Intervention de Noël Mamère

Réunion du 17 septembre 2014 à 9h45
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNoël Mamère :

Je remercie à mon tour le rapporteur pour la qualité et la clarté de son propos. Il a très bien posé les limites du texte qui nous est soumis aujourd'hui en retraçant le long chemin de croix du Protocole de Kyoto depuis 1997. Certains pays s'en sont d'ores et déjà retirés, et la réussite dépend largement de l'Union européenne et des Etats-Unis qui, eux, ne l'ont pas ratifié.

Vous avez bien souligné que le respect de l'engagement de baisser les émissions de gaz à effet de serre de 20 % que l'on a constaté n'était pas dû à notre volonté politique mais au seul effet de la crise économique qui a permis ce résultat. Nous ne sommes pas encore aux objectifs de moins 30 % de gaz à effet de serre annoncés d'ici 2030 ; et nous ne serons pas non plus à leur division par quatre d'ici à 2050, comme l'a recommandé le GIEC. Nous sommes loin du compte, comme sur le marché du carbone qui n'a pas fonctionné compte tenu du fait que le prix de la tonne est passé de 27 euros à 5 euros, ce qui a cassé le mécanisme.

Par conséquent, le contexte international et les perspectives de la Conférence de Paris l'an prochain ne sont pas sur de bons augures. Il y a des réticences très fortes de la part de nombreux pays, ne serait-ce que des émergents, à s'inscrire dans cette logique. On aurait cependant tort de les montrer du doigt, dans la mesure où, depuis 1997, nous ne respectons pas nous-mêmes nos engagements.

Nous ne sommes pas non plus à la hauteur, que ce soit l'Union européenne ou la France, sur le volet des énergies renouvelables, ou en ce qui concerne notre efficacité énergétique. Je rappelle à ce sujet que l'Allemagne, que l'on critique si facilement pour son retrait du nucléaire, consomme 20 % d'énergie en moins que la France ! Des pistes existent que nous n'explorons pas suffisamment sur la question centrale de l'efficacité énergétique qui suppose de passer à une logique de sobriété énergétique.

J'ajoute que ce n'est pas seulement d'une problématique environnementale qu'il s'agit. Nous abaissons au niveau technique un débat éminemment politique. Je vous renvoie au journal Libération de ce matin qui publie une étude aux termes de laquelle il ressort que le nombre des réfugiés climatiques est d'ores et déjà trois fois supérieur à celui des réfugiés dont l'exode est dû aux conflits. Se posent donc des questions tenant à nos capacités d'accueil et à la redéfinition du statut de réfugiés, dans la mesure où la Convention de Genève ne pourra s'appliquer à des personnes provenant de pays qui demain n'existeront plus, car noyés sous les eaux ou désertifiés. Il est par conséquent urgent de s'engager sur d'autres logiques, de transition énergétique.

Sur ces sujets, ni l'Union européenne ni la France n'ont de réponses à la hauteur des enjeux : c'est notamment le cas du projet de loi sur la transition énergétique dont nous allons débattre d'ici peu. De même, au niveau de ce qui est proposé par la communauté internationale, rien de ce qui est avancé n'a de caractère contraignant. Devra-t-on attendre d'être face à la catastrophe pour s'engager dans des politiques autoritaires ? Doit-on attendre les atteintes à la démocratie qui ne manqueront pas alors de survenir ou essaie-t-on de s'organiser avant, démocratiquement, avec une acceptation sociale des contraintes au niveau mondial, alors que cette transition énergétique est indispensable pour notre survie ? Je crains que nous soyons dans une perspective de voir émerger des sociétés de contraintes. Pourtant le rapport Stern indique que cette transition comporte des gisements d'emplois importants tout en favorisant la compétitivité. M. Mario Draghi a prévu que la BCE finance de grands projets d'infrastructures ; reste à savoir lesquels. Il faudrait privilégier l'efficacité énergétique, plutôt que des projets inutiles et fort coûteux comme la liaison ferroviaire Lyon-Turin.

Le projet de loi sur la transition énergétique à venir laisse encore une place majeure à EDF quant aux décisions relatives au nucléaire ; ce n'est pas un projet de transition énergétique mais une stratégie bas carbone, ce qui est tout autre chose et ne correspond pas aux enjeux.

Le groupe Écolo votera bien sûr pour l'amendement, mais avec toutes les limites posées par notre rapporteur.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion