Intervention de Christophe Caresche

Réunion du jeudi 11 mai 2023 à 14h00
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Christophe Caresche, ancien député :

Parmi les amendements que j'ai déposés sur les lois « Thévenoud » et « Grandguillaume », l'un – selon Le Monde – faisait partie des propositions d'Uber. Je n'avais pas le souvenir de l'amendement concernant la « loi El Khomri » mais ne le renie pas.

Arrêtons de faire d'Uber un épouvantail à moineaux ! Uber est devenu emblématique d'un combat politique : ce simple mot semble désormais sulfureux. Pour ma part, j'ai eu le sentiment de rencontrer une structure assez artisanale et j'ai été témoin de pratiques de lobbying bien plus agressives de la part d'autres acteurs.

J'ai par exemple été rapporteur d'un projet de transposition d'une directive européenne qui visait à une plus grande transparence pour éviter la corruption sur la détention de mines, notamment en Afrique, par de grandes entreprises pétrolières ou minières. Cette directive, transposée dans le droit français, proposait que ces entreprises aient l'obligation de rendre publiques des informations sur la détention de ces mines. J'ai été harcelé par une organisation non gouvernementale américaine, qui tenait fortement à ce que le contenu de la transposition aille plus loin que celui de la directive. Je voyais pour ma part un risque de distorsion de concurrence. J'ai entendu plusieurs députés reprendre, mot pour mot, cet amendement lors des débats dans l'hémicycle. Or j'ai découvert que cette ONG ne publiait pas la liste de ses donateurs et que son conseil d'administration comptait une personnalité américaine qui avait fait partie du gouvernement de M. Bush, était bien connue pour ses liens avec l'industrie pétrolière et siégeait elle-même dans l'entreprise pétrolière Halliburton. J'ai trouvé étrange que l'on impose aux entreprises pétrolières françaises des dispositions qui pouvaient être inspirées par d'autres considérations que celles avancées – et je ne suis pas certain que les députés dépositaires de cet amendement l'avaient compris. Il s'agissait d'un lobbying très subtil.

L'amendement est un droit constitutionnel du parlementaire. Dès lors qu'il est déposé, c'est au parlementaire qu'il faut demander des comptes. Il ne serait cependant pas inutile qu'un parlementaire qui intervient dans un débat précise publiquement le nombre de fois où il a rencontré les acteurs concernés par le sujet.

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