Intervention de Dominique Maillard

Réunion du jeudi 26 janvier 2023 à 9h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Dominique Maillard :

L'Allemagne et la Grande-Bretagne étaient prépondérantes au sein de l'Union européenne. La Grande-Bretagne était par nature acquise aux vertus de la libéralisation, tandis que l'Allemagne s'y est, à terme, convertie.

La Grande-Bretagne, avec le Central Electric Generation Borad ( CEGB), connaissait une organisation comparable à la France, à la différence près que le CEGB n'a, objectivement, jamais témoigné d'une grande efficacité. Par conséquent, les Anglais, indépendamment de leur analyse idéologique, considéraient qu'il était pertinent de s'en défaire et ont très tôt démantelé le CEGB, conduisant à la libéralisation de la production. Les Anglais ont alors plaidé en faveur du démantèlement d'EDF, puisqu'ils avaient fait de même chez eux et que le résultat avait été pour eux probant.

En Allemagne, le système était fédéral, organisé autour de cinq, puis quatre grands opérateurs, et non pas d'un opérateur unique. Pour les Allemands, il était naturel que davantage d'opérateurs coexistent, puisqu'eux-mêmes vivaient avec un tel système, sachant toutefois que chaque opérateur était doté de son domaine d'intervention propre.

Les Anglais, à la fois car ils ont été précurseurs avec le démantèlement de leur ancienne organisation et car ils étaient idéologiquement acquis à la libre concurrence, et l'Allemagne, dont le système était par nature fédéral, ont considéré que les Français devaient évoluer en ce sens. En Europe, les Italiens avaient un système comparable à EDF, avec l'Enel, de même que les Espagnols, quoique ces derniers aient plus suivi le mouvement que cherché à constituer avec la France un pôle de défense du statu quo.

La France nourrissait la volonté de préserver son organisation et le gouvernement français a, à plusieurs reprises, été amené à rappeler à la Commission européenne qu'elle n'avait pas à interférer avec la propriété publique, ou non, des entreprises, ce que celle-ci a admis. Néanmoins, la tentative de contourner cet obstacle institutionnel par des dispositions visant à démanteler le monopole et à introduire la concurrence a subsisté.

La loi de 1946 relative à la nationalisation de l'énergie avait laissé un petit secteur privé, notamment dans le petit hydraulique, où les producteurs indépendants étaient soumis à une limitation de mégawatts qui a ensuite évolué. Le transport était en situation de monopole, tandis que la distribution pouvait être opérée par des régies, qui constituaient souvent l'émanation des collectivités locales. La situation n'était toutefois en rien comparable à celle de l'Allemagne, où l'on a pu compter à une époque 1 000 opérateurs-producteurs-distributeurs d'électricité. Comme l'organisation était foncièrement différente, il n'existait aucune appétence particulière à voler au secours des Français.

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