Intervention de Bernard Accoyer

Séance en hémicycle du 21 octobre 2014 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Accoyer :

…imaginées pour compenser les 6,3 milliards de baisse des charges du pacte de responsabilité illustrent ce renoncement.

Il s’agit là d’une des conséquences de ce PLFSS, qui contribue à repousser sine die la maîtrise des comptes sociaux, transmettant aux jeunes générations une montagne de dettes. Dans le contexte économique et monétaire mondial et européen, il expose la France à de graves difficultés financières.

Mais ce PLFSS aura aussi des conséquences qui pèseront sur l’avenir de la protection sociale dans son ensemble pour les trois branches que sont l’assurance maladie, l’assurance vieillesse et la branche famille.

Pour ce qui est de la branche maladie, en choisissant de préparer un monopole hospitalier tournant le dos aux missions de santé publique pour les urgences et l’hospitalisation, s’appuyant sur l’ensemble des atouts sanitaires publics et privés, le Gouvernement prend le risque de la fin du libre choix des malades, de la baisse de la qualité des soins, de l’explosion des coûts financiers et, à terme, des files d’attente.

Pour l’hospitalisation, après avoir dénaturé la T2A et supprimé pour des raisons purement dogmatiques la convergence tarifaire, le Gouvernement persiste et signe. La médecine ambulatoire, malgré les discours lénifiants du Président de la République, est bel et bien en grand danger, attaquée par un nouvel assaut de contraintes, de pesanteurs administratives et de paperasseries, méprisée par la montée inexorable des paiements forfaitaires, des menaces de sanctions et l’instrumentalisation insidieuse du tiers payant.

Madame la ministre, vous rêvez d’un service public de santé, mais vous ne ferez rien sans les professionnels. L’étatisation rampante de notre système de soins est une dérive pernicieuse dont personne ne veut vraiment quand on en connaît les conséquences.

Quant au médicament, il est, je le répète, avec la famille, le bouc émissaire de ce PLFSS. Alors que ce poste représente 15 % de l’ONDAM, vous l’amputez de 1,5 milliard d’euros – il s’agit là du reste de l’essentiel des mesures dites d’économies pour 2015, sans compter les 700 millions d’euros du mécanisme de restriction de financement des nouveaux traitements curatifs qui sont un progrès majeur contre l’hépatite C.

Vous voudriez éradiquer l’industrie pharmaceutique en France que vous ne vous y prendriez pas autrement. En modifiant les principes de la lettre K, qui maîtrise le coût des médicaments, pour la transformer en lettre L, vous taxez à nouveau et en plus l’industrie pharmaceutique dès lors qu’elle ne diminuerait pas son chiffre d’affaires en 2015. C’est un comble, alors que le Président de la République, le Premier ministre et tout le Gouvernement ne savent que faire pour la croissance !

Madame la ministre, croyez-vous que les laboratoires vont ainsi pouvoir poursuivre leurs investissements dans la recherche et le développement de nouveaux médicaments ? Souvent issus des biotechnologies, ceux-ci sont en effet fort complexes et leur mise au point et leur développement sont évidemment coûteux. Pensez-vous sincèrement que les exportations, qui comptent pour quelque 8 milliards d’euros, et l’emploi dans ce secteur, qui représente quelque 100 000 postes, pourront survivre à vos décisions ?

Au-delà de ces conséquences économiques et sociales, c’est le droit des malades à accéder aux thérapies innovantes qui est mis à mal, et cela est particulièrement grave. Non, madame la ministre, il n’est pas normal que les conséquences que porte ce PLFSS pour les droits fondamentaux à l’accès aux soins les plus performants – c’est-à-dire, disons-le clairement, la restriction qu’il impose à l’accès aux meilleures chances de guérison – ne donnent pas lieu à un large débat démocratique sur cet enjeu, qui est l’un des plus importants pour nos compatriotes.

Les conséquences de ce PLFSS sur la branche vieillesse, les retraités et les futurs retraités sont dans la ligne de la pseudo-réforme des retraites que vous avez fait adopter par l’Assemblée nationale en 2013. En effet, comme l’opposition l’avait alors annoncé, la réforme est déjà caduque et, dès cette année, les comptes de la branche vieillesse seront encore dans le rouge pour 1,5 milliard d’euros et pour 2,9 milliards d’euros au titre du FSV, soit 4,4 milliards d’euros.

Or, le compte pénibilité, que vous avez voulu à tout prix instaurer, ce sont des charges administratives et des dépenses supplémentaires qui se chiffreront à terme par un supplément de plusieurs milliards d’euros.

En revenant en 2013 à un âge de départ à la retraite à 60 ans pour les carrières longues, en renonçant à avoir le courage de regarder les calculs actuariels incontestables, c’est-à-dire la vérité de l’avenir des retraites, et à prendre en compte l’évolution de l’espérance de vie, comme l’ont fait tous les pays autour de nous, la gauche aura porté de nouveau un très mauvais coup à l’assurance vieillesse. Mais chez elle, mes chers collègues, depuis 1983, c’est une constante !

Quant aux retraités eux-mêmes, ce PLFSS augmente de 80 % – excusez du peu ! – la CSG pour les retraités parmi les plus modestes, dont le taux passe de 3,8 à 6,6 %.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion