Intervention de Roger-Gérard Schwartzenberg

Séance en hémicycle du 28 mars 2013 à 15h00
Recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoger-Gérard Schwartzenberg :

En revanche, les chercheurs français, soumis à un régime d'interdiction-dérogations, risquent d'être distancés dans la compétition scientifique internationale, marquée par de nombreuses avancées. Notre législation est en effet l'une des plus restrictives au monde. De ce fait, bien que la France soit une grande nation scientifique, elle risque de se trouver dépassée dans ce secteur important de la recherche.

De plus, cette position juridique, ambiguë et incohérente, est peu lisible, peu compréhensible à l'étranger, alors que la coopération internationale est essentielle dans ce domaine. Nos chercheurs doivent pouvoir coopérer avec nos partenaires sur des bases claires.

Pourtant, cette situation juridique persiste, bien que les instances consultatives les plus qualifiées aient pris position à plusieurs reprises pour que le régime d'interdiction assorti de dérogations soit remplacé par un régime d'autorisation encadrée.

L'Agence de la biomédecine l'a fait dans son rapport d'octobre 2008 et le Conseil d'État dans une étude de mai 2009. L'Académie nationale de médecine a pris la même position dans deux rapports de 2010. Il faut ajouter, bien sûr, le rapport adopté le 8 juillet 2010 par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, dont parlait son premier vice-président à l'instant, qui estime qu'il n'est pas pertinent de maintenir un régime d'interdiction.

Dans ce rapport, on peut lire : « Prôner un interdit pour en organiser la transgression revient à stigmatiser les chercheurs qui conduisent ces recherches. C'est une forme indirecte d'atteinte à la liberté de la recherche sans réelle justification. Un régime d'autorisation encadrée par l'Agence de biomédecine est plus adapté à la réalité scientifique et tout aussi protecteur de l'embryon. »

Bref, pour ne pas en rester là, une proposition de loi a été déposée au Sénat et adoptée par celui-ci le 5 décembre dernier, de manière consensuelle, à une majorité importante, loin de tout clivage systématique. En effet, cette proposition de loi a été votée par les groupes de la majorité sénatoriale, mais aussi par un nombre important de sénateurs appartenant à d'autres groupes.

Chers collègues, il a onze ans, en janvier 2002, l'Assemblée nationale avait adopté en première lecture un projet de loi de bioéthique posant en principe l'autorisation des recherches sur les cellules souches embryonnaires, en l'accompagnant d'un strict dispositif d'encadrement. Pourtant, quelques mois plus tard, c'est la solution inverse qui a été retenue : l'interdiction de ces recherches, assortie de certaines dérogations.

Beaucoup de temps a été perdu depuis le vote initial de 2002, au préjudice des chercheurs et surtout, ce qui est encore plus grave, au préjudice des malades en attente de thérapies nouvelles.

Le rôle de l'État n'est pas d'entraver la science biomédicale par une législation inappropriée et obsolète. Il importe donc d'agir pour modifier cette législation, afin que la recherche cesse d'être la recherche du temps perdu. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP, SRC et écologiste.)

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