, et ne peuvent guère vivre correctement. Actuellement, la plupart des familles ne souhaitent pas aller au-delà du Liban ou de la Jordanie, mais, plus la précarité et la pauvreté grandiront, notamment du fait qu'elles ne peuvent pas travailler, plus la tentation sera grande de partir plus loin et de grossir les flux de migrants qui viennent en Europe. Par ailleurs, la présence de 1,2 à 1,5 million de réfugiés sunnites risque de déstabiliser le Liban, dont l'équilibre institutionnel et confessionnel est extrêmement fragile.

L'Union européenne a pris des engagements, mais ils restent très en deçà des besoins des Nations unies, qui ont réclamé, je le rappelle, 20 milliards de dollars pour faire face aux crises migratoires cette année. C'est donc, pour moi, un point d'inquiétude.

Dans le même temps, si l'on en croit le projet de loi de finances, la France envisage de diminuer son budget de coopération et d'aide au développement. Ce serait, selon moi, un mauvais signal adressé aux pays qui accueillent aujourd'hui l'essentiel des réfugiés de la guerre en Syrie et sont obligés de redoubler d'efforts pour limiter les flux migratoires. Même si cette question ne relève pas directement de votre compétence, monsieur le ministre, j'aimerais connaître votre avis sur ce qu'il serait nécessaire de faire pour améliorer notre aide à ces pays.

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