Intervention de Gilles Kepel

Réunion du mercredi 8 novembre 2023 à 11h00
Commission des affaires étrangères

Gilles Kepel, professeur des universités à l'université Paris Sciences et Lettres et directeur de la chaire Moyen-Orient Méditerranée à l'École normale supérieure :

J'avais effectivement noté que La France insoumise se référait désormais à Dominique de Villepin.

De deux choses l'une. On peut s'inscrire – c'est tout à fait votre rôle – dans une vision des choses où vous favorisez la dénonciation de faits qui vous semblent inacceptables, inqualifiables, ce que vous êtes évidemment tout à fait légitimes à faire. On pourra alors vous dire que vous favorisez l'une des exactions et que l'autre n'a pas la même force dans votre propos. Ce n'est pas mon objet en tant qu'universitaire. De mon point de vue, il me semble important de partager avec vous un bilan global – chacun en fera ce qu'il souhaite – en vous apportant les analyses d'un universitaire, ainsi que des perspectives.

En l'occurrence, je pense qu'il n'est pas réaliste de penser que l'on pourrait aujourd'hui stopper l'offensive israélienne. On peut le dire, on peut souhaiter qu'elle s'arrête, on peut demander la trêve, mais il est irréaliste de penser que les Israéliens pourraient – sauf en cas d'énorme catastrophe, et encore – s'arrêter avant d'avoir réalisé leur but de guerre, c'est-à-dire la destruction de l'appareil militaire du Hamas, pour les raisons que j'ai précédemment expliquées. On peut bien sûr critiquer Israël si on le souhaite : c'est tout à fait légitime mais ce qui me semble aujourd'hui le plus important, c'est que la position de la France soit de faire en sorte que les droits du peuple palestinien soient défendus dans une prochaine étape. Le résultat dépendra bien entendu de la situation sur le terrain mais également des pressions des uns et des autres.

Cela dit, je ne me fais guère d'illusions sur le fait que des pressions américaines – si tant est que les Etats-Unis voulaient en mener par-delà la façade – puissent aujourd'hui faire dévier Netanyahou ou le gouvernement israélien. D'ailleurs, sur ce point, les Israéliens le suivent, y compris ceux qui sont très critiques à son encontre et considèrent qu'il est responsable de presque tout, sinon de tout. Je n'ai pas entendu, en Israël, de voix significative s'opposant aux buts de guerre militaires, même s'il existe des voix s'opposant aux exactions contre les civils.

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