Intervention de Arnaud Montebourg

Réunion du mercredi 1er mars 2023 à 16h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Arnaud Montebourg, ancien ministre du redressement productif (2012-2014) :

Cette question se pose à tout être engagé dans l'action collective : quelle est la part de conviction qu'on peut transmettre et imposer dans un compromis ? J'ai jugé que les promesses faites par le président de la République étaient intenables ; la preuve en est qu'elles n'ont jamais été tenues. Le seul dégât que nous n'avons pu éviter est Fessenheim ; tout le reste, nous avons réussi à l'éviter. Je considère donc que j'ai plutôt réussi, pendant les deux ans et demi où j'ai servi, à défendre la souveraineté énergétique de la France. Cela n'a pas été simple, vous le constaterez en prenant connaissance des discussions internes. Il est intéressant de voir que des désaccords considérables se manifestent à l'intérieur du collège gouvernemental – il en va ainsi dans toutes les majorités. Aussi vient un moment où une décision doit être prise, et le président de la République et le Premier ministre décident. On voyait bien que le président ne pouvait pas décider la fermeture des réacteurs, parce qu'en réalité il ne le voulait pas : il avait vu toute l'impopularité de cette mesure. Ce qui a retourné l'opinion en faveur du nucléaire, c'est Fessenheim et les articles de la presse régionale expliquant que l'on mettait les gens au chômage en fermant une usine qui marchait bien. Il y a eu un retournement d'opinion par l'intérieur du pays, et aussi par la prise de conscience que l'on avait là un outil qu'il était criminel de démonter après avoir eu tant de mal à le bâtir. Le combat s'est mené à l'intérieur et je suis fier d'avoir pu le conduire, parce qu'il a servi à quelque chose : nous avons réussi à désamorcer le dogmatisme en la matière.

Sachant que toute la stratégie anti-nucléaire est venue d'eux, ce que disent les Verts allemands aujourd'hui est très intéressant et montre une évolution des consciences. Il y a deux ans, alors que cinquante réacteurs sont en construction dans le monde, Mme Anna Veronika Wendland et M. Rainer Moormann, deux figures du militantisme anti-nucléaire allemand, ont appelé dans une tribune publiée dans Die Zeit à sortir des énergies fossiles avant de sortir du nucléaire et appelé le gouvernement à reporter la fin du nucléaire. Certains écologistes allemands déclarent même : « Sans l'atome, l'Allemagne sera obligée de recourir au gaz et au charbon. Nous nous attaquons au mauvais problème ». La consommation quotidienne actuelle de pétrole dans le monde s'établit à 15 milliards de litres ; à 50 centimes le litre, le pétrole est meilleur marché qu'une boisson non alcoolisée. Nous avons besoin de produire beaucoup plus d'électricité pour remplacer toutes ces émissions de carbone, et donc d'un secteur nucléaire sûr et d'une industrie solide. Nous l'avons, gardons-la.

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