Intervention de Marie-Agnès Poussier-Winsback

Séance en hémicycle du jeudi 14 mars 2024 à 9h00
Réduction de l'impact environnemental de l'industrie textile — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Agnès Poussier-Winsback :

Des vêtements flambant neufs à des prix imbattables : des jeans à 7 euros, des robes à 5 euros, et même des ensembles de costume pour une quinzaine d'euros. Mais à quel prix ? Derrière des tarifs affichés, qui défient toute concurrence, le citoyen passe en réalité une deuxième fois à la caisse et paye le chômage, les délocalisations, la désindustrialisation et les boutiques qui ferment leurs portes dans nos centres-villes. N'oublions pas les dégâts environnementaux, engendrés par la production de volumes toujours plus importants : des produits chimiques dans les rivières, des gaz à effet de serre pour des livraisons express en avion, des vêtements souvent de piètre qualité, peu portés, qui finissent rapidement en déchets aux quatre coins du globe – ou plutôt dans les pays les plus pauvres, pour ne pas gâcher notre plaisir d'acheter, acheter, acheter parce que ce n'est pas cher – ou en microplastiques dans les océans.

Cet incroyable gâchis de la mode jetable a un prix, qui ne s'affiche pas en rayon. Cette responsabilité est laissée à la collectivité, avec un grand C, pendant que les marques qui sont à l'origine des dommages ne sont jamais inquiétées pour leurs pratiques, en dépit des scandales. L'addition est bien là sur le plan environnemental, sociétal et économique ; simplement, elle n'est pas payée par ceux qui devraient s'en acquitter. C'est face à cette situation absurde et injuste que les députés du groupe Horizons et apparentés défendent devant vous cette proposition de loi pour enfin changer la donne, pour faire en sorte que les entreprises de ce que l'on appelle la fast fashion, l'ultrafast fashion ou plutôt la mode jetable contribuent enfin aux dégâts qu'elles engendrent et qu'à l'inverse, les productions vertueuses, durables et de qualité, qui aujourd'hui sont inaccessibles au plus grand nombre, soient récompensées et rendues abordables.

Au-delà des prix chocs, c'est tout un modèle commercial qui incite à la surconsommation que nous devons remettre en question : renouvellement quotidien des collections – oui, quotidien, vous ne rêvez pas – avec jusqu'à plusieurs milliers de nouveaux modèles par jour ; bons d'achats, promotions et réductions alléchantes ; publicités ciblées et intrusives sur les écrans des réseaux sociaux, dès le plus jeune âge. Face à ce secteur en pleine expansion, hors de toute régulation, qui propose souvent des produits interdits et dangereux, qui ne répondent pas aux normes européennes les plus élémentaires et qui échappent même à l'acquittement de la TVA, il nous faut être intraitables dans les contrôles et endosser le rôle qui est le nôtre, en tant que législateur, pour réguler cette activité. Nous appelons donc à renforcer l'information et la sensibilisation du consommateur sur les sites de l'ultrafast fashion et à interdire de publicité les entreprises de ce secteur.

Au nom du groupe Horizons, et avec le soutien de l'ensemble de ses membres, je défendrai plusieurs amendements pour amplifier la portée du texte. Il s'agira notamment de renforcer l'information et la sensibilisation du consommateur, à l'instar de ce qui est fait dans le cadre de la lutte contre le tabac, ou encore de durcir le contrôle des market places – ou, en bon français, des places de marché –, qui proposent à l'achat les produits de différents vendeurs.

Ce texte, même s'il est le fruit d'un travail de plusieurs mois, fait écho à un enseignement de la crise agricole et, au-delà, à une philosophie, une manière de vivre qui prévalait encore il y a deux générations : celle du juste prix, de la valeur des choses, de leur qualité.

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