Intervention de Annick Girardin

Réunion du 8 octobre 2014 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Annick Girardin, secrétaire d'état chargée du développement et de la francophonie :

Je commencerai par répondre à vos questions sur l'OIF et le sommet de Dakar. M. Abdou Diouf a une telle personnalité que la France a essayé de plaider pour qu'il reste encore un peu – mais il faut aujourd'hui lui trouver un successeur. Nous souhaitons que le prochain secrétaire général – ou la prochaine secrétaire générale – représente la modernité et le dynamisme qui doivent être ceux de la francophonie. M. Diouf a joué un rôle politique très important et nous continuerons de promouvoir des valeurs de paix. Mais aujourd'hui, les jeunes trouvent trop souvent le français ringard ! Il ne faut pas tout miser sur l'économie, mais c'est un aspect important : il faut montrer aux jeunes, et aux pays qui décident de promouvoir l'enseignement du français, que la francophonie leur offre un avenir, des emplois.

Nous souhaitons que le successeur de M. Diouf soit également une personnalité connue et qui inspire le respect. Aujourd'hui, il y a quatre candidats du Sud et une candidate du Nord. La France a exprimé son souhait de voir les pays africains trouver un consensus entre eux sur un candidat. Nous aimerions surtout qu'un accord intervienne avant le sommet de Dakar, afin que celui-ci – qui doit traiter d'enjeux très importants – ne soit pas monopolisé par des questions de personnes. Quoi qu'il en soit, la décision, je le sais bien, sera sans doute prise au dernier moment…

La France ne soutient aucun candidat. Une campagne est en cours : c'est nouveau, et c'est très bien.

S'agissant des francophonies, de la francophonie plurielle, je veux surtout insister sur le fait que la France n'a pas le monopole de la langue française. La francophonie, ce sont aussi des valeurs universelles : la démocratie, les droits de l'homme…

Vous avez raison, il est très important de soutenir l'audiovisuel français. Je viens, vous le savez tous, de Saint-Pierre et Miquelon, et je sais à quel point il est difficile de maintenir la langue française en Amérique du Nord. C'est un effort, mais un effort que chacun doit consentir, et je suis souvent fâchée, je ne vous le cache pas, de voir des ministres, des scientifiques, des élus locaux, et même des ambassadeurs, qui ne s'expriment pas en français ! Il est vraiment dommage que certains pensent que communiquer en anglais donne une impression de modernité et de professionnalisme… Pour ma part, je ne m'exprime pas très bien en anglais, mais j'en fais une affaire de principe : je parle français. Les chefs d'États africains sont d'ailleurs ahuris de voir tous ces Français qui parlent anglais, et ils ne me le cachent pas.

Les scientifiques prétendent que publier en français aurait moins de valeur et d'intérêt que de publier en anglais, parce que ce serait moins lu. Je n'en crois rien. Lors d'un récent dîner au Mexique, j'étais à une table de sept personnes : on parlait anglais, puis, quand j'ai parlé français, tout le monde – même un convive chinois ! – s'est mis à parler français ! Cela prouve qu'il ne faut pas renoncer.

Parlons des questions financières. Nous sommes loin, je vous l'accorde, de l'objectif de 0,7 % du RNB. Mais il n'est pas oublié – il est même inscrit dans la loi. Nous n'avons pas fixé de date pour l'atteindre, mais nous devrons nous efforcer de le faire dès que nous retrouverons le chemin de la croissance.

L'aide publique au développement reste majoritairement bilatérale – à 62 %, selon l'OCDE. Mais il ne faut pas rejeter l'aide multilatérale, qui est vraiment utile : sur Ebola, sur les objectifs pour le développement durable (ODD), nous devons travailler de façon multilatérale – comme d'ailleurs avec les entreprises, les organismes financiers… En matière financière, il faut innover.

Nous veillons à ce que l'aide multilatérale soit aussi bien utilisée que possible. Depuis mon arrivée au Gouvernement, j'oblige les gens à m'expliquer le fonctionnement de tous ces mécanismes – c'est peut-être la force du jeunisme ! – et j'ai demandé la mise en place de nouveaux contrôles. À nous d'aller plus loin, de mieux contrôler et de mieux gérer ! Souvent – je pense au Fonds Bêkou, au Mali… – nous sommes en pointe sur ces sujets, ce qui nous permet d'influencer les choix qui sont faits.

Le redressement de notre économie doit tous nous mobiliser. Mais l'AFD a une mission de développement : elle doit contribuer à notre rayonnement économique et à la création d'écosystèmes favorables aux entreprises, mais sans sacrifier à sa mission de développement et de solidarité. Les deux combats doivent être menés de pair. Je rencontre très fréquemment Mme Paugam, directrice générale de l'AFD, dont je suis l'une des tutelles. Je ne ménage ni mes critiques, lorsque c'est nécessaire, ni mes félicitations, lorsqu'elles sont méritées. J'ai donné des consignes claires à l'AFD pour que la loi sur le développement soit appliquée le plus vite possible, et les contrôles sont réguliers.

J'accorde une grande importance à la responsabilité sociale des entreprises et au développement durable : c'est un sujet sur lequel l'AFD doit mieux travailler avec les collectivités territoriales mais aussi avec les entreprises, notamment les PME. J'y veillerai.

La France est un acteur majeur de l'aide publique au développement en matière de santé : nous avons engagé 750 millions d'euros en 2013, ce qui représente 8 % de notre aide. Nous faisons des choix, mais nous n'avons pas à rougir de nos efforts, bien au contraire : nous sommes les deuxièmes contributeurs, par exemple, au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Nous avons également été à l'initiative de la création d'UNITAID, dont 50 % des ressources proviennent de la France.

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