Intervention de Élie Aboud

Séance en hémicycle du 12 juin 2014 à 9h30
Maintien d'une administration et de politiques publiques dédiées aux français rapatriés d'outre-mer — Discussion d'une proposition de résolution

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlie Aboud :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État chargé des anciens combattants et de la mémoire, mes chers collègues, historiquement, le destin de la France s’inscrit pour l’essentiel dans deux horizons géographiques : l’Europe et la Méditerranée. Culturellement et économiquement, nous y avons d’ailleurs des partenariats très privilégiés.

En Europe, la France réalise 60 % de ses échanges. Les relations commerciales entre la France et l’Allemagne y sont essentielles, l’Allemagne demeurant le premier client de la France et son premier fournisseur. Le dépassement des méfiances historiques nées des différents conflits et l’envie de construire l’avenir ont permis cet extraordinaire essor.

Si l’axe Paris-Berlin, monsieur le secrétaire d’État, est fondamental dans l’épopée européenne, les relations franco-algériennes le sont tout autant pour la réalisation d’un espace méditerranéen calme et prospère.

La France est le premier fournisseur de l’Algérie et son quatrième client. Cette importance des échanges entre les deux pays dynamise, dans le domaine économique, tout le tissu relationnel euro-algérien. Ainsi, au premier trimestre 2014, l’Union européenne est le principal partenaire commercial de l’Algérie.

Dans ce contexte, le 19 décembre 2012, à l’occasion d’une visite du Président de la République française, une déclaration sur l’amitié et la coopération a été signée à Alger par les deux chefs d’État. Par la suite, elle a donné lieu, en un an, à une dizaine d’accords sur la formation, la recherche, le développement et les partenariats industriels.

Ce document souligne que la France et l’Algérie partagent une longue histoire, qui a permis de nouer des liens humains, affectifs et culturels d’une exceptionnelle intensité, dans tous les domaines.

Au-delà des difficultés et des incompréhensions, la période française en Afrique du Nord, particulièrement pendant 132 ans en Algérie, a permis de mêler des peuples, des cultures, des langues, des traditions et, par la suite, de tisser des relations indissolubles.

De tels liens, mes chers collègues, transcendent les drames et violences nés de la guerre d’indépendance, lesquels ont meurtri deux peuples.

L’intimité toujours vivante entre la France et l’Algérie est patente. Selon l’excellent rapport de notre collègue Axel Poniatowski réalisé suite à une mission d’information sur l’Algérie, c’est dans ce pays que l’on trouve la seconde communauté francophone du monde, avec 16 millions de locuteurs.

En France, indique aussi ce rapport, si l’on additionne tous les apports humains provenant de l’autre côté de la Méditerranée, notamment, les « pieds-noirs », les harkis, les binationaux, cette population est supérieure à cinq millions de personnes.

En Algérie, monsieur le secrétaire d’État, après 132 ans de présence française, soit l’équivalent de cinq à six générations, le départ d’un million de Français de toutes origines a été particulièrement douloureux pour le plus grand nombre d’entre eux, vous le savez très bien. Ce n’est pas falsifier le passé et compromettre l’avenir que de le reconnaître.

Dans le souci, dit-on, de rationaliser les structures administratives, les deux supports de l’action publique en faveur des rapatriés ont disparu ou vont disparaître. Pourtant, bien des dossiers demeurent en suspens : insertion sociale et professionnelle des familles de harkis, situation de nombreux rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, artisanale ou agricole, en état de détresse sociale, bilan critique de l’indemnisation des biens.

Or, dans le même temps, que constatons-nous ? La loi de finances pour 2014 a d’abord supprimé l’Agence nationale pour l’indemnisation des Français d’outre-mer, l’ANIFOM, établissement public d’État, en transférant ses compétences à l’Office national des anciens combattants, l’ONAC.

Parallèlement, le Gouvernement prépare un décret mettant fin à la mission interministérielle aux rapatriés, la MIR.

Si les rapatriés comprennent bien que l’heure est à la rationalisation des structures administratives, les mesures réalisées sans concertation par le Gouvernement, rencontrent l’incompréhension et suscitent même l’inquiétude de la population concernée.

Votre éclairage, monsieur le secrétaire d’État, et l’adoption de la présente résolution sont susceptibles de les apaiser : en effet, nous ne pouvons ignorer plus longtemps l’inquiétude des rapatriés.

J’ai l’honneur de présider le groupe d’études des rapatriés et des harkis.

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