Intervention de Joël Giraud

Séance en hémicycle du 7 janvier 2014 à 21h30
Agriculture alimentation et forêt — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoël Giraud :

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui a l’ambition d’associer l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

La France est un pays agricole : chacun de nous connaît ses racines et si l’agriculture française a une belle histoire, elle représente aussi notre quotidien, ce que nous avons dans notre assiette. L’agriculture, ce sont les paysages que nous traversons ou habitons, mais aussi ce que nous partageons au-delà de nos frontières.

Les agriculteurs ont besoin d’un projet de loi ambitieux qui leur donne les moyens de cultiver, élever, produire dans de bonnes conditions. L’agriculture et la forêt ont besoin d’un projet fort et rassembleur pour que l’aménagement et la vitalité de nos territoires soient au coeur de nos préoccupations et retrouvent la place qu’ils méritent.

Nous devons accompagner le double objectif de ce texte : performance économique et écologique. Il nous faut nous battre, encore et toujours pour l’emploi, pour des emplois qui aient du sens, qui soient socialement utiles. Il nous faut nous battre pour préserver notre cadre de vie et celui des générations futures contre certaines formes de pollutions diffuses, parfois pas immédiatement perceptibles, et difficiles à combattre par la suite.

C’est une agriculture diversifiée et créatrice d’emplois que souhaite promouvoir ce texte en redonnant également toute sa place à la forêt, cette ressource multifonctionnelle qui doit être mieux valorisée, tout en restant dans le cadre du raisonnable. Si nous soutenons et encourageons la préservation et l’entretien des forêts françaises, l’éventualité d’une obligation de compensation de reboisement pouvant aller jusqu’à 5 fois la surface défrichée, que prévoit l’alinéa 61 de l’article 30, semble excessif. Imaginez les conséquences d’une telle mesure pour le défrichement d’une forêt de frênes, qui, dans une zone humide de montagne, ne met pas cinq ans à pousser ! La compensation serait totalement déraisonnable, voire envahissante. Nous vous proposerons un amendement pour limiter ce coefficient multiplicateur. Dans la lutte contre l’artificialisation des terres qui nous préoccupe tous, la forêt doit être prise en compte à sa juste valeur.

Permettez-moi également, en tant qu’élu d’une vallée des Alpes et président de la commission permanente du Conseil national de la montagne de vous parler de sujets que j’ai la prétention de connaître un tant soit peu.

Dans nos territoires de reliefs, nous savons l’importance, la nécessité de l’agriculture et de la forêt mais aussi leur inquiétante vulnérabilité. Plus fortement qu’ailleurs, le foncier agricole, dans les massifs alpin et pyrénéen et plus encore dans les zones de piémont, est en recul. En dix ans, le nombre d’exploitations en montagne a diminué de près de 23 %, une diminution qui s’accentue en haute montagne et dans certains massifs.

Garantir l’avenir de l’agriculture de montagne, c’est pourtant garantir la diversité de notre modèle, c’est préserver une agriculture de qualité et de proximité, dont le rôle en faveur du maintien de vallées vivantes, d’espaces ouverts, de paysages montagneux et de lutte contre les risques naturels n’est plus à démontrer.

Les travaux de la commission des affaires économiques ont permis de faire entendre certaines des spécificités de cette agriculture de montagne. Je me réjouis que le Conseil national de la montagne puisse être représenté au sein du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire. De la même manière, les territoires de montagne seront représentés dans les commissions départementales de la préservation des espaces naturels agricoles et forestiers.

Nous avons également pu inscrire dans l’article 1er la contribution essentielle de la politique d’installation à l’aménagement du territoire, en affirmant le principe du maintien sur l’ensemble du territoire, y compris en zone de montagne, d’un nombre d’exploitants agricoles en adéquation avec les enjeux d’entretien des paysages, de biodiversité et de gestion foncière. La référence à la loi montagne a pu être insérée aussi dans le texte.

Nous avons déposé d’autres amendements qui seront soumis à discussion au cours de l’examen et que nous aurons à coeur de défendre.

Ainsi nous vous proposerons, comme Martial Saddier l’a dit, que les comités de massif émettent un avis sur le plan régional d’agriculture, les préfectures de région étant parfois très éloignées de leur arrière-pays.

En ce qui concerne la formation, levier essentiel pour transformer notre agriculture et la rendre plus performante d’un point de vue économique et écologique, nous demanderons que les offres de formation biqualifiantes, qui correspondent aux réalités de nos bassins d’emplois marqués par la pluriactivité, soient proposées dans les schémas prévisionnels des formations et les programmes inscrits à l’article 10 de la loi montagne.

Nous vous proposerons aussi un amendement pour que le rôle de la forêt contre les risques naturels gravitaires soit reconnu dans le code forestier. Sur les terrains en pente forte, la forêt permet de fixer les sols. Et nous savons tous combien il vaut mieux prévenir que guérir… La notion de forêt de protection existe déjà dans les plans de gestion de la forêt, mais elle ne correspond pas à une définition légale ou réglementaire. L’inscription dans la loi permettrait de combler ce manque et peut-être un jour, monsieur le ministre, d’obtenir la sortie de ces forêts de protection de la surface taxable des forêts communales – sait-on jamais !

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