Intervention de Pierre Moscovici

Séance en hémicycle du 24 juin 2013 à 16h00
Consommation — Présentation

Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances :

Monsieur Lefebvre, c’est lorsque vous étiez dans ce ministère que la DGCCRF a le plus souffert.

La discussion parlementaire doit permettre d’avancer encore sur ce point et de trouver, dans les mois à venir, des solutions précises pour répondre aux demandes du bâtiment ou des entreprises exportatrices.

Autre mesure importante pour nos PME : le rééquilibrage des relations commerciales entre distributeurs et fournisseurs.

Je m’arrête un instant sur ce point, pour m’adresser en particulier – vous voudrez bien m’en excuser – aux députés de la majorité. Lorsque nous étions dans l’opposition – j’étais sur ces bancs –, nous avions largement critiqué la loi de modernisation de l’économie, estimant qu’elle faisait la part trop belle à la grande distribution.

Pour ma part, devenu ministre de l’économie et des finances dans ce Gouvernement, j’assume parfaitement la nécessité d’un rééquilibrage, au premier chef au profit des producteurs et des PME de l’agroalimentaire.

Aujourd’hui, reconnaissons-le, des pratiques abusives persistent. Par exemple, certains distributeurs refusent de répercuter les hausses de prix demandées par les industriels qui se retrouvent étranglés par de fortes hausses des prix des matières premières, dans les secteurs du lait, de la confiserie ou de la charcuterie notamment.

Le projet de loi impose donc à la grande distribution une clause de renégociation obligatoire des prix dans les contrats portant sur certains produits alimentaires, pour faire face à la volatilité des prix des matières premières. Je reprends la fable du pot de terre contre le pot de fer, car au fond l’idée est la même : éviter que des petites structures, des petites PME au pouvoir de négociation limité, ne se voient imposer des contrats léonins qui déséquilibrent profondément les relations économiques.

Je remercie les rapporteurs, notamment Mme Le Loch pour les amendements qu’elle a fait adopter en commission et qui ont permis d’aller plus loin en s’assurant que la mesure sera applicable à tous les secteurs concernés.

L’équilibre des relations commerciales entre distributeurs et fournisseurs est au demeurant une préoccupation constante du Gouvernement, au-delà du champ même du projet de loi que vous allez examiner.

Il y a quelques semaines, certaines fédérations professionnelles ont alerté le Gouvernement et le médiateur inter-entreprises quant à la captation abusive du crédit d’impôt compétitivité emploi par de gros acheteurs, qui exigeraient de leurs fournisseurs qu’ils en répercutent directement les bénéfices dans leur politique de prix. Nous avons immédiatement réagi, avec Arnaud Montebourg, pour informer les PME des voies de recours à leur disposition, si elles devaient se trouver dans ce type de situation, et naturellement nous n’hésiterons pas à agir si des pratiques de ce type devaient se confirmer ou s’amplifier.

Par ailleurs, j’affirme très solennellement devant la représentation nationale que toute pratique abusive de tel ou tel grand distributeur, quel qu’il soit, sera immédiatement sanctionnée, car tout le monde doit être jugé selon la même toise républicaine.

Ma fonction, ainsi que je l’indiquais tout à l’heure, comporte l’ordre public économique. Je dispose donc de par la loi d’un pouvoir d’assignation devant le juge des entreprises qui se rendraient coupables d’abus à la loi de modernisation de l’économie.

J’ai donné des instructions très claires à la répression des fraudes pour assigner toute entreprise que les services de l’État estimeraient en infraction. Vous pourrez constater très rapidement, si de telles pratiques devaient persister, les effets de cette instruction.

À ceux qui nous disent que nous n’allons pas assez loin face à certains grands distributeurs dont les pratiques étranglent leurs fournisseurs, je réponds solennellement que le Gouvernement les a entendus et se montrera d’une totale fermeté pour le respect de la loi, au nom de la préservation de l’emploi dans nos territoires et au nom de ce beau principe républicain qu’est l’égalité.

Sachez donc que l’engagement du Gouvernement sur ce point est total. Mais en même temps, nous ne devons pas prendre le risque d’un bouleversement complet de nos règles. Nos entreprises, que je connais bien pour les rencontrer régulièrement, quelle que soit leur taille – ce matin encore se tenaient à Bercy les Assises européennes du financement des PME – ont besoin également de stabilité ; Benoît Hamon et moi ne l’ignorons pas.

Nous ne pouvons pas, à l’heure actuelle, prendre le risque de changements de la loi qui se traduiraient par une inflation des prix des produits alimentaires, rognant ainsi sur le pouvoir d’achat, lequel est au coeur de nos préoccupations. Je suis sûr de pouvoir compter sur la vigilance de la représentation nationale sur ce point particulier.

Benoît Hamon portant ce texte au premier chef, je vais le laisser le présenter de manière plus détaillée ; il sera à vos côtés pendant la totalité de ce débat. Pour ma part, j’en termine par une autre petite révolution introduite par ce texte : la mise en place d’un registre national des crédits, qui a été adoptée par la commission des affaires économiques.

Débattue depuis longtemps et parfois contestée, cette mesure a donné lieu à une véritable bataille ; mais cette petite révolution va enfin voir le jour. Aux côtés de l’action de groupe et du rééquilibrage déjà évoqués, cette conquête centrale et même majeure consacre ce texte comme la révolution structurelle dont je parlais en introduction.

C’est un pas essentiel dans la lutte contre le surendettement dans notre pays,…

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