Intervention de Daniel Gibbes

Séance en hémicycle du 26 novembre 2015 à 15h00
Favoriser la baisse de la production de co2 par le développement de l'effacement électrique diffus — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Gibbes :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi de notre collègue Yves Jégo sur un sujet qui, je le sais, lui tient à coeur : l’effacement électrique diffus. Il faut l’avouer, ce sujet technique et complexe n’est maîtrisé que par quelques spécialistes. Pourtant, l’effacement électrique diffus mérite d’être popularisé auprès des consommateurs comme des professionnels.

De quoi s’agit-il ? Il s’agit d’un dispositif permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre en faisant baisser temporairement, chez des consommateurs, le niveau de soutirage effectif d’électricité sur les réseaux publics. Ainsi efface-t-on l’électricité avant qu’elle ne soit consommée, d’où l’expression « effacement de consommation ».

Plus précisément, un opérateur d’effacement soustrait une quantité d’électricité à des consommateurs volontaires, via des microcoupures, afin de l’injecter sur le marché de l’énergie et sur le mécanisme d’ajustement de l’offre et de la demande.

L’effacement électrique a un véritable intérêt en période de forte consommation. En effet, en hiver, lorsque la température baisse ne serait-ce que d’un degré, la consommation augmente de 2 300 mégawatts, soit deux fois la consommation de la ville de Marseille. Lors de ces périodes dites « de pointe », l’effacement électrique permet d’équilibrer le réseau sans recourir à une augmentation de la production, à la fois coûteuse et néfaste en termes de développement durable.

Pour les consommateurs, l’effacement électrique permet de faire baisser la facture grâce aux économies d’électricité réalisées. En période de difficultés économiques, les consommateurs auraient donc tout intérêt à se porter volontaires, alors même que leur quotidien ne se trouve en aucun cas impacté par les microcoupures.

Enfin, d’un point de vue économique, le développement de l’effacement électrique peut faire émerger des acteurs français champions de cette technologie. Comme l’a très justement remarqué Yves Jégo dans son rapport, des entreprises françaises ont déjà élaboré des techniques pour gérer les microcoupures d’électricité. La France pourrait donc devenir un des leaders mondiaux du savoir-faire technique de l’effacement diffus, avec à la clé la création de nombreux emplois.

L’effacement électrique présente donc toutes les qualités, économiques et environnementales, pour être encouragé par les pouvoirs publics. Or, pour cela, il est indispensable que le cadre juridique, c’est-à-dire les droits et devoirs de chaque acteur, soit clairement défini et équilibré.

Ce cadre juridique, issu initialement de la « loi Brottes » de 2013, règle les relations financières entre l’opérateur d’effacement et le fournisseur d’électricité du site effacé, le premier devant verser au second une compensation financière puisque, d’une part, l’électricité effacée ne sera pas consommée par le consommateur et donc ne sera pas payée ; d’autre part, l’opérateur d’effacement peut revendre cette électricité sur le marché et ainsi retirer un gain financier pour une électricité qu’il n’aura pas produite mais seulement réorientée.

Le montant de la compensation financière, appelée « versement », dépendra du type d’effacement, c’est-à-dire selon qu’il conduit à une véritable économie d’énergie ou à un simple report de consommation sur le réseau, et donc des bénéfices retirés ou non par l’opérateur d’effacement.

Si la loi Brottes a déterminé un cadre juridique applicable à l’effacement électrique, elle ne lui a malheureusement pas permis de se développer significativement. Or, on estime que la capacité d’énergie effacée s’élèverait à 500 mégawatts et concernerait 100 000 foyers. Il est donc indispensable de promouvoir l’effacement électrique et de le rendre attractif sur le marché de l’énergie.

C’est la raison pour laquelle la loi relative à la transition énergétique entend réformer son cadre juridique. Lors de l’examen de l’article 168 de cette loi, de longs débats avaient été engagés, notamment autour des propositions d’Yves Jégo. Julien Aubert, l’orateur de notre groupe, avait soutenu ces propositions, rappelant que « la meilleure énergie est celle qu’on ne produit pas, qu’on ne dépense pas. L’effacement est donc la meilleure façon de réussir la transition énergétique. »

À la veille de la COP21, il apparaît opportun de valoriser ce dispositif utile en termes de maîtrise de la consommation énergétique et de développement durable. La proposition de loi d’Yves Jégo a le mérite de reprendre le débat sur l’effacement électrique afin de le mettre sur le devant de la scène et le rendre plus attractif auprès des opérateurs, en clarifiant les modalités du versement aux fournisseurs.

Les députés du groupe Les Républicains ne peuvent être que favorables à cet objectif et soutenir la proposition de loi. La commission des affaires économiques n’a d’ailleurs pas remis en cause cette proposition de loi, mais a renvoyé aux conclusions de la mission d’information sur l’effacement électrique diffus qui vient d’être lancée. Nous souhaitons par conséquent que cette mission d’information travaille rapidement et fasse des propositions pragmatiques et équilibrées pour tous les acteurs de la chaîne : opérateur d’effacement, fournisseur et, bien sûr, consommateurs.

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