Intervention de Violette Spillebout

Séance en hémicycle du lundi 11 mars 2024 à 16h00
Sécurité des élus locaux et protection des maires — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaViolette Spillebout, rapporteure de la commission mixte paritaire :

Samedi 17 février 2024, vers dix-sept heures trente, Jacques Montois, maire d'Hantay, petite commune de 1 200 habitants des Weppes, dans la métropole européenne de Lille, s'est fait agresser verbalement par un groupe d'individus du village alors qu'il était accompagné de son adjointe. Ces personnes l'ont insulté et ont proféré des menaces d'atteinte à ses biens, des menaces de mort contre lui et sa famille et des menaces de viol à l'encontre de son épouse. Qu'avait-il donc fait pour mériter cela ? Il prenait des photos d'arbres, avant une opération d'élagage, dans une rue calme, mais un groupe de squatteurs installés dans des bâtiments proches a considéré qu'il les dérangeait une nouvelle fois.

Tous les habitants du village, les élus locaux et les parlementaires que nous sommes ont réagi immédiatement et ont apporté, tout comme vous, madame la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, leur soutien à Jacques Montois, car rien n'est pire que la violence. Le maire a bien sûr porté plainte et il a eu très envie de démissionner, découragé devant l'immobilisme des pouvoirs publics face à l'occupation de logements par des squatteurs, situation connue de tout le village et pourrissant la vie des habitants.

Confrontés aux attaques physiques et verbales, beaucoup d'élus locaux s'épuisent, démissionnent et renoncent car ils ont le sentiment que leurs agresseurs jouissent d'une impunité. Ce renoncement, nous le combattons. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin, vient de l'annoncer : sur son instruction, « ceux qui ont menacé gravement le maire de Hantay et sa famille viennent d'être expulsés de leurs logements sociaux par le préfet ». Chacun doit savoir que l'État fera preuve de fermeté contre toute personne ne respectant pas les règles élémentaires de notre pays.

C'est à cela que contribue la proposition de loi sur laquelle nous sommes appelés à voter : c'est un non au renoncement, un non au fatalisme, un non à l'impunité. C'est aussi un message fort qu'adressent les parlementaires aux élus locaux : « Nous reconnaissons votre action quotidienne, votre engagement, votre dévouement pour vos administrés. Nous sommes avec vous. »

Moins de six mois après sa première lecture au Sénat, c'est un texte essentiel pour la sécurité des élus locaux que nous vous présentons, après qu'il a fait l'objet d'un accord au sein de la commission mixte paritaire (CMP) en février. Nous allons vite, il le faut : il y a urgence. Dans la société civile comme au Parlement, nous sommes tous d'accord : soutenir les élus, ceux qui sont à portée de bises, mais aussi d'engueulade, c'est stimuler l'engagement de ceux qui sont les hussards de la République, c'est réparer notre démocratie partout en France.

Ce texte consensuel est très attendu dans chacune de nos circonscriptions. J'aurai ici, si vous me le permettez, une pensée pour Bernard Gérard, maire de la commune de Marcq-en-Barœul, située dans ma circonscription, et président de l'Association des maires du Nord, qui a récemment subi une attaque à son domicile. Je saisis aussi cette occasion pour saluer les associations d'élus, qui nous ont toutes fait part de propositions pour améliorer le texte.

Je tiens à saluer Sébastien Jumel, qui était rapporteur avec moi de la mission d'information sur le statut de l'élu local, laquelle portait plus spécifiquement sur les violences faites aux élus locaux et l'amélioration de leur statut. Il reconnaîtra quelques-unes de ses formules dans mon intervention et je sais qu'il ne m'en voudra pas pour ces emprunts. Nous n'avons pas terminé de travailler ensemble tant le sujet est riche et transpartisan. Il nous oblige à la complémentarité de points de vue au-delà des oppositions stériles. Le chemin législatif commun que nous avons entamé pour protéger les élus locaux a pour ambition de créer un choc d'attractivité pour les mandats de maires et d'élus locaux.

Avec cette proposition de loi, nous aggravons les sanctions encourues par les auteurs de violences, nous améliorons la prise en charge de ceux qui en sont victimes, nous renforçons la protection des candidats aux élections et nous facilitons les relations entre élus locaux et procureurs. Notre volonté est que les élus et leurs familles soient mieux protégés.

Je tiens à saluer le travail mené avec le Sénat, en particulier avec la rapporteure de la CMP, Mme Catherine Di Folco, que je remercie particulièrement. Nos positions étaient parfaitement alignées, exception faite de l'article 2 bis . Cet article procédait à un allongement de la durée de prescription des délits de presse que sont l'injure publique et la diffamation par des modifications apportées à la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, sans pour autant atteindre l'objectif que nous nous étions fixé. Ces changements avaient même pour les journalistes de graves effets de bord que nous n'avions pas suffisamment mesurés. Sur ma proposition, la commission mixte paritaire a décidé de le supprimer.

Cependant, madame la ministre, il nous reste à combattre le phénomène que nous avons cherché à circonscrire : la haine et le harcèlement sur les réseaux sociaux, dont nos élus sont les principales victimes, exposés qu'ils sont à des particuliers pour la plupart anonymes. Retrait de contenus, bannissement, amendes forfaitaires : avec Sébastien Jumel et les élus de tous bords qui accompagnent nos travaux, je veux que nous trouvions de vraies solutions.

Nous avons encore de nombreux combats à mener. Ce texte ne constitue qu'une étape dans cette lutte et je tiens à remercier, outre François-Noël Buffet, président de la commission des lois du Sénat et auteur de la proposition de loi, l'ensemble des députés qui ont contribué à l'enrichir. Nous pouvons être particulièrement fiers du travail transpartisan que nous avons accompli ensemble.

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