Intervention de Nathalie Appéré

Séance en hémicycle du 11 octobre 2012 à 15h00
Création des principes d'adaptabilité et de subsidiarité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNathalie Appéré :

Limiter les normes, c'est aussi favoriser la rationalité de notre travail législatif. Cette proposition de loi apporte, selon nous, une réponse inadaptée à une question juste que le rapporteur a eu raison de soulever. Je le salue.

En premier lieu, comme cela a déjà été dit, le champ d'application du texte pose problème. Les articles de la proposition de loi ne visent pas une catégorie particulière de collectivités, mais l'exposé des motifs et surtout le titre lui-même limitent les principes édictés par ce texte au milieu rural, sans jamais d'ailleurs le définir. Sans méconnaître les difficultés particulières du monde rural, je voudrais que nous ne versions pas pour autant dans les simplifications. Deux idées potentiellement erronées sous-tendent cette proposition de loi.

Premièrement, les petites communes ne sont pas forcément rurales. Le manque d'expertise, qui limite leur capacité à connaître et appliquer les normes, se rencontre aussi en milieu péri-urbain. Je qualifierai une deuxième idée de fausse : les petites collectivités n'ont pas forcément un potentiel financier réduit et, a contrario, les grandes collectivités n'ont pas toujours un potentiel financier élevé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) J'en veux pour preuve la situation particulière des communes dont l'essentiel du territoire est classé en zone urbaine sensible. Elles doivent faire face à des charges accrues pour des recettes minorées, et sont de ce fait particulièrement victimes de l'inflation normative.

Comme l'écrit régulièrement le Conseil national des villes dans ses avis, les villes dites pauvres, quels que soient leur nombre d'habitants et leur situation géographique, sont confrontées à un double défi : d'une part conforter l'environnement urbain économique, social, éducatif et culturel de l'ensemble de la population, mais aussi corriger les inégalités de tous ordres qui frappent les habitants les plus démunis, qui sont souvent cantonnés dans les territoires les plus sensibles.

La simplification des normes concerne donc bien toutes les collectivités. Elle n'est pas détachable d'une réflexion globale sur l'égalité des territoires et ses corollaires que sont l'organisation territoriale et l'exercice des compétences d'une part, mais aussi la péréquation financière d'autre part.

Plutôt que d'adopter une proposition de loi manifestement entachée d'inconstitutionnalité, notamment parce qu'elle contrevient de manière manifeste au principe d'égalité, plutôt que de répondre par un texte au problème de la prolifération des textes, adoptons une autre démarche, comme vous nous y avez invités, madame la ministre !

Le Président de la République nous y a également invités dans son discours prononcé le 5 octobre à l'occasion des états généraux de la démocratie territoriale, qui a été abondamment – et à juste titre – cité ce soir. La feuille de route claire qu'il a donnée intègre la question des normes comme un élément du pacte de confiance entre l'État et des collectivités locales qui, il est vrai, ont été particulièrement malmenées, méprisées et rendues coupables de tous les maux ces dix dernières années.

Retrouver les chemins d'une décentralisation apaisée, comme nous y invitera le projet de loi sur l'acte III de la décentralisation qui nous sera soumis début 2013, c'est admettre qu'en matière de normes, l'égalité n'est pas l'uniformité, que la France est riche de la diversité de ses territoires, et que les chemins de la croissance et du redressement passent aussi par une mise en synergie des acteurs locaux dans une République des territoires modernisée.

En votant contre cette proposition de loi, que nous jugeons juridiquement inaboutie et inadaptée, notre groupe entend poursuivre une réflexion qui devra avancer rapidement et s'inscrire dans un mouvement global. Sans renvoyer formellement à l'acte III de la décentralisation, il va de soi que la question de la simplification des normes et de leur adaptation est indissociable de l'évolution de notre organisation territoriale. La réponse aux difficultés des collectivités les plus défavorisées, indépendamment de leur taille, passe aussi par le développement des coopérations intercommunales et des processus de mutualisation. La question des ressources et de la consolidation des outils de péréquation est aussi liée à cette démarche. Le changement, attendu par les élus locaux, doit s'écrire globalement en se fondant sur la confiance et la stabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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