Intervention de Laurent Villette

Réunion du jeudi 8 février 2024 à 9h45
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Laurent Villette, secrétaire confédéral en charge de la presse :

Il est regrettable que la question sociale ait été totalement éludée par les États généraux de l'information. En tant que négociateur de branche pour la presse écrite, je vous invite à vous pencher sur les grilles de salaire des journalistes, qui sont catastrophiques. Lors de son discours de politique générale, le Premier ministre a considéré qu'il fallait « désmicardiser » la France. Pour ma part, je pense qu'il faut commencer par désmiscardiser le travail des journalistes. La note qui vous a été remise porte justement sur les salaires des journalistes. Or dans les différentes branches de presse, nous dénombrons douze indices dans lesquels les salaires conventionnels sont inférieurs au montant du Smic.

Les journalistes sont aujourd'hui déclassés. En pratique, jusqu'en milieu de carrière, la plupart d'entre sont quasiment payés au Smic. Dans la presse hebdomadaire régionale, ils sont rémunérés au Smic plus 5 % ; dans la presse magazine, ils sont rémunérés au Smic plus 10 euros. Ces salaires sont indécents. Entre 2019 et 2022, les salaires des jeunes journalistes, ceux âgés de moins de 26 ans, ont baissé de 6,13 % : ils sont passés en moyenne de 2 180 euros à 2 054 euros, selon les données de l'Observatoire de la presse. La situation est encore pire pour les jeunes pigistes, dont les salaires se sont effondrés de 9,46 %, passant en moyenne de 1 885 euros à 1 722 euros, en brut. En presse spécialisée, on demande ainsi à un journaliste assez expérimenté de travailler à Paris pour un salaire de moins de 2 000 euros brut par mois.

Naturellement, les salaires réels dans les entreprises peuvent différer du salaire conventionnel de la branche. Mais pour les jeunes journalistes, ils s'en rapprochent de plus en plus. Nous lançons donc une alerte : si nous voulons une information de qualité, il faut attirer des gens disposant de connaissances nécessaires, lesquelles nécessitent de longues études ; et il faut les payer correctement. À ce titre, je regrette que les États généraux de l'information aient complètement éludé les conditions d'existence des journalistes.

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