Intervention de Hervé Pellois

Séance en hémicycle du 10 septembre 2013 à 21h45
Accès au logement et urbanisme rénové — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Pellois :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové complète les nombreuses mesures déjà votées et entrées en vigueur depuis le début du quinquennat avec un même objectif : accroître l’effort de construction de logements tout en luttant contre l’étalement urbain. C’est surtout sur ce dernier thème que je m’attarderai.

La France s’est en effet fortement urbanisée au cours de ces deux dernières décennies. Les trois-quarts de la population vivent désormais en ville ou en périphérie. Cette évolution est marquée par un étalement urbain sans précédent. L’exemple du Morbihan, dont je suis l’un des élus, est à ce titre révélateur : chaque année, 1 500 hectares d’espaces agricoles sont urbanisés, soit la perte d’une trentaine exploitations agricoles en moyenne.

Les territoires artificialisés ont progressé de près de 40 % entre 1992 et aujourd’hui, avec toutes les conséquences qui en découlent en matière environnementale. Les parcelles constructibles bénéficiant de la meilleure situation voient leur valeur augmenter considérablement. Ce critère foncier conduit aujourd’hui les populations les plus jeunes et moins aisées à s’installer en périphérie, souvent en deuxième, voire en troisième couronne. Ce modèle, dans un contexte de hausse des prix du carburant, fragilise encore davantage les ménages les moins favorisés, tout en contribuant à la hausse des émissions de gaz à effet de serre.

Face à cette situation d’étalement urbain, les transports collectifs sont difficiles à organiser pour les collectivités locales et ne répondent pas aux besoins de déplacements des ménages.

Sur le plan économique, l’artificialisation des sols agit également à différents niveaux : perte de la production agricole ou forestière, diminution de l’attractivité du territoire et de la qualité du cadre de vie par la destruction d’espaces naturels.

Alors que la crise du logement sévit, l’aménagement doit, plus que jamais, être une affaire publique. Les documents d’urbanisme doivent encadrer les conditions d’exercice du droit de propriété. Ils doivent contribuer à anticiper et à réguler les conflits d’usage de l’espace. L’élaboration d’un projet urbain appelle en amont un projet agricole fort.

À travers ce texte de loi, le Gouvernement instaure les conditions d’un urbanisme qui réponde aux besoins des habitants. C’est une grande réforme du droit de l’urbanisme qui s’engage, tout d’abord pour construire des logements là où se situent les besoins. Le projet de loi ALUR prévoit notamment des mesures de densification en zone urbaine, il propose de supprimer la taille minimale de terrain et le coefficient d’occupation des sols, il vise à faciliter la subdivision des lots pour les lotissements, il entend moderniser et sécuriser le droit de préemption pour mobiliser les gisements fonciers, il fait du schéma de cohérence territoriale l’unique document de rang supérieur.

C’est une grande réforme du droit de l’urbanisme, pour lutter contre le mitage et freiner l’artificialisation des sols. Il prévoit d’encadrer le classement en zones 2AU, de limiter fortement la constructibilité dans les espaces naturels et agricoles, de renforcer l’ingénierie foncière par le développement d’établissements publics fonciers, d’agir sur les plans locaux d’urbanisme et de renforcer la maîtrise de l’aménagement commercial.

Pour autant, ce projet de loi doit favoriser la création de réserves foncières, notamment dans les villes et les périphéries en fort développement, où l’accès au foncier se prépare sur le long terme. ll faudra en tenir compte et ne pas déclasser les zones 2AU de manière systématique et trop rapidement.

Toute démarche d’urbanisme mêle des savoirs, des négociations de long terme et des situations géographiques multiples auxquels les élus sont très attachés et sensibles.

C’est une grande réforme enfin du droit de l’urbanisme, dans laquelle la participation des citoyens en amont des projets sera renforcée.

Le logement est à la fois l’un des domaines les plus familiers pour tout un chacun et un objet d’une grande complexité avec beaucoup de spécificités.

Cette richesse créative collective est un enjeu majeur pour l’attractivité des espaces : le caractère vivant de nos territoires dépend de ces concertations en amont.

Je tiens à saluer votre action, madame la ministre, l’action du Gouvernement pour la qualité de ce projet de loi, qui a su allier humanisme et urbanisme.

Les cadres de l’urbanisme sont en train de bouger. Le projet de loi ALUR préfigure une autre manière de construire et surtout de concevoir l’espace. Il bâtit les conditions de nouvelles utopies urbaines, construites en concertation étroite avec les habitants. C’est pourquoi, pour conclure, je reprendrai cette phrase de Robert Park, de l’école de Chicago : « En faisant la ville, l’Homme se change lui-même. » Plus modestement, en votant ce texte, nous participons à la rénovation de notre pays.

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