Intervention de Jean-Jacques Bridey

Réunion du 21 octobre 2015 à 16h15
Commission élargie : finances - défense nationale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Bridey, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour l'équipement des forces – dissuasion :

Lors du débat budgétaire de l'année dernière, vous aviez rappelé, monsieur le ministre, combien l'année 2015 serait décisive pour la bonne exécution de la LPM : des programmes clés pour la modernisation de notre armée, notamment MRTT et Scorpion, devaient être lancés et les ressources exceptionnelles (REX) issues des ventes de fréquences devaient venir abonder le budget de l'équipement des forces à hauteur de 2,2 milliards d'euros. Sur ce dernier point, je vous avais fait part de mon inquiétude, largement partagée sur ces bancs, quant au calendrier des cessions, qui semblait bien optimiste pour 2015 et laissait planer une grande incertitude sur la trajectoire financière de la LPM. Je m'interrogeais à l'époque sur le bien-fondé de la création des fameuses sociétés de projet que vous envisagiez. Un an après, cette inquiétude n'a plus lieu d'être : l'actualisation de la programmation militaire, votée en juillet dernier, a levé l'hypothèque que représentaient les REX en leur substituant des crédits budgétaires, non seulement pour 2015, mais pour le reste de la période de la LPM. Le montant des REX demeure aujourd'hui tout à fait résiduel : moins de 1 milliard d'euros sur les 162 milliards de ressources attendues pour les années 2015 à 2019, soit 0,57 % du budget global.

Parallèlement, l'année 2015 a vu les hypothèses d'exportation de Rafale – sur lesquelles était également bâtie la LPM – se réaliser, sécurisant la trajectoire financière pour les années à venir. Elle ouvre ainsi des perspectives nouvelles pour toute la chaîne de production, de Dassault à Thalès en passant par tous les sous-traitants. Les industriels m'ont confié en audition se préparer à augmenter leurs cadences de production pour passer rapidement à deux avions par mois, puis à trois à partir de 2018. Ces contrats viennent conforter les excellents résultats enregistrés à l'exportation par l'industrie de défense française depuis trois ans.

Non seulement aucune des briques de la programmation n'a donc pour le moment été retirée, mais les décisions courageuses prises par le Président de la République pour tenir compte du nouveau contexte stratégique ont accentué l'effort en faveur de la défense de 3,8 milliards d'euros pour la durée restante de la programmation. Pour la première fois depuis longtemps, une loi de programmation militaire est donc en passe d'être intégralement respectée.

Pour l'année 2016, les crédits de paiement du programme 146 s'élèvent à 9,9 milliards d'euros que viendront compléter 63 millions d'euros de fonds de concours et attributions de produits, portant le total des ressources disponibles à un peu plus de 10 milliards d'euros. Ces montants se situent dans la continuité des deux premières années de la programmation, mais se composent désormais quasi exclusivement de crédits budgétaires.

La majorité des programmes nouveaux prévus par la LPM ayant été lancés en 2014 et 2015, conformément au calendrier, 2016 est avant tout une année de consolidation du modèle d'armée en train de se mettre en place et de concrétisation des choix opérés par la LPM actualisée. Parmi les événements notables de l'année à venir, retenons la poursuite de l'effort en matière de renseignement, avec la montée en puissance des programmes « Capacité de renseignement électromagnétique spatiale » (CERES) et Comsat NG, et la commande d'un nouveau système de drones « Moyenne altitude longue endurance » (MALE) – le troisième en attendant le quatrième –, ainsi que l'attention portée à la composante hélicoptères, avec des commandes supplémentaires de Tigres et de NH90, ou encore la commande de nouveaux B2M et BSAH.

Au-delà de ces bons chiffres, plusieurs enjeux soulèvent des interrogations. Le premier sujet d'inquiétude porte aujourd'hui sur la poursuite du programme A400M. L'industriel rencontre de grandes difficultés dans la mise au point des capacités tactiques des avions, qui doivent notamment permettre le largage de parachutistes – par les deux portes – et de charges. L'équipe industrielle a été entièrement remaniée en cours d'année, mais le programme a pris beaucoup de retard et les livraisons ne seront pas au rendez-vous cette année. C'est d'autant plus regrettable que les besoins opérationnels de nos forces sont aujourd'hui particulièrement importants. Vous avez rencontré le président du groupe Airbus cet été et lui avez fait part de nos exigences : la livraison de six avions dotés de capacités tactiques avant la fin de l'année 2016. La réponse était, je crois, attendue ces jours-ci ; que pouvez-vous nous dire à ce sujet ? Que se passerait-il si Airbus n'était pas capable de répondre à ces exigences ? Comment voyez-vous l'avenir de ce programme ?

La loi actualisant la LPM, que nous avons votée cet été, prévoit un effort supplémentaire en faveur de l'équipement de 1,5 milliard d'euros, dont 1 milliard viendrait des gains de pouvoir d'achat potentiels à la suite d'une évolution favorable du coût des facteurs. La commission de la défense a déjà effectué, en juillet dernier, un contrôle sur pièces et sur place dans les locaux du ministère des finances ; nous serons évidemment très attentifs dans les mois qui viennent à ce que ces économies potentielles se traduisent effectivement par des commandes supplémentaires. Quel suivi comptez-vous faire de cette évolution du coût des facteurs ? Quelles discussions avez-vous engagées à ce sujet avec les industriels, notamment sur les programmes futurs ? Quelles marges de manoeuvre avez-vous identifiées pour l'année prochaine ?

Nous suivrons de près la fin de l'exécution 2015, notamment le surcoût des OPEX et le financement des OPINT, et nous serons attentifs à ce que les 2,2 milliards d'euros de crédits budgétaires, essentiels à la bonne poursuite de notre effort en matière de défense, soient bien au rendez-vous en loi de finances rectificative.

J'émets évidemment un avis favorable sur ce projet de budget.

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