Intervention de Laurence Vichnievsky

Séance en hémicycle du mercredi 8 mars 2023 à 15h00
Régime juridique des actions de groupe — Après l'article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Vichnievsky, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Je ne souhaite pas compléter ce qu'a dit mon excellent collègue Philippe Gosselin, mais il a anticipé sur la discussion et donné son avis sur l'amendement n° 98 , que nous examinerons plus loin. Son argumentation, que je partage, vaudra donc pour tout à l'heure.

Pour la clarté du débat, je précise que l'amendement n° 100 du Gouvernement exclut du champ de l'action de groupe l'ensemble du droit du travail, à l'exception des manquements relatifs à la discrimination. Vous justifiez cet amendement par le fait que l'action de groupe dessaisirait les conseils de prud'hommes de pans entiers du contentieux. Pardonnez-moi, monsieur le ministre délégué, mais je ne suis pas d'accord avec vous : il n'y a aucun risque en la matière, puisque l'essentiel du contentieux prud'homal concerne les licenciements individuels, quel qu'en soit le motif. S'agissant des licenciements économiques collectifs, le cœur du contentieux relève du tribunal administratif, le juge administratif étant désormais seul compétent – ce qui n'était pas le cas auparavant – pour apprécier le contenu et la validité d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Enfin, il convient de rappeler que les syndicats disposent déjà d'une possibilité d'agir pour défendre l'intérêt collectif ; dans ce cas, cela relève du tribunal judiciaire et ne concerne donc pas les conseils de prud'hommes.

J'ajoute que l'action de groupe permettra au contraire de résoudre des difficultés que rencontrent aujourd'hui les syndicats devant les tribunaux. Il existe en effet en droit du travail une action très proche de l'action de groupe en cessation de manquement. Dans le cadre de cette action prévue par le code du travail, le tribunal judiciaire ne peut qu'enjoindre l'employeur à cesser le manquement, mais il ne peut pas indemniser les salariés, ce dont se plaignent les syndicats – ils ont posé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qui n'a malheureusement pas été transmise par la Cour de cassation au Conseil constitutionnel. En outre, le manquement de l'employeur doit être suffisamment grave pour porter atteinte à l'intérêt collectif de la profession, ce qui est restrictif. Par exemple, les syndicats ne peuvent pas agir pour faire respecter un simple accord d'entreprise. L'action de groupe permettra donc de résoudre ces difficultés.

Deuxième considération, l'action de groupe appliquée au droit du travail présente le même intérêt que l'action de groupe en général. Les salariés ne saisissent pas le conseil des prud'hommes pour de petits préjudices tels que le paiement des indemnités de transport ou l'octroi d'une prime. Ils demandent cette indemnisation à l'occasion d'un licenciement. Avis très défavorable.

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