Intervention de Paul Midy

Réunion du mercredi 20 septembre 2023 à 21h35
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Midy, rapporteur général :

En ajoutant l'article 5 bis, les sénateurs ont souhaité introduire le recours à l'AFD, d'une part, et, d'autre part, créer l'infraction d'outrage en ligne.

Le principe de l'amende nous semble être une belle avancée, en ce qu'il permet de sanctionner les faits de cyberharcèlement de façon graduée. Dans 95 % des cas, il ne se passe pas grand-chose. Dans les autres, si, comme Hoshi ou Eddy de Pretto, vous disposez de suffisamment de temps et d'argent pour faire face à une procédure de trois ans, vous ferez peut-être condamner dix personnes parmi les quelques milliers, voire millions qui vous ont harcelé.

Il faut un panel de sanctions graduées, allant des mesures d'éducation à des peines lourdes en passant par l'amende. Nous avons travaillé à l'élaboration de dispositions les plus robustes possible pour réussir à infliger des amendes dans les cas où l'infraction est aisément constatable et relève d'un délit figurant d'ores et déjà dans le code pénal, compte tenu de la difficulté, d'après certains experts, à rendre aisément constatable un délit nouvellement créé.

L'amendement permet la délivrance d'une AFD de 300 euros, soit le montant prévu par les sénateurs. Les délits concernés sont les injures et diffamations publiques racistes, proférées à raison de l'origine ou de l'appartenance ou de la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, et les injures et diffamations publiques sexistes, homophobes, handiphobes et transphobes. S'agissant des propos négationnistes, nous souhaitons les retirer du champ de l'amendement.

Il ne s'agit ni d'une déqualification ni d'un allégement de la répression. Les infractions visées demeureront passibles d'une peine d'emprisonnement. Notre objectif est de punir des faits qui ne sont pas poursuivis. Nous créons un outil supplémentaire pour que la réponse pénale soit plus efficace et traite plus de cas, selon la logique suivie pour le recours à l'AFD s'agissant d'usage de stupéfiants, de conduite sans permis et de certains vols, soit des délits qui demeurent passibles de peines d'emprisonnement bien plus lourdes qu'une amende.

Le montant de l'AFD, qui est plutôt faible à l'aune des peines prévues par le code pénal, peut faire l'objet d'un débat. Quant au mécanisme lui-même, il vise à lutter contre le sentiment d'impunité. Chaque année, les parquets traitent 3 000 dossiers d'injure et de diffamation à caractère raciste, dont très peu jusqu'au bout de la procédure.

Notre rédaction est robuste sur le plan constitutionnel. Le cadre fixé par le Conseil constitutionnel à l'AFD est le suivant : elle doit sanctionner des infractions passibles de trois ans d'emprisonnement au plus – tel est le cas des délits retenus par l'amendement – et elle doit sanctionner des infractions aisément constatables, ce qui est le cas grâce à l'usage de l'adverbe « manifestement ». Notre rédaction est donc opérationnelle, pourvu que des circulaires du Gouvernement définissent le champ d'intervention des forces de l'ordre et des parquets dans ce cadre. Il s'agit d'une nette amélioration du texte.

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