Intervention de Maud Petit

Réunion du mercredi 4 octobre 2023 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMaud Petit :

Notre commission examine ce matin la proposition de loi visant à supprimer ou à suspendre les allocations familiales pour les parents d'enfants criminels ou délinquants. Cette solution est défendue par nos collègues du Rassemblement National, qui considèrent notre justice des mineurs comme trop laxiste ainsi que le montre l'exposé des motifs : « L'impunité des mineurs est une hormone de croissance de la délinquance. » Déposée dans le contexte récent des émeutes de juin 2023, cette proposition de loi en appelle à l'application du principe casseur-payeur. Sa principale mesure consiste ainsi à suspendre le versement des allocations familiales aux parents dont les enfants ont été reconnus coupables ou complices d'un crime ou d'un délit.

Si le groupe Démocrate considère le respect de l'ordre républicain comme un impératif de notre société, en ce qu'il permet le vivre-ensemble, le présent texte ne propose pas, à notre sens, les bonnes solutions. D'un point de vue philosophique, cette proposition de loi semble considérer le mineur délinquant comme une sorte d'enfant roi, presque maléfique et intouchable. Le code de la justice pénale des mineurs rappelle pourtant l'importance de l'accompagnement de ces jeunes, consacrant la primauté de l'éducatif sur le répressif. Certes, de telles mesures peuvent mettre du temps à produire leurs effets, mais sanctionner à travers un outil de politique familiale ne résoudra pas, à long terme, les problèmes de délinquance juvénile. Il existe par ailleurs des peines d'amende voire d'emprisonnement applicables aux parents défaillants dans leur devoir d'éducation.

Je le répète, sanctionner les familles par le biais de la réduction ou de la suppression d'une aide familiale ou sociale n'est pas une solution adéquate. La « loi Ciotti » adoptée en 2010 pour lutter contre l'absentéisme scolaire illustre bien l'inefficacité de ce genre de mesures. « Rien dans les statistiques disponibles ne suggère donc que le dispositif de suspension des allocations familiales ait été efficace », concluait un rapport sénatorial de 2013 appelant à l'abrogation de cette loi.

Nous ne voterons donc pas le texte qui nous est proposé.

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