Intervention de Alain Bazot

Réunion du 4 mars 2015 à 9h30
Commission des affaires économiques

Alain Bazot, président de l'Union fédérale des consommateurs, UFC-Que choisir :

Si l'UFC a soutenu la loi, elle a émis des réserves au sujet du choix de modèle de détecteur retenu : nous avons souligné le risque qu'il y avait à ne labelliser qu'un seul type de dispositif et l'histoire nous a donné raison. Par ailleurs, nous sommes navrés de constater que la disposition qui prévoyait une vaste campagne de sensibilisation avant la promulgation du texte n'a pas été appliquée. Les pouvoirs publics avaient devant eux cinq ans pour cela ; nous attendions l'équivalent de ce qui est fait au sujet des accidents de la route. Las, la campagne lancée il y a un mois seulement par le ministère du logement n'est pas à la hauteur des enjeux. Dans d'autres pays, plus que l'installation de détecteurs, ce sont les campagnes de sensibilisation qui ont réduit par deux, voire par trois, les taux de mortalité – sans parler du nombre de blessés, bien supérieur à celui des tués.

Dès 2006-2007 nous avions procédé à des tests qui montraient que les appareils mis sur le marché étaient défectueux, sans que cela entraîne la moindre réaction. Alors que les consommateurs ne connaissaient ni leurs obligations, ni leurs droits, les professionnels se sont mis en ordre de bataille pour vendre leurs produits. Et nos derniers tests ont montré qu'un tiers des appareils mis sur le marché ne fonctionnent pas ! Quant aux normes, nous connaissons une véritable cacophonie. Le marquage CE est une duperie ; il a été renforcé en cours de route mais ne fait l'objet d'aucun suivi. Le marquage NF offre de meilleures garanties mais, relevant du droit privé, il ne contraint pas les fabricants. Par ailleurs, tous les consommateurs sont loin d'être au fait de ces distinguos.

Nous avons dénoncé des détecteurs dangereux et porté plainte devant les tribunaux pour pratiques commerciales trompeuses, mais l'encombrement des tribunaux est tel que nous n'avons guère d'espoir. Inversement, nous avions estimé un produit correct, mais la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes l'a retiré du marché en le considérant déficient. Le contrôle des appareils mis sur le marché est insuffisant : la DGCCRF fait ce qu'elle peut mais manque de moyens, ceux-ci sont en constante diminution, ce que nous ne cessons pas de dénoncer. Pour excellente que soit la loi, son accompagnement n'est donc pas à la hauteur des enjeux.

Les consommateurs sont sous-informés. Combien faut-il de détecteurs par logement ? Il en faut un, mais les vendeurs disent le contraire alors que nous sommes à quatre jours seulement de l'entrée en vigueur de l'obligation. Il règne par ailleurs un flou total sur une loi qui date de cinq ans et que des textes récents viennent de modifier sur des sujets cruciaux : la loi ALUR dispose ainsi que l'obligation d'installation repose sur le propriétaire, tandis que la loi Macron ne fait qu'ajouter à la confusion au sujet des délais, si bien que nous sommes submergés d'appels ! Par ailleurs, je considère pour ma part qu'il n'y a pas obligation qui vaille sans sanction ; or, nous venons d'avoir confirmation qu'il n'y a pas de sanction, ni de la part des assureurs ni à quelque niveau que ce soit. Et pendant ce temps-là, les consommateurs se précipitent pour acheter des appareils dont la moitié sont pourris…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion