Intervention de Valérie Pecresse

Séance en hémicycle du 23 juin 2014 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2014 — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Pecresse :

Cela représente cinq cents kilomètres du nord au sud, autant que de Paris à Amsterdam : ce n’est pas ainsi que l’on fera la moindre économie, vous le savez bien.

Renoncement encore et mauvais choix que de concentrer la baisse des dépenses sur la réduction des investissements. Amputer les crédits de la recherche et l’université, c’est sacrifier l’avenir et se priver un peu plus d’une chance de rebondir. J’ai apprécié l’euphémisme dans lequel vous avez enveloppé cette suppression de crédits de recherche : les investissements d’avenir seraient sous-consommés. Ils le sont lorsque l’on décide de ne pas les dépenser ! Le progrès technique est pourtant un facteur clé de croissance à long terme, et je ne crois pas que vous l’ignoriez.

Couper les crédits destinés aux infrastructures de transports, comme le drame de Brétigny l’a tragiquement montré, c’est menacer la sécurité des Français. C’est emboliser des régions entières, c’est priver des milliers de Français d’emplois liés à ces grands chantiers et, là encore, c’est hypothéquer la compétitivité future de notre pays.

Plus encore que les chiffres, il y a des symboles puissants qui montrent le « massacre » – je cite Mme Boone – dont est responsable votre politique économique et l’effritement inexorable de la position française en Europe et dans le monde.

Il y a d’abord cette fuite des investisseurs et l’incapacité de fleurons de notre économie comme Lafarge, Alstom, PSA, Club Méditerranée, à conserver les moyens d’un développement indépendant.

Il y a aussi l’effacement désormais presque total de notre pays sur la scène européenne. Les Français ont été, comme moi, très durement atteints dans leur fierté par l’épisode qui a suivi le discours de politique générale de Manuel Valls.

Le Premier ministre se faisait fort d’aller réclamer à Bruxelles un nouvel équilibre et un nouveau délai pour rétablir nos comptes publics. Nos négociateurs n’étaient pas encore à la Gare du Nord qu’ils ont dû rebrousser chemin en raison de la fin de non-recevoir cinglante de Bruxelles.

Ce refus n’était pas seulement celui de quelques technocrates zélés. Il exprimait d’abord et avant tout le ras-le-bol de tous ces peuples – en particulier d’Europe du sud – qui ont fait tant d’efforts pour surmonter la crise, commencent à en toucher les fruits, et qui voient la France, avec désinvolture, s’exonérer des règles qu’elle leur a imposées faute de s’être elle-même réformée.

En 2009, Nicolas Sarkozy parvenait à convaincre Angela Merkel de la justesse de ses vues pour sauver les banques européennes de la banqueroute. Cinq ans plus tard, Matteo Renzi refusait la main tendue par la France pour plaider la cause des pays en délicatesse budgétaire avec Bruxelles, de peur de désigner l’Italie, qui activement se redresse, comme un pays n’assumant pas sa part des réformes.

Le contraste est saisissant. Ce constat est surtout terrifiant pour la France, son rang et la fierté des Français.

Ce premier texte budgétaire du nouveau gouvernement Valls aurait pu être l’acte I du redressement de la France. Il est malheureusement le symbole du renoncement.

Que la gauche meure est une chose, mais il ne faudrait pas que la France sombre avec elle. À la lumière des risques que ce texte fait courir à l’avenir de notre pays, il n’y a pas lieu à délibérer. C’est pourquoi je vous demande de le rejeter.

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