Intervention de Raphaël Glucksmann

Réunion du mardi 4 avril 2023 à 18h00
Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères-États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées-visant à influencer ou corrompre des relais d'opinion, des

Raphaël Glucksmann, président de la commission spéciale INGE 2 :

Il n'est pas possible, dans le cadre du travail parlementaire, d'identifier d'éventuels agents dormants. Leur présence en Ukraine, toutefois, était parfaitement organisée depuis longtemps afin que, le moment venu, ils puissent être réveillés.

Le Parlement européen procède à un certain nombre de contrôles – déclarations d'intérêts, registre de la transparence… – mais d'une manière beaucoup trop ténue. De surcroît, les pouvoirs de sanction sont inexistants ou dérisoires. Des réformes s'imposent donc, auxquelles nous réfléchissons : tout doit être envisagé, depuis l'interdiction des groupes d'amitié lorsqu'il y a des délégations jusqu'aux réglementations sur les conflits d'intérêts. Je fais confiance au rapport de Mme Loiseau et de M. Bilčík ainsi qu'aux différents groupes pour proposer des réformes ambitieuses, et je gage que des changements se produiront dans un grand nombre de domaines : la période de « refroidissement » après un mandat électoral, la création d' ethics bodies – des comités analogues à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique mais à l'échelon européen –, la réglementation des voyages parlementaires, les accès aux bâtiments européens, etc. S'agissant par exemple des conflits d'intérêts, un parlementaire peut être avocat dans un cabinet qui travaille pour Total, ce qui soulève un problème dès lors qu'il peut être amené à voter des textes relatifs aux questions énergétiques.

Un excellent documentaire, « La Caviar Connection », a été consacré à la corruption au sein de l'APCE par le régime azerbaïdjanais. Il illustre comment la corruption d'un nombre limité de personnes peut faire basculer des majorités. En l'occurrence, le rapport sur les prisonniers politiques à Bakou a été rejeté par une coalition politique dont le principal orchestrateur était financé par ce régime. J'ignore si, depuis, l'APCE a engagé des réformes mais il n'en reste pas moins que toutes les assemblées sont menacées.

Selon le témoignage de l'ancien ambassadeur d'Azerbaïdjan devant le Conseil de l'Europe, le régime de Bakou a dépensé me semble-t-il 30 millions pour corrompre des députés. Ces régimes sont très riches quand nous, nous avons le sentiment d'être pauvres pour défendre nos institutions. Nous ne sommes donc pas toujours en position de force mais nous pouvons réformer nos règlements afin de rendre de tels procédés aussi difficiles que possible. Si nous ne parvenons pas à bannir toute forme de corruption, faisons au moins en sorte de limiter ses éventuelles conséquences sur la décision politique.

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