Intervention de Pierre Moscovici

Réunion du 16 juillet 2013 à 18h30
Commission d'enquête relative aux éventuels dysfonctionnements dans l'action du gouvernement et des services de l'État, entre le 4 décembre 2012 et le 2 avril 2013, dans la gestion d'une affaire qui a conduit à la démission d'un membre du gouvernement

Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances :

Deux éléments de réponses.

D'abord il y a des personnes physiques, M. Dominique Reyl, M. Hervé Dreyfus, qui ont été évoquées ou mentionnées dans des articles au mois de décembre aussi bien de Mediapart que celui vous venez de citer. Mais, et c'est pour ça que je vous disais que chaque mot est important dans cette affaire, la possibilité d'un compte dans un autre établissement Reyl & Cie, devenue banque en 2010, n'est apparue que plus tardivement, c'est-à-dire le 1er février après la réponse des autorités suisses. Et donc, le 24 janvier, quand la demande part de la DGFIP, la seule information recoupée, donc légitime pour interroger la Suisse c'est celle de Mediapart du 4 décembre selon laquelle il aurait eu un compte à l'UBS transféré à Singapour en 2010. Et on ne peut pas me dire que le dossier de Mediapart était complet et en même temps de me reprocher d'avoir interrogé l'administration suisse sur ces seules bases !

En vérité j'ai interrogé l'administration suisse sur les bases de ce qu'avait dit Mediapart qui elle-même avait été à l'origine de l'enquête préliminaire qui a été déclenchée le 8 janvier. J'ajoute que nous avons bien pris en compte les informations de Mediapart puisque nous avons aussi visé Jérôme Cahuzac en qualité d'ayant-droit économique du ou des comptes et donc notre demande d'entraide visait à inclure d'éventuels prête-noms. Le cas échéant par exemple ça aurait pu être M. Dreyfus ou M. Reyl, s'ils avaient ouvert des comptes chez UBS pour le compte de Jérôme Cahuzac.

J'ajoute enfin que l'article d'Antoine Peillon du 1er février mentionnait la banque Reyl et indique que son auteur a posé au groupe Reyl la question suivante : « Pouvez-vous nous confirmer que monsieur Jérôme Cahuzac a été l'ayant-droit économique d'un compte ouvert à l'UBS par vos services ? » Donc voilà d'une manière très précise pourquoi nous avons procédé ainsi.

La deuxième chose, on voit bien là qu'on jongle, ce n'est pas seulement de l'uchronie pour le coup, c'est parfois de la contradiction entre les critiques, où on me dit « vous en avez trop fait » d'un côté, « vous n'en avez pas assez fait » de l'autre.

S'agissant de Singapour encore une fois, dans mon esprit, il y avait une chaîne logique : un compte à l'UBS qui aurait en 2010 été transmis à Singapour. Dès lors que les autorités suisses, interrogées non pas seulement sur la période 2010-2012 mais sur la période 2006-2012, nous disent de façon très claire « Non, il n'y a pas eu de compte de cette nature, il n'y a pas eu de transfert et ça concerne aussi monsieur Jérôme Cahuzac comme ayant-droit économique du ou des comptes », la question se pose de savoir s'il faut interroger Singapour.

Mais, si nous avions interrogé Singapour à ce moment-là et, pour le coup, sans avoir d'élément du tout, on aurait procédé à ce qu'on appelle du chalutage et de surcroît on aurait très clairement empiété sur l'information judiciaire. Je pense que ce n'était vraiment pas notre rôle de mener une enquête parallèle. Je m'y suis refusé.

J'ai dit tout à l'heure, j'ai fait ce que je devais et ce que je pouvais, j'ai utilisé autant que je le pouvais, autant que je le devais l'instrument juridique précis qui était en notre possession. Je n'ai pas voulu lui faire faire plus que ce qu'il pouvait, par exemple du chalutage, du fishing comme on dit, c'est-à-dire interroger sur toutes les banques. Cela aurait été, à ce moment-là, dilatoire. Et je n'ai pas voulu non plus poursuivre au-delà de la question posée parce qu'à ce moment-là on m'aurait accusé de mener une enquête en parallèle, alors que je ne voulais pas d'enquête parallèle. Nous nous serions mis en grave difficulté et là encore vous seriez en train de nous le reprocher à juste titre.

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