Intervention de François Brottes

Séance en hémicycle du 13 février 2015 à 9h30
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 59

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Brottes, président de la commission spéciale :

Nous pouvons nous réjouir de la probable suppression de cet article, non pas que les dispositions qu’il contient ne sont pas utiles, au contraire, mais le Gouvernement a fait le choix, et nous l’en remercions, d’inscrire dans la loi les mesures qui auraient dû être prises par voie d’ordonnance. C’était l’une des demandes du rapporteur général et du rapporteur thématique.

Je me demande cependant si les dispositions que nous allons voter tout à l’heure pourront s’appliquer dans un certain nombre de cas. Je voudrais vous rapporter le témoignage de fournisseurs qui, s’ils veulent avoir un espoir d’être payés pour les prestations fournies les quatre ou six derniers mois, doivent accepter de consentir une remise de 30 % ! Je ne citerai pas l’entreprise – secret des affaires oblige ! – mais je vais préciser ma préoccupation.

Lorsque l’on bénéficie d’une licence en téléphonie mobile, bien rare que d’autres ne peuvent pas utiliser, que l’on se trouve en quasi-monopole, par exemple sur l’île de la Réunion – je ne vise personne –, que l’on reprend une entreprise et que l’on menace les fournisseurs de les renvoyer s’ils n’acceptent pas certaines conditions, je considère que nous avons affaire à un abus de position dominante. Le fournisseur, en effet, ne peut pas proposer ses prestations à un autre client, puisqu’il n’y en a pas d’autre.

Quand une surface de distribution bénéficie d’un permis de construire et ne veut plus référencer tel ou tel fournisseur, l’abus de position dominante est caractérisé car les zones où peuvent s’implanter ces surfaces étant délimitées par un périmètre précis, aucune autre ne peut s’y installer également.

Lorsque le libre marché s’applique aux clients mais pas aux fournisseurs, l’exercice de ces métiers bénéficie d’une sorte de protection dans la mesure où le contingentement interdit à d’autres de s’installer. Nous recevons beaucoup de témoignages de cette situation inacceptable. Les prestataires sont obligés de réviser leurs prix, ce qui peut poser problème au regard des engagements qu’ils ont pris et des charges qu’ils assument pour réaliser la prestation envisagée. Comment dès lors s’étonner qu’il y ait des dépôts de bilan ?

Quant aux délais de paiement, sujet cher à Chantal Guittet, on dépasse souvent les 120 jours, c’est-à-dire que l’on ne respecte pas la loi. Encore une fois, c’est le pot de fer contre le pot de terre. Le fournisseur n’ose pas dénoncer la situation, car il risque de perdre définitivement son client. On aura beau inscrire plein de choses dans la loi, cela ne servira à rien si une entité n’est pas là pour dénoncer ces comportements intolérables dans un pays de droit. Monsieur le ministre, toutes les dispositions prochaines permettront-elles à l’Autorité de la concurrence, voire à d’autres, de régler cette question ?

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