Intervention de Philippe Goujon

Séance en hémicycle du 16 décembre 2015 à 21h30
Transports collectifs de voyageurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Goujon :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre pays est en guerre contre le terrorisme et il nous revient, en tant que législateur, de forger un véritable bouclier de sécurité face à la persistance de la menace. En Île-de-France, ce sont plus de 7 millions de voyageurs qui utilisent chaque jour les transports en commun. Ils constituent une cible, nous le savons : l’histoire récente l’a hélas montré à plusieurs reprises.

Même si l’objet initial de cette proposition de loi – qui, en cela, s’inspirait largement de propositions de Valérie Pécresse –, était la lutte contre la fraude, son volet antiterroriste méritait d’être renforcé au lendemain des terribles attentats du 13 novembre dernier.

L’urgence sécuritaire vous a aussi inspiré des propositions de bon sens, que nous formulons depuis longtemps. Il en est ainsi de l’élargissement des pouvoirs de fouilles et de palpation aux agents des transports – même s’il faut encore lever, selon nous, la condition du consentement de l’intéressé –, de leur habilitation à exercer en civil, même s’il faudrait aussi les autoriser à porter leur arme en dehors de leur service et renforcer cet armement, au vu de certains délits comme la vente à la sauvette – puisque celle-ci est désormais un délit, à la faveur d’une disposition que j’avais fait introduire dans la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite « LOPPSI 2 » – ou de l’usurpation d’identité.

Il en va de même du durcissement de la lutte contre la fraude par l’échange d’informations administratives et de la sanction des mutuelles de fraudeurs, même si, sur ce point, le texte issu de la commission punit simultanément de deux mois et de cinq ans de prison le même délit.

Surtout, vous auriez dû saisir l’occasion qui vous était offerte pour prendre davantage en considération la lutte antiterroriste. De fait, les propositions annoncées par le Président de la République au lendemain des attentats exigeront sans doute plusieurs lois encore pour trouver leur concrétisation. Or les amendements de l’opposition sont souvent rejetés, avant d’être repris au compte-gouttes par le Gouvernement dans un texte ultérieur, même si, monsieur le rapporteur, des efforts ont été consentis.

Depuis des années, nous proposons en vain de doter la police et la gendarmerie d’un cadre rénové de légitime défense, de déchoir de la nationalité les terroristes, de faire du renseignement pénitentiaire un vrai service spécialisé, de renforcer l’isolement physique et électronique des détenus radicalisés, de créer un délit de consultation des sites djihadistes et de placer en stages de dé-radicalisation les jeunes qui les fréquentent. Je pense que vous y viendrez, même si c’est un autre sujet.

En commission, nous vous avons proposé de renforcer la coopération entre forces de l’ordre et sécurité privée, suivant en cela une recommandation du rapport Blazy. C’est d’ailleurs le sens des mesures décidées par le Gouvernement pour l’état d’urgence ; elles autorisent les policiers municipaux à prêter main-forte aux forces de sécurité nationale pour la sécurisation des transports – vous avez même étendu cette possibilité aux AOT – et habilitent les policiers et les gendarmes à porter leur arme en dehors de leur service.

Nous vous proposons de conserver cette possibilité une fois levé l’état d’urgence, non seulement pour les policiers et gendarmes, mais aussi pour les agents de sécurité de la SNCF et de la RATP habilités à porter une arme à feu – actuellement au nombre de 3 737 –, afin d’améliorer la sécurisation passive des lieux publics et de nous prémunir au mieux d’attentats comme celui du Thalys. Chacun doit également être en mesure de justifier son identité et de se prêter aux contrôles de ses bagages.

Bien que la majorité ait préféré ses amendements aux nôtres, il faudra autoriser les agents de sécurité des transports à contrôler l’identité et à fouiller les bagages des passagers en supprimant la condition de consentement, et à expulser les passagers qui refuseraient.

La multiplication des colis suspects appelle aussi à clarifier le partage des compétences entre la police et les agents des transports, afin d’éviter des événements comme la grève « monstre » du RER A.

J’en profite, même si c’est un autre sujet, pour appeler de nouveau le Gouvernement à mener à bien la réforme de la protection de l’identité que j’avais engagée – la future loi constitutionnelle permettant de résoudre le risque de censure –, comme vous comptez sans doute le faire pour la déchéance de nationalité. Cette réforme est en effet indispensable pour déceler les usurpations d’identité.

Quant au criblage des personnels des sociétés de transport affectés à des postes sensibles, il est insuffisant de se limiter aux nouveaux recrutements et aux affectations, comme le propose le rapporteur : il convient d’étendre la disposition à tous les agents déjà en poste.

Sur ce texte utile et urgent, nous avons encore des propositions, que nous espérons voir retenues. Notre vote, vous l’aurez compris, dépendra de votre capacité à construire le dialogue républicain auquel vous vous référez ; mais quelle que soit votre posture ce soir, si vous ne remédiez pas au désarmement pénal en restaurant des mesures telles que les peines plancher, en étendant la rétention de sûreté aux terroristes, en instaurant un régime d’isolement carcéral des radicalisés prosélytes et en abrogeant la libération automatique aux deux tiers de la peine – mesure qui conduira à relâcher, dans les deux ou trois ans qui viennent, quelque 200 terroristes dans la nature –, la République ne sera peut-être pas en mesure de gagner, comme nous le souhaitons tous, la guerre contre le terrorisme.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion