Intervention de Jean-Yves Le Bouillonnec

Séance en hémicycle du 30 octobre 2014 à 21h30
Modernisation et simplification du droit dans les domaines de la justice et des affaires intérieures — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Bouillonnec :

On me distrait, monsieur le président, et j’espère que vous n’allez pas décompter ces quelques secondes de mon temps de parole !

Je vais essayer de remplacer au mieux notre collègue Cécile Untermaier, qui a été la porte-parole du groupe SRC sur ce texte et qui a participé activement, au côté de notre rapporteure, au travail d’auditions.

Le choc de simplification a déjà fait l’objet de plusieurs textes de loi, et celui que nous examinons ce soir se propose de régler les problèmes que nos citoyens rencontrent au quotidien. Sans reprendre l’intégralité du dispositif qui a été adopté par le Sénat, puis par notre assemblée, je rappellerai seulement que ce texte entend prendre à bras-le-corps les problèmes et les embarras que nos concitoyens peuvent rencontrent dans leur vie quotidienne, qu’il s’agisse par exemple du versement des prestations compensatoires ou des formalités relatives aux héritages. Parce que toutes ces procédures peuvent être une source de gêne pour nos concitoyens dans leur vie quotidienne, nous devons essayer de les améliorer, en veillant à la fois à respecter les principes du droit et de la sécurité juridiques, et à faire oeuvre de clarification administrative.

Nous nous sommes félicités de ce dispositif législatif, même si nous avons tout de suite été confrontés à une difficulté, puisque les sénateurs, qui ont voté le texte le 21 janvier, et les députés, qui l’ont voté le 16 avril, ne se sont pas mis d’accord sur la question du recours aux ordonnances – et j’ai encore pu constater ce désaccord au sein de la commission mixte paritaire, que j’ai eu l’honneur de coprésider. Nous sommes tous heurtés par ce dispositif et il me semble que même vous, madame la garde des sceaux, avez dit ce matin que ce recours aux ordonnances n’allait pas de soi.

Je pense néanmoins qu’il faut faire un sort particulier au dispositif contractuel, parce que voilà vingt ans, au fond, que le législateur ne s’est pas penché sur cette question. Et c’est tout le problème ! Si l’on n’envisageait cette réforme que depuis trois ou quatre ans et que l’on tournait autour du totem en faisant la danse du scalp, on pourrait être critiqué, mais voilà vingt ans que cela dure ! Comme cela a été souligné à plusieurs reprises, le droit des contrats a évolué depuis vingt ans, et cette évolution n’est pas le fait de la loi, mais de la jurisprudence.

Or permettez-moi de vous dire, mes chers collègues, que l’évolution jurisprudentielle, sur des sujets aussi fondamentaux, est aussi critiquable que le recours à l’ordonnance pour modifier des dispositions du code civil. Il faut en effet avoir en tête, comme vous l’avez rappelé à plusieurs reprises, madame la garde des sceaux, qu’en raison de cette accumulation de jurisprudences, tous les acteurs du droit se trouvent depuis des années sur tous ces sujets dans une situation bien aléatoire, avec le risque majeur de voir s’inverser, au nom de contingences très respectables prises en compte par la jurisprudence, des processus qui étaient actés dans des formulaires ou dans des engagements depuis des années. Sur ce point très particulier, je considère, comme mon groupe, qu’il était nécessaire d’entreprendre ce travail et qu’il ne pouvait pas être fait autrement que par ordonnances.

Cela étant précisé, je tiens, madame la garde des sceaux, à vous remercier au nom du groupe SRC, pour avoir répondu aux questions de notre rapporteure et pour avoir donné un certain nombre de précisions, et même communiqué la matrice des ordonnances.

Je vous invite par ailleurs, mes chers collègues, à lire l’article 3 dans son entier : vous constaterez qu’il couvre bien tous les champs des problèmes qui peuvent se poser en matière contractuelle, sans abandonner les fondamentaux du droit, dont je suis un fervent défenseur. Ce qui est intéressant dans la proposition qui est faite, c’est précisément qu’elle concerne les fondamentaux : les conditions de validité des engagements, la nature de ces engagements, le principe du consensualisme, qui a souvent été évoqué et qui constitue depuis toujours la matrice des obligations mutuelles entre celui qui accepte une obligation et celui qui doit la respecter.

Le texte respecte tout cela et l’article 3, qui décline ces différents points, permettra, me semble-t-il, d’offrir à nos concitoyens, mais aussi aux grands acteurs de l’économie, aux entreprises et aux particuliers, un instrument de contractualisation moderne. C’est à mes yeux l’un des aspects remarquables de ce texte.

J’ajoute qu’il importait également que nous nous conformions à certaines pratiques internationales, sans quoi nous nous serions heurtés à de sérieuses difficultés.

En conclusion, à condition que vous n’abusiez pas des ordonnances, madame la garde des sceaux…

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