Intervention de Alain Leboeuf

Séance en hémicycle du 13 décembre 2012 à 9h30
Principe de participation du public défini à l'article 7 de la charte de l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Leboeuf :

Madame la ministre, madame la présidente, monsieur le vice-président de la commission mixte paritaire, madame la rapporteure, chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis tire les conséquences de plusieurs décisions que le Conseil constitutionnel a rendues en octobre 2011, en juillet dernier puis, récemment, à la fin du mois de novembre, à l'occasion de questions prioritaires de constitutionnalité. Ces décisions visent à combler une lacune de notre arsenal législatif concernant l'article 7 de la Charte de l'environnement, qui consacre le principe de participation du public aux décisions ayant des effets sur l'environnement.

Je tiens tout d'abord à saluer l'effort constant de notre pays, depuis dix ans, pour que notre législation tienne mieux compte de l'environnement et que le public puisse participer aux questions liées à sa préservation. C'est cette volonté qui a conduit la France à signer, puis à ratifier, le 8 juillet 2002, la convention d'Aarhus qui garantit l'accès à l'information et la participation du public au processus décisionnel ainsi que l'accès à la justice en matière d'environnement. C'est cette même volonté qui a encore conduit notre pays à inscrire en 2005, dans sa Constitution, la Charte de l'environnement et à consacrer la démocratie environnementale prévue dans son article 7, en permettant que soient ouverts de grands débats publics sur les projets ayant un impact environnemental.

Nous devons à la persévérance et à la force de conviction de Jacques Chirac l'inscription dans notre Constitution de la Charte de l'environnement. Si celle-ci a pu être débattue à l'époque, je constate qu'elle fait aujourd'hui l'objet d'un vaste consensus. Nous ne pouvons que nous réjouir, au sein du groupe Rassemblement-UMP, que le groupe socialiste et le groupe écologiste, qui n'avaient à l'époque pas voté la Charte de l'environnement et son principe de précaution, aient, depuis, pris la mesure de l'importance de ce texte et qu'ils s'engagent à le compléter.

C'est un gage de reconnaissance des travaux conduits sous les précédentes législatures par les gouvernements et la majorité de l'époque : travaux conduits par le gouvernement du Président Chirac, avec l'adoption de cette Charte en 2004, puis son inscription dans la Constitution en 2005, travaux conduits par le gouvernement du Président Sarkozy, sous la direction de François Fillon, avec l'adoption du Grenelle de l'environnement, qui a marqué un véritable tournant dans la politique en matière de défense environnementale.

Pour autant, si l'on ne peut que se réjouir de cette reconnaissance et de la volonté de poursuivre dans cette voie, je regrette les lacunes du texte qui nous est présenté aujourd'hui.

Je regrette tout d'abord qu'il prévoie de recourir à une ordonnance sur des questions aussi importantes que celle du régime des décisions individuelles. Nous déplorons fermement, comme Martial Saddier, la volonté du Gouvernement d'user de cette procédure telle qu'elle est prévue à l'article 7 du projet de loi, lequel habilite le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance des dispositions relatives à la participation du public pour les décisions autres que celles incluses dans le champ de l'article L.120-1 du code de l'environnement, c'est-à-dire, notamment, les décisions individuelles. Il me paraît pour le moins contradictoire que la représentation nationale soit ainsi dessaisie de ses compétences dans un texte qui prévoit de renforcer les procédures de contrôle à travers la participation du public aux décisions en matière d'environnement.

Par ailleurs, je souhaite émettre d'autres réserves sur le contenu du texte.

Nous sommes en effet en droit de nous interroger sur sa conformité avec la décision rendue le 23 novembre dernier par le Conseil constitutionnel, qui a statué sur une nouvelle question prioritaire de constitutionnalité relative à l'article L.120-1 du code de l'environnement. À cette occasion, le Conseil constitutionnel a bien précisé que n'étaient concernées par le principe de participation que les décisions ayant une incidence directe et significative sur l'environnement. Or, le présent texte fait simplement référence aux décisions ayant une incidence sur l'environnement. En maintenant cette formulation, différente de celle utilisée par le Conseil constitutionnel et qui donne un périmètre beaucoup plus large au champ des décisions qui seront concernées par le principe de participation du public, nous pouvons nous interroger sur la sécurité juridique du dispositif que ce texte propose.

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