Intervention de Serge Letchimy

Séance en hémicycle du 15 mars 2016 à 15h00
Biodiversité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Letchimy :

Madame la secrétaire d’État, votre texte n’est pas fourre-tout : il doit seulement combler un vide de quarante ans, la dernière loi-cadre de protection de la nature datant de 1976. C’est un texte très important, par lequel la France donne un exemple exceptionnel puisqu’elle légifère sur la biodiversité tout en consacrant un secrétariat d’État à la biodiversité. C’est à saluer.

Je ne sais pas si c’est le hasard ou la nécessité – référence à la pensée de Jacques Monod – qui a conduit à un délai de deux ans pour l’examen de ce texte. Ce qui est sûr, c’est qu’à chaque fois qu’un texte est présenté à l’Assemblée nationale, c’est toujours avec perplexité qu’on constate que l’outre-mer est relégué à l’arrière-garde de la réflexion, et que pendant ces deux années, nous avons pu ensemble corriger une injustice. En effet, alors qu’on se complaît à préciser que 80 % de la biodiversité française se trouve dans l’outre-mer, la première mouture du projet de loi ne contenait absolument aucune disposition concernant ces territoires. Je voudrais remercier Mme Ségolène Royal, la rapporteure et le président Chanteguet pour avoir su, petit à petit, trouver le rythme et proposer des avancées importantes pour l’outre-mer.

Je veux saluer sept initiatives. La première concerne la composition du Comité national de la biodiversité, avec la présence appréciée des pays d’outre-mer. Deuxième avancée : la mise en place de comités régionaux de la biodiversité pour chaque département et région d’outre-mer. La troisième est l’appui à la préservation de la continuité écologique transfrontalière et aux actions de coopération régionale entre la France et les États voisins des pays d’outre-mer.

Ensuite, il faut mentionner le dispositif d’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation. Un débat important a porté sur la notion de communauté d’habitants, et plus particulièrement sur les retombées liées aux pratiques traditionnelles. Je salue le consensus autour de l’idée que les dispositions relatives aux retombées de l’utilisation des ressources génétiques doivent aussi être applicables dans l’outre-mer. Au-delà de la notion de communauté autochtone – celle-ci n’existe pas en Martinique ou en Guadeloupe, mais existe en Guyane – les savoir-faire locaux restent très importants pour la production et l’usage de médicaments.

Très important aussi : la création d’une délégation de l’Agence pour la biodiversité, sa composition et ses retombées. C’était un élément capital dans chaque bassin maritime transfrontalier au départ, et nous sommes allés plus loin puisque vous avez accepté le principe d’une installation dans chaque département d’outre-mer. Nous aurons un débat sur cette question car si ce principe a été contesté sur le plan juridique, nous considérons qu’il faut absolument le maintenir.

Nous sommes conscients que la portée de ce texte excède l’outre-mer, mais le travail de fond réalisé en commission, bien loin des déclamations de la séance publique, a permis d’approuver une trentaine d’amendements au profit de ces territoires, déposés par l’ensemble des parlementaires d’outre-mer. Nous venons d’un pays qui a été traumatisé par les pollutions de toute nature, à commencer par le chlordécone. Mais aujourd’hui, les prises de conscience collectives locales nous permettent d’aller très loin dans tous les domaines, y compris dans celui de la banane durable. Elles nous donnent surtout la possibilité de travailler sur la transition énergétique. J’espère qu’on ne confondra plus charbon et biomasse, comme tout à l’heure : une usine de biomasse produit quatre fois moins de CO2 qu’une usine de charbon ! L’usine de Trinité, qui fonctionnait au charbon et a été transformée en usine de biomasse, suit la logique développée par l’État, contrairement à ce que j’ai entendu. Ce dernier a en effet lancé un appel à projets pour la construction d’usines de biomasse en France et dans l’outre-mer, afin d’améliorer notre mix énergétique.

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