Intervention de Naïma Moutchou

Séance en hémicycle du lundi 4 décembre 2023 à 21h30
Saisie et confiscation des avoirs criminels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNaïma Moutchou :

La réponse à la délinquance peut prendre, le cas échéant, la forme d'une peine de prison, mais pas seulement. La sanction est d'autant plus dissuasive et efficace que nous touchons au portefeuille, au patrimoine, aux affaires des délinquants. C'est l'idée que, même une fois la peine d'emprisonnement purgée, le crime ne paie toujours pas.

Certaines activités criminelles, disons-le, rapportent gros : le trafic d'armes, le trafic de stupéfiants, la cybercriminalité et l'escroquerie, mais aussi la criminalité environnementale, dont on parle moins, qui connaît un développement inquiétant, avec un rapport bénéfice-risque plutôt favorable à ceux qui s'y adonnent. J'évoquerai rapidement un exemple très parlant : le trafic transfrontalier de déchets dangereux et leur enfouissement illégal engendrent des revenus annuels comparables à ceux issus du trafic de cannabis, soit environ 10 milliards d'euros à l'échelle de l'Union européenne ; ce n'est pas rien.

Pour démanteler ces réseaux, les autorités de poursuites pistent, suivent les flux financiers, infiltrent, captent des données ; mais elles peuvent aussi, en complément, geler, saisir, confisquer les capitaux, les biens matériels et les biens immobiliers, pour priver les délinquants de leurs profits illicites et tarir les ressources du crime.

Nous pouvons encore améliorer les dispositifs de gestion des biens saisis, la maîtrise des frais de justice – point important en matière de dépense publique – et l'indemnisation des victimes. C'est l'objet de ce texte.

L'article 1er propose de confier au premier président de la cour d'appel, ou à un conseiller par lui désigné, la compétence sur les procédures de contestation des décisions prises avant jugement des biens meubles saisis. C'est une mesure de bonne administration de la justice, qui permettra de délester les chambres de l'instruction – très chargées, comme chacun sait – et de réduire les délais de réponse.

L'article 2 élargit l'assiette des biens dont le produit peut être reversé aux victimes : il s'agit d'une avancée incontestable.

L'article 3, enfin, présente un intérêt évident, même s'il pose question sur le plan du droit. Il vise à introduire, à l'article 131-21 du code pénal, le fait que la décision définitive de confiscation d'un bien immobilier constitue un titre d'expulsion à l'encontre de la personne condamnée. Lors de la confiscation d'un immeuble, l'Agrasc entamera une procédure de droit commun pour expulser l'occupant ou le locataire. Or l'objectif, même indirect – vous l'avez dit, monsieur le rapporteur –, ne saurait être de sanctionner un occupant de bonne foi. Il conviendra de clarifier ce point.

Enfin, j'ai déposé deux amendements, le premier visant à étendre la mise à disposition à titre gratuit de biens meubles aux associations ou aux fondations reconnues d'utilité publique, le second visant à mettre à disposition des biens immobiliers aux collectivités locales. Si le premier a passé le filtre de l'article 40 de la Constitution, le second n'a pas eu cette chance et n'a pas survécu. Cela étant, je crois qu'avec le précieux soutien du Gouvernement, que je remercie, nous pourrons avancer sur cette question importante pour les élus locaux.

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