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Claire O'Petit
Question N° 11507 au Ministère de la justice


Question soumise le 7 août 2018

Mme Claire O'Petit attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des victimes d'agression qui vivent dans l'angoisse que leur agresseur pourrait recommencer. Actuellement, 48 États américains ont adopté le système d'information VINE (victim information notification everyday) qui permet à une victime de crime de connaître le statut carcéral de son agresseur pratiquement en temps réel. De plus, lorsqu'il porte un bracelet électronique GPS, VINE permet d'informer la victime lorsqu'il ne respecte pas les conditions de son placement sous surveillance à distance. Pour connaître le statut de leur agresseur, les victimes peuvent se connecter sur un site web, appeler un centre d'appel dédié ou bien choisir de recevoir des notifications par mail, par courrier, par SMS, par appel téléphonique automatique. Le système VINE est gratuit pour ses utilisateurs. Aussi, compte tenu de la procédure pénale inquisitoire française qui interroge sur la place de la victime, elle lui demande de lui préciser son point de vue sur le système d'information VINE et sur la possibilité de développer un système semblable en France.

Réponse émise le 6 novembre 2018

La préservation des droits et des intérêts des victimes constitue l'une des priorités de l'action du Gouvernement. Le système VINE a pour effet de permettre à la victime d'accéder sans intermédiaire à des informations relatives à l'exécution de la peine de la personne condamnée. Si l'évolution de la législation française a légitimement conduit à une prise en compte de plus en plus importante des intérêts de la victime à ce stade, il apparait nécessaire de maintenir un équilibre entre les droits de la personne condamnée, notamment le droit au respect de la vie privée à valeur constitutionnelle et conventionnelle, et les intérêts des victimes, tels que la sécurité et la tranquillité. Ainsi, en ce qui concerne la possibilité pour les victimes d'avoir directement accès à des informations contenues dans des fichiers judiciaires, les dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés sont applicables, l'article 1 de cette loi prévoyant notamment que l'informatique […] « ne doit porter atteinte ni à l'identité humaine, ni aux droits de l'homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques ». Dès lors, la conciliation des droits des personnes condamnées et des victimes nécessite l'intercession d'une autorité régalienne. Les lois successives ont donc eu pour effet de rendre l'autorité judiciaire garante des intérêts des victimes pendant l'exécution de la peine, tant en ce qui concerne leur information que leur protection, et ce de manière complète. Ainsi, aux termes de l'article 130-1 du code de procédure pénale (C.P.P.), les fonctions de la peine de sanctionner l'auteur de l'infraction et de favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion afin d'assurer la protection de la société, de prévenir la commission de nouvelles infractions et de restaurer l'équilibre social, doivent être poursuivies « dans le respect des intérêts de la victime ». Dans cette continuité, la loi du 15 août 2014 est venue compléter l'article 707 IV du C.P.P., donnant à la victime, tout au long de l'exécution de la peine, le droit : « 1° de saisir l'autorité judiciaire de toute atteinte à ses intérêts ; 2° d'obtenir la réparation de son préjudice, par l'indemnisation de celui-ci ou par tout autre moyen adapté, y compris, s'il y a lieu, en se voyant proposer une mesure de justice restaurative ; 3° d'être informée, si elle le souhaite, de la fin de l'exécution d'une peine privative de liberté, dans les cas et conditions prévus au présent code ; 4° à la prise en compte, s'il y a lieu, de la nécessité de garantir sa tranquillité et sa sûreté ». La communication aux victimes d'une information pertinente sur le statut carcéral du condamné ainsi que sur les mesures et obligations en cours (date de libération, date de fin d'une mesure, conséquences pour le condamné du non-respect des certaines obligations etc.) relève donc des missions des juridictions de l'application des peines. De la même manière, les juridictions de l'application des peines doivent prendre en compte les droits et les intérêts des victimes à l'occasion de l'ensemble de leurs décisions. A cette fin, elles peuvent diligenter toute mesure d'investigation utile afin d'évaluer les conséquences d'une décision au regard de la situation de la victime, et notamment le risque que la personne condamnée puisse se trouver en sa présence. Le condamné pourra ainsi être soumis à toute interdiction de contact ou de paraitre qui serait nécessaire. Dans cette hypothèse, non seulement la victime doit être avisée de telles obligations mais encore l'article 230-19 du C.P.P. rend obligatoire leur inscription dans le fichier des personnes recherchées, lequel permet une diffusion de l'information sur l'ensemble du territoire national aux services de police et de gendarmerie. Les victimes de violences conjugales ou de viol concernées par ces obligations peuvent également se voir proposer l'attribution d'un « téléphone grave danger » afin de prévenir toute nouvelle agression, s'agissant d'un dispositif de téléprotection avec possible géolocalisation qui assure un accompagnement pendant toute la durée de la mesure par une association référente ainsi qu'une prise en charge globale par les acteurs locaux. Le ministère de la justice est ainsi particulièrement vigilant à prendre toutes les mesures adaptées pour garantir la protection des victimes d'infraction et permettre la mise en place de dispositifs participant à leur reconstruction, y compris via des processus innovants. Dans le prolongement des dispositions de la loi du 15 août 2014, des travaux sont en cours au sein du ministère pour développer les mesures de justice restaurative et ainsi permettre une réparation des torts causés par l'infraction sous une autre forme que l'octroi des dommages et intérêts ou la peine prononcée.

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