Intervention de Philippe Vigier

Séance en hémicycle du jeudi 18 juin 2020 à 15h00
Contribution des hauts revenus à l'effort de solidarité nationale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Vigier :

Cependant, comme l'ont dit mes collègues, les inégalités et le sentiment d'injustice qu'elles engendrent ont progressé. Ainsi, le pouvoir d'achat du quatre-vingt-dix-neuvième percentile est celui qui a le plus progressé depuis juin 2017, alors que, dans le même temps, 20 % des ménages les plus modestes ont vu leur revenu disponible diminuer d'environ 1 %.

Ce constat formulé, que penser des mesures proposées par nos collègues du groupe GDR ? La suppression du prélèvement forfaitaire unique n'est, selon moi, pas souhaitable, car elle pourrait avoir un effet pervers sur les recettes publiques. L'urgence du moment nous impose en revanche de voter l'augmentation des taux de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus dont vous vous souvenez, cher Jean-Paul Dufrègne, qu'elle avait été instaurée en 2012, à l'initiative de Charles de Courson et de votre serviteur, pour mettre les plus fortunés à contribution. C'est là une réflexion que nous devons avoir.

La question essentielle qui nous est posée avec ce texte est de savoir si, oui ou non, nous rétablissons l'ISF. Pour y répondre, le groupe Libertés et territoires estime qu'il existe plusieurs pistes.

La première consiste à refonder l'imposition du patrimoine et les droits de succession, solution que de nombreux économistes considèrent comme la plus efficace pour taxer le capital et éviter d'entretenir les inégalités. Dans cette logique, il conviendrait de laisser le choix aux Français, en leur proposant deux solutions : payer un impôt sur la détention du patrimoine à partir d'un certain seuil, sans aucun impôt de succession, ou ne pas le payer, en contrepartie de quoi la transmission de leur patrimoine serait imposée. Il y aurait là une notion de choix et de responsabilité. Une troisième solution, mixte, consisterait à considérer que l'impôt sur la détention vient en déduction de l'impôt sur la transmission. Cette formule ne concernerait pas nos concitoyens les plus modestes, ni même les classes moyennes, puisque moins de 15 % des héritages dépassent 100 000 euros, qui est le montant de l'abattement pour une transmission en ligne directe.

La seconde piste, celle que je privilégie, consisterait à dépasser les débats surannés autour du rétablissement de l'ISF ou du bien-fondé de sa transformation en IFI. Essayons d'avancer un peu ! Le groupe Libertés et territoires propose la création d'un impôt sur le capital modernisé, qui ne serait pas seulement symbolique, mais contribuerait à la solidarité écologique et économique. Grâce à un mécanisme de défiscalisation et de fléchage des recettes, son produit serait intégralement investi dans la transition écologique ainsi que dans le soutien aux très petites entreprises – TPE – , aux PME, aux petites et moyennes industries – PMI – et aux entreprises de taille intermédiaire – ETI.

Vous l'aurez compris, la question du rétablissement de l'ISF que soulève cette proposition de loi est pour nous indissociable d'une réflexion beaucoup plus vaste sur la fiscalité du patrimoine, mais aussi sur le financement de la transition écologique. Les assurances-vie représentent 2 000 milliards d'euros : quand serons-nous en mesure de faire bouger une partie de cet argent ? Plus que d'ajustements, de retours en arrière, car il faut un minimum de continuité en matière fiscale, ou de débats empreints d'idéologie, c'est d'une refonte de notre fiscalité que nous avons besoin. Elle doit être pensée à l'aune des urgences écologique, économique, sociale, au sujet desquelles notre groupe vous alerte depuis sa création et que la crise vient d'ériger en priorités absolues.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.