Intervention de Huguette Bello

Séance en hémicycle du 20 janvier 2014 à 16h00
Égalité entre les femmes et les hommes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHuguette Bello :

Monsieur le président, madame la ministre, je voterai ce texte. Non seulement parce qu’il ouvre une nouvelle génération de droits pour les femmes, mais aussi en raison de l’approche intégrée et transversale qui le caractérise. Nous n’avons cessé, des années durant, de prôner – parfois, de revendiquer – l’adoption d’une loi globale, d’une loi-cadre, seule à même de traiter de manière cohérente des questions étroitement liées. En regroupant, pour la première fois dans un même texte des sujets jusqu’ici abordés de manière séparée, nous gagnons en lisibilité, en crédibilité, et probablement en efficacité.

Construire l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, c’est le fil rouge qui traverse les multiples dimensions de ce texte. À chaque fois, il s’agit de renforcer, en les complétant, les législations existantes et de lever les obstacles de toutes sortes, anciens mais aussi nouveaux, qui entravent cette grande ambition qui concerne la société tout entière.

Dans le monde du travail, plusieurs lois ont été votées qui sont à l’origine de nombreux outils juridiques et financiers. Mais si les femmes sont désormais toujours plus actives sur le marché du travail, l’égalité demeure encore un horizon. C’est vrai pour les salaires, où un écart de 9 % persiste une fois neutralisées les différences structurelles. C’est vrai aussi pour les conditions de travail, que le chômage et les horaires atypiques fragilisent. C’est vrai encore pour l’accès aux responsabilités, puisque le plafond de verre est très souvent plus convaincant que tous les diplômes.

L’égalité professionnelle ne se joue pas seulement dans la sphère du travail. Elle a partie liée avec la vie familiale. C’est à ce titre que le congé parental est réformé et qu’une nouvelle prestation est créée. Cette première étape en appelle nécessairement d’autres, et surtout le développement à grande échelle des modes d’accueil des jeunes enfants.

Le texte intègre également plusieurs dispositions de l’accord national interprofessionnel, qui sont assorties, en cas de non-respect, de sanctions. Mais l’enjeu est aussi de ne pas laisser s’accroître les inégalités entre les femmes selon qu’elles travaillent ou pas dans une entreprise de plus de cinquante salariés, selon qu’elles aient un CDI ou un contrat de travail temporaire. De même, le travail à temps partiel, dont l’explosion depuis les années 1990 a surtout concerné les femmes, exige une attention toute particulière. Les chiffres sont éloquents et révèlent, à leur façon, à quel point le développement de l’emploi des femmes est corrélé aux mesures incitatives des politiques publiques. Appréhendé, dans un premier temps, comme un moyen de concilier vie familiale et autonomie des femmes, le temps partiel, généralement subi, s’est révélé comme une fabrique de la précarité.

La journée de travail en miettes est une nouvelle réalité à laquelle les femmes sont trop souvent confrontées. Et il est peu probable que l’obligation d’une durée minimale d’activité de 24 heures par semaine apporte de grands changements pour la plupart des salariés à temps partiel dont la durée moyenne de travail est déjà de 23,9 heures.

Ce texte souhaite aussi lutter contre la précarité, singulièrement dans les familles monoparentales, à travers un dispositif contre le non-paiement des pensions alimentaires. Il paraît opportun qu’une des régions d’outre-mer, où la proportion des foyers monoparentaux est élevée, figure parmi les sites de l’expérimentation.

Ce titre II pourrait aussi être l’occasion d’inscrire dans la loi la volonté – unanime, je pense – de lutter contre les risques de paupérisation de nos aînées. Elles subissent souvent des situations de grande précarité : près de 15 % des femmes de plus de 75 ans vivent sous le seuil de pauvreté, les droits conjugaux et familiaux ne compensant pas les inégalités qu’elles ont subies durant leur vie active et qui se répercutent sur le niveau de leurs pensions.

La lutte contre les violences se trouve renforcée. Nous disons oui aux améliorations apportées à l’ordonnance de protection, oui à la généralisation du téléphone « grand danger », oui à l’éviction systématique du conjoint violent du domicile. De même, nous approuvons particulièrement deux nouvelles mesures attendues depuis longtemps, à savoir les stages de responsabilisation pour les auteurs des violences et une formation obligatoire portant sur les violences intrafamiliales pour l’ensemble des professionnels concernés. En confiant au CSA la responsabilité de veiller aux représentations des femmes diffusées par les médias, nous luttons aussi contre une forme de violence, celle qui malmène l’image des femmes et conditionne les mentalités. Reste, même si elle ne relève pas de la loi, l’enquête VIRAGE : nous réitérons notre demande, madame la ministre, pour qu’elle soit conduite de manière simultanée sur l’ensemble du territoire, c’est-à-dire y compris dans les outre-mer.

L’égalité réelle entre les hommes et les femmes, c’est aussi la traduction dans les faits de l’article 1er de la Constitution. Et force est de constater que les lois adoptées pour la parité politique et les avancées qu’elles ont permises n’ont pas provoqué un élan dans les autres secteurs. Une fois de plus, il faut passer par la loi et envisager des sanctions pour faire vivre la parité dans toutes les instances dirigeantes : celles du sport, de la culture et des arts, des chambres consulaires, des entreprises et des établissements publics, ou encore des nombreuses autorités administratives indépendantes.

L’égalité est une conquête quotidienne. Ce texte y contribue avec force : pour les femmes et pour les hommes.

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