Intervention de Raphaël Glucksmann

Réunion du mardi 4 avril 2023 à 18h00
Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères-États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées-visant à influencer ou corrompre des relais d'opinion, des

Raphaël Glucksmann, président de la commission spéciale INGE 2 :

Votre question portait sur notre rapport ; c'est pourquoi ma réponse était axée sur l'Europe. Puisque vous évoquez les interventions que j'ai faites dans un contexte national, je vous répondrai à titre personnel. Les décisions prises par M. Schröder ont sans doute plus influé sur l'histoire européenne que les agissements de tel ou tel mouvement politique qui n'était pas au pouvoir. C'est le point de départ de mon livre.

Postérieurement à l'invasion et au démembrement de la Géorgie, qui surviennent en 2008 alors que la Russie a violé l'accord de cessez-le-feu négocié par le président français, Nicolas Sarkozy, celui-ci décide avec son Premier ministre, François Fillon, de vendre au régime de Vladimir Poutine des bateaux de guerre offensifs. Si le président François Hollande n'était pas revenu sur cette décision, des bateaux français attaqueraient aujourd'hui l'Ukraine. Des décisions très graves ont été prises à ce moment-là : loin de moi l'idée de les minorer.

L'appartenance politique des acteurs en cause n'influera jamais sur l'analyse que je fais de tels agissements. Dans les interviews où j'attaque le positionnement du RN, je m'en prends aussi à des personnalités éminentes de la gauche européenne. Le fait que M. Le Guen ait eu une étiquette socialiste ne m'empêche nullement de m'interroger sur le travail qu'il a effectué pour des intérêts chinois.

J'en viens aux mouvements proprement dits. Lorsque M. Schaffhauser va négocier l'octroi de prêts au RN, c'est le parti en tant que tel qui devient débiteur de la First Czech Russian Bank. Celle-ci est l'une des composantes du système poutinien, qui est hostile à nos intérêts fondamentaux et à nos principes. La différence tient aussi au rapport à Poutine, qui est présenté par les dirigeants de votre parti comme un étendard politique. À l'époque dont je parlais, nos gouvernants affirmaient qu'on était bien obligé de discuter avec Vladimir Poutine, ce qui nous a conduits à des compromissions. Mais les déclarations du RN sont allées au-delà, en exaltant un agenda commun.

La stratégie russe se développe depuis des années selon deux axes : la corruption du système et le soutien à des forces décrites comme antisystème. Le Front national a été instrumentalisé car il apparaissait comme une force remettant en cause le système, la construction européenne et les institutions de l'Europe. C'était l'une des composantes de la stratégie d'ingérence russe, au même titre que les actions que vous avez évoquées. Sans doute la corruption du système était-elle la priorité des autorités russes.

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