Intervention de Jean Lassalle

Séance en hémicycle du 23 janvier 2013 à 15h00
Débat sur les politiques industrielle et commerciale européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Lassalle :

Merci monsieur le président. En participant à ce débat, je mesure l'extrême complexité des questions soumises à nos ministres. Fort heureusement, ils sont armés pour cela. Tout le monde connaît le talent légendaire de M. Cazeneuve et je découvre celui de Mme Bricq. Je ne peux m'empêcher de penser à ce que disait hier M. le Président de la République fédérale allemande, qui observait que depuis cinquante ans, la communauté européenne était obligée de se construire entre deux pensées très fortes – celle d'Adenauer qui était plutôt pour une Europe fédérale et celle du général de Gaulle qui était pour l'Europe des patries – et que, malgré, tout il fallait garder espoir parce que l'Europe continuait à avancer. C'est le sentiment que vous me donnez en écoutant vos réponses.

Je ne vais pas poser de questions parce que vous avez déjà assez à faire (Sourires.), mais je voudrais faire une ou deux réflexions qui me viennent à l'esprit.

On parle beaucoup de la Chine. Moi, j'y ai fait un voyage, il y a deux ans. Quand on parle de la Chine, il faudrait dire « les Chine », car c'est un pays où 100 millions d'habitants – à peu près une Allemagne – ont le même standing que nous, mais où ce que j'ai vu dans l'arrière-pays, pas très loin de Pékin ou de Shanghai, c'est le Moyen Âge plus que moyenâgeux, c'est terrifiant ! Il y a aussi, dans le grand jeu géopolitique auquel la France doit participer, des questions à se poser.

Ma deuxième réflexion porte sur le rôle des grands chefs et des grandes entreprises françaises. À part quelques exemples notables, notamment dans l'aviation ou la haute technologie, j'ai l'impression qu'un certain nombre de très grandes entreprises ne se battent plus comme il le faudrait pour défendre les intérêts français.

Je prendrai l'exemple de Total. Vous avez peut-être entendu parler de cela : Total est venu sur le site de Lacq pour récupérer les immenses concessions pétrolières qu'avaient accumulées avant elle – d'une manière parfois un peu pittoresque, c'est vrai – Elf et la SNPA. Voilà un groupe qui ne paie pratiquement pas un centime d'impôts en France et qui affichait l'an dernier des millions de bénéfices. Il y a quand même là un problème. Pas le moindre début de réhabilitation du site : c'est le conseil général des Pyrénées-Atlantiques et le conseil régional d'Aquitaine qui sont obligés de le faire, en se saignant aux quatre veines. Pire : pour donner le sentiment qu'ils font du développement, ils piquent les entreprises qui se trouvent dans un rayon de cent cinquante kilomètres à la ronde et les font venir chez eux. Vous voyez, moi qui suis républicain, comme vous, j'ai du mal à l'encaisser. Et quand j'apprends qu'ils ont 250 employés croates, polonais, qu'ils paient sept euros de l'heure, certes par une société italienne, probablement écran, je dis que ce n'est pas de nature à donner le moral aux Français !

Pour le reste, je me suis beaucoup retrouvé dans les interventions de Mme Rabin et de Mme Bechtel, c'est pourquoi je ne ferai pas plus long. Je vous ai trouvés tous très aimables, merci de m'avoir écouté. Mais il y a un problème français quand même : je ne peux pas croire que la France, qui était il y a vingt ans l'un des pays les plus entreprenants et les plus industrialisés du monde, soit aujourd'hui scotchée à la volonté de quelques entreprises qui ne veulent plus avancer, si ce n'est pour nous faire payer des URSSAF et des ASSEDIC.

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