Intervention de Jean-Yves Le Bouillonnec

Séance en hémicycle du 19 décembre 2012 à 15h00
Retenue pour vérification du droit au séjour et modification du délit d'aide au séjour irrégulier — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Bouillonnec, suppléant M Yann Galut, rapporteur de la CMP :

Madame la présidente, monsieur le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, chers collègues, le rapporteur de la commission mixte paritaire, M. Yann Galut, qui avait d'autres obligations, m'a demandé de le suppléer et vous prie de bien vouloir l'excuser pour son absence.

Je serai bref, car nous avons tous présents à l'esprit les débats qui se sont achevés la semaine dernière dans notre assemblée.

Le projet de loi relatif à la retenue pour vérification du droit de séjour et portant modification du délit d'aide au séjour irrégulier nous réunit pour la dernière fois. Il a deux objets.

Le premier est de mettre notre législation relative aux étrangers en conformité avec le droit de l'Union européenne. À ce titre, le projet de loi supprime le délit de séjour irrégulier et crée une procédure de retenue pour vérification du droit au séjour d'une durée maximale de seize heures. Il établit également un nouveau délit de maintien irrégulier sur le territoire, conforme à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, et réforme le contrôle des titres de séjour.

Le second objet du texte est d'étendre le régime des immunités pénales en matière d'aide au séjour irrégulier, de manière à exclure clairement du champ de cette infraction les actions humanitaires et désintéressées des personnes physiques ou des associations. En d'autres termes, il supprime ce que l'on a pu appeler d'une manière extrêmement maladroite le « délit de solidarité ». Il répond ainsi à une demande légitime de l'opinion publique, soutenue par beaucoup d'entre nous.

Ce projet de loi est caractérisé par une volonté d'équilibre, conciliant justice et fermeté. Cet équilibre a été la préoccupation constante de la commission des lois et de son rapporteur, qui se sont efforcés de renforcer les garanties accordées aux personnes sans porter atteinte à l'efficacité de nos forces de l'ordre.

La commission a ainsi précisé que la personne retenue peut prendre tout contact utile afin d'assurer l'information et, le cas échéant, la prise en charge des enfants dont elle a la garde. Elle a rendu systématique la remise du procès-verbal à l'intéressé, encadré le recours aux menottes ou aux entraves et clarifié le fait que la personne retenue pourrait prévenir à la fois sa famille et toute personne de son choix.

En ce qui concerne le délit de solidarité – expression encore une fois impropre – la commission a étendu le champ de la nouvelle immunité humanitaire afin d'éviter les inconvénients liés à une énumération limitative des prestations concernées. Est ainsi également couverte toute aide n'ayant pas donné lieu à contrepartie si elle est destinée à préserver la dignité ou l'intégrité physique de l'étranger, au-delà des seules prestations énumérées – conseils juridiques, restauration, hébergement et soins médicaux – qui restent, bien sûr, incluses dans le champ de l'immunité.

Ces avancées ont été confortées lors de la séance publique.

L'apport le plus important est évidemment la présence de l'avocat lors de toutes les auditions, et non plus seulement lors d'un entretien de trente minutes. Cette amélioration résulte, pour des raisons de recevabilité financière, d'une initiative du Gouvernement et je tiens à remercier le ministre de l'intérieur d'avoir ainsi répondu à une demande très forte de nombre de nos collègues. La disposition relative à la prise en compte des intérêts des enfants a également été précisée, et l'encadrement de la prise des empreintes digitales a été renforcé.

Quant au dispositif relatif à l'immunité humanitaire en matière d'aide au séjour irrégulier, celui-ci a encore été amélioré, de manière à conforter pleinement l'extension du champ prévue en commission et à assurer sa parfaite lisibilité.

Les travaux de l'Assemblée ont été menés dans le même esprit que ceux du Sénat, qu'ils ont prolongés et complétés sur certains sujets. La commission mixte paritaire qui nous a réunis la semaine dernière sous la présidence de M. Jean-Jacques Urvoas n'a donc eu à trancher qu'un nombre de points limité, à partir de rédactions communes préparées par ses deux rapporteurs, Yann Galut pour l'Assemblée et Gaétan Gorce pour la seconde chambre.

La première de ces rédactions communes améliore la formulation de l'alinéa prévoyant que la personne retenue sera informée de la possibilité de ne pas signer le procès-verbal.

La deuxième prévoit la création d'un registre spécial des retenues, sur le modèle du dispositif qui figure dans le code de procédure pénale pour les gardes à vue. Ce registre permettra de garder une trace des mesures de retenue et de garantir ainsi un contrôle effectif de ces mesures par les autorités compétentes – je pense notamment au contrôleur général des lieux de privations de liberté.

La troisième précise la rédaction de l'article 6 relatif au délit de maintien irrégulier sur le territoire français, afin d'assurer sa parfaite conformité avec la jurisprudence européenne.

En définitive, le texte a été substantiellement amélioré à l'issue des travaux des deux assemblées sans que son équilibre général ne soit bouleversé.

Il faut garder présent à l'esprit que ce projet de loi n'est qu'une première étape. Son objet est circonscrit et son ambition n'est pas de résoudre toutes les difficultés soulevées par les six lois adoptées au cours des cinq dernières années.

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