Intervention de Guy Teissier

Réunion du 4 décembre 2012 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Teissier :

J'ai eu le privilège de participer à l'élaboration du précédent Livre blanc. À l'époque, notre réflexion avait principalement porté sur l' « arc des crises ». Le document en préparation devrait se caractériser par une vision transversale. Tout Livre blanc est une boussole offerte au Président de la République, chef des armées, pour lui permettre d'orienter sa politique de défense - à cet égard, le rôle de la DGA n'a pas à y être évoqué. Vous avez évoqué l'éventualité d'opérations civilo-militaires, notamment au Sahel. Selon moi, mieux vaudrait parler d'opérations militaro-civiles : comment des opérations civiles sont-elles possibles s'il n'y a pas de paix, laquelle ne peut être apportée que par une intervention militaire, avec ou sans armes, puisque des opérations de maintien de la paix suffisent parfois. Des interventions militaires seront nécessaires, ce qui ne signifie pas qu'elles doivent obligatoirement être réalisées par notre armée. Bien sûr, il faut aussi intervenir sur le plan civil - mais comment des ONG pourraient-elles agir en Afghanistan dans un climat insurrectionnel permanent ?

Au cours de la décennie écoulée, de nombreuses interventions ont eu lieu. Nous allons à présent nous retirer d'à peu près tous les théâtres d'opérations. Il avait été imaginé dans le précédent Livre blanc, sans que cela soit finalement réalisé, de dégarnir nos positions en Afrique. Cette orientation qui, à l'époque déjà, me paraissait être un non-sens, me semble l'être davantage encore aujourd'hui. Il n'empêche : notre armée, désormais professionnelle, aura bientôt pour tout horizon ses casernes à Canjuers ou au Larzac. Qu'adviendra-t-il d'une armée ainsi cantonnée à ses terrains de manoeuvre – singulièrement l'armée de terre ?

Pour ce qui est de l'Europe de la défense, en faveur de laquelle j'ai beaucoup milité, deux camps sont en présence : celui des « nantis », les grands pays qui ont leur propre industrie de la défense, et celui des « petits » pays qui s'en moquent éperdument, considérant que leur double appartenance à l'espace économique européen et à l'OTAN les dispense de s'intéresser à la question. De plus, dans les grands pays prévaut l'égoïsme national, chacun souhaitant maintenir son industrie de défense. Mieux vaudrait donc renforcer les coopérations qu'envisager une intégration. Il y a trois jours, la société Dassault a fait voler le prototype du drone européen de combat ; c'est la parfaite illustration qu'une coopération européenne est possible sur des projets précis. En revanche, regrouper l'industrie navale ou terrestre au sein d'un mastodonte européen me semble être, à ce jour, une entreprise utopique. Enfin, l'Europe de la défense ne pourra fonctionner aussi longtemps que n'existera pas l'état-major européen dont ni les États-Unis ni le Royaume-Uni ne veulent entendre parler pour l'instant.

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